Coder c’est bien, mais bien coder c’est mieux

Koffi Sani
4 min readMay 12, 2016

C’est désormais courant : les évangélistes du code –-de la programmation informatique — pilulent partout et prêchent la bonne nouvelle du code. Ils nous font savoir que l’avenir serait brillant lorsque tout le monde, tous les jeunes, tous les enfants sauront écrire le code. Lorsque le monde entier serait programmeur. Autant que j’en trouve sur le net, autant les moyens se mettent en place pour investir dans la réalisation de cette apocalypse. Probablement parce que l’on se fie aux milliards de dollars générés par les compagnies informatiques, avec les startups qui sont désormais évaluées à des millions de dollars. Ça nous fait croire que ce continent africain qui cherche avec acuité sont émancipation technologique verrait son soleil dès que tous ses fils seront des programmeurs.

Mais, je crois en réalité, qu’il y a un grand problème : l’écriture du code — juste parce que des gens nous y incitent — n’apportera pas la solution à l’Afrique.

Il est très récurrent de nos jours de voir presque toutes les entreprises aujourd’hui migrer vers la technologie. Toute entreprise, des startups aux multinationales, est aujourd’hui une entreprise technologique. Et les startups semblent n’avoir d’avenir que dans le code informatique. Cela se fait voir partout sur le globe, et particulièrement en Afrique. Mais je crois que nous devons repenser la chose. Nous devons revoir nos besoins. Et l’un des plus primordiaux me fait comprendre que l’Afrique n’a pas besoin de ceux qui codent. Elle a besoin de ceux qui codent bien.

Ces derniers temps, nous ne vivons pas que dans nos maisons. Nous vivons sur internet, nous vivons dans les logiciels, nous nous nourrissons d’eux. Par exemple, 1/7 personnes vont sur facebook chaque jour. On est nombreux à plaider pour un accès à l’eau potable pour tous. On doit aussi autant songer aux “codes potables” pour tous. Les médecins nous prescrivent de bien manger, pas en quantité mais en qualité. Aussi, faut-il désormais prescrire le code qualitatif et non quantitatif.

Réarmer nos écoles d’informatique pour l’Afrique de demain, mais aussi d’aujourd’hui

Même si c’est seulement aujourd’hui que vous mettez pieds sur le continent, vous vous rendrez compte qu’une pléthore d’institutions s’investissent dans l’éducation, et spécialement dans l’éducation numérique. Parallèlement, n’importe qui peut coder aujourd’hui. Il suffit d’avoir cette volonté d’apprendre, de se faire former par un enseignant virtuel qu’on ne voit nécessairement pas. Et au bout de quelques heures de vidéos sur Youtube, on peut envoyer sa première application Android sur Google Play. Et c’est ce qui se passe dans certaines écoles, celles où les jeunes n’ont de vrais enseignants que ceux virtuels; ceux physiquement présents n’étant plus utiles face aux besoins actuels. Les jeunes s’inscrivent dans des écoles d’ingénieurs, mais passent des heures de cours à ne prendre que des cours inutiles.

Certes ces jeunes, à leur entrée dans de telles filières, ont déjà un grand nombre de pré-requis, qu’il ne suffit que de renforcer, de réarmer pour booster leur capacité à bien coder. Ceci passe par le renouvellement du corps enseignant, du contenu des cours et de la manière d’apprendre. Cette méthode permettra à l’Afrique d’aller plus vite, au lieu de s’investir dans une aventure de “coder pour coder”.

Apprendre à écrire du bon code

L’informatique d’aujourd’hui est très difficile. La programmation telle que nous la connaissons actuellement est très compliquée. Mais nulle n’ose le dire; c’est même dans cet article que je le dis pour la première fois. En 1995, créer une page web se résumait à utiliser un seul langage de programmation (ou de balisage) qu’était l’ancêtre du HTML5. Mais aujourd’hui, pour qu’une page web soit envoyée sur internet, elle doit a avoir été conçue avec au moins trois langages ou technologies. Et avec des contraintes et des règles de bonnes pratiques à mettre en place. Lesquelles bonnes pratiques sont le socle du bon code.

Écrire du bon code –-bien écrire du code — requiert aujourd’hui des compétences dans divers domaines, des connaissances souvent très avancées en mathématiques telles que l’algèbre relationnelle ou la théorie des ensemble. Et quiconque prêche l’évangile du code doit aussi mettre en garde ses adeptes.

Seul le bon code a de l’avenir

Dans un monde où les grands groupes ne cessent de consommer les startups prometteurs, écrire du bon code permet aussi de se faire une place parmi les grands, même si on vient d’un ghetto. Entre apprendre à coder et devenir codeur, il y a une grande fosse. Prêcher le code, inciter les jeunes à coder en leur faisant croire en un salut certain dans ce domaine est trop flatteur. Le mieux, c’est de les aider très tôt à tracer ce bon chemin qui les conduira, sans qu’ils le sachent forcément, à devenir de “bons codeurs”.

Prêcher la bonne nouvelle du code est normalement une bonne chose. Mais je crois que dans cette Afrique où le développement est toujours à l’étape initiale, coder seul ne suffira pas pour sauver le continent. Mais l’approche du “bon code” renferme une forme d’assurance que le produit développé serait bien apprécié des utilisateurs, et de ce fait pourrait être profitable aux codeurs.

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Koffi Sani

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