Aucun objet ne remplacera le smartphone…

coreygraphe
Entre-espace
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6 min readFeb 19, 2024

…car le smartphone n’est plus un objet; il est devenu une extension de l’humain. Cette extension peut, elle, être remplacée…

Spacer de la série Fondation d’Apple TV, un membre d’une race de navigateurs génétiquement modifiés

62 % des Français ont augmenté leur temps devant leur écran mobile durant le confinement (étude menée par l’Ifop en 2020), ce qui confirme ce dont nous sommes déjà tous témoins : il s’est incrusté dans chacun des instants de nos vies. Conduite, marche, toilettes, repas, réveil, brossage de dents, sexe !,…

Entre l’AI pin et le prétendu retour des lunettes intelligentes, on reparle depuis quelques mois du remplacement du smartphone et de ses extensions (pods, montre, bague, lunettes)…

Mais de quel usage parlons-nous ?
Nous utilisons notre téléphone pour nous connecter aux réseaux sociaux, dialoguer, jouer, regarder des films, écouter de la musique, nous renseigner, acheter, nous abonner, être guidé lors d’un itinéraire, contrôler son corps, contrôler les objets de sa maison, gérer son temps, gérer son budget, travailler, et même parfois pour téléphoner…

Chacun de ses usages va demander l’application de sens et de fonctions cognitives différentes selon notre contexte au moment de l’utilisation : sommes-nous à l’aise avec la technologie ? Sommes-nous en situation de handicap ? Avons-nous une mémoire plutôt auditive, visuelle ou kinesthésique ? Quelle est notre facilité d’abstraction ? Sommes-nous plutôt dans le contrôle ou plutôt dans le “laissé-allé” ? Sommes-nous seuls et au calme ? Avons-nous une urgence à gérer ? …

Caractéristiques de l'utilisatrice et de l'utilisateur

L’activité
Objectifs - Niveau d’expertise - Habitudes -Fréquence d’usage - Contraintes

Les facteurs humains
Mémoire - Lois de la perception - Référentiel de l’utilisateur - Émotions

L’environnement
Météo, lumière, reflets - Interactions / interruptions humaines -
Couverture réseau - Bruit - Vibrations, mouvement

L’extension cognitive

Le smartphone, et ses connexions, bouleversent déjà toutes nos fonctions cognitives :

  • L’attention. D’un côté, ce portable peut nous plonger dans la surinformation qui demande une attention partagée, de l’autre, il peut être un outil facilitant l’automatisation d’une partie de l’attention sélective (le choix de quelle information mérite quel traitement.). Par exemple, accompagné de son casque réducteur de bruit, nous pouvons aller jusqu’à une attention soutenue de son interaction avec son smartphone, jusqu’à en oublier le reste du monde. C’est le fameux focus ;
  • La mémoire. le smartphone est un outil de recherche nous permettant de vérifier une information, une partie de notre mémoire a pu être déportée sur lui : nous ne cherchons plus dans ses souvenirs, nous utilisons un moteur de recherche ou un assistant personnel ;
  • Les fonctions exécutives. Ce sont les opérations mentales nécessitant plusieurs étapes : la planification, le contrôle et la régulation de l’action, la flexibilité mentale. La supervision de notre quotidien (santé, famille, trajet, planning, connexion à nos différents cercles, etc.) peut aussi être facilitée par le smartphone et l’assistant personnel. Cependant, le besoin de contrôle sera facilité par un support visuel (écran) pour maîtriser les informations les plus complexes (planning chargé sur une semaine). Une manipulation manuelle facilitera pour beaucoup la compréhension des conséquences d’une action, donc la prise de décision et la flexibilité mentale;
  • les fonctions visuo-spatiales et du langage, passons ici les évidences liées à la mobilité et les possibilités de traduction immédiate, déjà utilisables. Dans le visio-spatial est aussi inclue l’image mentale qui peut se lier avec toutes les autres fonctions cognitives. Aujourd’hui, ce sont les plans et les infographies qui servent surtout de support à un travail de visualisation mentale d’objets et de flux.

L’extension par les objets intelligents

Image de la première vidéo de présentation de Soli, un homme contrôle l’heure par un geste sans contact
  • Le geste. On imagine facilement le contrôle d’objet par la détection de geste et/ou de présence.
    Google ATAP (Google’s Advanced Technology and Projects group), par exemple, travaille depuis une dizaine d’année sur le projet Soli pour arriver à proposer ce contrôle d’objet.
  • La vision. On assiste régulièrement dans les mêmes films et séries à l’idée d’un “calque” informationnel qui apparaît par-dessus ce que l’on voit, on pense forcément aux Google glasses qui se proposaient de déporter une partie du portable sur ses lunettes. Reste à savoir si l’humain peut adapter son corps et son esprit sur du long terme à cette nouvelle couche d’information et donc à une attention divisée.
  • Le clône numérique (digital twins). On voit souvent dans la SF la projection 3D des objets et de leurs structures qui deviennent un support incroyable de représentation là où n’existent que les plans 2D et l’image mentale.
    On peut aussi imaginer un support faisant le lien entre mémoire et image mentale pour créer son propre palais mental dans lequel on pourrait se déplacer. Le trajet est important dans cette méthode.
  • L’esprit. Enfin, l’objet de beaucoup de fantasmes : l’implant fonctionnant à l’intelligence artificielle. Neuralink, l’une des sociétés d’Elon Musk, a déjà pratiqué son premier test d’implant sur un patient humain. Si une des ambitions affichées est de rendre la vue aux aveugles, on imagine facilement augmenter cette vue avec un calque d’informations. On peut ajouter aux projets la télépathie, la télékinésie des smart objets, etc.
  • Le dialogue. Ce sujet a été traité au niveau de base avec les pods ou les casques. Le challenge majeur reste l’aspect privé et le respect des espaces publics. Des entreprises commencent à promettre des objets nomades permettant d’offrir des bulles de silence (les autres n’entendent pas) et neutralisateurs de bruits (on n’entend pas les autres).

AI Pin, une alternative ?

Vidéo de Humane, présentant leur produit: l’AI Pin
Pour proposer une innovation, il faut répondre à 4 questions 
pour cadrer sa valeur :

1. Quel problème voulons-nous solutionner ?
2. Quelle solution souhaitons-nous apporter ?
3. Comment font aujourd'hui les utilisateurs pour contourner le problème ?
4. Comment les ferons-nous changer leurs habitudes pour notre solution ?

Humane, les créateurs de l’AI Pin proposent un minuscule ordinateur intelligent et autonome qui va aller, selon notre commande, chercher la bonne IA et la bonne information. La vidéo ci-dessus vous en dira plus.

Nous croyons en la construction d’une technologie innovante qui soit familière, naturelle et humaine.
Une technologie qui améliore l’expérience humaine et qui naît de bonnes intentions.
Des produits qui nous remettent en contact avec nous-mêmes, avec les autres et avec le monde qui nous entoure.
Des expériences fondées sur la confiance, avec des interactions qui semblent magiques et apportent de la joie.
Humane est la prochaine étape entre les humains et l’informatique.
La meilleure expérience humaine qui soit.
Humane

  1. Le problème est un non-dit : le smartphone est une extension technologique qui nous parasiterait, la solution serait donc une technologie qui nous libèrerait de tout cela tout en gardant un lien avec le web. Mais a qui s’adresse cet outil ? Est-ce que les utilisateurs de smartphones souhaitent se “désintoxiquer” des réseaux sociaux, des jeux et séries en ligne ? D’après une étude
    2. Les usages ne correspondent donc pas à ceux d’un smartphone : Adieu la connexion constante aux réseaux sociaux, au revoir les jeux et séries Netflix. Bref, adieu aux utilisations principales des smartphones, gardons la musique, la partie informationnelle et “administrative”.
    3. Pour contourner le problème :
    - les utilisateurs n’ont pas de smartphone ou…
    - les utilisateurs ont acheté un Light phone (un téléphone avec l’essentiel pour communiquer et se déplacer) ou…
    - les utilisateurs brident l’utilisation de leur smartphone par eux-mêmes.
    4. C’est dans le changement d’usage qu’apparaît le plus important problème… Une étude montre que les jeunes sont prêts à payer pour que Tik Tok disparaisse, mais qu’il faudrait les payer pour qu’ils quittent Tik Tok (si l’app existe toujours)… Il va falloir plus qu’un coup de pouce pour réussir à bouger ces lignes.
    Étude faite sur 600 étudiants américains en 2023

Des usages limités…
Sans écran, pas de jeux, pas de vidéos… Cet objet aurait pu être présenté comme une extension du portable, mais l’ambition est bien de remplacer le smartphone. L’abonnement (un numéro de téléphone, du stockage dans le nuage, un nombre illimité de requêtes aux IAs) semble augmenter le couperet du choix entre smartphone et AI Pin.

Un autre paradigme cognitif…
L’extension cognitive est augmentée pour les fonctions de l’attention et de la mémoire.
Par contre AI pin est dans une assistance de l’instant et supporte peu les fonctions exécutives (ex : visualiser un planning complexe) et les fonctions visuo-spatiales (ex : voir un plan complexe). Il déporte une partie de la supervision sur des moments arrêtés. En termes de langage, le traducteur quasi-immédiat est simple, mais pourrait exister sur d’autres supports.
D’une manière globale, la solution répond à la promesse cognitive, l’objet est un support beaucoup moins invasif permettant de reprendre un équilibre entre monde physique et web.

…qui ouvre le champ des possibles
Cet objet commandé pas la voix et le geste ouvre la voie à une commande simplifiée des objets connectés (dont domotique).
Reste une grande question à nous poser, souhaitons-nous vivre notre vie :
A/ Sur un écran ?
B/ Dans un monde connecté ?
C/ Dans un monde low tech ?

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coreygraphe
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