Retarder le lancement d’une fusée peut amorcer le décollage d’un territoire

Civocracy
4 min readJan 18, 2018

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Comment les citoyens et les officiels guyanais ont fait entendre leur voix et revendiqué leurs droits alors qu’ils se trouvaient à plus de 7000 km de l’Élysée.

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Nous avons tous entendu parler de la Guyane à l’école, mais combien d’entre nous sauraient placer ce territoire sur une carte du monde ? Qui connaît son histoire et ses coutumes ? La Bretagne pour ses crêpes, la Côte basque et son surf, la Provence pour ses champs de lavande… Mais que savez-vous de la Guyane ?

Pourtant la Guyane, territoire d’outre-mer de 281 612 habitants, est la deuxième plus grande région française par sa superficie. Nichée entre le Suriname et le Brésil, elle est anciennement une colonie esclavagiste de l’Empire français, déclarée officiellement département français en 1946.

La Guyane c’est donc une terre d’Europe sur le vaste continent sud-américain, dont la plus haute autorité juridique est en France métropolitaine, les politiques agricoles définies en Belgique, et la monnaie — l’euro — contrôlée par la Banque centrale européenne en Allemagne.

Cependant, la région fait face à des défis économiques et sociétaux très différents de ceux des autres régions françaises.

L’Assemblée de Guyane a été créée dès 2011 pour faire face à ces défis uniques et s’attaquer spécifiquement au sentiment d’abandon que ressentent les populations de la région. Les enjeux sont de taille face à l’exploitation des ressources naturelles, le manque d’infrastructures terrestres, aériennes et numériques, les menaces environnementales et la pression économique posée par les dynamiques migratoires.

Les prix sont 12% plus élevés que sur le continent malgré des salaires moyens plus bas, le taux de chômage est de 23% (alors qu’en France métropolitaine le taux n’est que de 10%) et l’intégration culturelle est un facteur clé pour une région qui abrite une vingtaine de communautés ethniques et tout autant de langues.

Cependant un mouvement social d’une ampleur historique a marqué le printemps 2017, caractérisé notamment par 11 jours de grève générale.

Une grève initiée à l’appel de plus de 30 syndicats qui réclamaient une amélioration des services publics et de la sécurité sur le territoire. Cette grève a perturbé le lancement de la fusée Arianespace au Centre spatial européen de la Guyane à Kourou, et de nombreux habitants de la Guyane ont estimé que cette technologie était parfois plus appréciée que leur propre bien-être ; plus de 16 % de la population de la région n’a pas accès à l’eau potable et la population intérieure reste encore isolée des infrastructures électriques malgré une population qui augmente*.

*Rapport de la CRE, février 2017, Mission de la CRE en Guyane.

Suite à ces revendications sociales, un Accord a été introduit en avril 2017 pour exiger un large débat sur les ambitions à plus long terme de la Guyane. Le collectif Pou Lagwiyann dékolé, signifiant “Pour une Guyane qui décolle” en créole guyanais, demande une discussion ouverte entre les responsables de l’État français, les responsables des collectivités locales et les citoyens de la région.

Fidèle à sa parole, l’Assemblée vient de lancer un projet sociétal, les États Généraux de la Guyane, dans lequel il s’agit de débattre et de co-créer avec les populations du territoire sur les politiques et les projets qui auront un impact positif sur la région pour les 30 prochaines années. L’objectif est de faire respecter une volonté d’inclusion et de modernisation de la région, de faire croître l’économie de manière durable et de veiller à ce que la voix des guyanais soit entendue de chaque côté de l’océan.

Les représentants du territoire sont prêts à recueillir les points de vue des citoyens, même dans les zones les plus reculées, avec la mise en place de commissions publiques sur le terrain et d’un espace numérique participatif (la plateforme Civocracy) dans le but d’élaborer un Livre blanc de la Guyane qui éclairera les futures politiques publiques. Le projet, croisant des méthodes traditionnelles et numériques, permettra de prendre des décisions transparentes et adaptées aux spécificités de la Guyane, tenant compte de ses traditions et réfléchissant à des infrastructures efficaces tout en maintenant un équilibre écologique. L’impact environnemental est en effet crucial sur un territoire recouvert à 98% de forêts tropicales, de mangroves côtières, de savanes, de montagnes et de nombreuses zones humides, où l’on découvre encore de nouvelles espèces mais également d’importants gisements aurifères sous son sol.

Des discussions impliquant l’écosystème tout entier seront lancées autour de neuf thèmes pour aborder des domaines prioritaires tels que l’emploi, les transports, l’exploitation des ressources, la biodiversité, la sécurité et la cohésion sociale.

Dès cette semaine, la première discussion, qui vise à recueillir des points de vue sur ce que les citoyens veulent et attendent du projet des États Généraux, est désormais ouverte, et les hauts responsables français et guyanais sont déjà actifs sur la plateforme.

Vous souhaitez vous impliquer dans ce projet ambitieux : Regardez si la tournée des États généraux passent près de chez vous et abonnez-vous à la plateforme pour recevoir un email à l’ouverture des prochaines discussions citoyennes.

Les consultations seront ouvertes pour les deux prochains mois.

Partagez votre propre proposition pour le futur guyanais.

En savoir plus sur le projet des Etats Généraux de la Guyane.

Madeline Le Botlan, Chargée de projets participatifs
Emily McDonnell, Communication et presse

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