Arrêter de galérer avec le par coeur

Clément ROBIN
11 min readDec 5, 2019

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Le par coeur on n’y échappe pas.

Quelles que soient les études, il y a forcément des connaissances à savoir sur le bout des doigts.

> Soit tu les apprends pour tes exams, et tu les oublies une fois ta copie rendue

> Soit tu dois les ressortir sans l’ombre d’un doute sinon tu es bloqué, ou tu perds bêtement des points à chaque exam

D’ailleurs, du par coeur, on en fait depuis la primaire. On se souvient tous de nos tables de multiplication

Pourquoi ?

Car on les a répétées, répétées et encore répétées.

Le par coeur c’est juste de la répétition bête et méchante.

Parfois ça rentre bien, en quelques répétitions on a tout mémorisé, et parfois ça rentre vraiment pas

On connaît tous des gens qui sont désarmés lorsqu’on leur demande 7x8.

Ou d’autres lorsqu’on leur demande la capitale de la Slovénie, qui plus est, de l’écrire correctement aussi (je suis en PLS là 😖)

C’est pas grave quand on a une calculatrice et google. Mais quand il s’agit de tes exams, c’est plutôt relou d’avoir des trous.

Soit tu fais avec, soit tu repasses du temps à répéter jusqu’à apprendre.

Sauf que ce temps et cette énergie à bêtement répéter, tu pourrais l’investir dans autre chose.

Il n’y aurait pas un moyen de changer ça ?

D’ailleurs, quand on y réfléchit, est-ce que la maîtresse nous a vraiment appris à apprendre par coeur ?

Réapprendre à apprendre par coeur

Remontons dans le temps

Dans l’antiquité, il y avait des écrits, et des livres, mais assez peu en vérité. La majorité du savoir était oral.

Oui, oui. On parlait de tradition orale

Les mythes grecs étaient transmis à l’oral par des personnes appelés « compteur » tel que le légendaire Homere.

Et je vous invite à aller à la Fnac pour voir l’épaisseur de bouquin de l’Odyssée ou celui de l’Illiade. On parle de plus de 400 pages !

544 pages ici 😱

Aujourd’hui ça paraît impossible de retenir tout ça. Pourtant à l’époque, ils y arrivaient très bien.

On apprenait aux enfants à apprendre par coeur. On leur donnait des techniques.

C’était tout un ensemble de méthodes autre que la répétition abrutissante.

La démocratisation des livres, a fait qu’on a perdu la nécessité d’apprendre par coeur des grosses quantités d’informations, et donc la capacité à le faire.

La majorité d’entre nous n’a jamais entendu parler de ce genre de techniques, mais pas tout le monde.

Les grands mémoristes, ceux qui sont capable de mémoriser des milliers de décimales de pi, utilisent justement ce genre de technique.

Fabien Olicard en parle brillament dans ce spectacle

En vrai, « technique », c’est peut-être pas le bon mot, ça fait truc ultra secret, assez chelou.

La vérité, c’est que ses gens utilisent juste leur cerveau différemment, et avec un peu d’entraînement, on peut facilement apprendre à le faire.

Je suis sûr qu’on t’a déjà dit qu’on a 3 types de mémoires : auditive, kinesthésique et visuel.

Souvent, on nous explique que la mémoire est un de ces 3 types. C’est pas vrai, il n’y a pas que 3 types de mémoires, on peut mémoriser tout type de stimuli extérieurs. En pratique, on observe juste qu’on est plus sensible à un type de stimulus qu’aux autres, une dominance en somme

Pour ma part, je suis plus sensible aux stimuli visuels. Je mémorise très bien avec des images ou des schémas. Vous allez probablement le remarquer par la suite 😉

Pourquoi on n’utiliserait pas ça pour apprendre par coeur ?

Elle est là, la clé

D’ailleurs, c’est pas si nouveau que ça, vous en avez déjà entendu parler. On vous a balancé ça comme une petite astuce, qu’on peut utiliser de temps en temps. Alors qu’on devrait le faire quasi systématiquement.

Ça s’appelle des moyens mnémotechniques.

Initiation

Quand j’étais petit, en faisant des fautes à une dictée sur les verbes, ma mère m’avait dit que “Courir” ne prenait qu’un “r” car on manque d’air lorsqu’on court. Je n’ai plus jamais fait de faute à ce mot.

De même, “Hirondelle” prends 2 “l” car une hirondelle a 2 ailes

Ce genre de petite astuce, c’est le niveau 1. Simple, basique. Faut après être capable de se trouver ses propres astuces, et que cela devienne une habitude.

Cela demande un peu de créativité, mais avec de l’entraînement, on finit par en trouver facilement. C’est même un jeu.

Comme par hasard, tout est plus facile à retenir de cette manière. Ingérer de l’information brute est un exercice compliqué pour notre cerveau. Les meilleurs en par coeur ont recours à plein de moyens mnémotechniques sans s’en rendre compte.

Je suis sûr qu’en lisant ses moyens mnémotechniques, il y a des images, des sons, des sensations… Bref, des choses qui vous viennent en tête. Ces astuces, se sont comme des petites histoires, et notre cerveau est très sensible aux histoires : il les retient beaucoup mieux.

Pourquoi vous croyez que les mythes grec sont parvenus jusqu’à nos jours et pas le nombre précis d’habitant à Athènes?

Artisanat

Passons aux niveau 2, là les choses sérieuses commençent

J’adore imaginer le cerveau comme un métro. Chaque neurone est une station de métro, et plus il y a de lignes reliant les stations, plus le métro est performant. Le canal qui relie les neurones entre eux s’appelle un axone. Un signal électrique parcourt l’axone pour communiquer d’un neurone à un autre, cela s’appelle un train de potentiel. L’apprentissage revient justement à créer le plus d’axones entre les neurones. Autrement dit, de relier au mieux les stations de métro.

Les neurones s’activent en fonction des stimuli que l’on reçoit de l’extérieur.

Le bruit des cigales dans les champs, un bisou sur les lèvres, le soleil dans les yeux…Tout ça c’est des stimuli, des sensations en somme.

Comme un passager qui va rentrer via une station, dans le métro pour se mélanger avec d’autres passagers en empruntant différentes lignes de métro. Chaque stimulus va entrer via un neurone dans ton cerveau, et ensuite se recouper avec d’autres signaux électriques en empruntants les différents axones.

Là, en te racontant ma petite histoire de métro. Tu viens d’apprendre (ou de réapprendre) ce que c’est que la “plasticité cérébrale”. Simple non ?

Voici le vif du sujet. Le niveau 2 consiste à utiliser ses stimuli extérieurs pour former tes moyens mnémotechniques. D’ailleurs, en te racontant ma petite histoire de métro, tu te l’ai représenté via des stimuli : des images, des sons, et autres sensations…

Un exemple pour la route

Pour apprendre le verbe irrégulier “see, saw, seen” en anglais, j’avais imaginé une scie contenu dans un seau posé sur une scène de théâtre. Je vous avais dit que j’étais visuel ?

Tu remarqueras que c’est totalement absurde. Ouais, mais ton cerveau lui, il retient beaucoup mieux. Ce qui est absurde sort du quotidien, cela marque ta mémoire car c’est unique.

Maintenant que tu es au niveau 2, associe des sensations (images, sons, touchers…) aux choses que tu dois retenir par coeur.

Si t’as un article de loi à apprendre, chante-le comme du rap par exemple.

Tu as une équation de physique à retenir, imagine là, visualise là…

Le secret réside dans l’association avec des stimuli, (images, sons…). Le tout de façon assez absurde pour impacter ta mémoire. Ton réseau de neurones doit être emprunté par le plus de passagers possibles, et relier le plus de neurones.

Ainsi, tu transformes tes connaissances en souvenir. Un souvenir ce n’est pas une phrase que tu te répètes encore et encore, mais un ensemble de sensation.

Maintenant que tu es un artisan des moyens mnémotechniques. Il est temps d’industrialiser le processus.

Industrialisation

La différence entre l’industrie et l’artisanat, réside dans la production. En artisanat, chaque objet est unique. Dans l’industrie, on construit chaque pièce séparément, pour ensuite les assembler le mieux possible. Regarde les voitures.

Tes pièces détachées, cela va être des listes d’associations que tu pourras réutiliser pour créer plusieurs moyens mnémotechniques.

Commence avec l’alphabet et les chiffres de 0 à 9.

Voici quelques exemples de mes listes préfaites :

>Le C est un croissant de lune

>Le H des poteaux de rugby

>Le J une faux

De même avec les chiffres :

>Le 0 est un ballon rouge

>Le 1 est un pied-de-biche

>Le 2 est un cygne

>Le 8 est une paire de menottes

Je t’ai dit que j’étais visuel ?

Tu es libre de faire d’autres listes d’associations préfaites comme par exemple avec les signes mathématiques si tu as beaucoup de formules à retenir.

C’est en racontant une histoire absurde qu’on assemble les éléments, les pièces détachées.

Après, tu peux utiliser tout ça pour retenir des connaissances.

En 1882, l’école est devenue gratuite. Je connais cette date par coeur.

Alors que factuellement, cela ne m’est d’aucune utilité. En tant normal, j’aurais dû l’oublier avec les années.

Dans une salle de classe, ma maîtresse de CP ramasse un pied-de-biche par terre avec dans sa main droite, deux paires de menottes limitent ses mouvements, et de l’autre main, il caresse un cygne qui mange des billets.

Le pied-de-biche représente le 1. Les deux paires de mennotes : 88. Puis le cygne, le 2. Donc 1882. Ma maîtresse, l’école, et les billets mangés la gratuité = école gratuite. Simple et efficace

Faire une histoire comme ça m’a demandé une minute. Au lieu de répéter une vingtaine de fois “1882, l’école est devenue gratuite” en tournant dans ma chambre, je n’avais qu’à répéter cette histoire 3, 4 fois et j’avais mémorisé la date.

D’ailleurs, tu peux aussi te raconter une histoire absurde pour retenir ces listes préfaites. Un ballon rouge flotte dans le ciel, soudain un pied-de-biche est lancé dans le ciel percute le ballon, et l’éclate. Il est attrapé par un cygne…

La formule magique de la mémorisation, c’est association + histoire absurde. Avec ça, tu peux retenir n’importe quoi.

Stockage

Le magasin, c’est là où sont stockés et exposés les produits. Et c’est l’endroit où les clients peuvent déambuler pour découvrir la liste de produits.

D’ailleurs, je parie que tu connais exactement où sont les rayons dans le supermarché où tu as l’habitude de faire les courses. Tu sais où sont les pâtes, les boissons, les fruits, les biscuits…

En fermant les yeux, je suis sûr que tu peux te balader dans mentalement dans le supermarché, tu sais à peu près où se trouve quel type de produit.

Tu n’as même pas eu vraiment d’efforts à faire pour mémoriser ça.

Fais le test en faisant tes courses dans un autre supermarché. Au bout de deux, trois fois, tu auras mémorisé l’emplacement des rayons.

C’est-à-dire qu’en seulement au bout de deux, trois répétitions, tu auras appris des trucs par coeur. Et si tu te concentres vraiment, en une fois, tu peux totalement mémoriser la disposition du lieu.

Tu viens de découvrir ta mémoire la plus puissante : la mémoire spatiale.

Devine quoi, on peut l’utiliser pour stocker tes moyens mnémotechniques. Un peu comme un magasin.

Il te suffit de prendre un lieu qui t’est familier. Ton appartement, ta fac, ta salle de sport… Même le trajet pour aller chez de toi au boulanger peut faire l’effet.

Découpe ensuite, ses lieux en section que tu parcours dans un ordre précis. Traditionnellement, on les découpe par pièce. Dans chaque pièce, place une association d’idée qui raconte une histoire, et fais les interagir avec le décor. Ainsi, tu peux mémoriser des choses dans un ordre précis.

J’ai personnellement appris l’alphabet grec avant de rentrer en prépa de cette façon. J’avais utilisé la chambre d’un hôtel que j’avais fréquenté en vacances.

On appelle cela un palais mental. C’est très très pratique quand tu dois retenir une liste d’informations, encore plus si elles doivent être ordonnée.

On peut retenir des choses étonnantes grâce à cela. Je me suis amusé à retenir la liste de mots sans lien apparents :

Chips — Chameau — Radiateur — Statue — Compote — Corde — Jul — Architecte

Je parcours la maison de mon grand-père à la campagne.

Dans le jardin, le pommier a pour fruit des paquets de chips. Je vais ensuite dans son atelier de bricolage, où un chameau est en train de bricoler. Après, je me retrouve par le garde-manger, où un immense radiateur me barre la route. Je suis obligé de passer par une petite porte pour me retrouver dans la cuisine, où la statue de la liberté fait la cuisine. En sortant de la cuisine, je vois une Pom’Pote géante sur le canapé entrain de boire une bière devant la télé. Après, j’emprunte les escaliers pour aller à l’étage où la rampe s’est transformé en corde. J’arrive près de la salle de bain, où j’entends Jul chanter sous la douche. En allant dans ma chambre, je vois une maquette d’architecte posé sur mon lit.

Faire interagir tes images absurdes avec le décor renforce l’association, et tu les mémorises mieux.

Dans l’antiquité, les compteurs pour mémoriser l’Odyssée, prenaient, par exemple, la route de chez eux jusqu’à un temple et chaque étape du chemin était un morceau de l’histoire.

Te voilà à présent armé pour mémoriser n’importe quelle information 👊

En maîtrisant ces 4 niveaux (initiation, artisanat, industrialisation et stockage) tu vas pouvoir devenir un grand maître de la mémoire. Comme Fabien Olicard qui retient les 1000 premières décimales de pi dans son spectacle

Tous ces moyens mnémotechniques, il va falloir, bien-sûr les répéter, mais beaucoup moins que si c’était du par coeur. Tu seras aussi moins sensible aux trous de mémoire, car les informations ne seront pas mélangées.

Avec ce genre d’astuces, tu peux réviser un partiel très très rapidement, ça peut justement te sauver si tu es dans l’urgence. Je partage d’autres astuces (48 en tout, ça fait un paquet) comme celle-ci dans un livre que j’ai écrit avec un super pote : http://bit.ly/2rTHYqP

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Clément ROBIN

Auteur de Ce qu’on ne t’a jamais dit pour réussir à l’école et fondateur de Meteor