Ex Junkie de la télévision, j’ai tiré un trait sur mon addiction.

Joel Ca
16 min readSep 13, 2015

Bannir la télévision est l’une des meilleures décision de ma vie !

“On”

© Paul Campion

Je suis ce que l’on appelle un enfant de la télé. Du plus loin que je me souvienne, cette « boite noire » fait partie de ma vie.

Je me revois, petit, candide, passer derrière le poste, en scruter les coins et recoins, pour comprendre d’ou venait cette dame qui me parlait depuis de longues minutes sans me voir. Comment avait-elle bien pu entrer là dedans ?

Mes parents m’ont toujours posé devant, tout en me reprochant de trop la regarder ! J’ai été élevé avec Casimir, Candy, Albator, Goldarak, le capitaine Flam et tous les autres.

En fait, la télévision a tellement été présente dans ma vie que j’en suis devenu accro. Un « junkie » de la télécommande. Un toxicomane ayant besoin de sa dose quotidienne pour penser se sentir bien. J’ai tellement été habitué à cette présence, qu’il allait être difficile d’accepter que cette consommation excessive pourrait devenir nocive pour moi.

Je suis donc un téléphage obsessionnel compulsif, mais repenti. Comment ai-je pu laisser s’installer cette dépendance sans jamais réaliser la perte de « temps » qu’elle provoquait ?

La genèse de mon addiction

Représentant de la génération x, né à la fin des années 70. Comme aucune autre génération précédente, la télévision nous a offert un gourou, enfin si j’ose dire un dealer. Le meilleur trafiquant qui soit.

Blonde, accessible, très sympathique, la copine idéale : Dorothée.

Pour la première fois dans l’histoire de la télévision, nous étions biberonné par Pablo et sa bande, car en effet Dorothée est bel et bien le Pablo Escobar de notre génération. Entrer dans son club, c’est faire partie du Cartel de Medellin. Le fait de voir son nom défiler pendant 8 images à l’écran est une consécration, un graal.

La came que Dorothée nous propose durant toutes ces années est variée et de premier choix, importée directement du Japon, le pays producteur et unique fournisseur. Dodo avait tout en stock, et à profusion.

* Marijuana : Les Bisounours, Calimero, les Schtroumpfs,

* Ecstasy et amphétamines : Les Fraggle Rock, Gigi, le collège fou fou fou

* Cocaine : Cobra, Albator, Goldorak, X-or

* Héroïne : Les chevalier du Zodiaque, Dragon Ball, Ken le survivant

* Kétamine et dépresseurs : Remy sans famille, Clémentine, Princesse Sara.

NDLR ( si vous ne connaissez pas ces titres, dites vous simplement que la consommation de ces mangas, provoque sensiblement les effets des drogues dans lesquelles ils sont classés )

Dorothée avait tout en magasin, et savait proposer constamment de nouveaux produits à ses clients. A l’époque son hégémonie sur le business est tout à fait remarquable, une vraie success story.

Des années durant, j’ai passé des heures devant l’écran, devant ses produits. J’aimais ça, j’adorais ça, j’en garde même de très bons souvenirs mais j’ai plongé et je suis devenu un addict.

Toxico ? : non, si peu !

J’ai toujours entendu ma mère prononcer cette phrase « arrête de regarder cette télé, c’est pas ce qui va te donner à manger !». L’ironie, c’est que les circonstances ont voulu que j’en fasse mon métier, et depuis une quinzaine d’années, la télévision m’a finalement fait «manger».

Je ne connais donc que trop bien l’envers du décor, il y’a tellement de choses à dire sur ce milieu, mais on ne va parler boulot…

J’ai passé ces quinze dernières années à me réfugier derrière l’argument « je fais de la télé donc je dois regarder la télé, voir ce qui se fait, comment c’est fait, par qui c’est fait». Malheureusement, j’y ai laissé un temps précieux, sans jamais m’en rendre compte.

Mes rapports avec la lucarne étaient assez simples, en gros si j’étais chez moi, la télévision était allumée !

sur « on » …Simple, je vous dis.

Dès le matin, au réveil avant même la douche une « petite » dose de news, un premier JT puis un second, identique, puis zapping sur une autre chaine info.

Avant même d’être complètement alerte et réveillé, j’étais capable de recracher le conducteur (le déroulé du programme) du journal des deux chaines, merveilleuse prouesse.

Au bureau, je la retrouve, allumée, constamment. Quand on travaille en télé, il vaut mieux bouffer de la télé, pour être en mesure d’en parler, ne pas être largué, pouvoir dire « tu as vu ce truc hier …bla bla bla ». Toujours agrémenter la discussion d’une une anecdote télévisuelle..

Fin de journée, je rentre chez moi. Cette fois c’est ma compagne que je retrouve, mais c’est plus fort que moi, je passe en rituel : télécommande de la télé : « On » je passe sur « AV 2 », puis télécommande de la box et c’est parti pour un tour des « accès » le mot qui désigne en jargon télévisuel la plage horaire situé entre 18h et 20h. La mienne se situait plutôt entre 20h et 02h.

A ces heures, la plupart des familles française se calent sur les jeux décérébrants de TF1, mais selon un professionnel de la profession, je me suis laissé dire que « les jeux ça évite aux gens de penser à la journée de merde qu’ils ont passé, dans un ville de merde, dans les transports de merde, dans un bureau ou usine de merde, avec des gens de merde. Et puis pour la faire la cuisine, c’est tout à fait possible, pas besoin de suivre, donc le mari et sa femme peuvent regarder ensemble » c’est assez bien résumé, légèrement drastique, mais ça se tient certainement.

Moi, j’enchaine mon marathon, si un programme me plait je reste dessus, dans le cas contraire je zappe, zappe, zappe … la télévision ce chewing gum de l’œil.

Les heures passent, comme ça, elles défilent. J’étais entré dans une spirale, « je vais tomber sur un truc… Putain deux heures du mat, je commence tôt demain, bon je refais un tour complet pour voir s’il y’ a pas un truc et je vais me coucher » Un dernier JT, ce sera celui de 02h30, juste pour voir s’il s’est passé quelque chose. Toujours en tête cette impression qu’il va y avoir quelque chose de bien, cette attente du vide.

Voici, la teneur de ma consommation, mon ordonnance :

  • 1 heure le matin, je passe 30 min devant, focus. Le reste du temps elle reste allumée, juste pour le coup d’œil, de temps en temps.
  • 2 heures cumulées en journée, en comptant le repas au bureau
  • 5 heures le soir de 20h à 01h en moyenne

-Soit 8 heures par jour accroché à cet écran, en l’écrivant je réalise la pathologie ! 121 jours complets par an

…un suicide pour le cerveau.

Je hais la télévision. Je la hais autant que les cacahuètes. Mais je ne peux m’arrêter de manger des cacahuètes.

Orson Welles

J’ai donc ressenti à un moment que la télévision était devenue nocive pour moi, qu’elle tuait mes envies, ma créativité, j’étais devenu passif.

D’abord dans ma vie de couple. L’effet d’hypnose que procure les images en continu vous fait oublier que vous vivez avec quelqu’un. On regarde un écran mais finalement beaucoup moins la personne qui est à vos cotés. Je parle de télévision mais je devrais élargir aux écrans de toutes sortes. Aujourd’hui le problème se pose avec les ordinateurs, les téléphones, les tablettes. On peut en effet ne pas vouloir regarder la télévision mais reporter son attention toute entière sur un écran de douze centimètres, toute une soirée. Les effets sont sensiblement les mêmes.

J’ai tout de même fini par réaliser que j’étais devenu un artiste. Un artiste qui excelle dans l’art de perdre du temps à regarder des « conneries » que les gentils directeurs des programmes lui propose.

Je suis rude avec moi même puisque j’ai toujours essayé de privilégier des contenus qui m’intéressent, des documentaires, des grands reportages, des émissions culturelles, jamais de télé réalité de jeux, de prime time de divertissement. Le dilemme n’est pas de choisir ce que l’on regarde c’est de trouver quelque chose à regarder. La quête du bon programme passe par des heures de zapping, tout voir et ne rien voir, 10 sec là, puis 3 ici, 1 min, et non, finalement non, alors c’est reparti, le pouce vif et agile sur la télécommande. Pour être honnête, j’ai souvent répondu à la question « mais pourquoi tu regardes ça ?», par un laconique « Je sais pas y’a rien d’autre ! »

Le vrai visage de la télévision.

J’ai toujours pensé que la télévision est un media fantastique, qu’il parle à la masse donc il est un possible vecteur de réflexion, d’enseignement, d’éducation. Evidement, l’élite n’a absolument aucun intérêt à rendre les gens conscient de la réalité des choses. En 2004 Patrick Le Lay ancien pdg de TF1 l’avais fort bien expliqué

“ Il y a beaucoup de façons de parler de la télévision. Mais dans une perspective ”business”, soyons réaliste : à la base, le métier de TF1, c’est d’aider Coca-Cola, par exemple, à vendre son produit (…).

Or pour qu’un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible : c’est-à-dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible (…). Patrick Le Lay

cette interview avait fait une polémique, un scandale. La presse s’était déchainée. Le grand méchant loup était sorti du bois et il était visiblement très méchant mais pas menteur.

Finalement, c’est tout à fait honnête et louable de la part de ce monsieur de mettre les médias et la population devant un fait, une réalité. Pour une fois qu’un grand patron joue la carte de la transparence, laissons lui au moins cela.

En revanche, c’est à nous de rendre ce temps de cerveau indisponible pour Coca, à nous de ne pas regarder ce flot d’excréments. Personne ne pose un revolver sur nos tempes pour nous forcer à ingurgiter cette mélasse. Alors pourquoi donc s’offusquer ?

Les illusions perdues

L’apparition de TNT m’a fait croire que la télévision collerait à son temps, que la télévision profiterait de cette multiplication des pains pour se moderniser. Proposé de nouveaux contenus, innover, expérimenter. Avant cette pseudo “révolution” nous avions à disposition 7 chaines disponibles gratuites, sans abonnement à un fournisseur d’accès :

TF1, qui à donc pour ambition de vendre du temps de cerveau disponible, utilise avec excès les séries américaines de toutes sortes, les jeux aux questions débiles diffusés aux heures stratégiques, des programmes de télé-réalité, des grands « primes » ou l’on peut entendre en 2015, des phrases comme “Mesdames et messieurs sur un foxtrot…” . Plus tard dans la saison TF1 organisera un cola maya géant pour trouver le plus bel organe de France ( je parle de la voix bien sur !).

Les chaines du service publique mi-figue mi-raisin qui peinent malheureusement à trouver leur place, tiraillées entre service public et la dure loi de l’audimat. Ce malheureux service public sclérosé par son propre mode de fonctionnement.

Canal Plus la chaine du foot en crypté, avec un peu de cinéma, beaucoup de séries, de qualité la plupart du temps. Canal pour les intimes, pense depuis 30 ans maintenant, être toujours à la pointe de la “hype” lorsque elle diffuse en clair.

M6 la donneuse de leçon de vie. Ton look est nul, ton appart est moche, ta vie sentimentale est pitoyable, tu chantes mal, alors en attendant je vais te montrer qu’il y’a bien pire que ta vie de plouc. « drogues, prostituées, banditisme, islamisme, adolescence décadente. M6 ou le Monde de merde dans lequel nous vivons.

Je vais mettre à part France 5 et Arte puisque peu de gens regardent mais ces deux chaines jouent le jeu de l’éclectisme, elles proposent des programmes regardables. Normalement en passant une heure devant on peut éventuellement se coucher moins bête que la veille. Ces deux chaines représentent assez bien, le rôle que j’attends de la télévision.

“La télévision de qualité, c’est une télévision qui essaie d’enrichir plutôt que d’abêtir, qui se veut simple dans son exposé mais qui est ouverte à toutes les curiosités, à toutes les connaissances.”

Jacques Chancel

Dans cette masse de nouveau canaux, j’ai pensé que le service public nous délivrerai forcement, une chaine sur le thème du savoir, sur l’éducation, l’histoire, je poussais même à imaginer une chaine de tutos comme il en existe sur youtube, pourquoi pas ?. Une chaine “open source”, juste pour apprendre : l’informatique, des logiciels, la photo, l’entreprenariat à défaut d’apprendre à chanter et faire la cuisine, bref des contenus utiles et originaux.

“Depuis que toutes les chaînes se livrent cette bataille pour l’audimat, parler de l’intelligence à la télévision, c’est comme si l’on distribuait des guides gastronomiques au Sahel.”

De Guy Bedos

Evidement économiquement, ça n’a que très peu d’intérêt, et dans l’idée, dit comme ça, ça à l’air assez ennuyeux pour ne pas dire chiant. Mais prenons l‘exemple des conférences TEDX. Un intervenant, “génial”, la plupart du temps, des thèmes ardus, 18 minutes pour changer le monde, et à la clé des millions de vues par jour. Je ne suis pas un taliban du savoir à la télé, je suis pour la diversité le choix, au moins proposer une alternative. Donner les moyens d’avoir accès à la connaissance même vulgarisée, mettre cela à disposition du plus grand nombre.

“Ah non… mais non !”. A défaut de pouvoir contrôler ce qui se passe sur le net, nos dirigeants ne voient cette boite que comme un instrument de propagande de la léthargie, tant que nous sommes devant l’écran nous restons docile.

Comme en Rome antique « Panem et circenses » « des jeux et du pain » du divertissement, de la publicité. Flatter le peuple afin de s’attirer sa bienveillance. Faire des programmes uniquement dans le but de vendre de la pub.

Le virage que la télé n’a pas su prendre.

Je ne comprends toujours pas comment une institution comme le CSA ( le gendarme de la télé) qui traque le moindre petit dérapage, le moindre petit épisode télévisuel insignifiant , puisse laisser des chaines comme NRJ 12 ou W9, déverser une diarrhée de programmes lobotomisants. C’est me semble t’il un crime contre la jeunesse de ce pays.

Je m’explique, diffuser à la sortie des cours, des programmes de télé réalité impliquant des jeunes gens qui utilisent à peine 200 mots de vocabulaire, ne sachant conjuguer aucun verbe correctement. Ces chtis, ces marseillais, qui font le tour du monde dans des villas de luxe. Laisser diffuser cela quotidiennement, c’est dire aux jeunes gens issus de milieux populaires, l’école ne sert à rien, parler correctement ne sert à rien. Mais il reste toujours une issue possible à ta pauvre condition : la télé réalité.

“La télévision a une sorte de monopole de fait sur la formation des cerveaux d’une partie très importante de la population.”

De Pierre Bourdieu / Sur la télévision

La télévision a fini, par s’auto digérer, se regarder elle-même. Les programmes qui marchent recyclent allègrement les “daubes” vues sur les autres chaines. On les diffuse, on les critique, on s’en moque, pour finalement dire que c’est sans intérêt, inregardable. Etrange paradoxe! Hanouna par exemple, ce laissé pour compte de la télévision pendant des années, prends aujourd’hui sa revanche grâce à cette recette. Deux heures de show quotidien ou la télé, fait de la télé, en regardant la télé… Le cercle vicieux du serpent qui se mord la queue

Je vois donc mon « amie » historique la “télé” comme cela, une amie qui a changé mais qui n’a pas su évoluer et s’inscrire dans le temps. Je crois sincèrement que si elle ne se repense pas aujourd’hui, elle est destinée à péricliter. Internet à définitivement prit le pas, le pouvoir sur les populations jeunes. Impossible de « les » asseoir gentiment à une heure précise pour regarder un programme. Aujourd’hui nous voulons ce que nous cherchons à l’instant qui nous convient. Il suffit de se pencher sur les sites de replay des chaines historiques, un véritable désastre !. La possibilité de voir les programmes pendant une semaine seulement, des interfaces pitoyables, aucun effort n’est fait dans le sens de l’utilisateur. Ces nouveaux supports sont là et la télévision ne sait toujours pas pivoter, évoluer, et pour sa pérennité c’est sans doute, une “Fatal Error”.

Fin du programme.

Il y’a maintenant trois mois j’ai décidé de tout arrêter, de sortir de cette addiction qui est la mienne. Un soir, comme ça en rentrant, sans l’avoir prévu, dans un acte naturel, j’ai pris une paire de ciseaux. Comme un banquier prendrait la carte bleue d’un acheteur compulsif, je retire la carte de ma box et la découpe soigneusement en petits morceaux. Je garde évidement une attention particulière à la puce … Putain c’est bon !

Plus de télé, je ne suis plus asservi à ce flot d’images que l’on me propose, c’est fini, « i quit ».

Je termine mon action en prenant cet écran géant qui pèse un âne mort dans les bras. Le cale bien délicatement derrière l’armoire de la chambre. La télévision vient de disparaître de ma vue, de ma vie.

Libéré, délivré… ! mais avant cela, je dois faire face à une sensation nouvelle, étrange même, quelque chose d’immédiat : un son nouveau : …le silence, plus de bruit de fond, de brouhaha, de musiques incessantes, de volume qui augmente considérablement au moment des pubs. Non, là, pour la première fois j’entends mon frigo. Et c’est fou ce que ça fait comme bruit un frigo.

Après trois mois de sevrage, je dois dire que je me sens bien, parfaitement bien ! J’ai retrouvé du “temps”, je ne suis plus esclave de ce rituel, plus aliéné aux images qui défilent sans trop savoir à quoi elle vont bien pouvoir me servir. J’ai du temps pour faire des choses que je ne faisais plus :

-Une activité physique, l’état végétatif dans lequel vous plonge la télévision vous pousse au maximum à appuyer sur un bouton. Au mieux, se déplacer jusqu’à la cuisine pour prendre un plateau et le remplir de cochonneries que vous venez de voir passer dans une pub. Le fameux plateau télé, celui qui termine fatalement autour de la sangle abdominale. Des années de plateau télé, ça fait beaucoup de graisse cumulée, c’est si facile de s’engraisser, il suffit simplement de ne rien faire, végété. J’ai passé des heures à courir sur un tapis à suer comme un goret, une torture au début, mais finalement une addiction est remplacée par une autre. Aujourd’hui j’ai besoin de ça pour me sentir bien, calme, détendu. Pour moi ces années d’inactivité se résume aux 9 kilos que j’ai perdu depuis quatre mois, une victoire sur mon corps, sur moi-même.

Je trouve du temps pour lire à nouveau, chose que je ne faisais plus depuis des années. Lire des livres, des posts sur des blogs, des articles. Se redonner le droit d’interpréter une histoire comme on l’entends, ne pas se voir imposer une vision, un décor, le visage d’un personnage, avoir à nouveau la possibilité d’imaginer.

Voir et revoir ses amis. Grâce ou à cause des réseaux sociaux on a des milliers « d’amis », le simple fait de discuter par messagerie instantanée de parler et répondre en smileys nous conforte dans l’idée que le lien est là suffisant qu’il n’est pas rompu. J’ai réalisé que voir les gens, entendre l’intonation de leur voix, sentir leur regard, c’est ça et seulement ça qui crée un véritable le lien.

Sortir et profiter du nombre incalculable de spectacles “vivants” qui se joue chaque soir à Paris.

Et surtout être à nouveau là pour ma famille : mon “amie” et ma petite fille. J’ai parfaitement conscience d’avoir gâché un temps fou au détriment de ce qui est précieux : mon clan. Vivre avec un toxicomane quelque soit sa dépendance est une purge. ”Elle” m’a souvent dit « éteins un peu », « juste le week-end pas de télé s’il te plaît», pour finir par « j’en peux plus de cette télé ». Je comprends parfaitement ce sentiment d’impuissance, qu’elle a pu ressentir. Aujourd’hui je suis là, présent, sans pollution. Je l’entendais mais maintenant je l’écoute, j’ai du temps pour “elle”, pour discuter, échanger, la soutenir, faire cas des ses états d’âme, être présent. Je suis à nouveau totalement “disponible”.

Petit à petit, je reconsolide le lien avec ma douce et ma petite. J’ai longtemps été là sans l’être, toujours un peu ailleurs, dans une bulle, seul avec ma télé. Alors j’ai certainement encore beaucoup du travail pour retrouver un équilibre sain et compenser les heures perdues. Mais je me fais confiance et je fais confiance aux liens, bientôt on ne se souviendra plus qu’à un moment, j’étais absent.

“Off”

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