MOI, JULIE, 33 ANS, JOURNALISTE EN PLEIN SWITCH

Julie Albet
5 min readFeb 12, 2017

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Transition : passage progressif entre deux états, deux situations. Tout est dans le progressif…peu à peu, par étapes, j’accepte l’idée que mon rêve de gosse, ce Graal auquel j’ai consacré beaucoup de mon temps et mon énergie, ne correspond plus aux aspirations de ma vie actuelle. Tout est dans l’acceptation aussi. Accepter qu’il faut changer, réapprendre, se mettre en risque. Même si le processus est long, le jeu en vaut la chandelle. Car dans un monde où 50% de nos jobs auront disparu dans 10 ans, autant apprendre à switcher dès aujourd’hui !

1) LA PERTE DE SENS

Le journalisme, j’en rêvais depuis mes 14 ans.

Ado, j’arpentais déjà les couloirs des salons de l’éducation pour me renseigner sur les conditions d’admission des écoles qui préparaient à ce métier. Syndrome de la bonne élève oblige, j’ai posé pierre après pierre les conditions de ma réussite professionnelle : la bonne école, la bonne chaine d’info, puis la bonne boite de prod…J’ai enchainé les premières années de matinales, où même débarquer à la chaine à 3h du mat un 1er janvier m’enthousiasmait car je faisais partie d’une équipe. Puis les reportages à Paris, Nantes, Francfort, Kyoto, pour TF1, M6…toujours la même envie, le même plaisir, de mettre en lumière des personnes et des initiatives passionnantes. Mon réseau commençait à bien fonctionner, on me confiait des sujets intéressants.

Mais mon corps m’envoyait déjà quelques signaux de malaise, face à un contexte de travail qui correspondait de moins à moins à mes attentes. Jusqu’à ce jour où je réalise que le reportage commandé allait me conduire à faire tout ce que je vomissais à la télévision : filmer en mode caméra cachée dans les arrières salles d’un restaurant, à traquer une pauvre petite souris qui n’avait rien demandé !

Je me suis retrouvée à proprement parler paralysée devant mon poste de travail, incapable de décrocher mon téléphone, ne croyant plus en rien, ne sachant plus que faire. Et un matin, impossible de sortir de mon lit, tétanisée à l’idée de la journée qui m’attendait. Appelez-ça burn-out, les mots importent peu dans ces cas-là, c’est surtout la sensation de ne plus être à sa place. Après un mois de « mais qu’est-ce que je vais faire de ma vie » et de « tout ça pour ça », j’ai peu à peu repris confiance en moi. Le journalisme fait partie de ces quelques métiers passion, constitutifs de votre identité, que l’on garde chevillé au corps, son numéro de carte de presse tatoué sur la peau. Le quitter, c’était comme sauter du train en marche, avec la désagréable sensation que tous mes efforts avaient été vains.

Puis, à force de rencontres, j’ai réalisé que : 1) j’avais une place à prendre sur le marché du travail en tant qu’ancienne journaliste, 2) mon expérience valait quelque chose et 3) non, je n’étais pas nulle à vouloir aller vers de nouveaux horizons.

Mais la révélation, ça a été Switch collective.

2) LE SWITCH

Au mois de juin apparait dans ma boite mail un courriel à l’objet bien intrigant : « Qu’allez-vous faire de votre vie ? ». Je clique sur le très inspirant site de One minute project et je lis : « Fais le bilan calmement : un programme de 6 semaines axé sur la reconversion et aux mensurations parfaites : inspirant mais concret, en immersion collective, et adapté aux horaires de bureau avec des cours du soir. De quoi switcher en douceur d’un métier à l’autre. » Exactement ce dont j’avais besoin !

Je m’inscris à la session de septembre et là, je découvre avec étonnement une salle remplie et grouillante de 40 personnes, majoritairement des trentenaires ne se reconnaissant plus du tout dans leur job, mais aussi une pâtissière de 24 ans à peine sortie d’un burn-out, ou encore une quinqua en plein questionnement après toute une carrière dans un grand groupe. De nombreux ingénieurs aussi, des consultants, tout ce petit monde ne sachant plus très bien à quel saint du travail se vouer.

Très vite, beaucoup de bienveillance s’instaure entre nous car au-delà des parcours très singuliers de chacun, il y a cette même envie de tout envoyer balader, de se reconnecter à qui l’on est, à ce qui fait sens pour nous. A ce que l’on a dans les tripes, qui provoque ce fameux état de flow dont les créatrices de Switch nous parlent sans cesse. Une certaine rage de vivre aussi, car merde après tout, l’existence est trop courte pour se faire chier dans son boulot !

3) ET MAINTENANT ?

Hasard du calendrier (ou pas…), j’ai commencé mon switch professionnel en même temps que « Fais le bilan ». J’ai, pour la première fois de ma carrière, travaillé dans un secteur autre que le journalisme. J’ai trouvé dans la communication une grande créativité que je ne soupçonnais pas, me suis amusée à jouer avec les codes des réseaux sociaux, organiser un évènement…mais tout ça au sein d’une structure qui ne collait pas, mais alors pas du tout avec mon comment.

- « Ton quoi ? »

Le « pourquoi, quoi, comment » est, à mon sens, l’un des plus précieux enseignements de Switch collective.

Le comment, c’est donc l’environnement de travail. J’ai alors réalisé à quel point le journalisme était un univers professionnel à part. Autonomie totale, rapport à la hiérarchie très souple, liberté d’organisation, gestion personnelle des horaires…à l’opposé de la culture d’entreprise traditionnelle. J’ai compris que pour moi, autonomie n’était pas un mot en l’air, c’était LA base de mon fonctionnement. Sans cette autonomisation, impossible pour moi de travailler avec envie et motivation. Et je crois sincèrement que quel que soit le niveau d’expérience des individus, les responsabiliser et les autonomiser est la clé du management. Frédéric Laloux, dans « Reinventing organizations », le pose comme l’une des bases des modèles d’organisation les plus avancés. Les cadres supérieurs et intermédiaires doivent ainsi être « au service et à l’écoute de leurs subordonnées, pour les autonomiser, les motiver et leur permettre de développer leur potentiel. » Et je me demande bien comment faire ressortir des potentiels en instaurant des rapports contrôlant et infantilisants, qui coupent l’herbe sous le pied à toute prise d’initiative.

Autonomie, donc, mais aussi hiérarchie transversale et non pyramidale, un management participatif, une structure souple, agile comme on dit, où la créativité et la prise d’initiatives sont valorisées…utopiste ? Je ne crois pas, ces entreprises existent bel et bien, on les trouve plus souvent dans l’écosystème startup mais peu à peu, les grands groupes se rendent bien compte qu’ils doivent évoluer en ce sens s’ils veulent attirer des talents.

Il ne me reste plus qu’à prendre mon bâton de pèlerin et à partir à la conquête du job de rêve, celui qui correspondra le plus possible à mon pourquoi et mon comment. Celui qui fera sens, pour moi, qui résonnera et me donnera envie de m’impliquer à 100% sur un projet. Je me donne toutes les chances de ne pas faire partie des 70% des Français ne se reconnaissant plus dans leur travail.

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