Yes we cum : quand le X s’engage dans l’aventure politique

La Netscouade
5 min readJul 19, 2017

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Parce qu’il n’y a pas que les industries traditionnelles qui ont été chahutées par le numérique, le porno a aussi été pris dans la vague. Avec un vent de liberté.

Coincée dans un ghetto économique, l’industrie du X affiche une hardiesse insolente pour se renouveler et survivre. Et pour cause, les marques traditionnelles ne s’aventurent jamais à annoncer sur les sites X. Solitaire, le X n’a jamais vraiment rien créé. Il reste à l’affût, toujours à la conquête de nouveaux marchés, il supporte l’innovation, de la cassette VHS à la réalité virtuelle, en passant par le minitel. Une industrie qui, par essence, ne peut exister qu’en étant créative et inspirante.

Un terrain étonnamment politique

Qui l’eût cru ? La communauté du X (professionnels et usagers compris) a été sondée politiquement par Pornhub itself, avec une représentativité exemplaire compte-tenu du bassin d’audience du site. Résultats : il semblerait que la majorité des usagers soit démocrate, et plus précisément pro-Sanders.

Quelques usagers ont ainsi créé de faux profils au nom du candidat afin de prolonger la campagne sur le site, dans la section des commentaires. Parfois postés sur le ton de l’humour, il arrive tout de même que les commentaires dérivent sur des débats enflammés autour de questions sociales. Pleinement conscient de ces initiatives, Pornhub en a joué pour l’animation de sa communauté sur Twitter.

La course à la présidentielle américaine s’est donc étendue en ligne, au-delà des réseaux sociaux, des médias d’information et des sites de campagne. L’industrie s’est engagée au point où certains professionnels se sont même retrouvés ostracisés. Être pro-Trump dans l’industrie du X peut carrément être « dangereux », rapporte The Daily Beast, surtout depuis que le nouveau président et son équipe ont fait des déclarations érigeant le porno comme un problème de santé publique. Se prononcer publiquement comme soutien de Trump pourrait coûter cher à sa carrière d’acteur ou d’actrice… La plupart des managers recommandent plutôt la discrétion. “Soutenir Trump ne peut être en aucun cas bénéfique pour la carrière d’une femme”, affirme Mark Spiegler, le plus célèbre des agents d’actrices X.

Du lol au militantisme

Pendant des décennies, les liens entre politique et porno étaient anecdotiques et ne subsistaient qu’à travers quelques films et vidéos parodiques (faisant notamment appel à des “sosies” de personnalités publiques comme Sarah Palin). Aujourd’hui, l’industrie n’hésite plus à prendre la parole. Pornhub et YouPorn se sont effet associés à Netflix, Airbnb ou encore Google pour la journée de mobilisation pour la neutralité du net, le 12 juillet. Un ennemi commun : le nouveau boss de la Commission Fédérale des Communications (FCC), nommé par Donald Trump, farouchement opposé à la neutralité du net.

Une épée de Damoclès plane sur l’industrie : un gouvernement républicain qui a pour intention d’étouffer le trafic pour limiter l’accès au porno (au profit de consommateurs de bande passante davantage « grand public » comme Youtube). Selon Alex Hawkins, porte-parole de xHamster, cette initiative s’inscrirait même dans une optique plus globale que la simple censure pornographique. Si on pousse l’idée, restreindre l’accès au porno suit la même voie que la limitation de l’expression des sexualités, des droits LGBTQ+ et des femmes.

Le porno ne serait donc pas tellement éloigné de la vie politique nationale, voire internationale : “La fin de la neutralité du net risque d’aligner les États-Unis sur les régimes les plus conservateurs du monde, pas seulement pour le porno, mais en ce qui concerne la sexualité en général’”, ajoute Hawkins dans une interview sur Motherboard.

Censure partout, boobs nulle part

Même Tumblr s’y est mis ! La plateforme de micro-blogging était le centre névralgique du soft porn : son succès est sans aucun doute lié au hashtag #NSFW. Cependant, depuis son rachat par Yahoo, Tumblr rentre de plus en plus dans les rangs, tentant de s’acheter une certaine respectabilité. Résultat : l’installation d’un Safe Mode pour les mineurs (mais aussi disponible pour les majeurs), rendant impossible non seulement la consultation de contenus violents ou pornographiques (jusqu’ici tout va bien), mais aussi ceux qui seraient liés à la nudité artistique, éducative ou photojournalistique.

L’objectif : se donner une image plus responsable, alors que les contenus porno rapporteraient jusqu’à 20% des clics sur le site, selon TechCrunch.

Sans surprise, ce Safe Mode semble servir un peu plus que prévu et censure aussi en passant les contenus LGBT, même lorsqu’ils ne sont pas sexuels, et même s’ils ne contiennent pas de nudité. Pas vraiment en accord avec la ligne éditoriale du site jusqu’ici.

La nouvelle politique de Tumblr rejoint donc celles des autres grands médias sociaux : sous couvert de chasser les contenus pornographiques, ils ne font que cultiver le grand méchant tabou. On pense notamment à celui qui gravite autour du corps féminin, alimentés par des polémiques liées à la vision des règles et des tétons, sur Instagram ou encore Facebook. Comme quoi, ceux qu’on pense être nos alliés ne le sont peut être pas pour toujours.

– Thanh-Nhan LY CAM

@LaNetscouade

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