Carpe Diem

Instant d’Altitude n°1

Carine VIAL
1 livre, 1 don pour ACSE
2 min readJan 31, 2017

--

Au centre, dans le fond, la Barre des Ecrins, 4102 mètres, et le Dôme des Ecrins à sa droite immédiate, 4015 mètres (Ecrins, France)

Qu’on est bien, là, les fesses dans la neige à 3600m au sommet du pic de Neige Cordier, les pointes de mes crampons encadrant dans mon champ de vision le sommet de la Barre des Écrins, un des toits de l’Oisans, splendidement secondé par le Dôme à sa droite.

Une légère brise m’effleure le visage, hérissant les poils de mes bras, tel le Soleil présidant l’orientation des tournesols dans un champ : non, ce n’est pas une sensation de froid, non, ce n’est pas un frisson de peur, oui, c’est bien un profond fourmillement de plaisir. Un Soleil radieux réverbère le blanc immaculé de la neige sur les sommets environnants, aucun embryon de nuage à l’horizon.

Je respire profondément et lentement, attendant patiemment mes compagnons d’escapade, pour récupérer de l’effort réalisé durant cette longue montée. Plénitude. Un moment hors du temps, qu’on voudrait voir durer éternellement. Des minutes passées dans un état difficile à définir, si simple et pourtant étonnamment complexe. On peine à comprendre pourquoi on est si heureux, apaisé, transformé, libéré de tout tracas.

Savourer l’instant présent, les yeux écarquillés qui ne savent plus de quel côté se tourner pour se gaver de paysages incroyables. L’alliance du noir sombre et austère du rocher contrastant élégamment avec le blanc de la neige voire le bleu des glaciers sous-jacents. La sévérité des séracs dont le profil même nous fait ressentir le danger qu’il y a à s’aventurer dans leurs replis. L’élégance et la pureté des courbes que prend la neige sous l’effet combiné du vent et des températures, comme jouant avec les facéties du relief pour mieux le mettre en valeur : corniches, rigoles, pentes rebondies…

Montagne de contrastes depuis le col du Grand Neyron, le Mont Blanc au fond … (Parc National du Grand Paradis, Italie)

Et si ce bonheur intense et profond, ultime récompense, venait tout simplement de ce qu’on oublie sur le moment, c’est-à-dire tous les efforts et la préparation qui ont été nécessaires pour parvenir jusqu’ici ?

--

--