La première cyber-attaque du sport professionnel dévoilée

Nicolas Bariteau
Nicolas Bariteau
Published in
3 min readJun 17, 2015

Selon le New York Times, l’équipe de baseball des St Louis Cardinals aux États-Unis aurait pirater le réseau informatique de l’équipe concurrente des Houston Astros afin de prendre un avantage stratégique.

Le hacking au service de la compétition

Les dirigeants des St Louis Cardinals auraient eu accès à des informations confidentielles en attaquant, ou « hackant », le réseau informatique des Astros, essentiellement des statistiques concernant les joueurs lors des entraînement ou des matchs des Astros, leurs situations contractuelles, ainsi que les rapports établis par les spécialistes des Astros sur les autres équipes de la Ligue majeure de baseball (MLB). Selon le New York Times, citant des responsables de l’enquête, l’attaque aurait été diligentée par des dirigeants de haut rang des Cardinals qui n’auraient pas digéré le départ de leur ancien directeur général, Jeff Luhnow, qui a rejoint Houston en 2011. Cela est d’autant plus étonnant que les Cardinals, l’une des équipes les plus réputées de la MLB a remporté les World Series, le titre suprême en baseball, à onze reprises, dont deux fois depuis le début des années 2000 (2006, 2011).

L’arrivée des datas dans le sport professionnel

Si vous en avez l’occasion, je vous conseille de regarder Le Stratège (Money Ball) sortit en 2011 qui décrit l’arrivée des statistiques au sein du management sportif, plus précisément du baseball, et la stratégie de l’équipe d’Oakland Athletics pour redéfinir leur jeu et le visage de leur équipe. Tiens, tiens, cela ne vous rappelle rien ?

Lorsque Google présenta ses Google Glass, une des premières applications envisagées fut celle du sport et de la gestion en temps réel des performances sportives, que ce soit pour le spectateur ou le staff technique. Encore une fois, le Baseball montra le bout de son nez. On ne compte plus les articles décrivant cette révolution du sport grâce à l’exploitation des datas captées et analysées en temps réel afin de prendre l’avantage sur les concurrents. Ce qui se comprend d’autant mieux que les enjeux financiers sont énormes.

Analyse de la tactique adverse en amont, pendant et en aval de la compétition, instructions fournies aux sportifs en temps réel pour plus d’agilité, prédiction des phases de jeux, réduction des blessures et des délais de guérison… Les applications sont diverses. Data-business.fr rapporte même que

l’entreprise Stats a lancé le service SportVu dans tous les stades de NBA d’Amérique. Le principe, installer 6 caméras à tous les endroits du stade pour enregistrer et «datifier» précisément tous les mouvements des joueurs et du ballon sur le terrain.

Le piratage informatique en pleine expansion

Qui dit enjeux financiers, dit lutte acharnée, et l’accès aux données des joueurs et des tactiques mises en place par l’équipe ou le sportif adverse peut faire de vous le vainqueur adulé ou l’outsider permanent.

En découvrant cette affaire, je n’ai pu m’empêcher de penser à l’opération Carbanak, le casse de banque du siècle par des pirates informatiques en Europe qu’Humanoïde Magazine décrypte dans son dernier numéro.

Décryptage de Carbanak, le casse du siècle des hackers de banques, par @HumanoideMag. Hallucinant ! pic.twitter.com/myrDYPpMMt

— Nicolas Bariteau (@nicolasbariteau) 16 Juin 2015

Finira-t-on par voir émerger des places de marchés pour les sportifs dont la valeur serait indexée sur leurs données individuelles et comportementales, leur capacité de récupération, le nombre de points marqués, leur capacité d’adaptation à certaines données climatiques, leur patrimoine génétique ? Entre la perception d’une qualité, d’un talent, la performance qu’elle sous-tend, voire l’analyse statistique de son comportement, et la dissection statistique d’un individu, de son corps jusqu’à son profil psychologique, nous empruntons une voie qui n’est certainement pas souhaitable. L’humain ne se réduit pas à une mécanique bien huilée, comme la beauté d’un tableau de Rembrandt ne se réduit pas à son analyse spectrographique et à la qualité des pigments. Grossissez à l’extrême le détail d’une peinture, vous en perdrez toute intelligibilité. Le détail a son importance mais il ne fait pas tout. Il en est de même des data, qu’elles soient big ou pas, hors de tout contexte elles perdent de leur pertinence.

Finalement le bénéfice obtenu pourrait s’éloigner très fortement du résultat escompté : des sportifs transformés en pantins au service de la seule performance. Quid de l’émotion née du hasard et de l’exploit individuel qui font la beauté du jeux ?

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Nicolas Bariteau
Nicolas Bariteau

Fondateur deNB Consulting — Conseil et formation en stratégie marketing digitale. Curieux insatiable