8 petites choses que Nice-Matin tente avec #MonJournal pour engager sa communauté d’abonnés

Damien Allemand
6 min readApr 2, 2018

--

Les abonnés à l’édition numérique de Nice-Matin lors de la première soirée des “Trophées des Solutions”. (Photo Philippe Bertini)

Je ne sais pas vous, mais je n’y comprends plus grand chose à Facebook. Un jour, on nous annonce la chute vertigineuse du reach de toutes les pages, le lendemain la mise en avant des infos locales, le surlendemain que les groupes de discussion seront privilégiés puis que la firme de Marck Zuckerberg va permettre de s’abonner à des médias… Bref, Facebook change de stratégie à peu près tous les quatre matins vis à vis de l’information. De quoi donner des haut-le-cœur à tous les journalistes web et community manager.

Tout cela est brutal, instable, mais cela force toutes les rédactions à une profonde remise en question. Quel est le rôle d’un média aujourd’hui? Simplement diffuser de l’information? Est-ce que l’échange avec mes lecteurs se limite à poster des liens d’article sur Facebook en espérant 3 likes en retour? Autant de questions qui nous poussent à placer le lecteur au centre de chaque décision et dispositif pour construire une relation durable avec eux. Durable et non soumise aux aléas d’un algo.

Quand nous avons bâti, l’offre #MonJournal à Nice-Matin avec Benoît Raphaël, on s’est longuement interrogé sur la place du lecteur. Et au final, on peut facilement dire que cette offre abonnés numériques n’est pas “juste” éditoriale. C’est plutôt une offre communautaire autour de trois valeurs clés: l’authenticité, la transparence et l’engagement. L’objectif? Remettre beaucoup d’humain (même sur le digital) et de la confiance qui est sûrement la seule chose qui aura de l’importance dans les années à avenir pour un média.

Voilà donc ce que nous avons tenté, réussi, raté…

1. Le journalisme de solutions

J’en ai déjà beaucoup parlé ici et . Et ça fonctionne toujours bien. Nous bouclons notre 25e mois de hausse des abonnements… en 25 mois d’exploitation. On touche du bois pour que ça continue.

2. Les lecteurs deviennent rédacteurs en chef

C’est la première pierre pour engager notre communauté. Une fois par mois, nos lecteurs peuvent voter pour choisir le dossier qui sera traité par nos journalistes. Les détails sont ici.

Le +: les choix des lecteurs surprennent toujours et permettent de reconnecter les journalistes aux attentes des abonnés.
Le -: il faut trouver le bon dosage entre les sujets votés par les abonnés et les choix éditoriaux.

3. L’appel aux sources des lecteurs et à leurs contributions

Après le vote des sujets, les lecteurs sont invités par les journalistes à envoyer des contributions. Personnes à rencontrer en lien avec le sujet, mise en relation avec des sources intéressantes, appels à témoignages… les participations sont multiples. Elles sont recueillies à l’aide de plusieurs leviers. Des Facebook Live au début d’une enquête, des formulaires publiés sur nos supports… Le but? Engager une conversation avec nos lecteurs.

Facebook Live autour de la thématique: “A la recherche du bonheur au travail”

Une philosophie également appliquée pour le reste de nos contenus. Nous appelons régulièrement nos internautes à envoyer photos, vidéos, etc. quand il se passe quelque chose. Sans oublier de les remercier quand nous publions leurs contenus…

Le +: on ne peut pas être partout et les lecteurs nous invitent très souvent vers des personnes/lieux que nous n’avons pas l’habitude de mettre en lumière.
Le -: un important travail de vérification à faire par les équipes, notamment pour les faits-divers. Si les lecteurs nous aident volontiers, ils sont en revanche très peu à prendre la plume pour rédiger une tribune sur un sujet: c’est l’une des fonctionnalités de notre offre abonnés qui a le moins bien fonctionné…

4. Les coulisses de nos enquêtes

C’est devenue une tradition. A la fin de tous nos dossiers votés par nos abonnés, l’équipe rédige un making-of de l’enquête. Ceux qui nous ont parlé, comment on l’a trouvé, ceux qui ne nous ont pas ouvert leur porte, comment un reportage a failli tourner à la catastrophe… on essaie de rien oublier.

Le +: nos lecteurs nous l’ont dit plusieurs fois: c’est important de leur raconter la fabrique de l’info. Surtout aujourd’hui #fakenews. A noter aussi: le making-of a été plusieurs fois l’article le plus lu d’un dossier.
Le -: on n’a pas encore trouvé le bon format.

5. Les événements avec nos abonnés

Des débats autour de nos dossiers avec nos lecteurs et les “personnages” de nos enquêtes, des ateliers découvertes, des événements plus festifs, des visites du journal… Au moins une fois par semaine, nous invitons nos abonnés à des événements conçus pour eux. On a banni les traditionnels “on vous offre 2 places pour…” pour se concentrer sur une vraie expérience. Quasi VIP. Exemples: nos abonnés ont suivi un soigneur de loup toute une journée, ont survolé Monaco en hélico, ont nagé avec des dauphins en mer, ont appris à faire leur chocolat, ont (presque) sauté en parachute…

Le +: je crois qu’aucun abonné ayant participé à un événement s’est désabonné. C’est également important pour un média de rencontrer régulièrement (et physiquement) ses lecteurs.
Le -: très très très lourd en organisation et en recherche de nouvelles choses à proposer.

6. Les live foot par des supporters

Cédric (supporter de l’OGC Nice) et Morgane (supportrice de l’AS Monaco) lors du derby.

Comment Nice-Matin doit couvrir en direct les matchs de l’équipe? C’est une question qui nous tracasse depuis un bon moment. Alors cette année, on a lancé #LeKop. Mais uniquement pour les “gros” matchs (pour l’instant). C’est tout bête: nous confions notre compte Twitter à un supporter de Nice pendant tout un match. C’est lui qui fait vivre à nos followers la rencontre avec son regard. Sans filtre. Et franchement partisan.

Le +: le lecteur choisi live-tweete depuis la tribune de presse à côté de nos journalistes et découvre un peu les coulisses du journalisme sportif qui en fait fantasmer plus d’un.
Le -: Il faut vraiment bien “caster” l’internaute sous peine de mauvaises surprises…

7. La co-construction des nouvelles offres

Séance de travail dans une école pour Kids-Matin.

Avant chaque lancement de nouveaux produits digitaux, nous associons nos lecteurs à notre réflexion. Ce fut le cas pour notre nouvelle appli en 2016. C’est encore le cas cette année avec Kids-Matin, notre prochain media pour enfants. Les lecteurs peuvent suivre quasi quotidiennement l’avancé du chantier via une newsletter et un groupe Facebook. Ils sont appelés aussi à choisir les fonctionnalités et même la couleur du site.

Le +: transparence là encore et une vraie manière “de ne pas trop se tromper”
Le -: ça prend forcément un peu plus de temps.

8. Le crowdfunding

Un média doit-il être utile en plus de sa mission d’informer? On pense que oui. Fortement. Dans sa V1, l’édition abonnés #MonJournal comportait une cagnotte: 1 euro par mois et par abonnement y était reversé. Les abonnés votaient ensuite pour reverser cette cagnotte à plusieurs projets en pleine de campagne de crowdfunding chez Ulule.

Le +: cette cagnotte a notamment permis de sauver un kiosque à journaux d’une petite commune des Alpes-Maritimes.
Le -: nous avons pour l’instant arrêté. On espère reprendre bientôt!

--

--

Damien Allemand

Journaliste sur #LesInternets, responsable digital @Nice_matin #monjournal