Propositions pour une vraie Réforme Ferroviaire

Géopolitique (très politique) du rail européen

Jean-Daniel Guyot
26 min readJun 19, 2014

(Attention : ce texte est relatif à la réforme ferroviaire de 2014, pas celle de 2018. Les contextes et les objectifs de ces réformes ne sont pas identiques, même si certains éléments historiques restent vrais.)

En 2009, nous avons créé avec mes deux associés Capitaine Train, le premier site indépendant de vente de billets de train en France. Nous vendons plusieurs millions d’euros de billets de train par mois, en France, en Allemagne et partout en Europe. Grâce à notre positionnement quasi-unique, nous sommes devenus des spécialistes du réseau ferroviaire européen.

Le conflit qui oppose les syndicats à la SNCF et au gouvernement français est très compliqué à comprendre de l’extérieur. Officiellement, la CGT et SUD Rail, respectivement premier et troisième syndicats SNCF sont entrés en guerre contre la “Réforme Ferroviaire”, portée par le Ministre délégué chargé des Transports et de l’Économie maritime.

J’aimerais éclaircir quelques points dans ce débat. Prenez un bon café et des petits gâteaux, l’article est un peu long mais j’espère qu’il sera instructif.

L’Europe : des racines et des rails

Pour comprendre les enjeux actuels, il faut revenir en arrière, aux sources de l’Union Européenne. Quand ils créent la CEE en 1957, les pays fondateurs (Allemagne de l’Ouest, France, Benelux et Italie) ont chacun une histoire forte avec le rail — démarrée au XIXème siècle. Ils ont tous un réseau ferroviaire dense et une expertise importante du transport de voyageurs et de marchandises.

Ancien hémicycle du Conseil de l’Europe
Assemblée consultative, 04/05/1965 (Photo :
CRDP Strasbourg)

Si on prend l’exemple de la France, le schéma en étoile centré sur Paris a été conçu en 1838 par Legrand et la première loi sur les chemins de fer promulguée en 1842, sous Louis-Philippe. Cette « Charte des chemins de fer » définissait un cadre public-privé où l’État était propriétaire des terrains et des bâtiments tandis que les différentes compagnies privées avaient la responsabilité de construire et gérer le reste de l’infrastructure, un peu sur le modèle des concessions d’autoroute toujours en place.

Évolution du réseau ferré français de 1850 à 1921. De gauche à droite : 1850, 1910 et 1921. Source : Eric Rubio

Le but de cette loi était de rattraper l’Allemagne, la Belgique ou encore les États-Unis, bien en avance sur leurs réseaux respectifs. Le moins que l’on puisse dire est que cela a bien fonctionné. Si bien que l’État est allé trop loin, en voulant relier absolument toutes les sous-préfectures, poussant ainsi les compagnies ferroviaires à exploiter des lignes non rentables.

Le 31 août 1937, l’État crée la Société Nationale des Chemins de Fer pour sauver les différents acteurs du système, qui font face à la concurrence de la voiture et du camion, inexistante auparavant, sur un réseau beaucoup trop large. Les grandes compagnies ferroviaires sont alors réunies au sein d’une entreprise public-privée détenue à 51 % par l’État et à 49% par les anciennes compagnies. L’accord est le suivant : les anciennes compagnies donnent tout à la SNCF et celle-ci les rembourse pendant 45 ans, avec un taux d’intérêt de 6%. Ce système a ainsi perduré jusqu’en 1982, année à laquelle l’État est devenue actionnaire à 100% de la SNCF.

À partir de 1938, la SNCF devient l’instrument de « l’État stratège ». Il l’était déjà car l’État définissait les lignes à réaliser et leurs tracés. L’exploitation des trains va aussi devenir un outil pour réaliser telle ou telle politique. Et quand on parle de stratégie étatique, on ne parle plus forcément de rentabilité financière : alors que les anciennes compagnies ferroviaires pouvaient se prévaloir de dividendes en cas de bénéfice, la SNCF nouvellement créée n’en verra jamais la couleur (il faudra attendre 2000 pour voir le premier résultat net comptable positif de la SNCF).

Le rail comme moteur de la libre circulation

Revenons à notre CEE. Chaque État ayant un réseau ferroviaire conséquent, le rail fait naturellement partie de la “Communauté Économique” à sa création. Dès 1965, le Conseil prend une décision “relative à l’harmonisation de certaines dispositions ayant une incidence sur la concurrence dans le domaine des transports par chemin de fer, par route et par voie navigable”.

[…] considérant qu’un des objectifs de la politique commune des transports doit être l’élimination des disparités qui sont de nature à fausser substantiellement les conditions de concurrence dans les transports ; qu’il est nécessaire en conséquence de prendre des mesures d’harmonisation ou de rapprochement qui doivent porter sur certaines dispositions législatives, réglementaires ou administratives spécifiques aux transports ; que ces mesures doivent, selon les cas, concerner à l’échelon de la Communauté tant les relations entre les modes de transport que, à l’intérieur d’un même mode de transport, les relations entre les entreprises des différents États membres […]

L’objectif du Conseil par ce texte ? Il est dans ses gènes : réunir les hommes et femmes qui le composent dans un marché économique commun fluide et efficace. C’est donc naturellement qu’il encourage les États à harmoniser leurs taxes, fiscalités, législations et conventions sociales afin de permettre une concurrence saine. Il les invite à transformer leurs compagnies ferroviaires en réelles entreprises équilibrées.

La dette à grande vitesse

La France continue cependant à faire la sourde oreille. On ne dicte rien à un « État stratège », même si la fréquentation de ses trains baisse petit à petit, victimes de la démocratisation de l’automobile individuelle. La solution pour contrer la voiture et l’avion ? La vitesse. Le projet TGV est lancé en 1966 sous l’impulsion de Pierre Sudreau (président de la SNCF de 1975 à 1981) en s’inspirant du Tōkaidō Shinkansen japonais lancé deux ans avant. Le choc pétrolier aura raison des prototypes à turbines, le TGV “tout électrique” est donc choisi en 1974 par Pompidou.

Rame TGV Sud-Est en version d’origine orange, en gare de Paris-Lyon (Photo : Didier Duforest)

Nous sommes en 1975, et la CEE se rend bien compte que les États n’en font qu’à leur tête. Elle remet donc une nouvelle fois le couvert pour rappeler… les mêmes principes de 1965, en nommant cette fois les entreprises visées. Les demandes sont pleines de bon sens : des comptes clairs et séparés de ceux de l’État, la recherche de l’équilibre financier et plus d’autonomie vis-à-vis de la politique de l’État.

Cette demande de la CEE de revenir à l’équilibre face au coût du projet TGV doit certainement être dans la tête de Giscard d’Estaing, quand il convoque Jacques Pélissier, Président de la SNCF, en 1975 pour lui annoncer la fin du projet TGV. Mais les dix ans de travail de Pierre Sudreau et André Ségalat (président de la SNCF de 1958 à 1975) convainquent finalement l’État. Le TGV démarre ainsi son service commercial entre Paris et Lyon en 1981.

Le projet met en valeur l’excellence française en matière d’ingénierie, la France va vite et elle est moderne. La SNCF reste d’ailleurs en pointe dans la grande vitesse en Europe pendant très longtemps. Encore aujourd’hui, elle est largement en tête en nombre de passagers·km transportés (même si l’Espagne a un plus grand réseau grande vitesse, construit récemment, qui la place en deuxième position mondiale après la Chine).

Évolution du nombre de passagers·km transportés par pays entre 1981 et 2011 exprimés en milliards de passagers·km (Gpkm)

Le projet a coûté cher à la SNCF, mais l’État soutient la création de nouvelles lignes. C’est le début de la politique du “tout-TGV”. La dette augmente de 10% entre 1980 et 1990, puis de 37% entre 1990 et 1995. En 1995, le taux de service de la dette est considéré comme “insupportable” pour une entreprise qui, d’après la CEE, devrait être capable d’opérer “en pleine indépendance commerciale”.

La séparation de la dette et de l’État

La SNCF crée en 1991 une entité pour gérer sa dette, la SAAD (Service Annexe d’Amortissement de la Dette), un acronyme certainement trouvé par un anglophile, qui désigne en réalité un service interne de la SNCF. L’idée est de créer une structure dans laquelle l’État puisse abonder et diminuer de son côté la dette, afin que la SNCF puisse repartir sur des bases saines. Ce jeu de passe-passe ne leurre personne et est critiqué dès le départ par la Cour des Comptes.

1991, c’est aussi l’année que choisit le Conseil des Communautés Européennes pour publier une directive qui permet d’aller plus loin dans l’intégration européenne des chemins de fer. La directive 91/440/CEE répète ce que le Conseil dit depuis 1965, et ajoute la notion de séparation de l’infrastructure de réseau et de l’exploitation. Les gouvernements doivent :

  • Réaliser la séparation de la gestion de l’infrastructure et de la gestion de l’exploitation (disposition facultative), et la séparation des comptes (disposition obligatoire).
  • Veiller à ce que l’aide versée à l’une de ces deux activités ne soit pas transférée à l’autre.
  • Établir des règles de paiement pour l’utilisation de l’infrastructure selon le principe de la non-discrimination.
  • Reconnaître aux regroupements internationaux des droits d’accès pour la prestation de services internationaux de transport de marchandises et de voyageurs.

L’État et la SNCF décident d’appliquer une disposition pourtant facultative (ce qui n’est pourtant pas dans leurs habitudes) et créent une entité d’infrastructure séparée.

Séparer les deux activités va à l’encontre de la volonté des dirigeants de la SNCF, l’activité d’infrastructure étant bien trop stratégique pour s’en séparer si soudainement. D’un autre côté, la dette empêche toute perspective d’avenir pour l’entreprise. Elle tire donc partie de la situation en créant un montage financier dont l’unique objectif est de transférer la dette… mais rien d’autre.

RFF est ainsi créé en 1997, aussi maigre que possible sur le plan opérationnel mais lesté de 20,5 milliard d’euros de dette (2/3 de la dette SNCF).

Dès lors, le rôle de RFF n’est pas d’être une entité de gestion de l’infrastructure, mais bien d’être un porteur de dettes. Sa mission est légère, elle consiste à définir “les objectifs et principes de gestion relatifs au fonctionnement et à l’entretien des installations techniques et de sécurité sur le réseau ferré national ainsi que ceux relatifs à la gestion du trafic et des circulations sur ce réseau”. L’expertise de l’infrastructure, qui devrait être en tout logique chez RFF, est restée à la SNCF. Ce sont les employés de SNCF Infra qui font concrètement le vrai travail sur le réseau français. La SNCF facture RFF par le biais d’une convention de gestion, et le montant des prestations est plus élevé que ce que RFF ne lui facture en péages.

C’est un joli coup pour la SNCF et le gouvernement français, mais aussi, il faut le dire, une belle entourloupe pour l’Europe et ses citoyens, dont personne n’est dupe. 1997 marque aussi le début d’une longue série d’actions de la SNCF visant à limiter toute concurrence en France (tout en en profitant hors de nos frontières).

Personnellement, cette politique de la SNCF ne me choque pas particulièrement. Il est tout à fait normal pour le ou la dirigeante d’une entreprise de faire tout ce qui est en son pouvoir pour la protéger et la faire grandir. Je considère ça comme un acte de bonne gestion. En réalité, il n’y a rien à redire contre les directions SNCF qui se sont succédés depuis 1997 (Gallois, Idrac, Pepy). C’est à l’État de ne pas se laisser influencer et de savoir prendre des décisions dans l’intérêt commun. C’est malheureusement impossible à faire sans avoir une vision claire sur trente ou quarante ans, un horizon bien trop lointain pour les hommes et femmes politiques actuels.

L’Europe ne lâche rien

L’Union Européenne (la France y compris donc) continue pendant ce temps la modernisation du système ferroviaire européen, toujours dans l’objectif d’un marché libre et efficace pour relier les européens entre eux, comme elle le fait dans d’autres domaines. Sa politique est connue, claire et détaillée dans un Livre Blanc en 1996 : « Une stratégie pour revitaliser les chemins de fer communautaires ».

La politique de l’Europe repose sur une connaissance claire de l’intérêt et des ressorts d’un marché équilibré et sain, en un mot : concurrentiel. Le seul problème est que cette expertise est assez technique et difficilement compréhensible pour le grand public. Dans le cas du ferroviaire, la clé d’un marché ouvert repose sur la facilité essentielle qu’est le réseau ferroviaire. Sans un accès simple, rapide et en toute neutralité à cette facilité essentielle, la concurrence n’est pas possible. Les grands opérateurs historiques le savent très bien et font parfois tout ce qu’ils peuvent pour en limiter l’accès.

L’idée de l’Europe est de permettre l’accès en “open access” au réseau ferroviaire européen (différent de celui des concessions en place par exemple au Royaume-Uni). Le schéma est très simple : des opérateurs de réseau neutres, économiquement stables, font varier le prix des péages en fonction de la demande des opérateurs. Ainsi l’accès aux lignes peu rentables est favorisé par des prix attractifs, et le prix élevé des lignes rentables permet l’équilibre du système.

Suite au Livre Blanc de 1996, aucun gouvernement et aucun opérateur ne peut se dire pris au dépourvu. L’Europe crée des « paquets ferroviaires » régulièrement, qui visent à libéraliser l’exploitation des chemins de fer tout en structurant son réseau. 2001, 2002 et 2004 : trois paquets sont votés par le Parlement Européen.

L’objectif du troisième paquet est notamment d’ouvrir à la concurrence le trafic de voyageurs. Après quelques aller-retours, le Parlement vote finalement le texte en 2005 : il prévoit une ouverture des liaisons internationales en 2008, puis une ouverture complète en 2012. Catastrophe pour les monopoles. Ils avaient pourtant réussi jusque-là à détourner l’esprit des différentes lois à leur propre avantage, mais là, les choses deviennent sérieuses.

Vous imaginez sans doute le lobbying qui s’ensuit. La pression des plus vieux États membres est énorme, et la bonne vieille menace de conflits sociaux massifs est brandie pour finir d’amputer le texte pourtant déjà voté. Le trafic international sera finalement ouvert en 2010, le trafic national est repoussé… à plus tard. Cette loi a depuis bien été appliquée en France, elle donnera naissance à Thello, joint-venture entre Transdev et Trenitalia, qui opère entre Paris et Venise.

La concurrence made in SNCF

L’alerte est quand même chaude pour la SNCF. Elle décide de se préparer à la concurrence (on ne sait jamais) et crée iDTGV, filiale de droit privé qui n’a pas la licence d’opérateur ferroviaire mais qui loue des trains à la SNCF. iDTGV est un “labo” qui lui permet de sortir des contraintes de tarifs sociaux et de tester d’autres façons de vendre des billets de train, plus proches de l’aérien. Pour faire passer la pilule, elle associe tout TGV iDTGV à un TGV SNCF, qui lui contient des places à tarifs sociaux.

C’est aussi en 2005 que Hubert du Mesnil devient Directeur Général de RFF. Au fur et à mesure des années et jusqu’à la fin de son mandat, M du Mesnil est de plus en plus transparent et clair sur le boulet de 20 milliards d’euros que traîne RFF et le rôle pourtant essentiel de son entreprise pour la qualité des transports français.

Il dit de plus en plus fort ce que tout le monde sait : la réforme de 1997 n’a pas été faite pour créer RFF mais pour créer un véhicule pour la dette. Il faut redonner à RFF son autonomie et ses employés, augmenter les péages et permettre la concurrence pour assainir le système.

Hubert du Mesnil, président de RFF de 2005 à 2012 (Photo : Mobilettre)

Mais il n’est pas entendu en dehors du microcosme ferroviaire. La SNCF utilise durant toutes les années « du Mesnil » ce qui est devenu son arme principale : la communication. Elle se plaint continuellement de l’augmentation des tarifs des péages, qui « augmente le prix des billets », bien entendu, alors que ces tarifs sont très faibles par rapport à la structure de coût des trains, et qu’elle en récolte l’essentiel, RFF lui sous-traitant l’infrastructure.

Autre fait intéressant, pour préparer l’ouverture à la concurrence en 2010, la SNCF planche sur l’augmentation de la vitesse de ses TGV dès 2007. Elle communique d’ailleurs largement là-dessus. Un train qui va plus vite, voilà qui a de la gueule ! Pourtant tous les experts du ferroviaire vous diront que ça n’a pas de vraie logique économique. La SNCF le dit d’ailleurs clairement : « La vitesse commerciale de nos concurrents compte dans la compétition ». Le but est de définir des standards trop hauts pour les concurrents potentiels. Tous les moyens sont bons pour protéger son marché historique.

Afin de ne pas laisser éclater une guerre commerciale avec son principal concurrent potentiel, la SNCF crée en 2007 une filiale commune, Alleo, avec la Deutsche Bahn. Tout est fait à 50/50 et en parfaite entente. Le siège est mis à la frontière, les trains sont à la fois des TGV français et des ICE allemands et opèrent les lignes Paris-Münich et Paris-Francfort. Cela permet de faire bonne figure : l’Europe du rail est en marche, les grandes entreprises arrivent à coopérer, etc.

ICE en gare de Liège (Photo : Darkroom Daze)

Les deux grand groupes européens se tiennent à portée de vue et coopèrent au lieu de se concurrencer. Vraiment ? Non, car en réalité la concurrence se joue hors des frontières françaises.

Chaque pays peut en effet décider d’ouvrir son marché sans attendre l’obligation de l’UE. Keolis, achetée en 2001 par la SNCF, prend de l’ampleur et grossit à coup d’acquisitions. L’entreprise est bien gérée et tire parti de son expertise et des marchés ouverts pour se développer. Aujourd’hui par exemple, Keolis Deutschland est le troisième opérateur ferroviaire privé du pays.

En 2008, la SNCF achète 20% de NTV, le premier concurrent de l’opérateur historique italien, qui correspondrait en France à un concurrent du TGV sur Paris-Marseille, Paris-Lille et Paris-Bordeaux. Elle profite donc de l’ouverture du marché italien en 2012 et NTV se porte très bien, merci.

De son côté, la Deutsche Bahn acquiert Arriva en 2010, en laissant tomber la partie allemande pour des questions de concurrence, qu’elle vend aux chemins de fer italiens.

En 2011, la SNCF prend des parts dans WESTBahn, un nouvel opérateur autrichien dont l’objectif est on ne peut plus clair (et en phase avec l’UE) :

WESTbahn was founded in the course of the rail liberalisation within the European Union. The railway networks were made accessible to private providers as a result of the liberalisation: More competition should ensure more quality.

Le marché du bus s’ouvre lui en 2011. Eurolines, qui opère des lignes internationales, se voit offrir le droit au “cabotage”, ce qui lui permet de réaliser des lignes nationales sous certaines conditions. Immédiatement, le projet “C6” est lancé à la SNCF, renommé plus tard iDBUS. Deutsche Bahn crée les ICBus pour accompagner la libéralisation du bus en Allemagne.

La SNCF ne s’arrête pas là et crée Ouigo en 2013 pour expérimenter un nouveau type de train low-cost et se préparer encore mieux à la concurrence.

Aujourd’hui la concurrence nationale existe en France.
Au détail près qu’elle n’est composée que de sociétés appartenant à la SNCF.

TGV Duplex OUIGO (Photo : Megamark)

La SNCF passe à l’attaque

En 2012, c’est une nouvelle présidence de la République qui s’ouvre en France et un nouveau gouvernement qui prend le relai. L’occasion rêvée pour la SNCF de reprendre la main sur les dossiers chauds à venir, avec notamment en ligne de mire le quatrième paquet ferroviaire européen. Le Vice-Président de la Commission Européenne, Siim Kallas, en charge des transports, reste attaché aux idées originelles que l’Europe défend depuis 1965 et cherche à reconstruire ce qui a été détruit par les intérêts particuliers dans le troisième paquet ferroviaire.

Siim Kallas (Photo : Motor Talk)

La stratégie n’est pas forcément évidente pour la SNCF mais tout se déroule très bien. Elle rencontre finalement peu d’opposition car le gouvernement veut avant tout la paix sociale, cherche les occasions de montrer son patriotisme économique, et la communication infaillible de la SNCF se charge d’abreuver les médias sans cesse. Un projet de réforme ferroviaire est annoncé par Frédéric Cuvillier, nouveau Ministre des transports, en 2012, conjointement au remplacement de Hubert du Mesnil à RFF, qui décidément disait beaucoup trop de choses dans le sens de l’UE. J’insiste sur ce point : la réforme ferroviaire n’aurait pas du tout été possible dans ces conditions si du Mesnil était resté en place.

Hubert du Mesnil est remplacé par Jacques Rapoport, considéré comme bienveillant vis-à-vis de la SNCF. Et en effet, depuis sa nomination, plus personne n’a vu M Rapoport sans M Pepy. La SNCF a repris tous les sujets de communication qui auraient dû être ceux de RFF.

Jacques Rapoport (à droite), avec Guillaume Pepy (Photo : Ouest France)

Cela s’est particulièrement vu lors de l’accident de Bretigny en 2013. RFF, le gouvernement et les enquêteurs auraient dû être aux premières loges. Or tout le monde n’a vu que la SNCF. La SNCF a pris les rênes de la communication d’un accident dont elle faisait partie en tant qu’utilisatrice du réseau. Ce que je dis n’est pas une critique de la façon dont cela s’est déroulé, et en tout état de cause les responsabilités seront correctement établies dans cette tragédie, mais cela montre à quel point la SNCF ne se présente jamais comme un acteur du système mais comme le système lui-même, comme si la question ne se posait même pas. Je dois dire que je suis admiratif.

La Réforme Ferroviaire

En 2013, le gouvernement et la SNCF mettent les bouchées doubles sur la Réforme Ferroviaire. L’objectif est de prendre de vitesse la Commission Européenne, afin que la Réforme Ferroviaire française soit votée plus vite que le quatrième paquet ferroviaire européen, beaucoup trop ouvert à la concurrence.

Les rhétoriques avancées par le gouvernement et la SNCF, qui y met tout son poids médiatique, sont les suivantes :

A) Rassembler infrastructure et exploitation

  1. Le modèle du TGV est en bout de course, la SNCF souffre terriblement, pour une et une seule raison : les péages des rails facturés par RFF sont devenus trop chers.
  2. Le manque de synergies entre SNCF et RFF fait perdre du temps et surtout de l’argent à tout le monde.

Conclusion : Il faut donc réunir les deux acteurs au sein d’une même structure pour qu’ils travaillent mieux ensemble.

B) Préserver le modèle social

  1. L’Europe veut nous imposer une concurrence qui fera du dumping social.
  2. Notre modèle social est un acquis.

Conclusion : Il faut négocier et créer une convention collective de branche qui s’appliquera à l’ensemble du secteur.

Le problème est que tout se base sur un argumentaire faussé, qui arrive à des conclusions avantageuses pour la SNCF.

Décortiquons les différents points avancés :

A) Pourquoi rassembler infrastructure et exploitation ?

Les péages trop chers
Les péages de RFF augmentent car ils étaient partis de très bas, bien trop bas pour que le système soit pérenne et que RFF puisse régler les factures de… SNCF Infra. Ça n’est pourtant pas le coût le plus important pour un train, donc l’impact est minime sur le prix du billet. L’argument n’a aucun sens économiquement.

Le manque de synergie RFF/SNCF
La séparation SNCF/RFF a été faite justement parce que le système ne fonctionnait pas. Pourquoi les fusionner à nouveau permettrait-il désormais d’économiser de l’argent ? Ça n’a aucun sens évidemment, sauf si on peut trouver un exemple qui prouve le contraire.

Une histoire de trains trop grands et de quais à rabotter sort alors avec un timing incroyable dans les médias.

Une histoire ridicule mais marquante, un « non-problème » selon M Pepy, mais qui est ressorti depuis lors de chaque interview du Ministre délégué aux transports. L’histoire parfaite qui permet de prouver, par une anecdote facile à reprendre, que la relation SNCF/RFF ne peut pas fonctionner. Je ne crois pas une seule seconde au hasard dans cette histoire. Il n’y a d’ailleurs eu aucune improvisation du gouvernement dès la sortie de l’histoire dans la presse. Le message disant que le couple RFF/SNCF fonctionnait mal (et que la libéralisation était mauvaise) a été matraqué immédiatement.

Le gouvernement répète alors à qui veut l’entendre que fusionner RFF et SNCF leur permettrait de fonctionner mieux ensemble. Quand on dit ça, on sous-entend aussi de facto que les concurrents de la SNCF seront pénalisés dans leur relation avec RFF, puisque leur relation fonctionnera moins bien. Le gouvernement dit clairement qu’il est en train de donner un accès privilégié à une facilité essentielle au marché.

La solution poussée dans le projet de Réforme Ferroviaire s’inspire ouvertement de la situation allemande, où DB Netz est filiale à 100% de Deutsche Bahn AG. Comme la concurrence existe en Allemagne (elle représente 16% du marché et a même permis de rouvrir des lignes abandonnées), la SNCF peut dire que ce système fonctionne. C’est oublier que ce système a été mis en place en 1994 et que les recours des opérateurs auprès des juridictions compétentes se multiplient année après année. Un accès neutre aux gares, par exemple, est loin d’être gagné.

Au final quand on parle des relations SNCF/RFF, c’est surtout le manque de pouvoir et de poids de RFF qui pose un problème. Il y aurait moins de débats si RFF était capable d’imposer sa vision à long terme du rail français et européen.

La conclusion devrait donc être : Il faut créer une entité publique neutre et puissante capable d’attirer efficacement des transporteurs performants pour bien desservir le territoire français.

B) Comment préserver le modèle social ?

C’est là que se porte les principales craintes des cheminots. La peur du déclassement est forte. La réforme prévoit des négociations autour d’une nouvelle convention collective qui pourra s’appliquer à la SNCF et à tout nouveau concurrent.

Le gouvernement a joué gros là-dessus car il savait que cela serait un élément qui crisperait les syndicats. L’objectif de la SNCF est ici, comme elle l’a tenté avec la vitesse des TGV, de définir un standard difficile à atteindre pour un nouvel entrant. C’est donc un jeu d’équilibriste : négocier une convention collective assez avantageuse pour embêter un nouvel entrant, tout en faisant ce qu’elle peut pour réduire le poids des avantages acquis par ses salariés après 60 ans de négociations syndicales (ce qui est le cas dans toute entreprise de cet âge).

La négociation doit évidemment se passer avant qu’un nouvel entrant arrive, ça permet d’imposer sa loi. Car bien sûr, aucune entreprise ne doit pouvoir profiter des avantages de la SNCF (gestion de la dette par la France, rapprochement avec RFF, monopole des contrats avec les régions, etc), mais il faut que ses désavantages s’appliquent aux autres. La SNCF, le gouvernement et les syndicats agitent là le même chiffon rouge : le “dumping social”.

Ce terme n’a aucun sens : on peut certainement parler de dumping social quand un grand groupe exploite à la limite de l’esclavagisme des enfants au Bangladesh, mais on ne peut pas parler de dumping social quand on emploie des employés en France. D’ailleurs si on parle de dumping social simplement parce qu’une société respecte la réglementation d’un pays, alors la SNCF, via Keolis, fait du dumping social partout en Europe et dans le monde.

Donc non non, et encore une fois non, une nouvelle entreprise ferroviaire ne ferait pas de dumping social en créant des emplois en France. Elle respecterait la loi et c’est tout. Si la SNCF pense que les avantages des ses salariés sont trop importants, à elle de négocier cela avec eux.

La réforme ferroviaire n’a en fait rien d’une réforme. C’est une loi conçue sur mesure pour freiner la libéralisation du secteur. Elle a été pensée par la SNCF et pour la SNCF, et non pour l’intérêt commun, ni pour les caisses de l’État, pour les cheminots ou pour ses clients.

Discussion à l’Assemblé Nationale (Photo : Parti Socialiste)

Le passage devant l’Assemblée Nationale

Malheureusement même si la réforme ferroviaire française est prête en 2013, l’actualité politique repousse le passage du projet de loi au Parlement français. Les calendriers sont trop serrés pour passer avant le quatrième paquet ferroviaire, le combat se joue donc aussi au niveau de l’Europe.

En février 2014, c’est une victoire pour la SNCF : le lobbying intense arrive à couper l’herbe sous le pied de Siim Kallas et de la Commission Europénne. Le quatrième paquet ferroviaire arrive au Parlement Européen. Son texte prévoit l’ouverture du marché du transport de voyageurs et facilite la certification du matériel ferroviaire. Les députés allemands et français arrivent à faire passer un amendement qui valide le schéma prévu dans la réforme ferroviaire française (calqué sur le modèle allemand), sans séparation totale entre réseau et exploitation. Ils font même reculer la date d’ouverture des appels d’offres des régions à 2022, ce dont le gouvernement se félicite.

Bien sûr, la réaction du Président de la SNCF est parfaite, comme toujours : « Nous appliquerons la loi, nous ne prenons jamais part aux débats politiques ». Il a sûrement d’ailleurs raison, la SNCF n’a pas besoin d’y aller frontalement. Elle a un allié fort incarné par le gouvernement, et de multiples associations dont elle fait partie, comme la CER (Communauté Européenne du Rail), qu’elle peut influencer. Par ces biais la SNCF fait bien sûr de la politique indirectement, et ça serait une erreur de gestion de ne pas en faire. Encore une fois, je n’ai rien à redire sur le fait qu’une entreprise se défende avec ses armes.

Nous sommes en juin 2014 et la Réforme Ferroviaire française va être présentée à l’Assemblée Nationale. Même si son contenu est connu depuis longtemps, la réforme ne satisfait évidemment personne sauf la SNCF, et les syndicats sont passés à l’attaque.

Je pense sincèrement que le gouvernement et la SNCF estimaient avoir fait assez de communication pour éviter ça, et surtout qu’ils pensaient que les intérêts de la SNCF seraient assez convergents avec les positions des syndicats, même les plus à gauche (limitation de la concurrence par la maîtrise de l’infrastructure et la création d’un standard social élevé). Car il faut bien dire ce qui est : aujourd’hui le travail qui a été fait par la SNCF pour protéger ses intérêts — et par intérêts croisés ceux de ses salariés — est dantesque. Peu de directions auraient eu la force d’aller si loin.

Mais les syndicats ont préféré aller au combat afin que la réforme revienne encore plus en arrière dans le temps. Leurs revendications : le retour à une SNCF pre-1997 et l’abandon des négociations de convention collective.

Il est déjà assez impressionnant que la SNCF soit arrivée à cette proposition de loi, il est peu probable que les souhaits des syndicats soient réalisables. Le problème pour eux est que s’ils croient vraiment à leur alternative, il n’y aura pas d’autre opportunité avant longtemps.

Opportunités

À mon sens il y a plus intéressant que ce qui est dans le projet de Réforme Ferroviaire : ce qui n’est pas présent dans cette réforme. Ces éléments qui nous feront manquer de nombreuses opportunités dans l’Europe et le monde.

Un service public fort

Loin de moi l’idée de dire qu’il faut libéraliser le rail totalement et anarchiquement. Ça n’est l’idée de personne et surtout pas la mienne ni celle de l’Union Européenne.

Un service public et monopolistique est indispensable : c’est celui de l’infrastructure.

Le réseau est la clé si nous voulons :

  • Une sécurité maximum : l’infrastructure doit être chargée de certifier les différents opérateurs ferroviaires et de veiller au respect maximum de la sécurité sur le réseau.
  • Des trains à l’heure : l’infrastructure a le pouvoir de faire la police, aura l’expertise pour gérer les situations dégradées et favoriser tel ou tel opérateur ferroviaire en fonction de son comportement sur le réseau.
  • Des dessertes nombreuses et étendues : le système d’enchère sur le prix des péages permet d’inciter les opérateurs à aller sur les parties du réseau les moins rentables. Cela permet aussi d’augmenter le nombre de trains sur le réseau.
  • Une stratégie nationale (ou européenne, soyons fous) : de toute façon le gros de la stratégie est déjà le réseau. Les vrais projets sont de savoir débloquer des milliards d’euros pour créer une nouvelle ligne grande vitesse ou rénover un réseau, pas de savoir comment seront vendues les places d’un train.

Les futurs champions français du rail

Connaissez-vous NTV (Italie), WESTBahn (Autriche) ou HKX (Allemagne) ? Ce sont de nouvelles entreprises ferroviaires qui ont émergé en Europe ces dernières années, parmi d’autres. Elles offrent sur leur marché des services et des prix qui font leur succès.

Ces entreprises parties de zéro gagnent année après année de l’expertise et des parts de marché. D’ici quelques années elles auront prouvé qu’elles sont capables de venir concurrencer la SNCF en France ou d’autres anciens monopoles dans d’autres pays, à la manière de ce que fait Keolis un peu partout en Europe et dans le monde.

Le problème de ne pas s’ouvrir à la concurrence dès à présent, qui est quoiqu’on en dise inévitable (la SNCF s’y prépare depuis longtemps), c’est qu’on empêche des entreprises françaises de devenir des potentiels opérateurs ferroviaires prêts à conquérir le monde.

En fait, nous nous empêchons de créer 2 ou 3 SNCF au lieu d’une.

Un système centré sur le client

En repoussant la concurrence, on ne se permet pas de régler les vrais problèmes de la concurrence, qui existent d’ailleurs déjà en France :

  • Une personne veut faire Bordeaux — Bruxelles : elle prend un billet iDTGV Bordeaux-Paris puis un billet Thalys Paris-Bruxelles. Le train iDTGV est en retard, lui faisant manquer la correspondance avec le Thalys. Que se passe-t-il ? Aujourd’hui, elle n’a droit à aucun dédommagement. C’était d’ailleurs la grande idée de RailTeam, association des grands transporteurs ferroviaires qui tombe aujourd’hui en désuétude. Il faut régler ce problème dans la loi.
  • Imaginons qu’un train SNCF tombe en panne, et bloque tous les autres trains derrière lui, un train Trenitalia et un train RZD par exemple : que se passe-t-il ?
  • Aujourd’hui les agences de voyages hésitent à vendre des billets de train dans leurs offres car elles ont un manque de sécurité en cas de manquement du transporteur. C’est assez technique mais cela incite les agences de voyages à favoriser l’avion par rapport au train. Comment résoudre cela ?

Propositions

Une fois qu’on a fait les constats, apportons des solutions. Voilà ce que j’aimerais voir dans ce projet de Réforme Ferroviaire :

1. Le renforcement de RFF

La clé d’un service national et européen de qualité est là.

  • Nomination d’un Président qui aura toute la latitude pour faire avancer les projets d’intérêts nationaux et européens, ainsi que le pouvoir d’imposer sa vision aux transporteurs.
  • Intégration de tous les cheminots SNCF ayant un rapport avec l’infrastructure et sa gestion dans RFF.
  • Intégration de SNCF Gares & Connexions. Les gares sont un élément essentiel pour une concurrence saine. Un nouvel opérateur doit pouvoir installer des guichets ou des bornes libre-service très simplement. Aujourd’hui il doit demander à… la SNCF. Cela serait aussi une excellente source de financement pour RFF.
  • Discussions avec l’État et l’Europe de plans clairs de développement et d’entretien du réseau sur 10, 20 et 40 ans.
  • Gestion des certifications européennes et nationales des opérateurs ferroviaires.
  • Instauration d’une comptabilité transparente qui permettra à l’Europe et à la France d’être certains que l’argent des subventions ira bien financer le réseau et non pas un autre transporteur.

2. Un business plan crédible de gestion de la dette

Il n’est pas anormal que la dette actuelle repose principalement sur RFF, puisque sa dette correspond aux emprunts contractés pour la construction du réseau. Ce qui est anormal c’est de ne pas lui donner les moyens de résoudre le problème.

  • Négociations avec l’Europe d’un business plan permettant à l’État d’aider RFF à revenir à une situation comptable saine en réduisant sa dette.
  • Création d’un business model vertueux sur la base des péages.
  • Création d’une business unit de conseil en construction et entretien de réseaux ferroviaires. RFF doit aussi devenir un champion à l’international.

3. Un plan de transformation de la SNCF

La SNCF est une magnifique société, qui ne se prive d’ailleurs pas d’aller conquérir des parts de marché à l’étranger via Keolis. Lors de la dernière audition de M Pepy et M Rapoport, le président de la Commission du Développement Durable de l’Assemblée Nationale était tellement fier de cette capacité de la SNCF à aller à l’international qu’il a pris 5 minutes pour nous en parler (Je ne sais pas pourquoi il n’a pas parlé de Veolia d’ailleurs, ils font aussi du très bon travail).

  • Statu-quo sur le statut des cheminots. La SNCF est libre de négocier quand elle veut les conditions sociales de ses salariés, comme toute entreprise.
  • Changement de sa mission en “Opérateur de mobilité”, comme elle aime à s’appeler désormais. L’objectif actuel de la SNCF est d’intervenir dans tous les moyens de transport et plus seulement sur des rails : trains, tramways, bus, co-voiturage, etc.
  • Changement de nom de SNCF en Keolis, pour au moins trois raisons :
    - La SNCF ne se définit plus comme un opérateur ferroviaire, mais comme un “opérateur de mobilités”. Le “Chemins de fer” ne représente plus son activité.
    - Le “National” n’a plus vraiment de sens non plus, puisqu’elle intervient partout dans le monde.
    - Gage donné aux futurs concurrents de ne pas utiliser un nom “étatique” et si chargé en histoire pour leur faire concurrence.

4. Un plan d’ouverture à la concurrence

La concurrence est inévitable, elle apportera du dynamisme au marché, une offre plus riche, donc plus d’emplois et des avantages pour les clients. C’est l’histoire européenne. La concurrence existe de toute façon déjà dans sa forme organisée par la SNCF, avec iDTGV et Ouigo, et diverses sociétés créées pour gérer des destinations spécifiques : Eurostar, Thalys, Lyria, SNCF+DB et SNCF+Renfe.

  • Création d’une législation, en accord avec l’Europe, de protection des clients du train de tous les problèmes qu’ils pourraient rencontrer dans un marché concurrentiel.
  • Création d’un fonds de compensation français ou européen, abondé par tous les transporteurs, qui permettra la gestion des conflits inter-transporteurs (correspondances ratées, etc).
  • Définition d’un calendrier d’ouverture à la concurrence. Il n’a pas besoin de s’étaler sur des années, l’Espagne a ouvert son marché en 6 mois.

Évidemment je ne dis pas que tout sera simple pour arriver à un marché européen unique, dense et efficace. Comme toujours, le problème est moins dans l’idée que dans la qualité de l’exécution.

Ce débat est très technique et les enjeux sont lointains. C’est un sujet qui n’est pas facile à appréhender lorsque l’on est extérieur au marché. Mais ce qui doit primer pour moi doit toujours être l’intérêt commun, au niveau national et européen. Aujourd’hui ce projet de loi en l’état ne privilégie pas l’intérêt commun mais celui d’une entreprise qui tient un discours différent en France et à l’international.

Vous voulez poursuivre la discussion ? Je suis disponible sur Twitter.

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