Des dépotoirs improvisés

Iwacu
4 min readFeb 22, 2018

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Par Rénovat Ndabashinze

Un caniveau tout près du marché dit Ruvumera à Buyenzi bouché par des déchets.

De tas d’immondices s’observent dans plusieurs coins de la capitale. Néanmoins, des solutions durables sont à notre portée, affirment les environnementalistes.

Aux abords des avenues, des boulevards, tout près des marchés, des déchets s’amoncellent. Des décharges se multiplient. Différentes sortes de déchets solides ou liquides obstruent les caniveaux et avenues. A Buyenzi, un caniveau jouxtant le marché côté ouest vers Ruvumera, on y trouve des bouteilles plastiques, des restes d’aliments, des défécations humaines, etc. Non loin de là, tout près de l’hôpital Prince Régent Charles, une montagne d’immondices se forme. Une situation similaire à la 8ème avenue.

C’est là que tous les déchets ménagers récupérés dans plusieurs ménages de Bwiza, Buyenzi, Nyakabiga finissent au milieu des habitations. On y respire mal. On suffoque presque. Des vers, des mouches, des moustiques grouillent.

Des eaux polluées, très noirâtres provenant de Rohero, Nyakabiga, Bwiza, … y passent avant de se déverser dans la rivière Ntahangwa.

Innocemment, des petits enfants y jouent, certains hommes et femmes affamés y affluent pour récupérer les restes des aliments déjà en décomposition.

Mis à part certains quartiers huppés de Bujumbura, comme Kiriri, Rohero, … il est très difficile de faire plus de 30 m sans tomber sur un sac de déchets. Ce qui n’empêche pas qu’à Bwiza par exemple, sur la route appelée ‘’Irya ma bus’’ (la rue des bus), ou à la 8ème avenue, ou 9ème avenue, des femmes présentent aux passants du maïs grillé, des frites de patate douce, des avocats, etc.

Au nord, à Gihosha, Gikungu rural, Gisandema, Kamenge, Kinama, … la situation n’est pas différente. Des tas de déchets aux abords des avenues. Les rivières comme Ntahangwa et Nyabagere sont transformées quasiment en poubelles.

S’habituer malgré eux

« Nous n’avons pas de choix. Même si c’est dangereux pour notre santé, nous nous sommes habitués», se désole une vendeuse d’avocats rencontrée à la 8ème avenue de Bwiza. Avant qu’un de ses clients ironise: « Les Burundais ne meurent pas de saleté mais de faim.» Il dénonce ainsi l’incapacité de la mairie à résoudre ce problème : « Avec les nouvelles coopératives, nous avions espoir qu’elles seraient efficaces. Mais, la réalité est toute autre ». Leurs camions ne passent plus récupérer ces déchets.

A Gihosha rural, un père de famille abonde dans le même sens : « Nous ne savons plus quoi faire. Des sacs des déchets sont là dans nos ménages ». Selon lui, le risque des maladies comme le choléra ou d’autres maladies est grand.

Joseph de Cibitoke, commune Ntahangwa, trouve que les déchets sont devenus un fonds de commerce. « Chaque maire veut en tirer profit. Au lieu de rendre opérationnel les SETEMU, on nous amène des associations ‘’fantômes’’ sans expérience ni moyen humain, matériel ni financier ».

Contacté, Freddy Mbonimpa, le maire de la ville de Bujumbura, reconnaît des problèmes dans ce secteur. « Le dépotoir officiel de Mubone ne fonctionne plus comme avant. Pas de machines, d’autres sont en panne et la route qui y mène est bloquée ». Il accuse certains citadins d’avoir refusé de signer des contrats avec ces coopératives. Or, pour travailler, elles louent des camions, payent leur personnel, etc.

Quelques-unes ont déjà démissionné. Ainsi, M. Mbonimpa prévient que bientôt, la mairie va utiliser la force pour faire signer des contrats.

Trois ‘’R’’ pour rendre Bujumbura propre

Albert Mbonerane : « L’Etat doit trouver un système de traitement et de recyclage des déchets

« Réduire, réutiliser et recycler les déchets », une trilogie pour mieux gérer efficacement ces immondices dans la capitale burundaise selon les environnementalistes. « D’autres solutions ne sont qu’éphémères », tranche Tharcisse Ndayizeye, environnementaliste. Il propose de créer des industries de recyclage des déchets et les doter des facilités de réutilisation des déchets. Le pays doit avoir également des sites de décharge répondant aux normes environnementales. Il suggère qu’il y ait un site de transit de décharge, bien entretenu, par communes. « L’installation des bacs à ordure mobiles dans des lieux publics peut mettre fin aux dépotoirs improvisés dans la ville de Bujumbura ».

En effet, motive-t-il, les décharges mal gérées ont des impacts négatifs sur l’environnement. Il s’agit entre autres d’éparpiller les déchets légers à cause du vent ou solubles par l’eau, l’attraction des vermines, la libération des polluants dans l’eau et les sols contaminant ainsi la nappe phréatique et les rivières. Et les décharges des déchets organiques émettent du biogaz essentiellement composé de méthane et dioxyde de carbone ou gaz carbonique (CO2) avec des effets néfastes sur la santé humaine. « Le méthane abaisse l’oxygène dans l’air et peut provoquer l’asphyxie tandis que le CO2 peut entraîner la mort. »

Pour sa part, Albert Mbonerane, un autre environnementaliste trouve que la volonté politique est un préalable. Il rappelle qu’un projet de loi sur l’interdiction des sachets en plastiques non biodégradables vient de passer plusieurs années dans les tiroirs du ministère de l’Environnement. En outre, il estime qu’il est possible de recycler des déchets au Burundi. Il part d’ailleurs de l’exemple du Bénin où une unité de recyclage des déchets plastiques comme les sachets, les bidons, … est déjà opérationnel. Idem au Rwanda. « Ils recyclent des sachets plastiques pour avoir des sachets pour les pépinières ». Après leur utilisation, décrit-il, ils doivent revenir à l’usine. « Une façon donc d’éviter qu’ils se retrouvent dans la nature ».

Enfin, M. Mbonerane propose un système de triage car tous les déchets ne sont pas de même nature. « Les déchets ménagers peuvent être utilisés dans le compostage pour la production de la fumure ».

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