Le quartier de la Petite France à Strasbourg, Place Benjamin Zix

Pourquoi La Petite France de Strasbourg s’appelle-t-elle ainsi ?

Ekinoxe
6 min readJun 25, 2018

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Un quartier bucolique :

Quand on parle de Strasbourg, on pense forcément à la majestueuse cathédrale Notre-Dame au nord-ouest du Palais Rohan, à l’immense bâtiment plus récent du Parlement Européen, ou encore à la fameuse place Kleber, accueillant chaque année le plus grand sapin de noël d’Europe.

Mais l’endroit incontournable à ne surtout pas manquer si on visite la capitale alsacienne est évidemment le quartier historique de la Petite France.

Ce site remarquable, pittoresque et très prisé par les touristes pour sa valeur historique et son charme bucolique, est un ancien quartier de pêcheurs, de meuniers et de tanneurs du XVI et XVIIème siècle. Les peaux de ces derniers séchaient autrefois dans les greniers des toits pentus des magnifiques maisons à colombage de l’époque, dont la maison des Tanneurs et la maison Haderer, les plus connues, qui abritent aujourd’hui des restaurants.

Carte de la vieille ville de Strasbourg

Avec ses rues pavées incontournables, la Petite France est traversée par plusieurs canaux : le Zornmühle, le Dinsenmühle, le Spitzmühle et l’Ill, dans lequel baignent les célèbres Ponts Couverts de Strasbourg datant du XIIIème siècle.

Depuis 1988, le site est classée au Patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO.

Un nom donné par les habitants eux-mêmes :

Mais pourquoi ce quartier ne comportant que des maisons à colombage de tradition germanique, qui ne ressemble en rien à celles de la région parisienne ou du Pays de la Loire, s’appelle-t-il « La Petite France » ?

Et bien la raison, qui est d’origine historique, n’est en fait pas aussi attrayante que le quartier…

Faisons un bon de plus de 500 ans dans l’histoire et remontons en 1492. Au retour des marins espagnols et italiens des toutes premières expéditions en Amérique, une terrible épidémie se déclara en Europe. On l’appela la grande vérole, mais il s’agissait en fait de la Syphilis. Mais alors que Français et Allemands combattaient dans la région de Naples lors des campagnes d’Italie, plusieurs mercenaires allemands contractèrent la maladie. Ils se retrouvèrent plus tard à Strasbourg et dans d’autres villes du nord des Alpes. Ils furent soignés tant bien que mal dans des hospices à l’écart de la population. La maladie était inconnue auparavant, et les peuples l’attribuaient à leurs ennemis. Pour les Français, c’était le mal de Naples (d’où l’expression voir Naples et mourir), les Anglais parlaient de French pox (petite vérole). Pour les Polonais, la maladie était allemande, mais elle était polonaise selon les Russes, de quoi s’y perdre facilement…

À Strasbourg, le Grand Magistrat décida d’isoler les malades dans un quartier qui, à l’époque, n’était pas très apprécié à cause de ses odeurs : le quartier des tanneurs. Ceux qui étaient atteints du mal français, et qu’on appelait les Franzose, étaient logés dans un bâtiment qui leur était consacré : l’Hospice des Vérolés. Les Strasbourgeois le surnommèrent ironiquement : « Petite-France ». Une jolie référence au mal français ! Puis, au fil du temps, le surnom s’est appliqué à l’ensemble du quartier. Petit rappel : à ce moment, Strasbourg n’était pas française mais appartenait au Saint Empire Romain Germanique ; elle le deviendra bien plus tard, en 1681.

La Maison des Tanneurs à gauche

Un quartier très facile à visiter :

La Petite France est bordée de canaux qui faisaient autrefois l’affaire des tanneurs. Le quartier n’est pas bien grand et sa visite complète est donc chose facile. Elle se fait à pied le long de deux axes majeurs : la rue des Moulins qui rejoint la rue du bain-aux-plantes à la place Benjamin Zix, et alternativement la rue des Dentelles qui rejoint également cette place.

Une partie de la Petite France vue du ciel

Totalement détruit durant la Seconde Guerre mondiale, Strasbourg a engagé après-guerre une politique de reconstruction de ce quartier pittoresque. Depuis, ce lieu est devenu le plus touristique de la ville. Plusieurs vestiges de cette époque sont maintenant des bâtiments incontournables à ne pas rater, et font parties intégrantes de son histoire.

Quelques endroits les plus connus :

Les Ponts Couverts

Le passage sur les ponts-Couverts est souvent nécessaire. Appelés ainsi car ils comportaient autrefois des toitures, ces trois ponts se succèdent au-dessus du fleuve, avec une tour de garde reliant chacun des ponts pour ne former qu’un seul et même grand pont.

Les Ponts Couverts

La Maison des Tanneurs :

Bordant la place Benjamin Zix et bâtie au bord de l’eau, la Maison des Tanneurs est plus que romantique. L’édifice était le siège de la guilde des Tanneurs de la ville. Aujourd’hui, la maison abrite un restaurant. Comme beaucoup d’autres, le bâtiment est embelli par de magnifiques géraniums typiques alsaciens à la belle saison.

La Maison des Tanneurs

L’ Eglise protestante Saint-Thomas :

Cette église luthérienne est un temple protestant situé à l’extrémité Est du quartier. Sa construction remonte à la fin du 12ème siècle. D’abord église catholique, elle est consacrée au culte protestant luthérien depuis 1529. Saint-Thomas est facilement reconnaissable à ses deux clochers romans massifs. Celui au-dessus de l’entrée principale est carré. Le second, s’élevant à la croisée du transept, est hexagonale.

L’église protestante Saint-Thomas

A l’intérieur, Saint-Thomas possède cinq nefs, de largeur et de hauteur égales. On appelle cette caractéristique « église-halle ». Cette particularité était très fréquente au 16ème siècle en Rhénanie, en Lorraine et en Hollande.

Les autres églises :

La Petite France compte également deux églises : l’ancienne église Saint-Martin, à côté du pont du même nom, qui accueille aujourd’hui le théâtre TJP et l’église méthodiste de Sion sur la place Benjamin-Zix juste en face de la maison des Tanneurs.

L’église de Sion bordant la Place Benjamin Zix

Mais aussi :

Les anciennes Glacières de Strasbourg ont cessé leurs activités en 1990. Elles abritent désormais un hôtel. Les bâtiments ont abrité de 1897 à 1990 une usine de froid artificiel avec des machines de la société Quiri, devenue Axima Réfrigération.

Les anciennes Glacières

En face des Ponts Couverts se trouve le barrage Vauban, qui fut utilisé lors du Siège de Strasbourg en 1870, provoquant ainsi des inondations dans les quartiers en amont.

le barrage Vauban

Sur la rive située en face, on observe cette fois-ci l’architecture moderne et originale du Musée d’Art Moderne et Contemporain de Strasbourg.

Le Musée d’Art Moderne et Contemporain de Strasbourg

Le Marché de Noël :

Strasbourg est bien sûr connu pour son superbe marché de Noël multi centenaire, éparpillé un peu partout dans la vieille ville. Mais en plus de la place de la cathédrale ou de la grande place Kléber, il existe un marché de Noël sur la place Benjamin Zix de la Petite France à ne pas manquer. L’ambiance est féérique et garde encore son charme des petits villages alsaciens.

Le marché de Noël sur la Place Benjamin Zix
La rue du Bain-Aux-Plantes

Bref, même si le nom fait référence à un passage du passé plutôt négatif, le quartier de la Petite France est un lieu hautement historique, pittoresque et bucolique à ne surtout pas rater.

La Petite Venise de Strasbourg

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