Affaire Lhaka Hohnat (2020) — racontée par Marie Rota, dessinée par Raphaël Larre

École Urbaine de Lyon
3 min readMay 18, 2022

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Dessiner le droit dans l’Anthropocène donne à voir par le dessin la force créative du droit pour répondre aux multiples défis et enjeux contemporains : pollution des eaux, de l’air, des sols, changement climatique, extractivisme, catastrophe environnementale, déforestation, artificialisation des terres, érosion de la biodiversité, intérêts des générations futures, soin du vivant, rapport à la nature…

À la fois artistique et juridique, le projet a mobilisé 93 juristes et artistes travaillant dans plus de 20 pays différents. 51 duos constitués d’un artiste et d’un juriste ont été formés autour d’autant de sources juridiques incarnant la surprenante créativité du droit.

Né de ces échanges, le projet Dessiner le droit dans l’Anthropocène explore en 51 dessins des situations anthropocènes que le droit, appréhende, régule, répare.

Affaire Lhaka Hohnat (2020)

Peuples Indigènes de Lhaka Hohnat contre Argentine, Cour interaméricaine des droits de l’Homme, 6 février 2020

Indigenous Communities Members of the Lhaka Honhat (Our Land) Association against Argentina, Inter-American Court of Human Rights, February 6, 2020

Comunidades indígenas Lhaka Honhat (Nuestra Tierra) contra Argentina, 6 de febrero de 2020

racontée par Marie Rota, dessinée par Raphaël Larre

Cette décision, rendue par la Cour interaméricaine des droits de l’Homme, est fondamentale pour trois raisons. Tout d’abord parce qu’elle reconnaît pour la première fois la responsabilité d’un État (Argentine) pour avoir méconnu le droit à un environnement sain pour les populations autochtones, droit qui n’est pourtant pas consacré explicitement dans la Convention américaine relative aux droits de l’Homme (que la Cour est chargée d’appliquer et d’interpréter). Elle le fait grâce à une interprétation extensive de l’article 26 qui protège les droits économiques, sociaux et culturels, qu’elle rebaptise d’ailleurs « droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux ». Ensuite, les réparations octroyées vont bien au-delà d’une simple réparation pécuniaire puisque la Cour impose à l’Argentine des mesures concrètes pour remettre en état les terres concernées. Enfin, la portée de ce droit à un environnement sain est renforcée : la Cour souligne qu’il « protège les composantes de l’environnement comme les forêts, les fleuves, les mers et autres, en tant qu’intérêts juridiques en soi », reconnaissant la valeur intrinsèque de l’environnement. En insistant ainsi sur l’interrelation du vivant, c’est même à une certaine éthique relationnelle qu’elle appelle.

This judgment, rendered by the Inter-American Court of Human Rights, is fundamental for three reasons. First of all, it recognizes for the first time the responsibility of a State (Argentina) for having disregarded the right to a healthy environment of indigenous peoples, a right which is, however, not explicitly enshrined in the American Convention on Human Rights (which the Court is responsible for applying and interpreting). It does this thanks to an extensive interpretation of article 26 which protects economic, social and cultural rights, which it renames “economic, social, cultural and environmental rights”. Next, the reparations granted go far beyond simple monetary compensation since the court imposes concrete measures on Argentina to restore the land in question. Lastly, the scope of the right to a healthy environment is delineated: the Court emphasizes that it “protects the components of the environment such as forests, rivers, seas and others, as legal interests in themselves”, recognizing the intrinsic value of the environment. The Court calls for a certain relational ethics by insisting on the interconnectedness of all living entities.

Marie Rota, maître de conférences, Université de Lorraine, France.

Raphaël Larre, artiste, Bayonne, Toulouse, France.

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École Urbaine de Lyon

L’École Urbaine de Lyon (EUL) est un programme scientifique « Institut Convergences » créé en juin 2017 dans le cadre du Plan d’Investissement d’Avenir.