La Balade

Robert ALEXANDRE
1 livre, 1 don pour ACSE
2 min readDec 30, 2016

J’étais parti de nuit, la distance était grande,
Le silence des lieux étouffait tous les bruits,
Mon haleine blafarde montait en guirlande
La lueur de ma lampe en blanchissait la nuit.

J’étais parti très tôt, car la pente était belle,
Le vent, jusque-là calme, musait sur les parois,
Et le ciel, si fier de sa voûte éternelle,
De noir et de lumières ne veillait que sur moi.

Je m’arrêtai alors, contemplant l’univers,
La beauté de ses ombres, le charme de sa nuit,
Les neiges qui luisaient comme blanches clairières,
Dans l’obscur dédale des rocs endormis.

J’étais bien, immobile, aux rives du sommeil,
Je sentais, sous mes pieds, la planète assoupie,
De ce côté du monde, dédaigné du soleil,
Roulant comme une pierre, vers d’autres galaxies.

Je repris ma cadence, troublé par ces étoiles,
Par-delà le cosmos, qui me voient en ces lieux,
Suis-je admis ou intrus, quel sentiment astral,
Peuvent-elles éprouver, au plus profond des cieux ?

La neige qui craqua, d’un coup, sous ma semelle,
Me rappela soudain, ma frêle condition,
De Terrien convoitant, la Montagne Éternelle,
De l’Homme vivant là, son ardente passion.

La lueur qui pointa, là-bas, loin, sur la terre,
Qui pour l’instant n’était qu’un halo indistinct,
Prévenait, doucement, qu’ébauche de lumière,
De bonne heure, présage, la beauté des matins.

Je pus presser le pas, ayant pris, dans mon sac,
Afin d’aller plus haut, plus vite, les accessoires,
Qui défient à présent, glaces, neiges et séracs,
Et que nos Chers Anciens avaient su concevoir.

Le souffle court, alors, je frappai de la paume,
L’écaille de granit, bien ferme, sous ma main,
Sanglant mon casque tel, un chevalier son heaume,
J’en éprouvais le cœur, j’en caressai le grain.

S’élever dans le ciel, en embrassant la pierre,
Plaisirs renouvelés, délicieuses abrasions !
La force dans mes pieds qui repoussaient la Terre,
L’audace de mes doigts, qui vivaient d’émotions…

L’aube devenait couleurs, et le gris de la roche,
Révélait à présent de beaux cristaux dorés,
Le ciel se faisait pur et les sommets tous proches,
Prirent à chacun leur tour des teintes orangées.

Au-dessus des rochers, la neige restait ferme,
Et l’accès à la cime, aisé et rassurant,
J’éteignis donc, alors, ma petite lanterne,
Je gagnai le sommet, le front vers le levant.

Je bus un peu de thé, une chaude rasade,
Il avait, ce matin, un parfum sans pareil,
Devant moi, la Montagne, me donnait l’accolade,
L’étreinte froide du vent, le baiser du soleil…

Pour René,

Robert

Bourguignon 2015

--

--