SpankChain, littéralement la chaîne de la fessée, ne plaira pas aux puritains et plus globalement à tous ceux qui défendent une certaine idée de la pureté humaine.
Elle s’inscrit pourtant bien dans le prolongement des idéaux qui ont poussés Satoshi Nakamoto à créer un tel système. Les codes sont bien sûr revus avec l’humour propre à ce monde de l’amusement pour adultes. Le projet a été travaillé et étudié en profondeur. Regardons plus en détail ce que nous réserve cette “adult-tech”.
Le livre rose nous détaille l’architecture en trois couches imaginées, ainsi que le marché, ses limites, ses rentes, et son angle d’attaque pour le secouer.
Il contient beaucoup de références vérifiables. Le document est généré correctement et on peut vérifier les sources en cliquant tout simplement dessus.
Le marché
Malgré tous nos clichés et les facilités amenés par l’internet moderne, le marché de l’amusement pour adulte est estimé à 100 milliards de dollars en 2015, tout comme celui de la publicité mobile en 2016. Le marché des jeux vidéos n’en est “que” à 700 millions en 2017. Il y a quand même eu 2 milliards de recherche sur le mot “porn” en 2015.
Publiquement, bien sur, personne n’en consomme. Ce n’est “pas bien”. Mais les statistiques sont formelles, le plus vieux métier du monde n’est pas prêt de s’éteindre…
Sur le registre des outils techniques, c’est une véritable rente liée à la culture puritaine qui s’est installée. Tout les grands noms du paiement comme Visa, MasterCard ou PayPal refusent tout commerce lié et vont même jusqu’à fermer les comptes.
Pour en savoir plus, cet article est assez édifiant sur le sujet.
Les rares acteurs sur le marché profitent bien sûr de l’opportunité et se sont confortablement installés dans la rente. Les frais de paiement vont ainsi de 15% pour un paiement simple à 50% pour les sites de caméra.
Imaginez-vous artisan potier : à chaque fois que vous vendez une poterie, y a 50% qui part en frais de paiement. Sans même avoir commencé de payer les cotisations sociales, les impôts ou la TVA ! En gros, lorsque vous vendez 100, vous touchez 25.
Cette technologie, sans foi ou morale, pourrait très bien révolutionner ce secteur et ces intermédiaires. Contrairement aux notaires ou aux greffiers, les obstacles à lever sont beaucoup moins nombreux. Au nom de la morale et de la bonne conscience, cette industrie n’est pas réellement régulée.
Il ne faut pas oublier que l’innovation passe toujours par le porno et que 30% du trafic de l’internet contiendrait du contenu vidéo pour adules. Par exemple, si on prends la hype actuelle sur la Réalité Virtuelle on constate qu’elle est clairement dominée par le porno.
Architecture
SpankChain vise haut et grand. Ils ont découpé leur offre de valeur en 3 couches:
- La couche basse : le paiement
- La couche intermédiaire: les outils
- La couche haute : les sites / apps
Ils ont déjà commencé à s’attaquer au cœur du sujet: le paiement. Via un portefeuille en Javascript qu’ils développent, Vynos, et la bibliothèque de paiement Machinomy, ils sont capable d’ouvrir un canal de paiement permettant de payer au sein d’un navigateur, sans avoir besoin de télécharger une extension ou de comprendre quoi que ce soit à la blockchain.
Là où commence l’intelligence des fondateurs de SpankChain, c’est dans l’utilisation des canaux de paiement. Au lieu d’avoir à se faire valider chaque transaction, le canal de paiement va permettre de grouper une série de paiement dans un seul bloc de transaction public. Ça résout en même temps le problème des frais de transactions et le délai d’attente avant la validation du bloc.
Le fonctionnement est similaire à celui d’un bar / restaurant. Quand on s’assoit à une table, on ouvre une addition et on consomme au fur et à mesure de ses envies. L’addition n’est comptabilisée et réglée qu’à la fin.
Dans le monde de la blockchain, cela signifie que les transactions du canal de paiement sont réalisées en dehors de la chain (“offchain”) et ne sont réellement comptabilisées au sein d’un bloc public qu’à la fin.
Les autres outils sont plus classiques : vérification de l’age légal des créateurs de contenus, infrastructure de streaming vidéo, réseau de publicité, service de recherche et une interface de création pour permettre aux artistes de créer facilement leur propre espace.
Technologie
L’approche de cette vaillante équipe de 9 personnes, dont 7 dévs, relève d’une certaine forme coopétition.
Ils comptent utiliser leur technologie pour faire leur propre site, tout en restant sur le créneau de la technologie. Le but est surtout d’en faire une vitrine, de faciliter l’adoption et de comprendre les problèmes auxquels vont faire face leurs clients.
Ils comptent également sur la monétisation du réseau de publicité et d’affiliation avec le modèle désormais bien connu du partage de revenus. Ils espèrent ainsi devenir le premier canal de distribution des contenus gratuits.
Ils ont également réussi à faire un partenariat solide et public avec District0x. Ils ont l’intention de lancer “The Red Light District” , autrement dit le Quartier Rouge d’internet. On pourra y dépenser du DNT ou du SPANK à part égale, en accord avec leur stratégie respective et leur volume d’émission totale (1 milliards de token chacun).
Stratégie
Leur cœur de métier est clairement sur le paiement. Ils ont bien compris que l’expérience utilisateur actuelle du paiement par blockchain est leur principal obstacle à franchir avant de pouvoir aller plus loin.
Pour pénétrer le marché, en cohérence avec leur approche pour redonner le pouvoir aux créateurs de contenus, ils comptent nouer des partenariats avec ces derniers. Etant donné qu’ils développent de plus en plus leur propre réseau de “fans”, ils sont de moins en moins dépendant de la publicité et c’est autant d’opportunité pour les faire migrer en douceur.
Il y a déjà une porn star avec 273 000 abonnés dans leur core team. On peut penser que, tant que le contenu est là, les fans ne seront pas trop choqués par le fait de changer de site.
Il espèrent également que le statu-quo sur la publicité pour contenu adulte, qui rapporte actuellement 10 fois moins que la publicité “classique”, va se lever progressivement au fur et à mesure que la société se libère de ses verrous culturels sur le sujet.
Conclusion
Ils n’ont pas encore publié beaucoup de codes, mais clairement ils connaissent leur domaine et y travaillent depuis un certain temps.
Ils lancent leur ICO aujourd’hui et ils ont pris le temps de faire mener deux audits par des sociétés tierces, avec une prime de 50 000 $ à la clé. Comme tout projet sur ethereum devrait le faire…
Comme on pouvait s’y attendre avec le fonctionnement actuel d’ethereum, ils ont trouvé (et corrigé) une faille permettant de vider progressivement le compte de l’ICO. Le résultat des audit et le code source des contrats sont publiques et plutôt bien documentés.
La grosse vague de hype des ICOs étant derrière nous, reste à voir si SpankChain trouvera ses investisseurs… et ne se fera pas démolir par les différentes mafias, euh pardon, entreprises qui tiennent actuellement le marché…
Concernant le fait de trouver son public, avec du porno et vu les stats d’utilisation sur ce sujet ô combien tabou, on se doute qu’ils en trouveront…
