À la croisée des cultures, installation à distance d’un autoclave à Toamasina
Le CHU d’Analakininina, situé dans la ville de Toamasina — région Atsinanana, a été doté d’un autoclave pour traiter les déchets médicaux en toute sécurité et sans risques de contamination. L’installation a été guidée à distance avec la contribution des nouvelles technologies, du savoir-faire de techniciens aguerris, d’une bonne dose de connexion internet et de traduction ; une première à Madagascar dans le cadre du projet de réduction des émissions non-intentionnelles des polluants organiques persistants ou projet UPOPS, mis en œuvre par le Programme des Nations Unies pour le Développement.
« Chacun de nous avait différentes façons de comprendre les instructions. L’équipe malgache, malgré son expérience dans l’installation et la maintenance d’autoclave, ne pouvait devancer les instructions, ni prendre des initiatives. Nous nous sommes alors mis d’accord pour ne suivre que les instructions des techniciens Sud-Africains qui dirigeaient l’installation à distance» partage Michael Ratsimbazafy, un technicien du CHU JRAmpefiloha diligenté à Toamasina pour l’installation de l’autoclave.
Une installation guidée par visioconférence qui a pris 4 jours, sous la supervision de l’équipe du concepteur de l’autoclave basée à Johannesburg, et réalisée sur place par des techniciens d’Antananarivo et de Toamasina avec l’appui d’une interprète. Les défis ont porté à la fois sur la compréhension des instructions à distance, et sur le respect des gestes barrières pour les techniciens qui devaient toutefois travailler en équipe.
« Il y avait deux cultures différentes qui se croisaient. Les concepteurs donnaient les instructions depuis Afrique du Sud, mais les techniciens malgaches, déjà familiers à l’installation d’autoclave, estimaient qu’ils pouvaient monter les pièces d’une autre manière et plus rapidement.» explique Ravaka Tchiourson, interprète durant l’installation.
En effet, installer toutes les pièces d’un colosse de 2 mètres de hauteur par visioconférence avec des échanges allant de l’anglais, au français en passant par le malagasy, ne s’est pas fait sans quiproquos. L’objectif étant de réussir l’installation, toute l’équipe a travaillé d’arrache-pied avec les moyens du bord pour se comprendre et avancer. « L’instructeur a dit, une fois, « home button ». J’entendais « ON button » comme dans ON et OFF. Les minutes passèrent sans que nous avancions. Alors, j’ai alors montré l’image de tous les boutons de démarrage de la machine. Après il m’a dit « this is a house, home sweet home”. Je comprenais enfin ce qu’il me disait ” poursuit Ravaka.
Au quatrième jour, l’autoclave a pris sa forme finale. Il ne manquait plus que les tests de simulation pour l’entrée et l’évacuation de l’eau, et enfin l’adoucisseur afin d’éviter toute risque de fuite.
« Nous avons surtout fait un test de fonctionnement. Nous n’avons pas encore mis les déchets» informe Michael Ratsimbazafy. Ce genre de simulation permet de voir les failles durant l’installation et de rectifier les manœuvres. Après cette étape passe le test de fonctionnement de l’entrée de la vapeur dans la chambre de stérilisation pour ainsi évaluer la performance de stérilisation par le test Bowie Dick. Enfin, il y a le test biologique qui permet d’assurer la destruction de tout organisme vivant durant le cycle de traitement. Après quoi, l’autoclave imprime sur papier le résultat des tests avec la durée du cycle et le volume de déchets traités.
Mise à l’échelle régionale du traitement sécurisé des déchets
Alors que la ville de Toamasina était devenue l’épicentre de la pandémie de Covid-19 au mois de juin dernier, le CHU d’Analakininina devient la première structure médicale décentralisée à bénéficier d’un autoclave. C’est une grande avancée pour le pays qui devra au fur et à mesure s’assurer d’une mise à l’échelle nationale de systèmes et d’équipements permettant une bonne gestion des déchets médicaux, et rendre les hôpitaux plus sûrs.
« Je me sens fier d’avoir participé à la réalisation de ce projet ! J’ai vu de quoi nous sommes capables — œuvrer pour le bien de la population. Maintenant, je suis soulagé que Toamasina puisse enfin traiter les déchets médicaux en toute sécurité, en respectant l’environnement et sans risques de contamination » confie Michael qui retournera à Antananarivo après l’installation. Après les travaux d’installation, les techniciens du CHU Analakininina ont également bénéficié d’une formation par visioconférence pour la maintenance et la bonne gestion de ce nouvel équipement de traitement sécurisé de déchets médicaux.
Texte : Myriam Harilala Vololonarivo
Photos : ©PNUD Madagascar