#LaNoteDuNouveauMonde : Des vieilles illusions aux nouveaux rêves

Le Pouvoir des Idées
5 min readMay 29, 2017

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Que dit la sagesse populaire ? On ne peut pas vivre dans l’illusion. On ne doit pas se faire d’illusion. Les illusions se doivent d’être, un jour ou l’autre, perdues.
Malheureusement, en symétrie, être sans illusion est souvent synonyme d’être cynique, désabusé, voire abattu. Plus d’illusion sur le passé (démystifié), le présent (la parole décrédibilisée), le futur (l’avenir appauvri). La désillusion entraîne perte de tonus, de confiance, d’envie de créer. Les marques en sont victimes, comme les dirigeants, comme la politique : autant y faire face. Comment ? Sans retomber dans les fausses illusions, en inventant de nouvelles façons de rêver.

LES ILLUSIONS PERDUES À TRAVERS LES CHIFFRES : LA PAROLE DE PLUS EN PLUS GALVAUDÉE

« Les Français ne croient plus… » : impossible de dénombrer les enquêtes qui commencent la présentation des chiffres par cette périphrase. Partis, Etat, baisse du chômage, média, religions, réductions d’impôts, démocratie, vaccins… les Français ne croient plus à rien, et surtout pas à la parole des institutions :

Selon le baromètre Kantar 2017, 52% des Français estiment que les choses se sont passées vraiment ou à peu près comme la radio les raconte (-3 points). Le journal et la télévision accusent, eux, une baisse importante de leur crédibilité, à 44% (-7 points) et 41% (-9 points) : pour plus d’un Français sur deux (55%), il y a des différences ou les choses ne se sont pas passées du tout comme la télévision les raconte. Quant à Internet, 26% seulement des Français font confiance à l’information qu’il relaye, contre une majorité (52%) qui ne la juge pas crédible, retrouvant son niveau de 2006.

Les sondés indiquent avoir confiance à 89% dans les scientifiques, à 84% dans les policiers et les gendarmes à 77% dans les enseignants et à 68% dans les entrepreneurs.En revanche, à l’autre bout de l’échelle, les députés et les sénateurs n’ont la confiance que de 17% des sondés… et les journalistes font un tout petit mieux avec 30% de confiance.

9% des personnes interrogées font confiance aux patrons de grandes entreprises lorsqu’ils prennent la parole. Et le taux chute à 5% concernant les leaders des syndicats patronaux
Les chiffres sont d’autant plus durs que, dans le camp adverse, les associations de consommateurs engrangent 77% d’écoute favorable.

LA DÉSILLUSION TOUCHE D’ABORD LA FRANCE… ET LA JEUNESSE

En décembre 2014, seuls 64% des Américains pensaient qu’il est possible “de commencer pauvre, de travailler dur et de devenir riche”, selon ce sondage. En 2009, en pleine crise financière des subprimes, ils étaient encore 72% à croire à cette possibilité. L’American dream n’était plus crédible : et Trump qui l’incarnait fut élu.

Selon le baromètre mondial de BVA, 34% des Français jugent que 2015 sera pire que 2014, c’est aussi le cas de 42% des Italiens, 40% des Belges, 29% des Portugais. Le Royaume-Uni (18%), l’Espagne (19%) et l’Allemagne (19%) semblent en revanche moins touchés par ce pessimisme. 57 % des interviewés en France jugent que 2015 sera une année de difficultés économiques, un score qui fait de la France le plus pessimiste des 65 pays interviewés sur cet indicateur.

La nouvelle génération française lève le voile sur le mystère Père Noël plus tôt que la précédente (6 ans et 8 mois au lieu de 7 ans et demi), mais la France n’est pas le seul pays concerné par ce phénomène. Les Américains cesseraient de croire au Père Noël et à son traineau à l’âge de 7 ans et 2 mois. Les Australiens l’apprendraient à 7 ans et demi. Mais, c’est en Allemagne que la supercherie est dévoilée le plus tôt, vers 6 ans et demi en moyenne.

70% des jeunes français estiment que leur pays ne leur donne pas les moyens de montrer de quoi ils sont capables. 73 % estiment que « la crise économique aura un impact sur leur avenir » et 53 % que leur avenir « sera plutôt pire comparé à la vie qu’auront menée leurs parents » (Enquête Cevipof décembre 2016). Selon d’autres études, 75% n’ont pas confiance en l’avenir de la France.

À NOUVEAU MONDE, NOUVEAUX RÊVES

Sortir de l’illusion ne revient pas nécessairement à encaisser un dur retour à la réalité prosaïque. L’être humain a besoin de rêver : plutôt que de s’obstiner à rétablir une crédibilité perdue, ce qui serait s’entêter dans une autre illusion — elle ne reviendra qu’avec des résultats concrets — nous devons imaginer des nouvelles aventures contemporaines.

  • La réalité virtuelle : les nouvelles technologies au service des désirs d’ailleurs

Selon Kantar TNS (mai 2017), 95% des Français connaissent la réalité virtuelle. 62% des Français aimeraient essayer un casque de réalité virtuelle, 39% d’entre eux se déclarent même prêts à en acheter un. 58% des Français estiment que le principal avantage de la réalité virtuelle est de proposer des jeux-vidéos plus réalistes. 50% d’entre eux sont séduits par sa capacité à les plonger dans des expériences de films et de TV plus immersives.

  • L’économie peut apprendre à être participative

Faire des consommateurs un vivier de créateurs pour améliorer les produits, enrichir la gamme, ou proposer des services nouveaux se développe de plus en plus. Ikea fait partie des marques qui ont lancé ce mouvement. Selon une étude Opinionway, la cocréationn’est pas la demande spontanée prioritaire des clients (santé, sécurité, conditions de fabrication sont plus importants). La plateforme Lego Ideas permet au 25 idées des clients qui reçoivent plus de 10000 votes d’être lancées à la conception. Cvous.com du groupe casino recueille des idées de nouveaux magasins. La création n’appartient à personne.

  • Une action publique imprégnée d’utopie

Places dessinées par des enfants, applications qui permettent d’augmenter la réalité de la ville (par exemple en découvrant à Paris les films tournés dans les rues que l’on parcoure), utilisation temporaire des lieux par des artistes qui invitent les habitants à investir l’espace, friches devenues jardins partagés… L’action publique, surtout locale, doit être dé-technocratisée et redonner aux citoyens le pouvoir d’user des imaginaires pour s’approprier l’esprit des lieux. Un lien social qui se vit concrètement dans la transformation urbaine.
A ce titre, les événements mobilisateurs, comme les J.O. ou l’exposition universelle, sont aussi des occasions de recréer des rêves communs sur des projets concrets, assembleurs d’énergie.

Ainsi les chocs technologique, économique, démocratique, peuvent-ils se retourner positivement, à condition de pratiquer du judo : plutôt que de subir des événements qui nous dépassent, il faut en faire levier pour se projeter avec dynamisme et confiance dans l’avenir. Comme disait la chanson, il faut retrouver ce qui nous manque le plus : « l’envie d’avoir envie ».

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Le Pouvoir des Idées

Cabinet de conseil en stratégie de communication et stratégie d'opinion pour dirigeants publics et privés Rédacteur de l'Alerte Opinion / Note de l'Opinion