Réforme du sport en France : les petits clubs sur la touche

Hugo Protat
14 min readDec 20, 2018

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Crédit photo : Vincent Leloup

“Ce n’est pas le rôle de l’État de financer durablement les petits clubs” déclarait Laura Flessel le 19 juillet 2018 au Sénat. 4 jours seulement après le sacre mondial des Bleus de Deschamps, l’ex-ministre des Sports engageait une « réforme profonde de la gouvernance du sport français après plus de soixante ans d’immobilisme ».

Mais quel aurait été l’avenir de nos champions du monde sans leurs petits clubs ? Mbappé sans l’AS Bondy, Pogba sans l’US Roissy-en-Brie ou Griezmann sans l’UF Mâcon. Cette petite phrase de l’ancienne porte drapeau des JO de Londres a provoqué de vives réactions et inquiétudes aussi bien dans le milieu sportif que politique.

Perrine Goulet, députée de la Nièvre (LREM), ne partage pas la position de la ministre : “ Pourquoi nous n’aiderions pas les petits clubs autant que la haute performance ? On ne peut pas mettre autant d’argent dans les grands clubs de haut niveau et ne pas en mettre dans les petits clubs. Si nous n’aidons pas ceux qui détectent tous les jours les enfants, nous n’aurons plus de haut niveau.

Régis Juanico, député de la Loire (Générations, ex-PS), est plus incisif : “ Une phrase malheureuse qui représente bien le constat d’impuissance de l’État vis-à-vis de ses missions d’aides et d’accompagnement.

Quant aux présidents de petits clubs, ils sont dans l’ensemble inquiets. José Conesa, président de l’US Créteil Escrime, résume assez bien le sentiment général : Le sport pour tous est nécessaire à la société et est promu par les petits clubs. Il ne peut pas vivre sans argent public. Si Madame Flessel considère que ce n’est pas la vocation de l’État, alors on fait des clubs privés comme on fait des écoles privées. Mais cela entraînera forcément la disparition du sport pour tous. Aucune information n’est redescendue au niveau des clubs. ”

Mais que s’est-il passé ? Pourquoi l’ancienne ministre a-t-elle jeté ce pavé dans la piscine olympique ?

“ L’Agence Nationale du Sport “ ou comment faire des économies au ministère.

Nous sommes en septembre 2017, Edouard Philippe commande un plan d’économies de 30 milliards d’euros pour l’État. Le rapport « Comité action publique 2022 » (CAP 22) sort et préconise pour le sport la création d’une “Agence Nationale du Sport, établissement public cogéré avec le mouvement sportif, en charge du sport de haut niveau et de la préparation sportive pour les grandes compétitions. Le soutien au mouvement sportif serait redéfini à travers la remise en cause du soutien financier aux fédérations les mieux dotées, la mise en extinction progressive du corps des Conseillers Techniques Sportifs (CTS) et l’attribution d’une subvention aux fédérations les moins dotées pour le recrutement de leurs cadres techniques. La création d’une telle agence pourra d’ailleurs conduire à s’interroger sur l’opportunité du maintien d’un ministère de plein exercice.

Voilà pour le faire-part de naissance de ce que bientôt le milieu sportif appellera “ l’Agence”, avec une pointe d’ironie dans la voix et beaucoup d’interrogations sur son mode de fonctionnement.

Parallèlement au rapport Cap 22, en octobre 2017, Laurence Lefèvre, Directrice de cabinet du ministère des Sports et Patrick Bayeux expert en politique et équipements sportifs sont chargés de la rédaction d’un rapport sur la nouvelle gouvernance du sport, qui sera remis le 16 octobre 2018 à la nouvelle ministre des Sports Roxana Maracineanu fraîchement nommée après la démission, retentissante dans le contexte, de Laura Flessel pour des raisons liées à sa situation fiscale.

Reste à savoir si dans la passation entre les deux championnes,” La Guêpe” n’a pas oublié de parler à l’ancienne nageuse de la lettre de cadrage, qui avait passé l’été sur son bureau, exigeant la suppression de 1600 postes et une baisse de 7 % soit 30 millions d’euros sur le budget des sports. Rien n’est moins sûr !

Après avoir jugée “brutale” l’annonce des coupes budgétaires pour son administration, Roxana Maracineanu est vite happée par un nouveau dossier, celui de la Nouvelle Gouvernance du Sport.

Patrick Bayeux, co-auteur, nous explique que l’État “ ne financera pas ” les petits clubs, cela passera par l’Agence Nationale du Sport qui va définir les moyens sur chacun des budgets. “Cela ne change rien pour eux ” nous assure-t-il. “ Ils auront toujours l’argent des adhérents et la subvention des collectivités, les subventions de l’Agence qui seront distribuées par les fédérations (…) c’est simplement une autre manière de définir des priorités et de répartir le financement des clubs toucheront toujours des subventions des collectivités.”

Rien ne change finalement. Mais pourquoi alors cette réforme, ces changements de gouvernance et ces réactions tant politiques que sportives ?

Des fédérations arbitres et argentiers en même temps ?

L’Agence Nationale du Sport fait une première victime : le CNDS (Centre National pour le Développement du Sport), un fonds d’état privilégié des associations sportives et des collectivités, disparaît. Sa suppression, votée dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2019, ne passe pas inaperçue.

“ Une enveloppe de l’Agence qui était jusqu’à maintenant distribué par le CNDS passera désormais par les fédérations “ confirme Patrick Bayeux.

Les fédérations seront chargées d’élaborer un projet sportif de développement fédéral et de définir “ un certain nombre de conditions d’éligibilité des clubs à des financements. C’est un des principes d’autonomie et de responsabilisation du mouvement sportif qui consiste aussi à lui donner les moyens de son développement ” poursuit-il.

Avec cette proposition de nouvelle gouvernance du sport, le mouvement sportif et les fédérations prennent la main sur la caisse et pourront soutenir les clubs. Mais comment à la fois arbitrer et décider des règles d’attributions des budgets ?

Et le ministère des Sports dans tout ça, va-t-il disparaître ?

“ Non pas du tout, il est plus conçu comme un ministère qui va développer des politiques partenariales plutôt qu’un ministère prescripteur réponds Patrick Bayeux.Le ministère se recentre sur ses missions régaliennes, de contrôle, de sécurité, de rayonnement international.” Nous voilà rassurés.

Côté budget, quelles sont les problématiques des petits clubs ?

L’US Créteil Escrime, un club très primé dans le Val-de-Marne. Photo : Hugo Protat

Florilège de réactions de présidents de clubs rencontrés ces dernières semaines. Les situations sont très variées, en fonction de la pratique sportive, de leur degré de dépendance aux subventions ou du coût des licences, mais la baisse de leurs budgets semble inéluctable.

Lazreg Benelhadj, président du Stade de Vanves Natation depuis 7 ans. Un club qui compte près de 1200 adhérents chaque année et de nombreux nageurs de haut niveau.

Christian Blanc, président du Stade Olympique Ugine Albertville. Photo :Hugo Protat

Christian Blanc, président du Stade Olympique Ugine Albertville (SOUA)

Depuis 2015, Christian Blanc, est à la tête d’un club de 320 adhérents né de la fusion il y a 33 ans des clubs de rugby d’Ugine et Albertville. Donc deux villes, pour deux subventions d’un montant identique : 19 000 euros.

Il a perdu 1000 euros de subvention en trois saisons : “ c’est compliqué, c’est dur ! Nous organisons beaucoup de manifestations : belote, bodega, tournois pour les petits et cherchons sans cesse des petits sponsors, artisans, commerçants pour compléter.

Si cette baisse peut paraître dérisoire pour certains, les répercussions sont bien concrètes pour Daniel, l’entraîneur de la section féminine du SOUA :Si un samedi après-midi, je dois emmener une équipe de jeunes à Grenoble, c’est 1000 euros pour un bus, et je n’aurai déplacé qu’une seule équipe !

Les volants engloutissent l’intégralité de la subvention de la mairie. Photo : Hugo Protat

Yann Doineau, président du Choisy-le-Roi Badminton club,

Ce n’est pas qu’on vit au jour le jour, mais presque. Nous n’avons n’a pas beaucoup de perspectives d’évolutiondénonce Yann Doineau. Depuis trois ans, sa subvention stagne. “Tous les clubs sont différents, mais les problèmes rencontrés en interne sont souvent les mêmes : un créneau qui saute, des tournois à organiser, un entraîneur qui n’est pas là (…), après la masse salariale pour payer les entraîneurs, les volants constituent une part conséquente dans notre trésorerie. Un set de 12 volants de bonne qualité coûte 20 euros et 12 volants ça fait 3 heures de jeu, donc sur une année cela répresente entre 7 000 et 9 000 euros. C’est vraiment une charge pour nous ! ” déplore Yann Doineau .

Comme la mairie de Choisy leur alloue une subvention de 9 000 euros, faites les comptes !

José Conesa, président et fondateur de l’US Créteil Escrime depuis 29 ans. Photo : Hugo Protat

“ Cette réforme est catastrophique. Elle va appauvrir les clubs formateurs “, José Conesa est catégorique.

Le Val de Marne compte 21 clubs d’escrime. Avant, une majorité d’entre eux envoyait un dossier au CNDS pour obtenir des financements puis les conditions d’accès se sont restreintes. “Nous avons l’impression qu’au niveau des clubs, tout a été fait pour que nous accédions de moins en moins au CNDS. Aujourd’hui, cela représente 2 à 3 clubs, et l’année prochaine, il sera supprimé. Pour moi, c’est un des modes de financement de l’Etat qui disparaît. Nous avions entre 1000 et 1500 euros, parfois 2000. Pour un petit club, c’est une somme importante. “

Philippe Reclus , un habitué des baisses de budget. Photo : Hugo Protat

Phillipe Reclus, Responsable du stand de tir de Malakoff,

Adhérent depuis septembre 2004, à la section tir de l’USMM (Union Sportive Municipale de Malakoff), Philippe Reclus en est devenu responsable en 2011. L’USMM fonctionne avec les subventions de la mairie de Malakoff, qu’elle redistribue ensuite aux 18 sections, dont la section tir de Philippe. “ La subvention globale versée par la mairie est constante depuis 5 ans ”.

Ce qui les sauve, c’est leurs 300 adhérents et leurs 27 bénévoles, qui assurent le bon fonctionnement du club. En revanche, ce qui les plombent, ce sont les augmentations des coûts de déplacement ou encore des licences “ cette année elle a pris 1 euro, mais les dernières années elles avaient augmentés de 13 ou 14 euros chaque année ”, et les frais d’inscriptions suivent aussi fatalement.

On a l‘habitude d’entendre parler de baisse de budget ou de suppression d’aides, donc ça ne m’inquiète pas plus que ça ” ironise -t-il.

Majorité et opposition partagent les mêmes inquiétudes sur l’avenir des petits clubs en France ?

Manifestation à l’appel du SNAPS réunissant une centaine d’agents de la Jeunesse et des Sports devant le ministère, le 10 octobre 2018. Photo : Hugo Protat

Revenons aux faits… Depuis le lancement de cette réforme à l’automne 2017, le gouvernement a commandé deux rapports, et annoncé une baisse du budget du ministère des Sports . Mais des députés, majorité comprise, ont fait part de leurs inquiétudes à Roxana Maracineanu lors de séances à l’Assemblée nationale.

Perrine Goulet fait partie des députés de la République En Marche, qui ont fait entendre leurs voix sur les orientations sportives du gouvernement.

Élue de la Nièvre et rapporteure spéciale de la mission sport pour la Commission des finances, elle a remis, le 30 novembre dernier, un rapport à Edouard Phillippe sur le financement des politiques sportives en France, dans le cadre du projet de loi de finances de 2019.

Interview haute en couleur d’une députée qui ne mâche pas ses mots.

Quelles sont vos réserves quant à l’orientation de cette réforme du gouvernement sur le sport ?

Perrine Goulet :Effectivement, nous sommes plusieurs députés à s’inquiéter de ce changement de gouvernance, par la suppression notamment du CNDS, la perte de certaines compétences du ministère, pour les envoyer dans une agence, qui serait co-présidée pour le sport pour tous à 30 % par l’État, 30 % par les collectivités territoriales, 30 % par le Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF ) et 10 % par les collectivités.

Pour le sport de haut niveau, l’État doublerai sa participation, qui passerait à 60 %, qu’en pensez-vous ?

Ce qui nous inquiète, c’est que la gouvernance n’est pas la même entre le sport pour tous et le sport de haut niveau puisque l’État n’y sera pas engagé à la même hauteur.

Pour la haute performance, il y a déjà un manager, Claude Onesta, alors qu’il n’est pas prévu de manager pour le développement des pratiques, donc déjà deux poids et deux mesures ! Je ne comprends pas qu’on créé une agence unique, il faut plutôt rénover le CNDS. Dans son conseil d’administration, il y a déjà les collectivités, l’État et le CNOSF. Il ne manque que les entreprises. Nous aurions pu juste leur faire une place.”

Le dispositif prévu semble compliqué, pas forcément efficace et surtout pas à l’avantage des petits clubs ?

Les clubs vont devoir passer par les fédérations. Et comme nous n’avons pas rénové le modèle de gouvernance des fédérations, où les modes d’élections des présidents sont différents d’une fédération à l’autre, cela risque d’être inégal d’une discipline à l’autre.

“Pour toutes ces raisons, je m’inquiète pour nos petits clubs. Quels vont être les moyens financiers dans les départements pour réagir à la baisse inévitable de leurs budgets ? ”

Toutes les fédérations n’ont pas les mêmes moyens. Certaines vont s’en sortir tandis que d’autres vont devoir se serrer sérieusement la ceinture.

Je suis d’accord. Il ne faut pas forcément supprimer les CTS, mais les réorganiser. Certaines fédérations ont énormément de CTS alors qu’ils ont très peu de licenciés et très peu de sportifs de haut niveau. Il est donc nécessaire de vraiment ré-équilibrer les moyens de l’Etat au sein de fédérations.

Quelles propositions avez-vous faites dans votre rapport ?

J’ai proposé une idée concernant les petits clubs, celle de créer un fonds de financement pour le sport départemental, ressemblant à celui pour le développement pour la vie associative. On augmente le fonds en le dotant des 40 millions de la taxe Buffet, au lieu qu’elle soit versée dans le budget de cette Agence un peu opaque. Ensuite, le budget est réparti sur le département. Chaque département pourra ainsi décider des aides qu’il apporte à ses petits clubs. Pour moi, cette idée n’est pas en contradiction avec l’Agence, qui serait surtout en charge des infrastructures, du développement de la politique sportive, etc. Je pense que l’on peut à la fois avoir le fonds départemental et l’Agence. Ça n’est pas antinomique.

Photo : Hugo Protat

Laura Flessel avait annoncé deux objectifs : 80 médailles aux JO en 2024 et 3 millions de pratiquants de sport. De l’autre côté, nous avons cette lettre de cadrage et ce changement de gouvernance, vous ne trouvez pas cela contradictoire ?

Trois millions de pratiquants ce ne sont pas forcément trois millions de licenciés, ce sont de pratiquants de sport, par exemple des gens qui courent, jouent un 3x3 au basket dans une salle de sport privée. Dans mon rapport, je demande à ce que l’on aide un peu plus les entreprises, pour qu’elles incitent leurs salariés à faire du sport, qu’elles leur offrent des avantages.

Les fédérations n’ont pas compris que les gens n’ont pas forcément envie de tous les dimanches aller faire des matchs (…) qu’il faut surtout les accompagner en s’appuyant éventuellement sur le privé.

“Dans cette réforme, avec la création de l’Agence, nous sommes en train de tout miser sur les fédérations, donc sur l’objectif des 80 médailles et je crois que l’on oublie trop les pratiquants.”

Concernant l’Agence Nationale du Sport, son lancement, son fonctionnement, c’est encore très flou …

Je vous le confirme, on attend un préfigurateur, celui qui va construire l’Agence et qui devrait être embauché bientôt. C’est flou, c’est bien le problème. Aujourd’hui, on me demande de faire un rapport en tant que rapporteure spécial aux finances sur l’utilisation des fonds publics l’année prochaine et je ne sais même pas comment ils vont être utilisés.

Sa date de mise en place devait être le 1er mars 2019, cela vous semble-t-il encore possible ?

Oui, cela me semble encore possible.

Dont acte. Pour Perrine Goulet, malgré ses nombreuses critiques, dans cette réforme tout n’est pas à jeter, mais beaucoup d’éclaircissements sont nécessaires.

Mais quelle est la position d’un député de l’opposition ?

Régis Juanico, député de la Loire, a quitté le PS en juin dernier pour rejoindre le mouvement Générations est aussi co-président du groupe de travail sur les Jeux olympiques et paralympiques de Paris en 2024.

“ Beaucoup de structures se posent aujourd’hui la question même de leur pérennité et moi aussi. “

Quel est votre sentiment sur la situation actuelle des petits clubs en France ?

Régis Juanico :Aujourd’hui, il y a un nombre croissant de clubs sportifs, qui mettent la clé sous la porte. Des problèmes de gestion pour certains, mais surtout plusieurs facteurs : la quasi-suppression des contrats aidés (on parle de près de 80 % au final du nombre de contrats qui aura été supprimé l’an prochain), qui permettent de prendre en charge tout le travail administratif en particulier et d’équilibrer la charge qui pèse sur les épaules des bénévoles responsables. Si vous conjuguez cela avec le désengagement de certaines collectivités territoriales, le coût des déplacements à l’extérieur tous les 15 jours, donc la location ou l’achat de bus, l’essence, le péage, (…) ce sont des charges incompressibles qui augmentent de la même façon pour les clubs que pour tous les français qui s’en plaignent actuellement.”

La situation est-elle critique partout ?

“ Non heureusement. Mais il y a des disciplines, qui sont plus exposées que d’autres, par exemple le volley-ball ou le handball, qui dépendent des subventions des collectivités locales pour 70 ou 80 % de leurs ressources.

Avec cette nouvelle réforme, peut-on parler d’un désengagement de l’Etat ?

Ça, c’est clair, quand il passe à 30 % des voix autour de la table. Alors certes, ça a l’avantage de mieux impliquer d’autres acteurs comme les collectivités, qui assument aujourd’hui l’essentiel des financements notamment les équipements sportifs, le mouvement sportif à travers les représentants des fédérations, ou le monde économique. Par contre, il est nécessaire qu’il y ait une clarification préalable pour savoir qui fait quoi exactement, car, à ce jour, c’est flou. Et ce n’est pas que le désengagement financier de l’État dans le sport, c’est tout un ensemble aussi lié à l’emploi associatif, et aux multiples contraintes qui pèsent sur les clubs,(…) il y a une forme de découragement pour beaucoup.

En plus, il y a cette doctrine qui est inspirée par des organismes technocratiques, tels que CAP 2022, qui considèrent qu’actuellement les opérateurs de l’Etat sont inefficaces. Donc exit le CNDS et l’on confie le pouvoir, à une agence, c’est un phénomène de technocratisation.”

Au fil de cette enquête, nous avons découvert que les premiers intéressés étaient les moins bien informés. Les patrons des 163 648 clubs en France, garants de la pratique du sport pour tous et également d’une bonne partie de la vie associative de l’hexagone ont plus la tête dans le guidon que l’œil sur l’horizon. Cette réforme, ils ne la connaissent pas vraiment, ou ne se sentent pas encore vraiment concernés. Dès l’année prochaine, ils vont devoir changer d’interlocuteur pour avoir du budget et négocier âprement pour poursuivre leur mission. Il y a fort à parier qu’ils ne seront pas à l’aise le jour du match et que cela va piquer. Ce bouleversement dans l’organisation du sport, la fin d’une politique publique prédit par certains, des crédits en baisse, les inégalités de traitement d’une fédération à l’autre ou d’une région à l’autre redoutées par beaucoup, n’incitent pas à l’optimisme.

Alors oui, les petits clubs ont raison d’avoir peur !

Et pourtant, le sport est le premier vecteur d’intégration chez les jeunes, il apprend le respect des règles, le respect de l’autre et aussi à gagner sa place sur la feuille de match. Les politiques publiques du sport se sont progressivement mises en place en France au cours du vingtième siècle. Elles sont fondées sur le principe que le développement des activités physiques et sportives pour tous, c’est un objectif d’intérêt général et, en cas de victoire, de cohésion nationale.

Les Françaises viennent d‘être sacrées championnes d’Europe de Handball. La France va accueillir en juin 2019 la Coupe du Monde de football féminin, en 2023 la Coupe du Monde de Rugby à XV, en 2024 les Jeux à Paris, la liste est longue d’évènements de premiers plans et notre palmarès dans certaines disciplines : football, judo, handball, biathlon, décathlon, tir, canoë kayak et de nombreuses disciplines handisport … l’est tout autant.

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Alors comment financer, développer les petits clubs qui font les champions de demain ?

Comment réconcilier intérêt général et évènements médiatiques gérés par les sponsors, pour qu’au final chaque français puisse encore avoir la chance de simplement mouiller le maillot ?

Le premier trimestre 2019 devrait nous apporter quelques éléments de réponse.

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