Partie II — C’est une bonne situation ça intrapreneur ?

Emilien Matte
9 min readJan 7, 2020

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Photo by Austin Neill on Unsplash

Comme le titre l’indique c’est une seconde partie. Cela veut dire qu’avant cela il y a une première partie que je vous invite à lire avant de continuer plus loin !

2017 : La guerre d’indépendance.

La société voit officiellement le jour début 2017 après de longs mois d’échanges sur la structure de la société.
Mais cette année sera marquée sous le signe de l’informatique. En avril 2017, nous recrutons enfin un CTO et plus tard un lead developer qui vont passer l’année à échanger avec le prestataire informatique afin d’avoir un SI digne de ce nom. C’est aussi l’année pendant laquelle nous négocions sans relâche le contrat informatique qui sera finalement signé plus tard dans l’année. Je ne connais pas grand chose à l’informatique ou au juridique mais je prends part aux négociations avec Alexandre R.

Mais cette année est aussi un tournant dans la vie du projet Moonshot.

Nous prenons notre indépendance et emménageons dans de nouveaux locaux en plein coeur de Paris. Notre équipe commence à s’agrandir de 5 personnes nous passons à 8 personnes avec des profils riches et variés : IT, data, marketing…

La structure est cependant gouvernée par deux têtes, deux caractères différents, deux visions différentes. Quand il s’agit de présenter l’entreprise et de faire des roadshows interne pour parler de Moonshot au reste de l’entreprise tout va bien. Mais que se passe-t-il quand il faut assoir une vision stratégique et durable pour faire décoller l’entreprise ? Que se passe-t-il quand il faut prendre une vraie direction business ? Que se passe-t-il quand deux visions s’opposent ?

Ça explose.

Gouverner une entreprise avec deux CEO ne fonctionne pas. Rodolphe décide fin Novembre 2017 de se consacrer à d’autres projets professionnels et retourne dans le Groupe (qu’il quittera définitivement quelques mois plus tard.)

(Ok en fait ça se lit assez vite, il fait quelques fautes mais sinon ça va, heureusement qu’il a fait deux parties.)

Et la question des parts alors ?

On m’a beaucoup posé la question. Non la création de Moonshot ne m’a pas fait devenir millionnaire. Je n’ai pas eu de salaire à 6 chiffres et je n’ai jamais possédé de parts significatives dans l’entreprise. En tant qu’intrapreneurs, nous étions soumis à la même politique de rémunération que l’ensemble de l’entreprise.

Moi pendant mes vacances sur mon yacht.

A l’origine on nous avait promis beaucoup de choses : entre 10 et 20% d’une société qui n’existait pas encore. Nous aurons finalement une action de la société avec une promesse de revenir sur le sujet plus tard… (Spoiler alert : le sujet ne sera jamais rouvert…)

Nous n’avons bénéficié d’aucun programme d’accompagnement interne lorsque nous avons créé Moonshot. La structure n’était pas encore prête pour accompagner des startups internes, et elle ne l’est toujours pas. Elle n’a pas su nous permettre de partir sur des fondations solides et nous accompagner dans les moments critiques. Pour créer la structure, il a fallu se débrouiller par nous même et souvent se battre contre l’interne et la direction.

Mais comment lutter contre son employeur pour demander plus quand nous n’avons pas encore fait nos preuves et que pour le moment la société n’a encore rien fait de concret ? Comment être force de proposition quand votre employeur est accompagné par un cabinet d’avocats de renoms et que vous êtes seul face à eux ?

On a fini par céder sur le sujet des parts pour faire avancer notre projet car nous avions la conviction que nous pouvions faire quelque chose avec Moonshot. À tort ou à raison mais il faut savoir choisir ses batailles…

On devra se contenter d’une action et d’un ordre de mouvement signé et anti-daté. En cas de départ prématuré de l’entreprise, celui-ci est actionné par la direction ayant pour conséquence directe : une vente forcée de l’action.

2018 : Paré au décollage.

Cette année sera placée sous le signe du commercial et de l’expansion de la société. Alexandre R (CEO et co-fondateur de Moonshot) enchaîne alors plusieurs centaines de rendez-vous jusqu’à trois par jour ! Sans le savoir, un rendez-vous va à jamais changer le futur de la société (mais nous ne le saurons que bien plus tard.)
Nous sommes amenés à participer au Paris Fintech Forum et obtenons (gratuitement) un stand d’une journée.

En plus de la centaine de contacts business que nous nouons, nous faisons la connaissance d’une société indienne qui se montre très intéressée pour nous racheter dans un premier temps et ensuite pour investir chez Moonshot et prendre une part minoritaire dans la société. Nous échangeons immédiatement avec notre board afin d’étudier la proposition.

La direction : “On veut vous acheter ? On veut investir chez vous ?”

Comme depuis le lancement du projet, la direction prend très peu au sérieux le fait qu’une autre entreprise ou un fond d’investissement s’intéressent de près ou de loin à notre société. Pour eux, nous sommes pour le moment un projet parmi d’autres et qui est voué à mourir. Malgré tout, Alexandre décide de ne pas baisser les bras et de continuer à entretenir ce contact pendant plus d’un an.

A force de persévérance il réussit à organiser une rencontre entre notre direction et la société indienne. La direction ne mesure pas tout de suite l’intérêt de la société indienne à notre égard mais finissent par comprendre que la proposition de la startup indienne devient sérieuse et que finalement la société Moonshot est peut-être plus intéressante qu’ils ne le pensaient.

Nous avons inspiré le programme intrapreneurial que le Groupe a lancé l’année suivante et avons beaucoup oeuvré en interne pour répandre la bonne nouvelle, conseiller les intrapreneurs, la Direction sur les “do” et “don’t”. C’était le jeu de faire la promotion du Groupe et de vanter les aspects positifs de notre modèle hybride. Mais qu’en est-il lorsque c’est au dépend de rendez-vous commerciaux importants ou pendant une période de rush? Qu’en est-il lorsque vous participez à plus de 150 rendez-vous internes ‘obligatoires’ au déprimant de la survie de la société?

Fin 2018, nous arrivons finalement à un accord avec la société indienne et nouons un partenariat technologique. Il est bien précisé que, Alexandre R (mais si le CEO et co-fondateur, il faut suivre un peu…) ne doit pas prendre part aux négociations, menées par les hautes sphères M&A du Groupe, notre employeur et un cabinet d’avocat.

La gestion des négociations est chaotique : manque de communication interne, erreur tactique, des avocats qui ne savent plus à qui parler, qui croire… Bref, Alexandre finit par être au coeur de ces négociations et arrachent la signature du deal qui doit permettre de remettre à plat l’organisation de la société et accélérer le développement de Moonshot.

Nous allons vite nous rendre compte que ce sont deux mondes s’opposent : d’un côté une super startup présente déjà aux Etats-Unis et en Asie cherchant son bras armé européen pour créer une Assurtech mondiale. De l’autre un corporate qui n’a aucune expérience dans l’accompagnement de startup et qui cherche uniquement à briller aux yeux du Groupe en faisant de nous un pantin de communication.

Le mois de Novembre (date à laquelle la signature du partenariat intervient) marque un tournant personnel de la suite de mon aventure au sein de Moonshot. Nous avons été écarté des négociations, la communication du deal est récupérée par notre employeur (à son avantage) et l’agence de presse que nous avions engagé se retrouve à récupérer les miettes. À partir de ce moment, je comprends (un peu tard…?) que les ennemis que nous avions au début ont vite compris l’intérêt de notre projet et souhaitent réécrire l’histoire de la société ainsi que son futur. La photo finish sur laquelle vient se greffer la direction que nous n’avons jamais vu en 3 ans et demi d’existence en est la preuve.

Le point de non-retour est franchi.

L’année 2018 aura été éprouvante pour tout le monde. Nous avons trop souvent l’impression de nous battre contre le système et d’être en décalage avec la direction: quand certains se servent de la société comme d’un tremplin pour leur carrière ou d’un objet de communication; nous y voyons une vraie opportunité de révolutionner le secteur par l’intérieur et une opportunité de proposer un service fort aux consommateurs et ainsi rendre l’assurance simple, utile et accessible à tous.

2019 : Clap de fin pour de nouvelles aventures.

(J’espère que c’est la fin, j’en ai marre là… Trop long son article)

Time to say goodbye.

En 2019, le sujet des parts refait tout doucement surface… La société indienne souhaite que l’équipe de management soit incentivée avec une réelle association au capital. Les discussions avec la direction vont se rouvrir petit à petit pour laisser vite place à un grand vide : pendant de long mois on nous fait miroiter un plan d’actions qui doit rapidement être présenté (il sera présenté plus de 5 mois après les premiers échanges).

La discussion est unilatérale, le montant fixe et les conditions pour obtenir les actions floues. À aucun moment on nous a présenté par écrit, un plan clair et précis.
N’étant pas identifié comme une “personne clef” de l’entreprise et étant “jeune” et “volatile” on me propose un montant bien inférieur aux 3 autres personnes associées au capital (je n’attendais pas une tape dans le dos ou un bon point. Mais quand tu passes 4 ans à sortir un projet de terre pour en arriver là… la chute est rude). Le pourcentage proposé est ridicule et les conditions pour obtenir les parts la première année sont inatteignables.

Depuis le lancement du projet, il y a toujours eu un bras de fer constant entre la direction et nous-mêmes. Nous avons rarement été aligné sur les mêmes objectifs et la même vision pour le futur de l’entreprise.

Malgré l’attente d’obtenir plus d’informations, l’entreprise continue de tourner et nous signons des partenaires importants dans le monde du e-commerce. Nous continuons à recruter, à signer des contrats et à développer des produits. De l’extérieur tout va bien. De l’intérieur, c’est un navire à la dérive qui ne va pas tarder à imploser.

Le lundi 3 juin 2019, je décide de quitter mes fonctions au sein de Moonshot pour rejoindre une nouvelle aventure. Dix minutes. C’est le temps que cela m’a pris lors de la remise et signature de ma lettre de démission. Après avoir passé 4 ans au sein de la structure, co-fondé une Assurtech à partir de rien, mon aventure prend fin en l’espace de dix minutes.

Je suis “jeune et volatile” après tout…

Les mots de la fin ?

(Mais il n’en finira jamais cet article ?)

Regret ? Je n’ai aucun regret d’avoir participé à cette folle aventure avec Alexandre. Sans lui je ne serai pas là où j’en suis aujourd’hui. Je sais que nos routes vont se recroiser dans un futur proche. Je repartirai sans hésiter avec lui dans une nouvelle aventure mais on fera les choses différemment et on évitera les erreurs du passé.

Expérience. Je n’ai jamais autant appris en l’espace de 4 ans qu’en créant Moonshot. J’ai occupé les fonctions de CTO par interim, Responsable Communication/Presse/Digital/UX-UI/Office Manager/Chief of Staff.

Fier. Je suis fier d’avoir fait parti de cette aventure, d’avoir créer à partir rien une Assurtech connue et reconnue par le marché. Fier d’avoir réussi à convaincre des personnes de rejoindre l’aventure.

Amer ? Je l’ai été. Mais plus maintenant. Je vous laisse écrire la future histoire de Moonshot.

Conseils ? (Ok donc en plus il se permet de donner des conseils…) Si vous avez la chance de pouvoir vivre une aventure comme la mienne et que vous avez l’esprit entrepreneurial, allez-y. Vous prendrez des coups mais si vous êtes avec les bonnes personnes vous en sortirez encore plus fort.

Merci Alexandre.

(ENFIN, j’en avais marre ! C’était nul son truc. Trop long, mal écrit et puis franchement on s’en fou un peu de ce qu’il pense)

(Bravo d’avoir été jusque là. Vous n’êtes pas nombreux ! Si à tout hasard vous avez raté la première partie, c’est par ).

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Emilien Matte

People Enabler & Internal Com @Wakam l ex Marketing Google France l Co-founder Moonshot-Insurance