LEVÉE DE FONDS : PRÉPAREZ VOUS AU COMBAT

Emmanuel Touboul
6 min readOct 20, 2015

Depuis maintenant près de 3 ans à L’Atelier BNP Paribas, nous avons accompagné près de 50 start-ups dans tous les secteurs d’activité. Quasi-systématiquement dans la stratégie de financement le sujet de la levée de fonds avec des VC se pose. Vous trouverez ci-dessous un guide pratique pour vous lancer dans l’aventure.

POUR COMMENCER

AVERTISSEMENTS

Les investisseurs ne sont pas stupides, no bullshit. Ce qu’il veulent évaluer c’est votre compréhension du marché, la qualité de l’équipe et en particulier votre capacité à exécuter votre plan. Soyez donc précis et prenez le temps de travailler votre discours.

Vous allez vous prendre des vestes. Restez calmes et SURTOUT ne vous mettez pas votre interlocuteur à dos, même si il est grossier et n’a aucun respect pour ce que vous pensez avoir accompli. Le monde de l’investissement est un petit monde et vous serez “grillé” en un rien de temps.

La levée de fond prend beaucoup de temps. C’est une épreuve physique et psychologique. Vous allez devoir mettre de coté l’opérationnel pendant quelques temps. En revanche, il est hors de question que votre développement en pâtisse. Il est absolument nécessaire que vous puissiez montrer une évolution au fur et à mesure que le process avance avec un investisseur. Vous devez donc pouvoir compter sur votre associé ou, à défaut, un salarié, pour gérer le développement opérationnel de votre start-up pendant ce temps (comptez 6 à 9 mois).

CE DONT VOUS AUREZ BESOIN POUR LEVER DES FONDS

Un pitch deck
Un email type de prise de contact
Un google sheet pour loguer les Q&A
Un outil de suivi de vos contacts/relations investisseurs

LE MEILLEUR MOMENT POUR LEVER DES FONDS (Premier tour)

Le meilleur moment pour réaliser votre premier tour de table auprès d’un investisseur c’est lorsque vous avez validez votre “Market Fit” et que vous commencez votre croissance (autour du stade 2 sur le schéma ci-dessous). Basiquement quand vous commencez à avoir une approche commerciale industrialisée et que vous avez de KPIs pour rassurer vos investisseurs.

sources: startupcommons.org

Si vous n’en êtes pas là et que vous avez vraiment besoin de cash pour développer, vous pouvez faire appel à du Love Money (famille, amis, collègues..) ou à un Business Angel (BA) prêt à financer en seed. Activez votre réseau et proposez leur un deal attractif (le niveau de risque est très élevé)

Je vous déconseille de faire appel à des clubs de Business Angel. C’est souvent très chronophage pour un résultat peu qualitatif tant sur le montant (ils mettent souvent de petits tickets) que sur la qualité de l’accompagnement. Un vrai BA vous amènera certes, l’argent dont vous avez besoin, mais aussi une expertise, un carnet d’adresse ou, à minima, de la légitimité !

LE PITCH DECK

C’est un document écrit entre 10 et 15 slides. C’est LE document que vous enverrez aux investisseurs potentiels. Il doit être précis et efficace, laisser le moins de place possible au questionnement. N’oubliez pas, votre interlocuteur connait tout de votre marché ou n’y connait rien.

Ne mentez pas ! les investisseurs ne sont pas des abrutis, ils vont s’en rendre compte et vous n’avez pas de temps à perdre. À ce stade, votre crédibilité est votre principal asset, ne le bradez pas !

Le pitch deck nécessitant un effort important, il fait l’objet d’un article dédié

EMAIL DE PRISE DE CONTACT

Préparez des templates de prise de contact avec les investisseurs. Restez très concis et donnez leur une raison de vous accorder un RDV.

Préférez toujours un RDV en face à face mais si besoin votre Pitch doit être autoporteur et peut être envoyé par email.

Si le partner vous renvoie vers un analyste, ne soyez pas déçu et traitez votre interlocuteur avec respect. C’est votre meilleur atout pour faire remonter votre dossier. C’est également la personne qui aura la meilleure vision sur votre business et la plus disponible pour vous aider.

Pour industrialiser cette étape, vous pouvez utiliser Gorgias, Toutapp permet également de faire des templates.

Q&A

Une des choses importantes pendant le process de levée de fonds, c’est d’apprendre à chaque meeting. Pour cela, pensez à bien noter les questions qui vous sont posées et consignez-les dans un document en y associant la réponse associée.

Lorsqu’un investisseur vous pose une question, ce n’est pas grave si vous n’avez pas la réponse. Cela peut même être rassurant que vous ne sachiez pas tout. Ce qui compte c’est la façon dont vous allez répondre. Prenez le temps de la réflexion et faites une réponse réfléchie. Vous pouvez également y répondre par email hors séance.

TRACKER VOS INTERACTIONS

Quand vous aurez initié la démarche de levée de fonds, vous aller rencontrer beaucoup d’investisseurs (on vous le souhaite). Il est capital de tracker toutes vos interactions (comme pour une démarche commerciale) afin d’être cohérent et pertinent.

N’hésitez pas également à qualifier chacun de vos interlocuteurs. Tous les investisseurs ne se ressemblent pas.
Il faudra convaincre certains en les rassurant, d’autres, au contraire, auront besoin d’être excités par l’audace du projet ! Ne vous trompez pas de profil et adaptez votre discours.

Pour suivre ces interactions et ne pas oublier de relancer un investisseur, vous pouvez utiliser des outils de CRM/sales comme Pipedrive ou Toutapp

DANS L’ARÈNE, FIGHT FOR YOUR LIFE

L’oral : vous n’avez qu’une seule chance de faire bonne impression

Lors de votre premier entretien avec un investisseur, votre objectif est qu’il rêve de vous. Si il ne vous rappelle pas rapidement c’est mauvais signe. Sa crainte principale est de rater LE deal. Si vous avez “ferré” votre investisseur il n’attendra pas trois semaines pour avancer.

Si vous n’avez pas de nouvelles dés le lendemain, ne paniquez pas. Peut être qu’il hésite, ou bien vous n’êtes pas encore prêt pour cet investisseur et vous devrez prouver dans les semaines qui viennent que la situation a changé.

Vous devez IMPERATIVEMENT savoir ce qu’il vous manque pour qu’il vous propose un term sheet afin d’adapter vos priorités business ou de trouver les arguments pour le convaincre.

A l’oral, soyez professionnel. Prenez votre temps et maitrisez votre discours. Ni votre interlocuteur, ni vous n’avez de temps à perdre alors soyez concis et direct. Ménagez vos effets et proposez une démo.

Soyez factuels et démontrez que vous avez une profonde connaissance de votre écosystème, que vous maitrisez vos KPIs et que vous avez les qualités d’un futur leader. Ne négociez pas vos valeurs !

Le follow-up : relancez régulièrement vos interlocuteurs mais jamais sans une bonne nouvelle

La difficulté avec cette phase de la levée, c’est de bien gérer sa communication et son calendrier pour que l’intensité de l’envie de votre interlocuteur ne fasse que monter. Il faut éviter que le soufflé retombe.

Pour cela voici quelques conseils :

  • Gardez en sous le coude (si vous avez une quinzaine de clients, gardez en 5 à annoncer petit à petit pour entretenir l’intérêt de l’investisseur et vous donner des raisons de le rappeler.
  • Ayez à chaque fois une bonne nouvelle. cela prouve que vous êtes dans une bonne dynamique.
  • Ne ratez pas votre chance, insister quand vous êtes au plus fort, n’attendez pas d’être dans le creux de la vague, ça marchera moins bien même si c’est là que vous aurez vraiment besoin d’argent.
  • Répondez à chaque interrogation, chaque doute de votre interlocuteur,

NB: n’oubliez pas de ranger vos bureaux, si le process avance, il y a de fortes chances qu’ils souhaitent passer voir comment ça se passe pour jauger votre capacité à organiser une équipe.

LE CLOSING

Pour la phase de closing, prenez votre mal en patience.
Cela peut être extrêmement éprouvant. A ce moment vous avez fermé la porte aux autres investisseurs et accepté une Term Sheet.

Vous allez subir une double pression. D’une part, une pression opérationnelle pour atteindre les objectifs fixés par la Term Sheet, d’autre part car vous entrez dans une période de négociation des conditions dans lesquelles votre investisseur va rentrer au capital.

Faites vous accompagner d’un bon avocat, faites du sport et communiquez avec vos associés à chaque itération.

La négociation peut être violente et dure mais n’oubliez pas qu’à ce stade, certes vous avez besoin d’eux, mais eux ne veulent pas non plus faire capoter le deal !

Sources : personal experience, http://www.paulgraham.com/, http://guykawasaki.com/, VC interviews, Start-up interviews

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Emmanuel Touboul

Managing Director @ Roland Berger Tech Ventures | Former Entrepreneur | #innovation #AI #VC #Fintech #Frenchtech #Venture Capital