My readings #5 : Biographie de Marcelo Bielsa

Le livre : “Marcelo Bielsa El Loco unchained”— Thomas Goubin

4 min readMar 12, 2016

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Cette biographie est certainement la plus inspirante que j’ai lu pour l’instant. Non pas parce que Marcelo Bielsa est un entraineur de football, mais parce que c’est un homme exceptionnel qui symbolise parfaitement la figure du génie incompris.

Marcelo Bielsa est un entraineur argentin née en 1955, il a notamment entrainé l’Olympique de Marseille la saison dernière. Quand on demande aux personnes qui l’ont côtoyés de le définir tous les superlatifs sont utilisés. Pep Guardiola le considère comme étant le “meilleur entraineur du monde”. Tous les joueurs qu’il a entrainé le considèrent quasi-unanimement comme étant celui qui les a fait le plus progresser, qui a su tirer le meilleur de chacun d’eux, en bref, qu’il est le meilleur entraineur qu’ils aient jamais eu. Et le moins que l’on puisse dire c’est que Bielsa a eu énormément de très grands joueurs sous ses ordres.

Marcelo Bielsa est un homme idéaliste, jusqu’au-boutiste et surtout, perfectionniste. Sa méthode est chirurgicale, tout est analysé, rien n’est laissé de côté pour que la part de hasard et de chance soit réduite au maximum. Bielsa cherche à tout comprendre, tout expliquer, tout rationaliser. Sa culture de l’excellence est sans faille et la discipline qu’il s’impose à lui même est incroyable. Avant chaque match il visionne le maximum de matchs de l’équipe adverse, décortique toutes ses failles et ses faiblesses. Javier Zanetti disait à ce sujet : “Il te prépare tellement bien que lors des matchs tu sais exactement quoi faire”. Il a observé et analysé plus de 50 000 match de football. Bielsa n’a jamais envie de s’arrêter d’apprendre, il veut comprendre tout ce qu’il ignore. Après après démissionné du poste de sélectionneur de l’Argentine, il s’est enfermé 3 mois dans un couvent et a lu tous les livres qu’il souhaitait lire sur le football. Sans téléphone ni télé, bien sûr.

Marcelo est un esprit scientifique à la sensibilité artistique. Ses équipes sont belles à regarder jouer et misent tous sur l’attaque. Attaquer, récupérer le ballon le plus vite possible quand on l’a perdu pour repartir à l’attaque. Sans concession. Le football offensif est infini, les possibilités créatives sont immenses, tout peut être réinventé en permanence. La créativité basée sur une étude méthodique et approfondie en amont : le cocktail parfait de la réussite.

L’éthique de Marcelo Bielsa est infaillible : la loyauté et la solidarité sont les valeurs qui l’animent au quotidien. “Bielsa est à l’éthique ce que Maradona est au football”. Pour lui, seuls les moyens d’obtenir une victoire comptent. La victoire en elle-même n’a aucune importance, le chemin est plus beau que le succès. Pire encore, la victoire est dangereuse parce qu’elle te trompe.

“Les moments de ma vie où j’ai le plus progressé sont liés aux échecs, alors que les moments où j’ai régressé sont liés au succès. Quand tu gagnes, le message d’admiration est trop confus. Le succès déforme, nous fait nous relâcher, trompe, nous conduit à nous en-amourer excessivement de nous-mêmes ; l’échec est le contraire, il est formateur, nous rend solides, nous rapproche de nos convictions, nous rend cohérents.”

En plus de cela, l’argentin s’impute personnellement chaque défaite, il souffre en silence après chacune d’entre elle.

“Vous savez, je meurs après chaque défaite. La semaine suivante est un enfer, je ne peux pas manger avec mes amis et jouer avec ma fille. C’est comme si je ne méritais pas ces bonheurs quotidiens.”

Une manière de penser qui pousse l’Argentin à se dépasser sans cesse, à s’améliorer chaque jour pour devenir meilleur. Une remise en question permanente qui a pour but de réussir le lendemain ce qu’il a raté la veille.

Ses méthodes d’entrainement requièrent le dépassement de soi à chaque instant, sans moment de répit. C’est une exigence au quotidien difficilement supportable sur le long terme. C’est pour cela que Bielsa reste rarement plus de 2 ans dans un club. Le perfectionnisme est tellement poussé à son extrême qu’il en devient usant. Bielsa est un bâtisseur de long terme, qui aime former ses joueurs, leur donner les clefs d’une grande carrière en poussant l’exigence au maximum le plus tôt possible. De nombreux joueurs professionnels Sud-Américians lui dédient leur carrière.

On se rend ainsi bien compte que Marcelo, en tant qu’entraineur, n’est pas adapté au football moderne. Incapable de s’adapter et de faire des compromis à un monde court-termiste dans lequel les intérêts financiers priment et où la sur-médiatisation et la peoplisation des joueurs sont poussés à l’extrême. Tout est fait dans l’urgence à base de petits arrangements entre amis.

On lui reproche bien souvent son maigre palmarès en tant qu’entraineur, c’est juste. Mais combien d’entraineurs peuvent se targuer d’avoir laisser une trace indélébile dans tous les clubs dans lesquels ils sont passés ? Combien possèdent un stade à leur nom ? Combien sont élevés au rang de demi-Dieu dans leur pays natal ?

Cette citation d’Omar Da Fonsceca résume le personnage à la perfection :

“Ses équipes étaient à son image : géniales, merveilleuses, authentiques, mais incapable de changer. La rigidité et l’exigence de Marcelo finissent par le trahir et poussent ses équipes au suicide.”

Il y aurait tant à dire sur cet homme incroyable, génie à l’état pur. Un génie qui, comme beaucoup d’autres, est incompris, souvent moqué comme cela a été le cas lors de son passage en France car inadapté aux normes modernes.

A lire sans hésiter la moindre seconde.

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