Pourquoi le veganism est une religion hérétique

Les vegans ont vachement tort ! 🐄

Jean-Michel Fayard
8 min readSep 20, 2019

Mes amis ont noté chez moi un phénomène curieux:

Au cours d’une même journée, je peux parler en bien des végétariens pour ensuite me lâcher avec des réactions épidermiques et pleines de mauvaise foi à l’encontre du veganism.

Pourquoi cette différence de traitement apparemment contradictoire? Y a t’il une différence de degrés entre les deux ou une différence de nature? C’est la question que je vous propose de creuser ensemble.

Mais tout d’abord une mise en contexte. Il est tout à fait possible, cher lecteur que je n’ai jamais rencontré, que vous ne vous retrouviez pas du tout dans cette description des vegans que je fais. Oui, je parle de ce que je connais, donc commençons par décrire le contexte.

Berlin, un bastion avancé du veganism

Je vis à Berlin, une ville où le veganism est très présent dans la vie quotidienne. Le site https://www.berlin-vegan.de a une carte, cafés, glaces et boutiques vegan. Je zoome sur mon quartier pour que la carte reste lisible. Gardez en tête qu’elle n’est sans doute pas exhaustive:

Berlin: “Meat lovers are also welcome!”

Le phénomène est loin de se limiter à la nourriture. Le même site cite:

  • des supermarchés vegan
  • des boutiques de cosmétiques vegans
  • des hôtels vegan
  • des vêtements vegan
  • des salles de sport vegan
  • des studio de tattoo(!) vegan
  • des coiffeurs vegan

Là encore, la liste n’est pas exhaustive. Il manque mon exemple favori: le sex-shop vegan

https://other-nature.de/gb/info/about

Mais ce n’est pas juste que je vis dans une ville plein de vegans. Il faut bien avoir en tête que dans cette ville, je suis un immigré.

La bouffe, un sujet identitaire

Ah le sujet de l’intégration des immigrés! Sujet important sur lesquels les Français sont prompts à demander des efforts aux autres. Sauf que de ce que j’ai pu voir, ils sont pas forcément ceux qui font le plus d’efforts une fois qu’ils sont de l’autre côté de la barrière!

Mais comment la réaliser cette fameuse intégration?

Le chercheur Toshiaki Kozakai balaye certaines idées recues dans son Essai sur l’intégration culturelle. Sa thèse, qui cadre bien avec mon expérience, est que l’intégration de l’étranger ne devient possible que par une certaine fermeture identitaire. Ce n’est pas en reniant mon pays d’origine que je deviens libre de m’intégrer dans le pays d’accueil, c’est en définissant une part de moi comme étant profondément (par exemple) française que je me bâtis la sécurité émotionnelle et psychologique qui me permet de m’ouvrir pour le reste à une nouvelle culture. C’est le phénomène d’acculturation.

Alors quel est ce noyau d’identité française qu’un long processus m’a permis de distinguer et de conserver précieusement? Vous l’avez compris, le joyau le plus concret, le moins prétentieux et le plus palpable de la culture française, celui qui nous manque le plus à l’étranger, c’est: la bouffe.

Alors les Allemands ne sont pas comme ces perfides Anglais qui mangent avec fierté des choses immondes. Non, si vous les emmenez dans un endroit qui vous plaît, ils vous suivront avec plaisir. Mais lors d’une de mes premières journées de travail, lorsque j’ai demandé à un jeune collègue où il désirait manger, il a parfaitement résumé en très peu de mots comment il voyait la chose: “Egal, hauptsache billig!”. C’est à dire “Peu importe du moment que c’est pas cher!”. Comme vous le voyez, la bouffe n’est pas vraiment une priorité.

Il est maintenant temps de dire du bien des végétariens.

Les végétariens sont une avant-garde éclairée

Pour une raison simple:

Nous mangeons trop de viande.

Je savais qu’ils ont raison, même si je n’avais pas trop creusé pourquoi. Si vous aussi vous avez pêché par fainéantise, voici une vidéo de quatre minutes pour se rattraper:

4 minutes pour comprendre: La consommation de viande mondiale a quintuplé depuis 1950 et sa production s’est industrialisée.

Parmi les points abordés dans la vidéo:

  • Nous mangeons aujourd’hui 89kg de viande par ans, deux fois plus que nos grand-parents.
  • Cette sur-consommation de viande entraîne une industrialisation massive et peu ragoutante. Une ferme US typique vendait 945 porcs par an en 1992, elle en vend 8.400 aujourd’hui. Le porc moyen faisait 67kgs à l’abattage en 1970, il en fait 100kg aujourd’hui. 85% des poulets ne voient pas la lumière du jour.
  • Le bétail contribue autant à l’effet de serre que le secteur des transports! L’agriculture est responsable de 70% de la déforestation!
  • 70% des terres agricoles sont aujourd’hui dédiées à l’alimentation des animaux! Sur la même surface de terre agricole, on peut soit produire 1kg de viande, soit 7kg à 12kg de céréales. Produire 1kg de bœuf engloutit 15.500 litres d’eau. Si on veut tous manger et boire en 2050 quand on sera 9 milliards, il faut manger moins de viande!

Donc les végétariens sont une avant-garde éclairée de quelque-chose de positif. Il faut une avant-garde éclairée pour initier un mouvement. Mais nul n’a besoin d’être en avance sur son époque dans tous les domaines. Le risque est alors grand de devoir avaler la ciguë comme Socrate, d’être crucifié comme Jésus, ou dans une clinique psychiatrique comme bien plus de gens. Alors, je ne suis pas moi-même végétarien .Non, tout simplement, je mange moins de viande qu’avant.

Bon, mais tout ça, n’est-ce pas ce que disent aussi les vegans? Quelle est la différence?

Les vegans sont nettement plus chiants

Du moins dans mon expérience. Et ce pour deux raisons.

D’une part, le régime alimentaire est bien plus strict. C’est le phénomène bien connu où on invite des amis dont un vegan, et tout d’un coup “on ne sait plus quoi faire à manger”. La deuxième raison est à peine moins évidente:

Les vegans sont nettement plus prosélytes

Être vegan ce n’est pas seulement “manger vegan”. Non il s’agit bien d’”être vegan”, et de le faire savoir. À Berlin il y a sans arrêt des “Vegan Sommerfest”, des actions de sensibilisation consistant à montrer des vidéos dégueulasses pour donner mauvaise conscience, des affiches “manger de la viande, c’est un crime”, …

Donc les vegans sont souvent chiants. Mais comme on va le voir, ils ont une bonne raison d’être chiants.

Le veganism est une religion

TU NE TUERAS POINT!

Avant d’être un régime alimentaire, le veganism est une Morale de type religieuse. À savoir qu’elle propose des règles simples, claires et absolue pour distinguer le Bien du Mal.

Alors attention, savoir distinguer le Bien du Mal ne signifie que l’on va toujours agir suivant le bien. Un précepte moral religieux bien connu est Tu ne tueras point. Et il n’a échappé à personne que de nombreux chrétiens ont tués d’autres personnes dans le passé. Mais si ils sont honnêtes envers la foi, ils savent que ce qu’ils ont fait est Mal. Pas de “mais”.

Si on voit le veganism comme une morale religieuse, ses différentes extensions dans le domaine des cosmétiques, vêtements, sex shop, … prennent immédiatement sens. Il est bien évident que si contribuer à la maltraitance des animaux par son alimentation est Mal, il en est de même d’acheter des chaussures en cuir.

De même, il n’est guère étonnant que les vegans soient chiants. Et bien oui, imaginez que vous êtes un soldat qui a du défendre son pays, et tuer des gens pour au passage. Toute personne qui croît profondément au précepte moral “Tu ne tueras point” doit vous faire remarquer que vous avez participé à quelque-chose de mal. Et ça vous prendrait à rebrousse-poil. Mais elle se trahirait elle-même en ne pas vous le faisant remarquer.

Ok, mais attends, les végétariens eux aussi disent qu’il est mal de manger trop de viande, quelle est la différence? Il faut creuser encore plus.

Morale religieuse contre éthique Kantienne

La morale religieuse du veganism ou des 10 commandements est une forme d’absolutisme moral. Si tu as tué quelqu’un, peu importe les raisons ou les conditions pour lesquels tu l’ai fait, c’est en soi quelque-chose de mal.

Il n’en est pas de même du raisonnement: “si nous continuons tous à manger autant de viande, cela aura des conséquences désagréables pour tous, je choisis donc de changer mon comportement”.

Ce raisonnement est une prise de conscience écologique des limites. Il est plus nuancé. Manger un bœuf bourguignon de temps en temps n’est pas en soi condamnable. Mais que tous nous consommons deux fois plus de viande que nos grand-parents, c’est autre chose. Mais à quoi bon changer moi tout seul de comportement? L’effet produit est microscopique. Et pourtant si nous le faisions tous, il est massif! Ce qui permet de combler cette contradiction entre l’individu et la société, c’est une éthique de type Kantienne:

Mon comportement individuel actuel, s’il était généralisé, aurait des conséquences détestables. Ayant conscience de cela, mon éthique me dit à moi de changer de comportement.

En résumé, les vegans sont chiants parce qu’une morale de type religieuse les pousse à l’être. La vraie réponse ne consiste donc pas à leur en tenir rigueur, mais à les prendre au sérieux et à évaluer leur théologie.

Le veganism est une Hérésie

Le veganism est une religion hérétique, et ce pour deux raisons.

La raison mineur pour laquelle le veganism est une hérésie, c’est qu’il se trompe en mettant la viande et le poisson dans la catégorie Mal. Non, celles-ci font partie comme l’alcool de la catégorie à consommer avec modération. Mon modèle c’est l’évolution de consommation d’alcool en France. En 1950, la France détenait le record mondiale de consommation d’alcool. Honnêtement, cela avait tout une série de conséquences fâcheuses. Aujourd’hui on consomme nettement moins de vins, mais des meilleurs vins.

Mais la raison majeure de mon désaccord théologique est que le veganism classe le LAIT dans la catégorie MAL.

Alors là, non! C’est le schisme, l’affront et l’ex-communication. En tant que pape auto-proclamé du culte des adorateurs des produits laitiers, je proclame Urbi et Orbi que l’Hérésie est consommée.

LE LAIT c’est BIEN. La culture culinaire française toute entière est basée sur les produits laitiers. Vos fromages sans Lait m’indiffèrent davantage encore qu’un gâteau au chocolat sans chocolat. Vos gateaux sans œuf et sans lait sont d’une tristesse inégalables. Vos glaces sans lait sont trop sucrés. Et vous avez tort. Nous sommes des mammifères et le lait maternel c’est Bien. Le beurre, c’est Bien. Comme le sont tous les plats où on fait revenir dans la poêle avec du beurre. Et les biscuits au beurre. Et les croissants et autres viennoiseries. La crème fraîche c’est Bien. Tous les plats avec de la crème fraîche aussi. Le yaourt c’est BIEN, le fromage blanc itou. Et tous les plats qui contiennent du yaourt ou du fromage blanc. Et les fromages, ne touchez pas à mes fromages, ce sont ma litanie des saints: le Roquefort, la fourme de Montbrison, le Saint-Nectaire, l’Emmental, le Camembert, le Comté, le Maroilles, le bleu de Gex, le Munster, la brie de Meaux, le Morbier, le Cantal, et bien d’autres encore.

Le lait c’est bien, et tous ceux qui soutiennent le contraire sont possédés par le démon.

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