Comment je développe une startup dans un grand groupe

Aurélien De Nunzio
6 min readDec 13, 2016

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Publié dans “Crème de la crème” le 31 août 2016

Il y a quelques années, je n’aurais pas imaginé que je serai en train d’écrire un article pour témoigner de mon humble expérience sur l’entrepreneuriat pendant mes études, là, allongé sur un transat dans le sud de la France. Je n’aurai pas imaginé non plus que mon “travail” pourrait me suivre jusqu’au bord de la piscine un 22 août, car oui c’est ça l’entrepreneuriat : on ne décroche jamais vraiment à 100 %.

J’ai grandi dans la métropole Lilloise où après le collège, j’ai entamé une formation professionnelle. J’ai commencé mon parcours en m’intéressant à un domaine : l’habitat. C’est en 2008 que j’obtiens un BEP Finition du bâtiment puis en 2012 un BAC professionnel en Aménagement et finition du bâtiment en alternance, tout en me formant au métier de peintre décorateur puis de responsable de projet en aménagement et finition.

Je décide alors d’entrer dans le monde du travail en tant que peintre décorateur pour les projets de particuliers hauts de gamme. Un an après, avec la certitude que mon métier me passionne, je sais que je ne l’exercerai pas pendant toute une carrière, et depuis longtemps me trotte dans la tête deux choses : faire des études supérieures et lancer une boîte.

J’entame donc en 2013 un BTS en Études et Économie de la construction et c’est pendant ces deux années que naît mon projet « Permettez-moi de construire ». Je fais le constat qu’en France, les premiers obstacles à la réalisation d’un projet d’habitat sont : les démarches administratives et réglementaires trop contraignantes.

C’est à partir du milieu de ma première année que, sans le savoir, et n’y connaissant absolument rien au monde des start-ups et de leur vocabulaire étrange, du commerce et du marketing, je met met en mode «lean start-up» et je commence à tester mon idée de business, avec l’idée d’en faire un petit bureau d’études indépendant. Je crée mon statut d’auto-entrepreneur, un petit site internet, je grille une partie de mon prêt étudiant dans de l’adwords, des flyers et des événements (pas la bonne méthode) et pendant un an et demi j’accompagne des particuliers ayant des projets d’habitat à travers la France, pour les aider à obtenir des autorisations de travaux.

Je passe alors mes soirs et mes week-ends à réaliser des dossiers de demande d’autorisations de travaux, à voyager en France pour aller sur les lieux des projets de mes clients (jusqu’à aller en Haute-Savoie à 2500 m2 d’altitude pour un chalet de montagne) à découvrir des domaines qui me sont totalement inconnus, comme le marketing ou la communication, à médiatiser mon concept et même jusqu’à m’associer trop rapidement avec deux amis (ce qui s’est conclu par un échec et une rupture amicale définitive, ça arrive). Après un an et demi et une quinzaine de prestations vendues à 1000 €, j’obtiens mon BTS et me pose alors une réflexion : qu’est-ce que je fais ? Sans aucun doute, ces un an et demi de débuts dans l’entrepreneuriat m’ont complétement fait changer ma vision et mes ambitions de carrière. Une chose est sûre : j’aime développer une boîte et je veux apprendre.

Je décide alors de candidater à une école de commerce : l’Edhec Lille, plus particulièrement en BBA (Bachelor in Business Administration) mais sans trop y croire, car visiblement on a pas souvent vu de mecs ayant un BEP et un BAC professionnel. Et à ma grande surprise : mon parcours atypique séduit et je suis admis en troisième année de bachelor, que je décide de faire en alternance.

Je me met alors en tête de trouver une entreprise d’alternance et une seule me vient en tête, car elle représente une suite logique et fait le lien avec mon parcours plutôt tourné vers l’habitat et mon envie d’entreprendre : LLeroy Merlin France. C’est à ce moment là que tout bascule et sans le savoir non plus, je fais du Growth-Hacking et envoi un message de 150 caractères sur Linkedin à la première personne qui travaille pour le groupe ADEO (Maison mère de Leroy Merlin) que je trouve. Cette personne me répond et m’invite à venir le rencontrer le lundi suivant au siège du groupe. Je me rend compte qu’il s’agit en fait du CFO du groupe.

C’est la rencontre avec le CFO du groupe qui m’a définitivement conforté dans l’idée d’être entrepreneur. Après un échange des plus enrichissants, le CFO intercède à l’embryon de start-up que j’ai crée avec Permettez-moi de construire, et trouve que celui-ci présente de réelles synergies business avec le groupe.

Il me propose de le développer pendant mon alternance, au sein de la nouvelle cellule Entrepreneuriat et Innovation de Leroy Merlin. Cette rencontre fait partie des plus enrichissantes de ma vie et marque le point de départ de mon aventure.

Je rejoins en septembre 2015 le service e-commerce de Leroy Merlin et je suis rattaché à la cellule Entrepreneuriat et Innovation, qui se créera en février 2016. Le deal est le suivant : 50 % du temps pour développer la start-up et 50 % pour monter en compétences en travaillant sur des projets de l’enseigne, comme la web-analyse.

Au bout de quelques mois, les premiers résultats arrivent : les particuliers font appel à notre service. Entre-temps, je m’associe avec mon petit cousin : Maxime Coucke, un ingénieur en énergétique du bâtiment, fraichement invité à revenir en France pour devenir business developpeur de la boîte, après un VIE d’un an aux Philippines.

À partir de mai 2016, nous sommes accompagnés par NUMA Paris, dans un programme d’open-innovation établi entre Leroy Merlin et l’accélérateur Parisien. Cet accompagnement nous a permis de remettre au cause plusieurs fois la manière dont nous faisions les choses et d’arriver à quelque chose que les entrepreneurs finissent par faire : rester FOCUS sur son business sans s’éparpiller.

Programme d’Open-Innovation au NUMA Paris

Aujourd’hui nous continuons nos expérimentations et travaillons sur notre première levée de fonds prévue pour le premier trimestre 2017. Notre but à court et moyen terme et de développer notre service dans l’ensemble des magasins Leroy Merlin français et à plus long terme de devenir un réflexe dans l’esprit des particuliers pour la facilitation des démarches administratives de l’habitat.

Deux ans et demi après le début de ce projet, les choses ont bien changées : je suis devenu un accro du monde de l’entrepreneuriat, des start-ups et autres projets innovants, je suis monté en compétences sur des domaines comme le marketing, le SEO ou la web-analyse, j’organise désormais tous les mois les Apéros Entrepreneurs de Lille, je témoigne de cette humble expérience au près des plus jeunes, et notamment auprès des élèves en voie professionnelle et technique (ben oui, BEP ne veut pas dire idiot contrairement à ce que beaucoup de personnes pensent. Il n’y a pas que le parcours dit « classique »).

Alors quoi qu’il advienne pour le devenir de notre start-up : nous aurons appris, peut être gagné, mais nous n’aurons pas perdu. Cette expérience de développement de start-up au cœur d’un groupe immense comme Leroy Merlin est un apprentissage quotidien et un puissant accélérateur et l’aventure ne fait que commencer.

Le conseil que je donnerais aux étudiants qui seraient tentés de se lancer dans cette aventure de dingues : n’hésitez pas une seule seconde. La seule chose que vous pourriez risquer serait de vous éclater, de grandir, d’apprendre, de vous révéler, de chuter, de vous relever, et surtout d’en devenir accros. Et créer sa boîte en étant encore étudiant est le meilleur des timing, vous n’avez rien à perdre !

Aurélien De Nunzio — CEO & Maxime Coucke — Business Developper

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