Petit panorama de la philosophie de la conscience

Marie la rêveuse éveillée
6 min readMay 19, 2023

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Tout est dans le titre, ma foi… Une simple vue d’ensemble rapide des différentes écoles au sein de ce champs aussi fascinent que chatoyant, la philosophie de la conscience.

La position la plus connue, comme la plus controversée (rançon de la gloire) est sans doute le dualisme, qu’on réduit le plus souvent à sa variante cartésienne.

A savoir, l’âme(ou conscience si le terme vous paraît avoir trop de connotation religieuse) et la matière (y compris le corps donc) appartiennent à deux plans de réalité différente et son irréductibles l’un à l’autre…Le plus gros problème de la position en question étant l’interaction entre les deux.

D’une part, cela revient à accréditer l’âme d’une certaine dose de télékinésie extrêmement spécialisée, cette dernière étant uniquement capable de mouvoir un seul corps, celui auquel elle est rattachée sans qu’on sache trop comment. (Bon, pour Descartes, la réponse était relativement évidente, Dieu était l’intermédiaire qui soudait une âme à chaque corps)

Evidemment le problème coupe dans l’autre sens, puisqu’on peut constater une multitudes de manières dont le corps impacte directement l’âme supposé l’habiter (qu’on pense aux antidépresseurs et autres drogues, aux effets d’une lésion du cerveau, etc…)

Il existe cependant d’autres variantes du dualisme. Citons par exemple le dualisme hylémorphique conçu par Aristote et perfectionné par Thomas d’Aquin sur lequel je m’étais jadis penché.

Pour un spin plus récent, il existe également le dualisme des propriétés…qui est au fond une variante d’un concurrent majeur du dualisme, le monisme.

Cette conception, (dérivant du grec Monos, unité) consiste à affirmer qu’il existerait une seule réalité, de nature neutre, dont matière et esprit formeraient deux dimensions distinctes.

Dans la philosophie classique, Spinoza fût le plus grand représentant de ce courant de pensée. L’âme n’est que le reflet du corps sur le plan intellectuel, le corps n’est que le reflet de l’âme sur le plan matériel.

Pour tout corps, il y a une idée (son âme), pour toute idée, il y a un corps (l’objet matériel dont elle est l’idée).

Le corps n’est affecté que par d’autre corps, l’Idée n’est affectée que par d’autres idées, l’un comme l’autre formant l’endroit comme l’envers d’un ruban de Moebius qui serait la réalité.

Vous allez me dire que si on suit cette logique, tout corps existant dispose d’une âme… et c’est parfaitement correct, le monisme aboutissant le plus souvent au panpsychisme.

Cela peut paraître contre-intuitif et même baroque au premier abord, le monde étant composé d’une multitudes d’âmes, chaque atome disposant de la sienne…

Il ne faut cependant pas faire de contre sens, quand les monistes attribuent une âme aux atomes, ils ne vont pas donner à cette âme une conscience aussi riche et élaborés que celle d’un être humain ou même d’un animal…

De fait, pour mieux comprendre le panpsychisme, un petit détour par Schopenhauer peut être éclairant. Le brave Arthur avait déjà conscience du fait qu’expliquer la conscience par des éléments non conscients était une absurdité qui obscurcissait tout…

Il en tirait naturellement la conclusion qu’il fallait renverser la perspective, et utiliser la conscience comme paradigme de compréhension de ce que nous jugions jusque là dépourvu de conscience, la matière…

Nous invitant à prendre au sens littéral l’idée d’attraction universelle mise en lumière par Newton, et de procéder de même avec les relation entre les pôles dans le magnétisme ou les affinités chimiques…

La résistance de la matière pourrait être interprété comme instinct de survie face aux forces essayant de désagréger l’intégrité des corps, etc… Bref, concevoir les forces naturelles sur le modèle des instincts dans le monde animal (humain compris)

J’ai évoqué Schopenhauer, mais à proprement parler, il n’était pas moniste mais idéaliste. De son point de vue, il n’existait qu’une seule réalité, celle de la conscience…

La fameuse conception du monde défendue par Berkeley et qui entraine également son lots d’idées fausses et de contre-sens, cette dernière étant réduite à l’idée fantasque que le monde n’existerait pas…

Il peut être tentant d’user et d’abuser de Matrix comme allégorie de la pensée de Berkeley, nous serions semblables à des individus branchés dès la naissance dans une simulation virtuelle que nous confondrions avec le réel…

Et c’est comprendre Berkeley à l’envers. Il n’affirme pas que le monde de nos sensations est une illusion, il défend l’idée qu’il n’existe RIEN en dehors de nos perceptions, le monde que nous percevons est le seul réel

Notre confusion, selon lui, viendrait du fait que nous imaginerions une matière, distinct de nos perceptions, et avec laquelle nos perceptions pourraient rentrer en décalage, d’où les interrogations futile sur le mode “Vivons nous dans un rêve/une simulation?”

Berkeley choisit la solution la plus radicale, nier l’existence de la matière elle même. Pour comprendre cela, prenons l’exemple d’une cerise…

Notre idée naïve serait que le brave fruit serait composé d’une multitudes d’atomes qu’on pourrait observer pour peu que nous soyons doté d’instruments de mesures assez puissants…

Face à une image de ces mêmes atomes, le brave irlandais haussera les épaules et vous retorquera qu’il y a une structure cohérente menant de la perception de la cerise à celle des atomes, certes…

Il y a également une structure cohérente entre l’image de votre chambre, l’image de votre vestibule si vous en sortez, l’image de la rue si vous sortez de votre maison, celle de l’extérieur puis de l’intérieur de l’église, si vous allez à la messe, etc…

Vous n’en déduirez pas pour autant que l’autel de l’église est un composant interne de votre chambre, malgré la connexion entre les deux. Il en va de même des atomes et de la cerise…

Ce sont, là encore, deux régions du même monde, connecté de manière cohérente, et c’est d’ailleurs le rôle de la science de cartographier ces connexions…

Exemple qui met en lumière la spécificité de la métaphysique. Idéaliste comme opposant à l’idéalisme se base sur la même image du monde dévoilé par la science, c’est sur l’interprétation de cet image qu’ils pinaillent, pas sur son contenu.

N’est-il cependant pas plus pratique de considérer que les atomes forment les composant de la cerise qu’une région supplémentaire de l’univers connecté à la première?

Certainement, répliquera l’irlandais d’un haussement d’épaules, de la même manière que nous continuons à parler de lever de soleil ou de coucher de soleil après que Copernic, Galilée et Kepler aient démoli le géocentrisme depuis longtemps…

L’idéalisme est-il cependant théiste par nature? Dans le cas de l’évêque Berkeley, la question ne se posait pas…le monde entier, nous compris, existant dans la conscience de Dieu, nécessaire à l’existence comme la cohérence de ces perceptions formant le tissu du réél

Il existe cependant des variantes athées, comme celle de Schopenhauer que j’ai évoqué tout à l’heure… Le bouddhisme peut également être interprété dans ce cadre…

Le matérialisme, quant à lui, pourtant terriblement surcoté, est la position la plus bancale sur le marché des idées, ce dernier essayent de reprendre la conception de la matière théorisé par Descartes, mais en l’amputant du dualisme…

Entreprise vouée par nature à l’échec, la conception cartésienne-galiléenne de la matière (puisqu’elle fût créé par Galilée, codifiée par Descartes, et reprises par Locke) aboutissant structurellement au dualisme.

Citons également le mystérianisme, la position selon laquelle nos capacités cognitives sont structurellement incapables de résoudre le mystère de la conscience…

On pourrait également citer l’emergentisme, essayant d’expliquer l’émergence de la conscience à partir de la matière…

L’idée étant que, de la même manière que les phénomènes sociaux (ayant une existence distinct des individus) émergent des interactions entre individu, il serait possible d’expliquer l’émergence de la conscience à partir de celles des atomes…

Position séduisante en théorie, peu satisfaisante en pratique, mais je ne me pencherais pas là dessus, cet article servant simplement de vue d’ensemble rapide…

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Written by Marie la rêveuse éveillée

Une personne qui s'égare souvent parce qu'elle passe son temps à se chercher...

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