Créons du commun

Malo
4 min readMay 26, 2017

Hello Yannick,

Merci pour ce partage très intéressant. Je connais encore peu le contexte bruxellois mais nous sommes confrontés à une situation similaire à Lille avec, pour ne citer que lui en exemple, le beau Palais Rameau qui est sous-utilisé (ce qui marque déjà un progrès). Il serait génial, comme tu le dis, que ces lieux abandonnés trouvent une nouvelle utilité en devenant de l’espace commun, des tiers-lieux.

J’ai l’impression qu’il y a 2 faces à ce problème. D’un côté, les lieux qui sont peu adaptés, devenus vétustes et qu’il faudrait transformer. De l’autre, il faut trouver comment les occuper.

La première face du problème : les lieux

J’ai envie de connecter ton article à une initiative lilloise que j’ai découvert ce matin même. Elle est portée par 2 tiers-lieux de la ville, la Coroutine (cc. Simon Sarazin) et Volume Ouvert ainsi que d’autres acteurs de la métropole. Ils veulent mettre sur pied une foncière dédiée à l’achat de tiers lieux. L’idée est d’acheter des locaux et les mettre à disposition sous forme de location à des projets d’utilité sociétale. Le cas de Bruxelles est différent et ne nécessite peut-être pas, dans un premier temps, d’aller jusque l’achat de ces espaces vides mais peut-être de réunir des fonds pour les remettre sur pied, créer des accès plus commodes, … Toujours est-il qu’il y a matière à s’inspirer de cette réflexion, elle-même inspirée du mouvement Terre de Liens qui, notamment, achète des fermes pour les louer à des paysans engagés.

Finalement, si on simplifie à l’extrême, l’idée est de réunir des fonds pour investir dans l’amélioration de l’espace commun bruxellois, de ne plus dépendre des pouvoirs publics, ne plus attendre que le sujet devienne assez intéressant pour qu’il apparaisse dans les programmes politiques, il sera déjà trop tard. Peut-être, faudrait-il créer quelque chose comme le Fonds d’Investissement pour les Communs Bruxellois.

La seconde face du problème : l’occupation

Cette fois-ci, c’est la SNCF qui m’inspire. Elle a lancé Open Gare, un appel à projets pour 33 gares de la région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes. Quand un certain nombre de lieux seront formellement repérés, mis à disposition par leur propriétaire, en état d’être occupés (au maximum de ce qui peut être fait avec les moyens du bord donc l’absence de moyens), il faudra les occuper.

Peut-être, faudrait-il créer une plateforme d’appel à projets dédiée à trouver des utilisations à ces lieux. Cela permettra à des entreprises (dans le sens le plus noble de son terme : action d’entreprendre quelque chose) locales de voir le jour, en adéquation avec la population environnante, de s’installer dans un local propice à leur développement, … Peut-être même, pourra t’on avoir des projets plus saugrenus qui s’étalent sur plusieurs lieux, un espace d’exposition divisé, …

Plus qu’un problème, c’est une réelle opportunité de dynamisation, de porter un projet ambitieux, “remarquable” (Tedtalk de Seth Godin). Qui pourrait-être intéressé par un tel projet et le financerait ?

  • Les bruxellois : on parle de redynamiser 800 lieux au travers de toute la ville, fournir des locaux à des associations, des projets utiles pour la ville, …
  • Les commerçants : il est toujours bon d’être dans un environnement dynamique et cela fait tout bêtement de nouveaux clients potentiels à l’étage du dessus.
  • Les projets qui œuvrent déjà à la création d’un commun : coworking, fablabs, tiers-lieux en tout genre. Une coopérative comme SMart (cc. sandrino graceffa) qui, comme le montre cet article (cc. Arthur De Grave), fait déjà beaucoup pour la création d’un collectif, pourrait être intéressée à l’idée de soutenir un projet qui va dans son sens.
  • Les pouvoirs publics : pour redynamiser des quartiers (contrats de quartier), faire parler de Bruxelles, en faire un exemple. Aussi, créer de l’emploi, un peu à l’image des politiques de grands travaux, il faudra retaper tout ça, avec des artisans locaux, …
  • Les grands propriétaires terriens, à l’image de la SNCF que je citais plus tôt, qui sous-exploitent leur patrimoine.
  • L’Europe : nous sommes face à une problématique que beaucoup de villes connaissent, cela peut être une expérimentation avant essaimage.
  • Etc.

Le vrai challenge serait d’en faire un projet à échelles multiples pour réussir à inclure un maximum de monde, que chacun y trouve son intérêt. Ce n’est que comme ça, à mon sens, qu’on arrive à changer réellement les choses, à créer un mouvement et pas juste imposer une volonté descendante. Il faudrait être capable de faire du lieu par lieu pour que chacun soit pertinent dans son environnement (comme tu le dis dans ton article d’ailleurs). Il faudrait pour autant réussir à garder une vision globale et ambitieuse : il s’agit de mettre un gentil coup de pied dans les fesses de Bruxelles, redonner vie à 800 lieux. Il y a d’ailleurs sûrement des échelles intermédiaires à imaginer (quartiers, communes, …), peut-être même d’autres plus macro : on s’attaque à un problème global, l’allocation des ressources, la création de communs, d’un commun.

Les premiers pas d’un tel projet ? Comme tu le disais, Huis VDH est un POC (Proof Of Concept) de cette idée et passer à une poignée de lieux pourraient être une preuve supplémentaire tout en étant faisable “rapidement” et avec “peu de moyens”. Peut-être faut-il identifier un quartier en particulier avec qui travailler ou quelques propriétaires prêts à mettre à disposition leur(s) bien(s) contre un petit upgrade de leur bien. Il doit bien y avoir des micro-opportunités à saisir.

Enfin, tout ça pour dire que je suis plutôt très d’accord avec ta vision de la chose. J’ai l’impression qu’il y a matière à tenter (possiblement pas du tout ce que je propose d’ailleurs, tant mieux même, j’ai encore plein à apprendre), que ça peut être fun. Ça m’amuserait de pouvoir échanger plus sur le sujet.

“L’avenir, tu n’as pas à le prévoir mais à le permettre.” comme disait Saint-Exupéry. Alors permettons à ces lieux de reprendre vie, permettons aux bruxellois de s’en emparer et voyons un peu ce qu’il se produira !

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Malo

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