Comment je ne planterai plus ma startup avec de la méthode running lean.

Elodie HUGHES
5 min readDec 19, 2019

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Elodie est la co-fondatrice avec Nash du studio d’innovation Light Me Up, spécialisé dans la facilitation (Lean Startup, Design Thinking, Design Sprint), le mentorat d’entrepreneurs et la prospective. Leader naturelle et femme entrepreneure récidiviste, elle a monté des sociétés entre Paris et la Silicon Valley et a « tout vécu » du parcours de l’entrepreneur. Elle propose donc de partager son expérience en la matière ! Notamment en écrivant… alors bonne lecture !

En 2016, après 15 ans à la tête de mon agence, je décidais de changer voie et de lancer une startup. Je venais de découvrir les nouveaux visages de l’entrepreneuriat grâce à Oussama Ammar et Alice Zagury dans leur programme Koudetat !

Quel électrochoc !

Moi qui avais cravaché, 15 ans en arrière, pour entreprendre, lancer une startup donnait l’impression d’être super fun et leur vision simplifiait l’entrepreneuriat !

Je n’ai pas dit que cela devait rendre la tâche facile, mais certainement beaucoup plus drôle et surtout dans un cadre composé de règles, des recettes, toutes assez simples à appliquer, permettant un lancement rapide.

Trouver une idée et la structurer reste finalement ce qui prend le plus de temps.

Nous avons identifié notre problème : les jeunes entrepreneurs n’ont pas toujours les moyens d’embaucher des experts dont ils ont pourtant besoin pour accélérer leur développement, alors que les ressources pourraient leur être rendues disponibles.

Imaginer une solution et construire un produit nous a pris un peu de temps. Evidemment. Mais après, tout est allé très vite grâce notamment aux outils aujourd’hui disponibles : lancer notre landing page nos a pris deux heures grâce à Strikingly ; mettre en place un formulaire d’inscription en moins d’une heure, grâce à Calendly ; et même lancer notre offre via nos réseaux respectifs avec mailchimp, buffer, etc. en un temps record.

En quelques semaines, le TimeFunding était né.

Moi qui avais passé des années à vendre des stratégies digitales à prix fort, je découvrais des outils flexibles, complets et efficaces permettant de tout faire simplement et gratuitement.

Notre startup a tout de suite décollé : chaque jour comptait sa cohorte de nouveaux inscrits, la traction ne cessait de croître, les journalistes s’emparèrent du sujet, nous avons donc fait de nombreux passages en télévision qui ont eux aussi, accéléré encore les inscriptions.

L’autoroute du succès !

Jusque dans la Silicon Valley, le TimeFunding faisait parler de lui puisque Carlos Diaz, Geraldine Le Meur et Pierre Gaubil nous ont fait confiance au sein de The Refiners !

Nous sommes partis conscients du challenge qui nous attendait, mais aussi gonflés à bloc par nos résultats français.

J’avais lu « Running lean » d’Ash Maurya tout l’été et j’étais convaincue que nous étions sur la bonne voie.

A San Francisco, la chute fut brutale ! En quelques semaines nous arrêtions tout !

Dans la douleur d’un feedback laconique et réaliste : les mentors que nous rencontrions nous démontraient que notre startup n’aidait pas l’entrepreneuriat -bien au contraire. Que nous faisions notre marché sur un cimetière, que nous perfusions les entrepreneurs, que notre modèle avait les vertus d’une association….

Il fallait pivoter, « switcher », trouver autre chose.

Alors pourquoi un tel échec ?

J’ai compris depuis, que si j’avais appliqué à la lettre la méthode Running Lean d’Ash Maurya, j’aurais sans doute transformé mon projet avant mon départ dans la Silicon Valley.

D’autant plus que c’est un travail rapide et facile reposant sur le bon sens, essentiellement.

Prendre quelques minutes pour remplir le Lean Canvas, c’est avant tout prendre le temps de se poser les bonnes questions.

Neuf, en tout ! Neuf petites cases qui peuvent faire gagner à tous les entrepreneurs un temps précieux, de l’énergie, et leur éviter de passer par un échec évitable.

Quel est votre problème ?
Quelle est votre solution ?
Quelle est votre proposition de valeur ?
Quel est votre avantage compétitif ?
Qui sont vos clients ? Et vos early adopters ?
Comment allez-vous gagner de l’argent ?
Quels frais allez-vous devoir engager pour lancer votre projet
Quelles sont vos metrics ?
Et comment allez-vous communiquer ?

Pour chaque case : une hypothèse ! Même si vous êtes convaincus au plus profond de vous-même d’avoir la réponse pour chacune d’entre elles, le principe est simple : il faut les TESTER une par une !

Pas la peine d’appeler 150 contacts, pas la peine de faire des questionnaires à rallonge.

Avec un canevas d’interviews ultra simple, il faut partir à la rencontre de ses futurs clients, leur parler, et découvrir leur vision, recueillir leurs avis et faire évoluer le projet en fonction de ces retours.

La méthode apprend à écouter et à ne pas orienter les réponses, à considérer qu’il n’y a rien de définitif, qu’il faut toujours repartir au contact de ceux qui utiliseront ou consommeront la solution que l’on propose.

Etre en contact permanent avec ses futurs ou actuels clients est une obligation. Il ne faut jamais l’oublier ! Le jour où vous perdez le contact, votre entreprise perd pieds.

Pour chaque startup que j’accompagne aujourd’hui, je repars quasiment toujours du Lean Canvas, je repose toujours ces neuf questions clés, et je m’assure que les interviews ont bien été menées, que les retours ont bien été pris en compte. Si ce n’est pas le cas, alors il faut tout reprendre avant d’aller plus loin.

Sans méthode, lancer sa startup demande une énergie énorme pour des résultats incertains.

Combien de fois ai-je entendu : « j’ai une idée, mais elle est confidentielle, je ne peux pas en parler, encore moins à de futurs clients ! » ou encore « Je dois faire mon logo, ma charte graphique. Il me faut des cartes de visites pour dire qu’on existe, je verrai le reste après ! »

Et dans la mise en œuvre, à l’étape d’après, le raisonnement peut rester le même, meilleur moyen d’aller droit dans le mur : « je développe ma plateforme avec des tonnes de fonctionnalités, parce que je sais que c’est ce dont tout le monde a besoin ! » ou bien encore « j’ai une équipe de devs offshore qui me coûte 15k par mois, il faut que je leur fasse finir cette app, on testera après ! »

Et c’est pour ça que souvent, je coach des entrepreneurs épuisés, démotivés, et qui ne comprennent pas pourquoi tout cet argent et toute cette énergie déployée ne leur apportent pas les clients tant attendus ou le succès « évident » auxquels leur « idée » était promis.

Le Test & Learn et le mantra des entrepreneurs d’aujourd’hui : et faites-le avec méthode !

Abattez vos certitudes pour construire autour de votre projet de véritables convictions !

Concentrez-vous sur vos clients, marchez dans l’ombre, testez tout et systématiquement, utilisez les résultats pour construire un MVP le plus light possible : 1 problème — 1 solution — 1 fonctionnalité.

Oubliez la perfection : done is better than perfect! Et testez tout, toujours, vite et bien.

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