Pourquoi soutenir une association de patients ?

Point de vue d’une patiente

Boligraphe
4 min readApr 27, 2020

J’ai reçu cette semaine un appel au don de l’association de patients à laquelle j’adhère, pour faire face à la chute vertigineuse de dons ces dernières semaines. J’ai eu envie de partager cet appel sur les réseaux sociaux, mais il m’est apparu que la nécessité de ces associations n’était pas évidente pour tout le monde : elles sont spécifiques à une maladie et peuvent paraître superflues (on a déjà la Sécurité Sociale après tout, non ?). Quel est donc le rôle d’une association de patients ? Pourquoi en a-t-on tant besoin ?

En quelques mots (et en simplifiant un peu), si l’on considère le Covid, le rôle de l’association de patients est joué par l’Etat et les médias : le président lui-même va rendre visite aux chercheurs et aux médecins, le gouvernement nous dit comment nous protéger, et les médias relaient des informations sur les dernières nouvelles en terme de recherche. Quand la maladie concerne potentiellement tout le monde, tout le monde en parle, tout le monde travaille à un traitement. Au contraire, quand une maladie touche seulement 200k de personnes, on ne peut pas compter sur cette mise en lumière et ce financement.

Les maladies moins répandues sont si méconnues qu’il est courant que le malade apprenne l’existence de la maladie le jour de son diagnostic. Se faire diagnostiquer d’une maladie, c’est ouvrir les portes d’un monde inconnu, dans lequel on ne croise pas grand monde. Quels sont les traitements disponibles ? Quels sont leurs effets secondaires ? Quels sont les risques à long termes et les perspectives d’évolution ? Quelles sont les restrictions ? Ou en est la recherche ? Autant de questions qui peineraient à trouver réponse si les associations de patients n’existaient pas.

Atteinte d’une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (MICI, prononcer miki) depuis de nombreuses années, et ne connaissant personne dans mon entourage atteint de cette maladie, l’association de patients atteints de MICI (l’Afa-Crohn-RCH) est mon lien vers ce monde. Elle met à disposition les dernières nouvelles de la recherche, les recommandations, des témoignages de malades. Elle essaye d’apporter de la visibilité à la maladie pour permettre aux malades de la vivre mieux. Elle participe au financement de la recherche, et plein d’autres choses. J’ai sélectionné ci-dessous trois actions concrètes menées par l’Afa-Crohn-RCH et son homologue anglaise Crohns-and-Colitis-UK. Les exemples ne sont cependant pas spécifiques aux MICIs, ils pourraient concerner d’autres maladies.

Formation d’infirmières expertes

Au Royaume-Uni, l’association Crohns-and-Colitis-UK finance tous les ans des formations d’infirmièr.es expertes dans les MICIs, qui travaillent ensuite dans des hôpitaux partout en Angleterre. Un ajustement de médicaments ? Un problème de stock ? La maladie se réveille ? Une réaction à un traitement ? Les infirmier.es répondent à ces questions, peuvent modifier les prescriptions, et faire venir les patients à l’hôpital si besoin.

Les infirmièr.es expertes jouent un rôle primordial dans les soins des patients atteints de maladies chroniques, encore plus pendant cette période ou le système est sous tension. Ansi, en formant plus, on améliore le suivit des patients.

Relais des voix d’experts

L’association Afa-Crohn-RCH participe aux conférences de gastro-entérologie et transmets aux patients les dernières nouvelles de la recherche via l’Afa web, leur chaîne youtube. Par exemple, cette excellente vidéo du Professeur Beaugerie présente l’état des traitements d’aujourd’hui et de demain. En donnant à la communauté un accès direct aux explications des experts, l’association évite aux patients de se perdre dans les tréfonds de l’internet, qui regorgent de sites anxiogènes aux informations souvent erronées.

Combat pour le remboursement d’un traitement

En janvier 2017, la France a décidé de dérembourser l’Entyvio, un nouveau traitement qui était donné depuis 2014 (voir Crise Entyvio). L’injection mensuelle de traitement s’élevant à plusieurs milliers d’euros, l’arrêt du remboursement équivalait à l’arrêt du traitement pour les malades. L’association s’est mobilisée avec les syndicats de médecins et a obtenu que le médicament soit à nouveau remboursé. Il est maintenant remboursé pour les deux formes de MICI.

Du financement de la recherche à sa vulgarisation, des renseignements sur les traitements jusqu’aux combat pour les garder, les associations de patients sont essentielles. Elles aident les malades tout juste diagnostiqués à appréhender le nouveau monde qui s’offre à eux, et les accompagnent tout au long de leur vie.

En ce moment, les associations de patients sont plus sollicitées que jamais : les examens de contrôle marchent au ralenti et créent du stress, les nombreux patients sous immunosuppresseurs ont besoin d’information spécifique à leur cas, etc. Elles redoublent donc leurs efforts et produisent du contenu pour soutenir les patients : diagrammes explicatifs, lettres d’information, visio-conférences, interviews d’experts… Mais jusqu’à quand ? Période de crise oblige, les dons ont chuté, et les associations ont besoin de nous tous. Vous voulez les soutenir ? Pour les MICIs, si vous le pouvez, c’est par ici pour faire un don. Vous pouvez également soutenir une association en la suivant sur les réseaux sociaux et en relayant son contenu. Pour les MICIs, c’est par ici : Twitter, Instagram.

Merci !

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Boligraphe

I am a woman, working in tech, politics geek. I’m probably going to write mostly about gender equality. J’écris aussi sur les maladies chroniques, en Français !