En marche pour un avenir en commun et pour faire battre le coeur de la France !

Pierre Musseau Milesi
8 min readApr 23, 2017

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Voter Emmanuel Macron le 7 mai, est-ce vraiment rempiler pour 5 ans de politiques néo-libérales? C’est que nous répètent ceux qui ont pour mot d’ordre #sansmoile7mai, mais c’est aussi ce que pensent beaucoup de ceux qui déclarent d’abord voter contre Marine Le Pen.

La perspective de ce scrutin ne déclenche que rarement de l’enthousiasme parmi tous ceux qui se disent à gauche. Très peu saluent le fait qu’Emmanuel Macron ait détroné les deux partis majeurs qui ont rythmé la vie politique française depuis 25 ans. Beaucoup pensent encore qu’on a raté cette occasion unique de faire advenir une véritable politique de gauche et écologique — si seulement on avait pu additionner les votes de Mélenchon et de Hamon. Le programme d’ “En Marche !”, souvent caricaturé par ses détracteurs, est d’abord vu comme la continuité de la politique de Hollande, rarement comme la “Révolution” qu’Emmanuel Macron annonçait dans son livre publié fin 2016.

“Le dynamisme de la marche risque d’être stérile si on ne sait pas quel espoir se trouve dans l’ “en avant”. De toute façon, nous sommes dans l’aventure, cette élection est un saut dans l’inconnue”, Edgar Morin

Les inconnues sont effectivement nombreuses, même si Emmanuel Macron devient Président de la République le 8 mai. Suivant les résultats des législatives, des trajectoires très différentes pourraient en résulter.

Pour se projeter dans le quinquennat Macron qui s’annonce, je propose d’y projeter l’espoir d’un changement complet.

Ce n’est pas impossible qu’un néo-macron apparaisse s’il est président : Juan Carlos, couvé par Franco pour régner en Franquiste a au contraire, sitôt acquis le pouvoir, réalisé la démocratie. Gorbatchev, pur produit du stalinisme, est devenu le destructeur du système dont il est issu. Que serait Macron président?

Couvé par le social-libéralisme d’Attali à Hollande, ou pur produit la doxa néo-libérale de la Banque Rothschild, Macron peut-il finalement celui qui assurera la transition vers le système d’après.

C’est ce que je propose d’imaginer par un exercice de prospective à l’horizon 2022 où les politiques les plus libérales auront finalement été retournée pour préparer ce que certain appel le post-capitalisme.

Le néo-libéralisme ou l’âge de la régression

Le néo-libéralisme est un système économique et social pour lequel de plus en plus d’historiens, d’économistes, de sociologues, de psychologues s’accordent à dire qu’il est l’une des causes les plus profondes du mal-être de la quasi-totalité des démocraties à travers le monde, d’un nouvel âge de la Régression dont sont victimes toutes les sociétés occidentales.

En favorisant la toute puissance de la société consumériste au détriment des enjeux de citoyenneté, en transformant le travail en compétition acharnée qui désintègre toute forme de solidarité, en laissant se multiplier des crises financières qui à chaque explosion de bulles ne font qu’affaiblir l’Etat providence et la situation des plus fragiles, en ignorant largement les enjeux environnementaux et leurs conséquences sanitaires et géopolitiques, le néo-libéralisme pourrait être convoqué devant les tribunaux comme l’un des modèles de société les plus criminels de l’histoire de l’humanité.

Partout, deux barbaries se conjuguent, la vieille barbarie de la haine, du mépris, de la cruauté, et la barbarie lacée du calcul qui veut contrôler tout ce qui est humain. Edgar Morin

Ce système critiqué de toute part fait l’objet d’une remise en cause qui commence à prendre de l’ampleur dans la société et au sein même de ce qu’on appelle l’élite, élus politiques, décideurs économiques, universitaires et experts divers. De nombreuses batailles ont déjà été gagnées auprès d’une large majorité au sein de ces élites, pour la reconnaissance des ravages du changement climatique, de la perte de biodiversité, des mensonges de l’industrie pétrolière, chimique, nucléaire, agroindustrielle mais aussi des urgences de la réduction de la pauvreté, de la lutte contre la désagrégation des solidarités sociales et la détérioration des conditions de travail, etc.

Le programme d’Emmanuel Macron témoigne de cette prise de conscience progressive des maladies de notre modèle économique actuel.

Pour autant, il serait insensé d’affirmer qu’Emmanuel Macron remet en cause le néolibéralisme — les nombreuses mesures issues de la droite ou même du centre, qu’il a volontairement reprises, restent marquées par le discours qui a accompagné l’avènement du néolibéralisme depuis les années 80: réduction de l’Etat, flexibilité de l’emploi, responsabilité individuelle face au chômage, etc.

J’affirme cependant qu’ Emmanuel Macron est le meilleur rempart à la “dé-cvilisation” que nous constatons à l’échelle mondiale. Ce rempart est nécessaire aujorud’hui pour préparer la transition vers le nouveau modèle économique, le nouveau modèle de société, qui succédera au capitalisme néolibéral dont la fin de règne se fait de plus en plus proche.

Emmanuel Macron est le mieux placé car il a refusé de céder aux sirènes populistes qui signent la régression de nombre de démocraties. Par son message résolument progressiste, il peut enrayer le processus de “dé-civilisation” qui menace la France et l’Europe comme de nombreuses autres démocraties, ou ex-démocraties, où ce processus est beaucoup plus avancé, en Turquie, en Inde, en Hongrie, aux Philippines, en Pologne, aux Etats-Unis…

Partout, y compris en Europe, la régression politique a fait naître des postdémocraties autoritaires, que le mot “populisme” qualifie très mal, et nous sommes nous-mêmes ici menacés en ce moment historique. Edgar Morin

Malgré les nombreuses interrogations qui vont surgir jusqu’aux élections législatives sur sa capacité à construire une majorité pour son projet, son élection sera, j’en suis sûr, le début d’une nouvelle mobilisation citoyenne.

Sans doute n’aura-t-il pas une majorité homogène à l’Assemblée Nationale ; probablement devra-t-il faire avec une coalition de groupes politiques très divers. Mais c’est justement une chance pour les institutions françaises qui pâtissent avec la 5ème république de l’hégémonie du parti présidentiel alors que dans la plupart des démocraties européennes, les coalitions gouvernementales sont indispensables. Loin de paralyser les institutions, ces coalitions ont pour la plupart des pays permis de vivifier le débat démocratique.

La politique de Macron a d’autant plus besoin d’une pensée sur ce monde qu’elle se veut d’ouverture. Edgar Morin

Mon pari est que dans cette nouvelle configuration, Emmanuel Macron pourra stimuler l’innovation politique, sociale, écologique et économique, qui permettra d’accélérer l’entrée dans une ère post-capitalisme.

Le post capitalisme et la société des communs

Je partage l’idée que le post-capitalisme sera le fruit d’une triple transformation:

  • une transformation des rapports de production où le système hiérarchique de la bureaucratie capitaliste est remplacé par une logique de production en pair-à-pair ;
  • une transformation du rapport de propriété, où la rente qui se concentre aujourd’hui de plus en plus entre quelques plateformes numériques, peut être redistribuée grâce à un renouveau de la coopérative à travers ce qu’on appelle le coopérativisme de plateforme ;
  • une transformation des rapport politiques pour sortir de la dialectique public-privé et l’ouvrir à la prise en compte des communs, permettant autour d’une ressource quelle qu’elle soit d’impliquer réellement les usagers-citoyens dans chaque décision.

Ce post-capitalisme n’est pas très éloigné des idéaux anarchistes de la fin du 19ème et du début 20ème qui ont rêvé, et parfois expérimenté, des formes de coopératives et d’organisations horizontales, sans pouvoir central. Les anarchistes ont aussi accompagné les mouvements​ sociaux qui ont défendu souvent dans la rue et par la force, des droits nouveaux pour les ouvriers, salariés, paysans.

Si les expérimentations anarchistes n’ont pas pu durer, certaines étant écrasées - comme les soviets par Lénine, ou les coopératives espagnoles, par le gouvernement républicain soutenu par Staline-, les idées défendues par les mouvements syndicaux ont permis une réforme du capitalisme vers l’Etat-providence.

L’Etat providence a été remis en cause par bientôt 40 années de néo-libéralisme, mais l’émergence de la révolution numérique a stimulé de nouveaux mouvements qui partagent des idéaux proches de l’anarchisme des origines, et favorisé des transformations déjà à l’oeuvre dans nombre d’organisations, dans l’entreprise comme dans la société civile. Partout émergent des idées, des combats et des solutions pour faire société autrement que selon la doxa néolibérale.

Nous sommes dans un creux historique d’incertitudes et d’angoisses, qui provoquent les régressions de repli. Seule la conception d’une voie salutaire pourrait ressusciter une espérance qui ne soit pas illusion. Edgar Morin

En stimulant toujours plus l’innovation, et en gardant la porte ouverte à tous ceux qui veulent proposer de nouvelles idées, de nouvelles solutions qui répondent aux enjeux de solidarité, d’égalité, d’écologie, Emmanuel Macron peut ouvrir le champ des possibles nécessaire à l’émergence d’une société post-capitaliste.

Partant du programme d’En Marche!, je propose ici des premières pistes prospectives pour imaginer comment des solutions pourront permettre d’approcher les promesses de Hamon et de Mélenchon mais avec des moyens que ni l’un ni l’autre n’avait avancé dans la campagne.

Voici donc une nouvelle lecture des 6 chantiers annoncés par Emmanuel Macron si les forces de gauche s’allient pour soutenir son projet.

Et d’autres prospectives à imaginer…

2022, le conseil d’administration d’EDF vote un plan de sortie du nucléaire en 20 ans. Les incinérateurs sont également promis à une fin proche. Plus aucun pic de pollution liée à la circulation n’est mesuré et la congestion automobile a disparu des grandes villes. L’agriculture biologique est devenue la norme et chaque jour de nouvelles exploitations se créent dans les villes et leurs banlieues.

En 2022, l’accès au logement est garanti et une mixité sociale réelle existe sur chaque territoire. L’objectif zéro sans abri est devenu une réalité et des solutions de logements sont mises en oeuvre pour les nouveaux arrivants toujours plus nombreux avec l’augmentation constante des migrations internationales. Les peines alternatives sont démultipliées en faveur d’une intégration des personnes condamnées.

En 2022, les lobbys sont d’abord citoyens et chacun peut interpeller et participer concrètement aux décisions des différentes collectivités territoriales, mais aussi des entreprises et de l’Etat. Le renouveau démocratique est en marche.

En 2022, l’euro est devenu monnaie commune :le Franc et d’autres monnaies complémentaires locales sont utilisées pour favoriser l’échange en circuit-court. Le gouvernement de la zone euro assure une réelle politique fiscale et budgétaire au service de l’égalité et de la solidarité en Europe.

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Pierre Musseau Milesi

imaginer des lendemains qui chantent et rester lucide sur un présent qui dérape