Sans passion ni haine, je voterai Benoit Hamon. Explications.

Elliot Lepers
4 min readApr 22, 2017

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Des éléphants. Allégorie.

J’ai constaté récemment à quel point ces trop longs et laborieux mois de campagne ont glissé sur moi. Bien sûr, je les ai suivis de près, et en ai capté les plus faibles battements. Mais à aucun moment les évènements, les polémiques, les coups de théâtre, les révélations, les surprises, n’ont eu une quelconque influence ni sur mon rapport à la politique en général ni sur mon intention de vote en particulier. L’élection aurait pu avoir lieu il y a 3 mois, j’en serais au même point. Est-ce lié à la mauvaise qualité des différentes campagnes ou au fait que je devienne de moins en moins sensible au marketing électoral ? Sûrement les deux. En tous cas, cette désensibilisation semble être générale, quand on voit le nombre de Françaises et de Français qui orientent leur vote vers l’outrance, comme un antibiotique qui ne ferait plus effet à force d’avoir été utilisé.

Il y a quelques semaines, j’ai publié une série de tweets, un “thread”, pour raconter comment nous avions essayé de construire la primaire de gauche l’année dernière.

Déroulez les tweets pour lire la suite

Si ce projet n’a pas abouti, dans son ambition initiale du moins, c’est l’entière responsabilité de Jean-Luc Mélenchon, qui s’est opposé au projet dès son lancement et a préféré imposer sa candidature. En refusant de contribuer au seul projet qui aurait permis une union des forces de gauche, et donc d’avoir un candidat de moins à gauche. Si Jean-Luc Mélenchon n’est pas qualifié dimanche, il le sera de peu, et l’union ratée prendra alors tout son sens.

Ce n’est pas la manière dont j’ai envie de faire de la politique : individuelle, péremptoire, et surtout violente. Quoiqu’il arrive dimanche, ce n’est ni le vivre ensemble ni l’inclusion qui auront gagné. Depuis un an, nous nous sommes fracassés les uns contre les autres. Pour le bon plaisir de 5 professionnels de la politique.

Bien sûr, son programme a beaucoup de qualités. C’est indéniablement un projet sérieux et ambitieux sur bien des points (d’ailleurs pour beaucoup empruntés aux écologistes). Encore faut-il y croire. Mais le positionnement suicidaire sur l’Europe et la complaisance sur le plan des relations internationales sont pour moi rédhibitoires. Combien d’électeurs et d’électrices de Mélenchon croisent les doigts pour qu’il n’applique pas ses engagements ? Drôle d’espoir.

De l’autre côté, il y a l’auteur de la politique économique de François Hollande, rejetée par 96% des Français. Celui qui rassurait les marchés financiers au moment même où François Hollande prononçait les mots qui allaient le faire élire : « mon adversaire, […] c’est le monde de la finance ».

Celui aussi qui a failli être maire UMP du Touquet, ou encore celui qui a trahi la Société des Journalistes du Monde alors qu’il travaillait secrètement pour Alain Minc, l’aidant à racheter le groupe de presse.

Emmanuel Macron dit vouloir renouveler la politique. Feint-il d’ignorer que les cumulards d’aujourd’hui ne sont rien d’autre que le renouvellement d’autrefois ? Lui aussi exerce la politique de manière complètement verticale, dans un mouvement qui n’est finalement rien d’autre qu’un parti politique, où les investitures sont décidées de manière autoritaire. Après 1 an d’existance, le vernis commence déjà à craquer, et bientôt on parlera d’En Marche comme on a fini par parler d’Europe Écologie ou de Nouvelle Donne.

Ce qu’il nous faut changer, ce ne sont pas seulement les individus. C’est la méthode. Il nous faut réapprendre l’humilité, le collectif : l’intransigeance et la tolérance, comme l’écrivait Gramsci.

Ma voix

Cette année, je n’ai voulu faire aucun prosélytisme. Je vais voter Benoit Hamon, parce que le programme est bon et que l’homme est humble. Parce qu’il s’est soumis à une tentative démocratique d’oeuvrer tous ensemble à l’objectif que nous partageons. Parce que je pense que sa soif de pouvoir est plus contenue que chez beaucoup d’autres. Parce que, aussi, je me refuse à donner ma voix aux sondages, qui pensent pouvoir décider à notre place quel vote n’est pas inutile.

Ne pas voter pour un candidat sous prétexte qu’il n’a, selon les sondages, aucune chance d’être qualifié, c’est tuer le premier tour. Le front républicain face au Front National avait déjà tué le second tour ; il ne nous reste plus grand chose. Ce chantage, je ne m’y soumettrai pas.

Je vote donc pour le projet qui m’enthousiasme le plus, mais aussi qui me parait capable de ne pas plus abimer notre démocratie et notre envie de vivre les un-es avec les autres. Bien sûr, j’aurais préféré ne pas voter pour le Parti Socialiste, ne pas voter pour un ancien ministre de Hollande, ne pas voter pour un apparatchik, ne pas voter pour celui qui n’a pas voulu aller jusqu’au bout de la rupture avec le quinquennat. Il y aura d’autres moments pour cela.

Elliot Lepers
@elliotlepers

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