VENDRE UN PROJET D’UX DANS UNE ORGANISATION PEU MATURE

Clelia FILIPPELLI
5 min readNov 25, 2019

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Retour sur notre atelier UXCAMP Montpellier 2019

Ce week-end avait lieu à Montpellier l’UXCAMP 2019. Cet événement dédié aux métiers et aux techniques de l’UX Design était organisé avec brio par FLUPA, l’association francophone des professionnels de l’expérience utilisateur.

Au programme : 150 professionnels ou passionnés venus des 4 coins du pays, 2 conférences inspirantes, 25 ateliers thématiques proposés par les participants. Pour connaître l’ensemble des thèmes abordés lors de cette édition : https://uxcamp.flupa.eu/programme

J’ai eu la chance de co-animer avec Jean-Marc Establet une discussion de 45mn qui se proposait de trouver quelques réponses concrètes aux différents freins rencontrés lors de la phase de vente ou de préconisation de la démarche UX au sein d’organisations peu matures.

Cette question concerne bon nombre d’UX/UI qui se sentent un peu démunis pour faire évoluer leur entreprise vers de nouvelles méthodologies projet, mais également nombre de professionnels indépendants qui doivent justifier de surcoûts parfois significatifs liés aux phases de recherche ou de tests utilisateurs. Sans parler des UX designers qui rencontrent des clients qui ne comprennent pas qu’ils ne se chargent pas de l’UI !

Alors que faire lorsque notre interlocuteur nous demande de retirer les tests utilisateurs du devis car « c’est trop cher » ou la phase d’interviews car son service marketing a déjà commandé une étude il y a 2 ans et qu’il connait bien ses clients ? Comment vendre des ateliers d’intelligence collective quand un dirigeant considère qu’on n’a jamais eu besoin de ça avant ou un Sprint à une équipe qui n’a pas le temps ?

Bon, en 45mn, on n’a pas trouvé toutes les réponses mais on a évoqué quelques pistes intéressantes. N’hésitez pas à partager vos expériences dans les commentaires, ça nous servira pour animer un prochain Meet up sur le sujet !

LE RETOUR SUR INVESTISSEMENT :

Le ROI est l’un des arguments clés dans les métiers du digital, l’UX ne fait pas exception. Chaque client, surtout si cela représente pour lui un investissement significatif en temps et en budget, voudra savoir ce que ça va lui rapporter. C’est parfaitement légitime.

Une technique adaptée au design d’interface consiste à partir de l’existant (if any !), et à chiffrer concrètement le bénéfice vs l’investissement : augmenter de 8% le CA/nombre de leads/nombre d’abonnements/etc. en améliorant le parcours utilisateur de l’interface représente un bénéfice potentiel de X€/an. On n’est pas à l’abri de faire mieux que 8%. Voici le budget initial. Signez là :) !

Une seconde technique, plus rapide et moins engageante, consiste à présenter les résultats business des actions UX réalisées sur de précédents projets.

UNE VISION HOLISTIQUE DU CLIENT A L’INSTANT T :

Études marketing, infos issues du Service Client, rencontres avec les commerciaux, Analytics, Datas, commentaires issus des réseaux sociaux, une participante nous a rappelé que les sources d’informations sont nombreuses pour avoir des insights clients pertinents quand on n’a pas accès à l’utilisateur final. On est d’accord, ce sont des données précieuses et qui doivent absolument être prises en compte dans la phase de recherche. Cela peut éviter, par exemple, l’écueil de retirer des fonctionnalités génératrices de revenus dans le cadre d’une refonte.

Mais que répondre à un prospect qui, du coup, pense qu’il n’a pas besoin d’observations, d’entretiens ou de nouveaux sondages car il est sûr de bien connaître son client final ?

Ce qui différencie l’approche UX des autres techniques, c’est la vision globale du « Avant — Pendant — Après » qu’elle offre des utilisateurs au travers d’outils comme les observations, entretiens, personas et journey maps. Elle inscrit l‘utilisateur dans une vision plus large qui apporte de nouveaux éléments de réponse dans un contexte où les usages changent très vite : une vision holistique à l’instant T.

La question à poser au client, à mon sens, est “êtes-vous prêt à prendre le risque de passer à côté des ces infos qualitatives complémentaires” ? Et que se passera-t-il si votre concurrent, lui, engage ces recherches ?

LA PREUVE PAR L’EXEMPLE :

On l’a à peine abordé mais il est parfois utile de montrer aux décideurs des exemples réussis de projets. Que ce soit en se référant aux entreprises du marché qui doivent une grande partie de leur réussite à l’application de la méthodologie UX, à des cas d’études inspirants (on en trouve même en BtoB, si, si !).

C’est une partie du storytelling à ne pas négliger, et il suffit parfois d’ouvrir une appli bien conçue ou un écran avant/après d’un cas d’étude à un client pour faire avancer la cause !

CONTOURNEMENT :

Une UX Designeuse indépendante n’était pas très à l’aise car face à la méconnaissance de ses clients, elle avait vendu 2 jours de gestion de projet pour faire de l’observation sur site. Et bien pourquoi pas ! Après tout, dans la plupart des organisations, c’est bien au chef de projet de recueillir les besoins et de spécifier, non ?

En tant qu’indépendants nous vendons avant tout un résultat. Si les terminologies utilisées (idéation, convergence, divergence, itération etc.) font peur ou restent obscures à nos clients, à nous de nous adapter. À titre personnel, quand je fais du conseil, je le vends rarement comme tel. Et quand je propose un workshop, je ne parle pas forcément de design thinking…

DIMENSIONNEMENT DE LA MISSION/DU PROJET ET TARIFS :

Une UX junior a partagé son expérience sur la difficulté qu’elle avait à se positionner d’un point de vue tarifaire et contractuel. Au-delà d’établir un coût journalier, elle semblait peiner à valoriser l’ensemble de ses prestations. Peut être manquons-nous de référentiels métiers (grilles tarifaires, devis et contrats types, définition précise du périmètre d’intervention en amont du projet) tels que cela se pratique dans d’autres domaines du digital ?

Un autre point intéressant a été soulevé : qu’on soit junior ou senior, c’est parfois un véritable défi de dimensionner puis de chiffrer la mission au regard des enjeux et du budget de clients peu matures, surtout dans le cadre d’une première collaboration !

Il a été suggéré dans ce cas d’adopter une approche tactique : proposer par exemple 5 tests utilisateurs tous les 3 mois plutôt qu’une grosse étude au démarrage. En gros, séquencer le budget pour que le client puisse l’intégrer à son plan de manière progressive.

Je souhaiterai compléter cette approche avec la possibilité de proposer une démarche « test & learn ». Présenter l’ensemble de la démarche UX et des coûts associés, mais ne contractualiser qu’au fur et à mesure de la prestation.

Proposer un périmètre limité dans le cadre de la prestation initiale permet d’établir la confiance et de prouver que la technique fonctionne. Si les 1ers tests utilisateurs ou ateliers sont concluants, l’investissement du client pourra monter en puissance. Cette approche est toujours rassurante pour un nouveau client et elle permet d’avancer pas à pas en restant souple sur les solutions proposées.

Voilà, 45 minutes c’est peu court pour faire le tour d’un tel sujet alors n’hésitez pas à apporter votre vision, vos tips ou vos expériences dans les commentaires !

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Clelia FILIPPELLI

Consultante indépendante en marketing et communication digitale, passionnée d’UX, de stratégie de marques et d’innovation. https://thinkingdigital.fr