Epidose 2 : “#RestezChezVous”, cria la nature.
Le jour d’après.
Ca y est, c’est officiel. Le réveil qui pique. Fuir twitter. Fuir facebook. Fermer les conv. Laisser mes potes tranquilles, et stopper le spam. Respire éClair. Boulimie d’info contradictoires. On s’est fait fakenewsé. TU t’es faite fakenewser. Après une overdose d’articles et de contre-articles, ferme l’ordi. Respire je te dis. Fake ou pas, on est maintenant enfermés chez nous pour une durée indéterminée, en train de vivre un truc… historique...
La guerre.
Non Emmanuel, c’est non. Nous ne sommes pas en guerre. Nous ne pouvons pas (plus?) être en guerre contre le vivant. L’inverse, par contre, reste à prouver. Eh oui, la Terre se défend et nous envoie ONE LAST TIME un petit signal d’alarme : c’est pourtant pas compliqué les gars, ra-len-tis-sez ! Un sursaut d’humilité dans un monde qui tourne trop vite, c’trop demander ? Y’a quoi ?! Un virus qui menace notre espèce, qui nous confine, et nous paniquons. Sérieusement ? C’est drôle, non, quand on sait que grâce à nous un million d’espèces sont menacées d’extinction. C’est drôle, non, quand on sait que 83% des 80 millions de poulets élevés en France ne voient pas la lumière du jour. Qu’est-ce qu’y dit ? Il dit qu’il voit pas le rapport. Ah.
Pendant ce temps là les oiseaux chantent, la mousse repousse sur les dalles de ciment, la biche se promène, les émissions de CO2 baissent en Chine, l’eau de Venise coule sous les ponts… et le feu ça brule, et l’eau ça mouille oui on a compris.
Focus.
Maintenant que j’ai fini de ouin ouin parce que je verrai pas mes copines pendant 3 mois (j’étais obligée de mettre 3 pour la ref, no stress), je reprends mes esprits.
Envie de revenir aux bases, de retrouver des objectifs et de FOCUS. Je me remets donc en selle avec ma dream team au boulot, et je me fixe en parallèle comme objectif de devenir skateuse pro grâce à la planche que j’ai emprunté au voisin. J’ai écrit à Martin pour lui demander s’il était chez lui, et il m’a dit non. Figurez-vous que l’histoire ne s’arrête pas là ! J’ai dit ah mince est-ce que tu as un skate ? Il m’a dit oui. J’ai dit ah ok. Ensuite il m’a donné LE FIXE DE CHEZ SES PARENTS. Je crois que j’avais pas appelé un fixe depuis 2012. Autant passer des coups de fils à Hugo Clément ça me stresse pas (mdr toujours plus), autant appeler une maman sur un fixe c’est d’un stress... Du coup sa maman trop mignonne me dépose la planche devant la maison pour que je puisse passer la prendre sans la croiser. Et là je me dis imagine ça dure. Je me dis imagine, t’as besoin d’huile, tu appelles la voisine « oui salut c’est pour prendre de l’huile j’en ai plus » « oui bah c’est chaud c’est la guerre à Super U j’ai plus que 7 bidons mais vazy passe dans 5 minutes je te le dépose sur le paillasson ». Et là hop, marche en crabe, gauche, droite, pas sur le côté, tu prends l’huile tel un ninja, et tu repars faire une vinaigrette. C’était mon interaction sociale de la semaine. Du mois peut-être. Je ne l’oublierai jamais.
Flex Happiness Officer.
Oiseaux, soleil, herbe verte, footing seule tout dans la forêt, café, internet, dehors, dedans… Ca me fait toujours bizarre d’être dans la petite salle de bain et de me dire que ça fait la taille de mon appart à Paris. Alors soyons clair, mon confinement de luxe c’est indécent, et j’ai honte d’avoir fui comme ça. J’ai lu un tweet ce matin (oui j’ai un peu check twi au cas où ils annonçaient un truc de ouf genre une contagion mondiale — ah ah ah lol), qui disait :
Et c’est vrai. Je fais partie des connasses qui peuvent écrire des blogs sur leur confinement et leurs états-d’âmes et le bruit des oiseaux m’empêche de téléflexer. C’est moi, c’est Julie. ⬇️
Le décalage.
De deux choses l’une : 1) je me sens tellement inutile face à l’effort des personnes qui sont en première ligne 2) c’est dégueulasse que mon confinement soit aussi tranquille par rapport à l’enfer que vont vivre beaucoup d’autres gens.
Autant pour le 1), je vais tout faire pour trouver comment me rendre utile ! Proposer d’aller faire des courses, appeler des personnes âgées et leur raconter des histoires drôle, mettre mes skills à dispo de projets associatifs, lancer un clapping dans mon lotissement à 20h et le hisser en top tweet… Je ne manque pas de créativité.
Pour le 2), je suis démunie face aux inégalités qui sont en train de se renforcer. Déjà je pense bien fort à ceux qui doivent encore aller travailler physiquement, la boule au ventre, pour faire tourner l’économie des cadre en téléflextravail. Grosse pensée aussi pour les agriculteurs qui ne peuvent plus vendre quand la grande distri fait son meilleur chiffre d’affaire. J’écoutais aussi ce matin un reportage sur la condition des SDF (vous avez peut-être vu passer la version de Brut) c’est juste terrible ce qu’il se passe. Il y a même un sans abri qui s’est pris une amende pour être dehors à Lyon. WTF. Il y a des bénévoles sur le terrain (mais moins), et des assos comme la Fondation Abbé Pierre qui recrutent des dons. C’est s’acheter une conscience mais je me dis que c’est déjà ça… Et puis c’est bien sûr sans penser à toutes les personnes qui vont subir les coups physiques et psychologiques de leurs bourreaux enfermées avec eux dans 30 m2. Le numéro d’urgence (3919) reste actif… 🙏 Que dire / faire de plus ???
Toutes façons les gens sont cons !
Et puis il y a un truc qui m’énerve vraiment, sur les réseaux (oui Claire c’est pour ça qu’il faut que tu débranches). Cette manière que chacun a de juger ce que font les autres et combien ils sont plus intelligents que tout le monde. “Oh la la les gens sont cons ils achètent du PQ” “oh les parisien vous être des cons de partir de chez vous” “regardez cette vidéo de gens qui marchent dehors ils sont cons” “les gens qui racontent leur vie et font des stories insta vous êtes cons”. Bon. On se détend un peu ? On se pose des questions ? Pourquoi “les gens” se comportent pas comme on l’espère ? Pourquoi est-ce qu’on réagit tous plus ou moins différemment (article d’Usbek à ce sujet) ? Est-ce qu’on a tous le même accès à une information “vraie” ? Est-ce qu’on a tous le même environnement de vie ? Est-ce qu’on peut juger des gens à qui on a vendu un modèle consumériste et individualiste pendant 50 ans ? Est-ce que insulter les gens a déjà prouvé avoir des effets positifs sur leur comportement ? Est-ce qu’on est vraiment soi-même irréprochable ? Est-ce qu’on peut juste redescendre d’un étage et chercher cette humilité, solidaire, dont je vous parlais plus tôt ? Peut-être pas, et peut-être que les gens sont juste vraiment cons. Mais ça mérite qu’on se pose la question.
Rêver quand même. 🌱
Quand je suis de bonne humeur, je me surprends à imaginer le monde résilient qui naitra de cette énorme crise mondiale. Des humains plus solidaires, une consommation super locale, des transports complètement limités, une quête de l’essentiel, du nécessaire, qui nous dirigerait vers une sobriété heureuse. Je relis ma phrase et je me dis que je suis vraiment un bon gros bisounours. « Trop positive » il parait. Je vois juste le verre de menthe pastille à moitié plein, c’est tout. Ca aide. Ca empêche d’avoir soif, quoi.
C’est vrai ce soir c’est le weekend. Restez chez vous. Bisous, votre éclair.
📺 Bonus, trois vidéos canons pour comprendre ce qu’il se passe :
- L’explication que j’attendais tellement de la chaine In a Nutshell : https://youtu.be/BtN-goy9VOY
- La viz parfaite de DATA Gueule : https://www.youtube.com/watch?v=FCQA3T2S9XQ
- La douceur et la profondeur de la dernière vidéo #OnEstPrêt : https://www.facebook.com/watch/?v=160252545081212
