Le gouvernement devrait faire part de son travail en ce qui concerne l’analyse comparative selon le genre

Le mois de juillet a été occupé en matière d’analyse comparative selon le genre (ACG) au Nouveau-Brunswick.

Plus tôt ce mois-ci, le gouvernement du Nouveau-Brunswick (GNB) a rendu public un outil qu’il a développé pour faciliter les ACG et le Telegraph Journal a publié un article sur les efforts déployés par un député provincial (en anglais seulement) en vue d’obtenir des documents relatifs aux ACG réalisées pour le budget 2016‑2017.

Le Conseil des femmes du Nouveau-Brunswick a félicité le gouvernement pour la diffusion de son outil d’ACG, mais il lui demande d’aller encore plus loin du côté de la diffusion d’information relativement aux ACG. Plus précisément, le Conseil des femmes lui recommande de diffuser des renseignements supplémentaires sur son utilisation de l’ACG et de prendre l’habitude de publier les constatations découlant des ACG qu’il effectue.

L’ACG au sein d’un gouvernement

Au sein d’un gouvernement, l’ACG est un processus servant à déterminer et étudier la manière dont les lois, les politiques, les programmes, la prestation des services, les budgets, etc., peuvent avoir des effets différents sur un genre par rapport à un autre. Prenons l’exemple suivant : un gouvernement décide de prendre une partie importante des fonds alloués aux soins aux aînés et de les réaffecter à des projets de construction. Une ACG permettrait de constater que le personnel infirmier est majoritairement constitué de femmes, qu’il y a plus de femmes aînées que d’hommes aînés au Nouveau-Brunswick (en particulier dans le groupe des 85 ans et plus) et que la construction est un domaine dominé par les hommes. Cette décision du gouvernement aurait donc des conséquences importantes selon le genre.

L’analyse comparative selon le genre est importante, car, pendant la majeure partie de l’histoire moderne, les institutions publiques comme les gouvernements ne se sont pas souciées du fait que leur travail puisse avoir des effets différents sur certains groupes démographiques en particulier, comme les femmes, par rapport à d’autres. Ce n’est qu’assez récemment que les gouvernements ont commencé à tenir compte du fait que leurs décisions puissent ne pas avoir la même incidence sur les femmes que sur les hommes — et cela n’est certainement pas encore un réflexe automatique.

Lorsqu’elle est appliquée correctement, l’ACG contribue à l’élaboration d’initiatives dès le début, et ce, jusqu’à leur mise en œuvre et à leur évaluation. Certains gouvernements, comme le gouvernement du Canada et le gouvernement du Nouveau-Brunswick, ont adopté des processus d’ACG qui tiennent aussi compte de recoupement de facteurs comme la race, l’ethnicité, la situation socioéconomique, les capacités, etc.

Au début de 2016, le GNB a annoncé qu’il réalisait désormais une ACG dans le cadre de son processus décisionnel et d’élaboration de politiques. Pour orienter son utilisation de l’ACG, il a mis au point l’outil analytique susmentionné. Cet outil particulier demande aux utilisateurs de fournir des données qualitatives et quantitatives, d’identifier des lacunes dans les renseignements disponibles, de déterminer les répercussions possibles selon le genre ainsi que les options pour obtenir des résultats plus équitables, et de planifier la surveillance et l’évaluation des résultats.

Recommandations du Conseil des femmes

Compte tenu de l’importance de l’ACG, le Conseil des femmes du Nouveau-Brunswick recommande que le GNB :

· explique les circonstances dans lesquelles il a recours à l’ACG dans le processus décisionnel et les situations où une décision peut être exemptée de l’obligation d’effectuer une ACG;

· explique les mesures qu’il a prises pour favoriser l’ACG, notamment le nombre de fonctionnaires qui sont formés à cet outil et si la responsabilité de compléter des analyses est centralisée ou répartie dans l’ensemble des ministères;

· prenne l’habitude de diffuser l’information qui découle des processus d’ACG, tout spécialement pour des annonces importantes, comme les discours du trône et les budgets provinciaux, de même que les initiatives qui comprennent une consultation des citoyens.

Ces recommandations visent à s’assurer que l’ACG est non seulement effectuée, mais qu’elle est effectuée correctement et qu’elle a une réelle incidence dans les prises de décisions. Elles visent à faire en sorte que l’ACG fasse partie intégrante de l’élaboration des politiques, qu’elle ne soit pas une simple case à cocher de façon sommaire ou une façon d’anticiper les défis du côté des relations publiques. Nos recommandations découlent d’une longue histoire de femmes — en particulier des femmes autochtones, racialisées, LGBTQ2S+ et/ou handicapées — qu’on oublie, marginalise ou traite de façon symbolique quand vient le temps de prendre des décisions.

Le Conseil des femmes est d’avis qu’il est essentiel que le gouvernement soit transparent quant à son utilisation de l’ACG, mais sa recommandation concernant la diffusion des constatations découlant des ACG n’est pas qu’une simple question de reddition de comptes. Lorsqu’ils sont bien menés, les processus d’ACG devraient générer des renseignements précieux qui, s’ils sont rendus publics, alimenteront les discussions sur certains enjeux et renforceront notre démocratie. Ces données s’avéreront également utiles pour des entités comme le Conseil des femmes et des organismes communautaires qui s’emploient à promouvoir l’égalité des femmes dans notre province.

Obstacles et nécessité de les contourner

Pour que les ACG aient une incidence sur le processus décisionnel au sein du GNB, elles doivent être présentées au ministre ou au Cabinet; c’est là qu’entre en jeu la Loi sur le droit à l’information et la protection de la vie privée du Nouveau-Brunswick. Cette loi est le mécanisme grâce auquel des personnes peuvent demander à des organismes publics de communiquer des renseignements concernant leurs affaires publiques. Elle décrit par ailleurs les situations où le responsable d’un organisme public doit ou peut refuser de communiquer des renseignements. Il ne faut pas communiquer de renseignements qui « révéleraient le contenu des délibérations du Conseil exécutif » (c’est-à-dire du Cabinet). La divulgation de l’information est facultative dans le cas de conseils au gouvernement.

Ces dispositions permettent au GNB de refuser (et, dans certains cas, peuvent même l’obliger à refuser) de communiquer les renseignements découlant de l’ACG préparée pour un ministre ou le Cabinet, ou qui lui a été présentée. Toutefois, s’il veut favoriser l’égalité des femmes, le GNB doit s’efforcer de ne pas, par défaut, refuser de communiquer ce type de renseignements. Pour ce qui est des constatations découlant des ACG, le gouvernement peut prendre l’habitude de communiquer le plus grand nombre de renseignements que possible, tout en respectant le caractère confidentiel des délibérations du Cabinet.

Il convient de souligner que cette pratique de communication des constatations des ACG serait également conforme aux engagements du gouvernement en matière de données ouvertes et d’engagement des citoyens. La politique sur les données ouvertes du GNB affirme que les données détenues par le GNB ou pour ce dernier représentent « une ressource provinciale précieuse et un atout stratégique qui devrait être accessible au grand public à moins que des restrictions existent pour des raisons de protection de la vie privée, de confidentialité, de sécurité ou juridiques ». La politique affirme que le fait de fournir un accès public à ces données « peut améliorer la transparence et la reddition de comptes » et « appuyer une participation significative du public quant à la politique publique ».

Prochaines étapes

S’il demandait, le gouvernement trouverait de nombreux partenaires possédant une expertise en ACG qui seraient heureux de travailler avec eux pour mettre en œuvre les recommandations du Conseil des femmes. Le conseil lui-même serait, bien sûr, parmi ces partenaires. S’engager dans ce travail dès le début en collaboration avec les intervenants serait dans l’esprit de nos recommandations et s’alignererait avec un certain nombre de raisons et d’objectifs de la politique de données ouvertes. En adoptant nos recommandations et en collaborant avec les intervenants, le gouvernement prendrait des mesures importantes pour accroître la transparence et la responsabilité tout en favorisant l’avancement de l’égalité des femmes au Nouveau-Brunswick.

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