J’ai mis une image mais bon hein c’était juste parce que ça faisait vide, ça n’a pas d’utilité dans l’article

Règles de survie dans Game of Thrones (et à peu près n’importe quelle autre série)

ARTICLE SPOILER-FREE ! Cet article est garanti sans spoiler (point 7 excepté, mais c’est bien balisé). Attention néanmoins, je parle uniquement de spoilers directs. Donc y’aura pas de “machin aurait pu ne pas mourir si il avait fait ça” ou de “trucbidule a trop fait d’erreurs à ce moment”. Par contre vu que je donne des clés de logique qui sont vraies jusqu’au début de la saison 6, il est assez probable que vous puissiez en déduire certains événements. Donc ça reste une lecture à vos risques et périls si vous n’êtes pas à jour.

Loos Guccreen

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Il est possible dans A Song of Ice and Fire (ASOIAF) / Game of Thrones (GoT) de donner un score de survie aux différents personnages de la saga. Ce score, arbitraire (et non numérique), va déterminer le potentiel qu’un personnage a de survivre à la situation dans laquelle il se trouve. Il est bien évidemment amené à évoluer au fur et à mesure du récit, et ce qui fait peut-être la force de Game of Thrones, c’est que ce score est fixé selon des règles un peu différentes des narrations traditionnelles (parce que oui, c’est un procédé qu’on peut transcrire à la plupart des oeuvres mettant en scène la mort de personnages). Nous allons essayer ici de dégager les règles de narration qui semblent régir l’univers de GoT.

1. Un peu d’attention c’est bien, trop d’attention c’est dangereux

Tout les personnages de la saga ne bénéficient pas de la même attention. On peut les classer dans trois catégories: Les personnages principaux, secondaires et tertiaire. Leur catégorie respective va beaucoup influencer le score de survie du personnage.

Les personnages principaux sont quasi exclusivement les personnages Point of View (POV) du bouquin. Ils sont en nombre restreint (mais très grand par rapport aux récits de fiction traditionnels), et ont la caractéristique d’être uniques à un moment donné. En effet, il n’y a qu’un seul personnage POV à la fois, et quand deux personnages POV se rencontrent, l’un est secondaire dans la scène (scène qui, en général, est d’une intensité forte, sauf bien entendu quand il s’agit de deux personnages POV du même camp).

Ils sont très fixes dans leur catégorie. Un personnage POV est en général un personnage POV très tôt dans son existence dans le récit, et, ne sera pas déclassé secondaire de manière durable (par contre, il peut arriver qu’on arrête de parler de lui pendant un moment). Egalement, il est rare que des personnages POV meurent quand ils ne sont pas en position de personnage POV (donc en position de personnage secondaire). Attention toutefois: Si le personnage POV est évident dans A Song of Ice and Fire (la version livre, son nom est donné au début du chapitre), il est parfois un peu plus nébuleux dans Game of Thrones (la version télé).

Les personnage secondaires, sont, à l’exception bien sûr des personnages POV dont ce n’est pas la scène, un très large panel de personnages qui possèdent une importance assez haute dans le récit, mais qui ne sont pas assez importants (aux yeux de George Martin) pour être des personnages POV. Attention: Être personnage secondaire ne signifie pas être personnage mineur. Ils peuvent parfois être très centraux au récit. Nous verrons plus tard quelle importance cela peut avoir sur leur score de survie.

Alors bien sûr, c’est une tendance générale, mais il ne fait pas bon être un personnage secondaire dans Game of Throne. Cela ne signifie pas qu’être POV supprime le risque de mourir, mais être secondaire facilite beaucoup le passage spontané de vie à trépas. Pour cause: Ce sont des personnages “importants mais pas trop”. Les tuer aura souvent une conséquence directe sur le récit et ses protagonistes, sans non plus chambouler le déroulement global de l’histoire (à l’opposé de la mort d’un POV qui signifie le plus souvent un virage brutal du scénario). On peut éventuellement en déduire que plus un personnage secondaire est important, plus sa vie est en danger. Mais ce n’est pas systématique.

Les personnages tertiaires sont, eux, de la chair à canon. Ils ont parfois un nom, parfois pas, mais je ne parle pas non plus des figurants (qui sont une 4ème sorte de personnages sans importance). Souvent introduits peu de temps avant leur mort, ils servent principalement à ajouter du sang au récit. Cela dit, être un personnage tertiaire ne signifie pas nécessairement être en danger permanent de mort (voir point 4). Egalement, la barrière entre personnage secondaire et tertiaire est parfois mince. Certains personnages oscillent même périodiquement entre les deux groupes.

2. On ne meurt pas hors caméra

Ici presque tout est dans le titre. Excepté les personnages tertiaire (et encore), les figurants, et de rarissimes exceptions, personne ne meurt hors champ dans Game of Thrones. Si Martin tue beaucoup de personnages, au moins il a le panache de mettre leur mort en scène quasiment tout le temps.

Du coup, ça veut dire à l’inverse que quand un personnage est face à la caméra, il risque de mourir. Élémentaire, mais important. Les personnages sont immortels tant que l’histoire ne parle pas d’eux. Pas de “oh lui ? Il est mort il y a deux semaines”.

3. La prise de risque est récompensée en fonction de la catégorie du personnage

Un risque mortel (pertinent ou non) dans Game of Thrones porte bien son nom. Contrairement à d’autres scénario d’autres histoires, un risque mortel peut effectivement tuer le personnage qui l’entreprend, quel qu’il soit. Quel que soit son niveau de sympathie du personnage, quel que soit le niveau de risque dans le pari mortel, il peut mourir.

Néanmoins, cela ne veut pas dire qu’un risque mortel aboutit toujours à une mort (voir point 6). C’est vraiment un pari, que le personnage peut perdre comme gagner.

De manière générale, les personnages POV sont moins touchés par cette règle (voir point 5 et point 6) que les secondaires et tertiaires. Mais il faut vraiment garder en tête que dès qu’un personnage tente (ou est confronté à) un pari mortel, il met vraiment sa vie en jeu. C’est pas pour faire joli.

4. La vitesse de la prise d’importance dans le récit est directement reliée à l’espérance de vie (et inversement proportionnelle)

Cette règle concerne surtout les personnages secondaires, et est assez forte. Quand un personnage acquiert de l’importance rapidement, il peut être considéré comme très en danger de mort. Martin n’est tout simplement pas intéressé par des personnages qui arrivent trop rapidement à un stade de construction important, il préfère le faire lui-même.

Un personnage “feu d’artifice” peut néanmoins être construit pendant plusieurs épisodes/saisons avant de voir sa fin tragique arriver (parce que tuer un personnage sur lequel le spectateur/lecteur n’a construit aucune empathie n’a pas beaucoup d’intérêt).

Les personnages secondaires les plus durables sont plutôt ceux construits sur la durée, ce qui ne les rend pas immortels non plus.

5. Une punition qui ne tue pas rend immortel (pendant un moment)

Cette règle concerne principalement les personnages principaux. Un personnage POV qui est mis face à un danger mortel et qui y survit gagne ÉNORMÉMENT de points de survie, et en particulier moins bien il s’en tire, plus il gagne de points. Ca fonctionne aussi pour les personnages secondaires, même si ce procédé scénaristique est moins fréquent pour eux (en général ils survivent ou non).

La raison est assez évidente. Martin ne va pas s’emmerder à construire un personnage pour le tuer immédiatement. Et une blessure grave implique en général un tournant radical pour le personnage, donc un maximum de construction à faire. Donc une immunité temporaire.

Souvent une blessure grave rime également avec un isolement temporaire, mais ce n’est pas tellement une conséquence naturelle de la blessure, juste une observation récurrente. Difficile d’affirmer qu’il s’agit d’une “règle”.

6. Martin ne tue pas ses personnages pour rien

Là aussi, quand on y réfléchit un peu, c’est évident, mais ça permet de désamorcer certaines situations.

Des fois, on a envie de se demander: “est-ce que ce personnage va mourir ?”, alors que la question devrait plutôt être: “est-ce que la mort de ce personnage aurait un intérêt concret sur l’évolution du récit ?”.

Si la réponse est “non”, on est pratiquement certain que tuer ce personnage n’aura aucun intérêt, et donc que ça n’arriver pas. Si la réponse est “oui”, cela ne signifie pas pour autant que le personnage va mourir. Mais bon, y’a un risque quoi.

On peut tirer de cette règle aussi des déductions sur le moment de la mort d’un protagoniste. Généralement, elle va survenir, pour un POV, au milieu d’un risque mortel (donc un tournant scénaristique central, dont l’issue va marquer la direction suivie par le scénario). La mort d’un POV entraîne généralement avec elle une flopée de personnage secondaires.

Pour les personnages secondaires, la mort sert en général de faire valoir à un POV (quand un personnage secondaire en tue un autre c’est que le tué était plutôt un tertiaire, et donc que sa mort n’a en général qu’un impact minime pour l’émotion du spectateur, à part pour rajouter du gore). Elle peut survenir un peu à n’importe quel moment où ça profite directement au POV qui en est commanditaire. Il faut donc rester attentif aux relations qu’entretiennent les personnages secondaires avec leur POV. A noter qu’il arrive que des personnages secondaires meurent malgré tout dans le feu des batailles générales, de mains anonymes. Ah la bataille, un danger universel.

7. Trois personnages sont pratiquement immortels jusqu’au dénouement final (spoil jusqu’au début de la S6 vu que je vais révéler le nom de gens qui ont survécu jusque là)

Alors oui j’avais dit pas de spoil mais bon y’a quand même trois cas spéciaux qu’il est intéressant d’aborder: celui de Daenerys, Brandon et Tyrion.

Daenerys ne peut pas mourir. Enfin pas sans énormément de construction autour de sa mort. Simplement parce qu’en termes de méta-narration, c’est l’antagoniste principal de Westeros (avec les whitewalker mais ils n’ont aucun rapport), donc de pratiquement tout les autres personnages POV du récits (qui d’ailleurs se battent pour savoir qui l’affrontera). Martin s’est emmerdé à la construire en tant qu’antagoniste principal, à coup de légendes, de vieilles rancoeurs, etc., pendant au moins 5 saisons/bouquins. La tuer reviendrait à jeter tout ce travail à l’eau, puisqu’en tant qu’antagoniste sa mort relâcherait une part de la pression qui règne sur Westeros sans rien amener d’intéressant. D’autant qu’à l’opposé des trouzemille POV qui s’entretuent sur Westeros, personne n’a la carrure pour reprendre le flambeau de son côté. Elle peut mourir, mais ça sera le climax de l’histoire, donc sa fin. Ou alors la situation doit évoluer énormément pour que cela se produise.

2ème personnage quasi immortel (pour la même raison): Brandon. C’est le héros de l’histoire, tout simplement. Le vrai héros (même si ce n’est pas forcément lui qui tirera les fruits de son labeur). Son character building est juste trop gros pour disparaître d’un claquement de doigt. Et ce n’est pas une histoire d’empathie. Il est pratiquement le seul à se soucier des Whitewalker, et surtout à avoir les moyens pour les combattre. De la même façon que Daenerys, si sa mort survient, ça sera dans les dernières saisons. Bonus estropié: Il est encore beaucoup trop faible pour que sa mort apporte quelque chose, ça donnerait juste un “ah, Bran a échoué. C’est dommage”.

Le 3ème personnage immortel l’est pour une toute autre raison, beaucoup plus terre à terre: Tyrion est simplement le personnage le plus populaire de la série, et de très, mais alors très très loin. Martin n’a pas d’inhibition à tuer ses personnages populaires, mais Tyrion fait figure d’exception tellement le nombre de spectateurs qui se rattachent à lui est élevé. C’est bien simple, tuer Tyrion au mauvais moment/trop tôt pourrait amener à une baisse de l’audience de 30% à 50% (à la louche). Je pense personnellement que Tyrion n’est pas totalement immortel, mais le tuer nécessitera une grosse préparation, c’est un événement à calculer avec grande précaution.

Conclusion

Voilà, ce sont les principales règles que j’arrive à dégager de la logique narrative de George R.R. Martin. Cette façon de penser les règles de narration est transposable à toutes les oeuvres, à priori, mais les règles établies ici sont valables pour Game of Thrones / A Song of Ice and Fire.

Évidemment, la saison 6 n’est plus basée sur un livre, donc on sait que de grosses disparités entre le scénario d’ASoIaF et celui de GoT risquent d’apparaître à partir de là, mais je pense que ces règles devraient rester valables pour la suite de l’histoire, pour ses deux versions.

N’hésitez pas à commenter si vous en voyez d’autre, ou de réagir sur un paragraphe si vous n’êtes pas d’accord avec moi. Et si ça vous a plu, pourquoi ne pas partager l’article ? (Je ne touche aucun revenu dessus).

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Loos Guccreen

Des fois j’écris des trucs ici. C’est ptet intéressant, ptet pas. J’essaye de l’être.