« Génération Test » #15 : Game over.

Adrien
7 min readMar 13, 2018

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“Et c’est terminé !” La phrase est très bien adaptée à notre beau périple à travers les méandres du site Parcoursup. Notre, c’est nous, élèves de Terminale (ou plus) qui devions passer par la plateforme pour inscrire nos « vœux » pour l’année prochaine. Et je dis bien « devions », car ça y est, c’est terminé depuis quelques secondes, 23h : nous ne pouvons plus mettre de vœux sur Parcoursup.

Ce mardi, lendemain de rentrée pour un tiers des lycéens (de la zone B), est donc le jour du début de la fin. Et ces deux jours ont tellement été le bordel, que l’Éducation Nationale a décidé en dernière minute de repousser de cinq heures l’échéance, fatale.

Fatale, car depuis quelques minutes, donc, tout vœu qui n’a pas été inscrit sur Parcoursup, tout vœu qui viendrait à l’esprit des étudiants, après une porte ouverte (notamment chez les BTS, où les portes ouvertes des lycées ne se font que fin mars)… est perdu. Il fallait s’y prendre auparavant.
Perdu aussi pour les étudiants qui avaient choisi de se tourner vers le privé, et se sont faits recaler : il faudra obligatoirement passer, si celui-ci n’a pas fait de vœu de secours auparavant, par la procédure complémentaire… avec les places disponibles.

Racontons donc ces deux derniers jours, lundi et mardi, au retour d’un voyage scolaire, derniers jours pour Parcoursup.

Côté professeurs : toujours la même

En ces deux jours, la seule enseignante à nous avoir parlé de Parcoursup, est la prof de SVT, la même qui deux semaines auparavant nous annonçait que sans français, nous étions des « bons à rien ».
Elle commence à discuter de la plateforme, nous demande si tout est ok, car « ce n’est pas demain soir qu’il faudra vous plaindre »… en affirmant avoir peur pour sa classe, au vu du nombre de non-inscrits. Je lui fais : « Mais vous inquiétez pas, y aura des prolongations… » Elle me répond, interloquée : « Ah ça, non, n’y croyez même pas ! Y en a jamais eu les années précédentes, y en aura certainement pas cette année ! » Raté.

Ensuite, elle va voir, justement sur l’espace Gestion de la plateforme, qui n’est pas inscrit dans notre classe, sur Parcoursup. Quatre élèves, sur le groupe de 18 que nous sommes en SVT.

« Bon, K., tu n’es pas inscrit… Pourquoi ?
— Je vais dans la Gendarmerie, madame ! »

Car l’inscription sur Parcoursup n’est en effet pas une étape obligée, et au contraire bon nombre de formations n’y sont pas disponible : Science Po Paris, des écoles privées, des écoles d’art… Ou bien, évidemment, l’entrée dans la vie active, ou l’engagement dans la Gendarmerie, les armées, etc.

Même son de cloche pour les trois autres personnes : une à l’armée, deux autres dans des établissements privés. « Tu es sûr d’être pris ? — Ah oui, j’ai fait un truc parfait ! » Les gens sont parfois optimistes.

Et il y a ceux qui n’ont fait qu’un vœu, ou pire, aucun.

« E., tu as fait un seul vœu ?
— Oui, c’est au cas où je suis pas pris dans le privé… »

Ou alors, avec B., sans vœu, peinard :

« Mais tu n’as encore rien inscrit ?
— Je fais ça ce soir…
— Mais tu sais ce que tu vas mettre ?
— Oui ! Je verrai… »

À H-36, ça promet. Et puis il y a le cas d’un élève, D., qui a mis pas moins… de 22 vœux. Pour information, il est redoublant, et a donc connu la période APB à 24 vœux. « Non mais, D., tu sais qu’on peut mettre que 10 vœux… […] Oui là tu as mis vingt-deux vœux, mais le 31 tu pourras en confirmer que dix… et ça bloquera après 10, tu peux pas annuler la confirmation ! » J’entends déjà une autre redoublante rouspéter après ce changement, qui l’oblige à se limiter, alors qu’elle ne peut pas trop se permettre de tenter les grands établissements, avec dix vœux.

Puis on passe à autre chose… La prof de SVT sera la seule prof, hors PP, à nous en parler en deux jours.

La prof principale… et la re-confirmation

Aujourd’hui, notre prof principale préférait endosser son dossard de prof de physiques, avec un long contrôle dans la matière, sur les spectres (visible, UV, IR, RMN… si vous savez). Durant les deux heures, aucun propos sur Parcoursup. Je lui rappelle dix minutes avant la sortie, à propos du conseil de classe : « Vous avez prévu quoi jeudi [en AP] ? — Cours, pourquoi ? — Et les conseils de classe ? — Ah purée, c’est vrai… »

Et c’est après la sonnerie de fin de cours que la prof attrape une feuille, et demande à voir X, Y et Z, pour demander pourquoi il n’est pas inscrit, pourquoi elle n’a fait que deux vœux… et surtout, pour beaucoup, pourquoi il ou elle n’a fait que des demandes de formations sélectives…
Je retrouve A., celle qui veut faire ingénieure du son en passant en BTS son. La prof lui a exigé, en fin de semaine dernière, d’« ouvrir un peu les formations », pour avoir plus de chance d’être prise. « Alors ? » demande la prof.

« J’ai tenté, mais y a rien qui s’y rapproche vraiment… Je veux pas faire de licence, faut que j’en ai envie… »

Même son de cloche pour plusieurs personnes, à qui la prof a demandé de mettre des licences « pastille verte », du nom des licences qui acceptaient l’an dernier, théoriquement, tous les élèves. Théoriquement, car même des licences théoriquement open bar ont dû refuser des candidats l’an dernier.

Cette pseudo-obligation de mettre des licences dans ses 10 vœux a le don de m’irriter. Avec Parcoursup, il n’y a justement plus l’obligation qu’il y avait l’an dernier, de mettre au moins une formation bouche-trou. Afin de « recentrer les choix » sur ce que veut vraiment l’étudiant, au lieu d’avoir plein de demandes bouche-trou, pour tenter. La commission complémentaire, en cas de refus, a justement pour but de placer l’élève dans une formation très proche de la sienne, en cas de refus de ses dix vœux. Alors, lui dire de mettre une licence qu’il ne voudra pas… et qu’il pourra refuser après… c’est non.

La prof continue ensuite avec cinq personnes, concernant ceux qui ont mis « un seul vœu de PACES », ceux qui ont des vœux… éclectiques… etc. Il vaut mieux, en effet, en parler ce mardi, H-6, et cours l’après-midi…. Évidemment.

Juste avant… les mails de Parcoursup

La prof n’est pas la seule à tenir ce discours. En fin de semaine dernière, l’équipe technique de Parcoursup a en effet envoyé des mails automatiques aux gens pour les inciter à modifier (ou ajouter, le cas échéant) leurs vœux. Parmi ces mails :

  • un pour les bacs technos, afin qu’ils mettent des DUT, filière où ils devraient théoriquement aller ;
  • un pour les bacs professionnels, afin qu’ils aillent en BTS, là aussi filière théoriquement optimale pour eux ;
  • un pour les personnes n’ayant pas encore mis de vœu (logique) ;
  • un à l’intention des personnes n’ayant mis que des filières sélectives, pour les inciter à changer ;
  • un aux personnes qui n’ont fait que des vœux hors secteur, dans une académie qui n’est pas la leur ;
  • et peut-être plus ?

À quelques jours de la fin des vœux, voilà donc la machine qui vient encore plus stresser ceux qui ne suivent pas le bon chemin.

Trouvez l’incohérence sur cette image :D

Depuis quelques minutes, on ne peut de toute façon plus ajouter de nouveaux vœux sur la plateforme. Mais de toute façon, pour ceux qui voulaient s’occuper de Parcoursup en cette rentrée pour la zone B, ou début de semaine ordinaire pour les autres… il fallait attendre. Car, oui, le site, la plateforme officielle pour que près de 900 000 lycéens et étudiants puissent s’inscrire dans le sup, et continuer ses études… est tombée en rade, hier soir, et cette après-midi, même. Personne n’avait donc prévu de serveurs assez gros ?

Ma prof de SVT nous l’avait dit il y a deux semaines, mais je n’avais pas osé la croire, sur la possibilité d’un site down à quelques heures de l’échéance. Après les multiples bugs d’APB l’an dernier, le Ministère n’aurait pas pu se préparer à cela ? Car un tel afflux sur Parcoursup était évidemment prévisible, les Français n’étant pas connus pour s’y prendre en avance…

Cette fois-ci, c’est fini, terminé, kaputt : personne ne peut plus ajouter de vœux sur Parcoursup. Et tant pis pour ceux qui ont oublié, ou ont eu une perte de connexion le jour J. La prochaine étape, désormais, pour les étudiants est de remplir les pièces, avec notamment le projet de formation motivé ; pour les lycées et profs, le remplissage de la fiche Avenir™️. Une tâche ardue, longue, semée d’embûches… mais qui est cruciale pour les élèves. Dans le prochain épisode.

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