L’Intelligence Artificielle Racontée à mes Neveux et Nièces (2)

Marc Caillet
20 min readDec 1, 2021

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Dis, une intelligence artificielle, c’est quoi au juste ?

(Driss, 15 ans, avec Mehdi, Astou et Hilary, 18 ans)

Où l’on explore différentes façons de concevoir l’intelligence artificielle et identifie celle qui correspond aux intelligence artificielles qui sont conçues aujourd’hui, et où l’on se rend compte également qu’elles ont bien peu à voir avec les intelligences artificielles que l’on trouve dans les œuvres de science-fiction.

Marc
8-)

C’est compliqué !

Driss
(o_O)

Ah bon ? Moi qui pensais que tu allais nous donner une définition en deux mots…

En plus, comme a dit Astou l’autre jour, on en entend parler tout le temps ! Tout le monde a l’air de savoir ce que c’est ! Ça ne doit tout de même pas être si compliqué !

Mehdi, Astou & Hilary
(O_o)

Marc
8-)

C’est vrai qu’on en entend beaucoup parler, tu as raison, Driss. Et de telle façon que la définition semble aller de soi pour tous.

De façon superficielle, on pourrait dire que l’intelligence artificielle est le domaine qui tente de reproduire l’intelligence humaine sous forme de système informatique. Mais lorsqu’on y regarde de plus près, on se rend vite compte que ce n’est pas si simple !

Driss, Mehdi, Astou & Hilary
(¬_¬)

Marc
8-)

La question de l’intelligence artificielle a suscité enthousiasme, espoirs et controverses dès les débuts de l’histoire de l’informatique, au cours des toutes premières années de l’après Seconde Guerre mondiale.

1949 est une année clé…

Mehdi, Driss & Astou
(O_o)

Hilary
(o_O)

1949 ?

Marc
8-)

Oui, il y a déjà plus de soixante-dix ans !

Le 27 octobre 1949, très exactement, à l’Université de Manchester, département de Philosophie, une discussion passionnée anime un groupe de scientifiques et de philosophes réunis à l’occasion d’un séminaire intitulé Mind and Computing Machine. Elle s’articule autour de la possibilité d’une intelligence artificielle. Le sujet porte les cerveaux à ébullition, il suscite fort engouement d’une part, franc scepticisme de l’autre.

Parmi les membres de ce groupe de discussion, Alan Turing. Il publie, l’année suivante, en octobre 1950, Computing Machinery and Intelligence, un article dans lequel il décrit un test qui permettrait de déterminer qu’une machine est capable de penser. Le fameux Test de Turing.

Driss
(¬_¬)

Attends ! Ça me dit quelque chose… Ce test, ce ne serait pas le Jeu de l’Imitation ?

Mehdi
(¬_¬)

Turing, c’était un mathématicien, non ?

Marc
8-)

Si, c’est exactement ça ! The Imitation Game, dans la langue d’origine. Je vois que tu connais tes classiques, Driss !

Driss
=]

Marc
8-)

Et oui, Mehdi, il était bien mathématicien ! Ses travaux ont notamment contribué à poser les bases scientifiques de l’informatique. Rien de moins ! Et puis, il a joué un rôle majeur dans le décryptage des messages codés de l’armée allemande durant la Seconde Guerre mondiale ; ces messages étaient codés par la fameuse machine Enigma, alors réputée inviolable. Les Alliés en ont tiré un avantage considérable !

Driss
(*_*)

Ah oui, voilà ! J’ai vu un film qui raconte l’invention de cette machine à décoder les messages !

Hilary, Astou & Mehdi
(*_*)

Driss
(°_°;)

Euh… Par contre, j’avoue que je ne connais pas bien le principe de son test…

Marc
8-)

Eh bien, pour faire simple, le dispositif est le suivant : un humain dialogue à l’aveugle avec un autre humain et une machine. Leurs échanges se font par messages écrits exclusivement. Si la machine arrive à tromper son interlocuteur, autrement dit si son interlocuteur n’est pas capable de déceler qu’il dialogue avec une machine, alors on peut considérer que la machine peut penser.

Mehdi
(¬_¬)

Et donc, c’est ça une intelligence artificielle ? C’est une machine capable de se faire passer pour un être humain auprès des êtres humains ?

Marc
8-)

C’est tout à fait ça, Mehdi ! Selon le Test de Turing, tout du moins, ce serait une machine qui pourrait être jugée capable de penser comme un humain, parce qu’elle pourrait faire ce que nous — en tant qu’entités pensantes — pouvons faire. Et une telle machine correspond à l’une des approches de l’intelligence artificielle.

Cependant, en 1950, année de parution de l’article de Turing, on ne parlait pas encore d’intelligence artificielle. Ce terme a été inventé cinq ans plus tard par John McCarthy, l’un des pionniers de la discipline. Il a été définitivement adopté l’année suivante, en 1956, lors du fameux séminaire estival de Dartmouth, considéré comme l’acte fondateur de l’intelligence artificielle.

Astou
(o_^)

Ça remonte vraiment à loin !

Hilary
(¬_¬)

Et Turing, il en a construites, des machines comme ça pour faire des tests ?

Marc
8-)

Pas de machine réelle, non. Le protocole décrit par Turing doit être compris en tant qu’expérience par la pensée.

Astou
(¬_¬)

Expérience par la pensée, c’est comme le Malin Génie de Descartes, non ?

Marc
8-)

Exactement ! C’est bien vu, Astou !

Le Malin Génie est une expérience par la pensée par laquelle René Descartes trace la voie du doute hyperbolique qui lui permet d’aboutir au cogito, c’est-à-dire à la compréhension qu’il est conscient et que c’est bien la seule chose dont il ne puisse douter. Il n’existe pas réellement, ce Malin Génie. Mais l’imaginer et imaginer les implications de son existence a permis à Descartes de pousser au plus loin le doute radical et de se figurer que seule subsiste, au bout du compte, la certitude de son existence.

De la même façon, le Jeu de l’Imitation est une expérience par la pensée. La machine dont il y est question n’existe pas réellement. Cependant, imaginer son existence, son fonctionnement ainsi que le protocole de test a permis à Turing de déterminer les conditions que devrait remplir une telle machine hypothétique pour donner l’apparence qu’elle est humaine et ainsi, pour être jugée intelligente.

Astou
(^_^;)

Mehdi
(¬_¬)

Et on en fait dans d’autres domaines scientifiques, des expériences par la pensée ?

Marc
8-)

Oui. En physique quantique, par exemple.

Driss
(@_@)

Ouh là, stop ! Je n’ai jamais fait de philo, moi ! Mais si je comprends bien, une expérience par la pensée, c’est imaginer un truc qui n’existe pas et imaginer aussi ce qui se passerait si ça existait ?

Marc
8-)

Tu comprends très bien ! Ces expériences, on les appelle aussi expérience par imagination. Elles consistent à imaginer des dispositifs inaccessibles en pratique pour éprouver une théorie.

Pour la petite histoire, l’une des premières machines à avoir pu passer le Test de Turing avec succès a été créée au Laboratoire d’intelligence artificielle du MIT, par Joseph Weizenbaum, au milieu des années 1960. Nommé ELIZA, c’est un programme informatique qui donnait l’impression de comprendre les messages qui lui étaient adressés en langage naturel par des humains. C’est l’ancêtre des chatbots que l’on trouve maintenant fréquemment dans les jeux vidéo et pour l’assistance en ligne, notamment.

Driss
(*_*)

Ah ouais…

Marc
8-)

ELIZA avait la particularité de fonctionner selon un script qui régissait sa façon de répondre. Le plus célèbre d’entre eux est le script DOCTOR qui mettait ELIZA dans la peau d’un psychothérapeute, si je puis dire. Dans les grandes lignes, ELIZA se contentait alors de retourner au questionneur ses propres questions. Bien entendu, il ne résiste pas à un questionnement un peu poussé.

Mehdi
(¬_¬)

Hmmm… mais si ELIZA a réussi à passer le Test de Turing, c’est soit qu’on a pas fait le test très sérieusement, soit que le test n’est pas très valable, non ?

Marc
8-)

Je dirais qu’il n’a pas été mené de façon rigoureuse. Toutefois, ta remise en cause du Test de Turing comme mesure de l’Intelligence est pertinente. Mais, c’est un autre débat.

Mehdi
(¬_¬)

D’accord.

Astou
(¬_^)

On peut revenir aux définitions de l’intelligence artificielle ?

Marc
8-)

Oui, il est temps. On s’est un peu éloignés du sujet.

Mehdi
(¬_¬)

T’as dit un peu plus tôt qu’une machine pensante comme dans le Test de Turing était une définition possible de l’intelligence artificielle.

C’est quoi les autres ?

Marc
8-)

Stuart Russell et Peter Norvig ont collecté différentes définitions de l’intelligence artificielle. Ils les ont organisées en quatre catégories : les machines qui pensent comme les humains, les machines qui pensent rationnellement, les machines qui agissent comme les humains, les machines qui agissent…

Hilary
=]

…rationnellement !

Marc
8-)

…rationnellement, oui.

Ces catégories répartissent ainsi les différentes définitions en deux objectifs distincts : penser ou agir ; et deux façons de mesurer si ces objectifs ont été atteints : humainement ou rationnellement. Les auteurs, Stuart Russell et Peter Norvig, discutent chacune d’entre elles en introduction à leur ouvrage de référence Artificial Intelligence: A Modern Approach.

Astou
(¬_¬)
Humainement et rationnellement, ce n’est pas la même chose ?

Marc
8-)

Pas tout à fait ! “Humainement” signifie précisément “de façon similaire à un humain”. “Rationnellement” fait référence à une forme plus abstraite d’intelligence. Plus générale, aussi. Et enfin, comme son nom l’indique, fondée sur la raison. Elle n’est pas nécessairement similaire à celle d’un humain.

Mehdi
(¬_¬)

Et la machine du Test de Turing, elle entre dans quelle catégorie ?

Marc
8-)

Selon le Test Turing, une machine peut être considérée comme intelligente si elle parvient à se faire passer pour un humain auprès d’humains. Cette conception de l’intelligence artificielle définit la catégorie agir humainement ! Cette approche a connu un intérêt très limité. Les chercheurs préférant concentrer leurs efforts sur les principes sous-jacents de l’intelligence plutôt que sur son apparence.

L’approche qui considère que l’intelligence artificielle vise à créer des machines capables de penser comme des humains est très proche des sciences cognitives qui, elles, étudient les mécanismes de la pensée humaine.

Driss
(@_@)

Ouh là là, sciences cognitives, encore un truc que je ne connais pas !

Marc
8-)

Les chercheurs de ce domaine s’attachent à décrire, à expliquer et même à simuler le fonctionnement de l’esprit humain. Des phénomènes tels que le langage, la mémoire, l’attention, la perception, le raisonnement, la conscience. Pour y parvenir, ils exploitent les travaux réalisés par les chercheurs de nombreux autres domaines : la neuroscience, la linguistique, l’anthropologie, la philosophie, la psychologie et l’intelligence artificielle.

Astou
(¬_¬)

Et en quoi l’intelligence artificielle en est-elle proche, alors ?

Marc
8-)

Les modèles d’intelligence artificielle progressent grâce aux avancées réalisées dans le domaine des sciences cognitives. C’est particulièrement le cas, aujourd’hui, dans les domaines de l’apprentissage. Les chercheurs en sciences cognitives, de leur côté, utilisent les avancées effectuées en intelligence artificielle pour améliorer leurs modélisations du processus cognitif humain.

Ces deux disciplines s’alimentent l’une l’autre.

Hilary
(¬_¬)

Et les machines qui pensent ou agissent rationnellement ?

Marc
8-)

L’étude des machines qui pensent rationnellement repose sur l’idée que la pensée est régie par un processus de raisonnement irréfutable qui peut être codé selon les lois de la logique.

Cette approche tire son origine de la syllogistique d’Aristote, c’est-à-dire de son système de raisonnement déductif basé sur la logique.

Driss
(@_@)

La syllogi… quoi ?

Astou
8-)

C’est comme : Tous les hommes sont mortels, Socrate est un homme, donc Socrate est mortel !

Driss
(^_^;)

Ah oui, je connais ! J’ai déjà entendu ça quelque part !

Marc
8-)

Voilà, c’est ça un syllogisme ! Deux faits considérés comme étant vrais auxquels on applique une règle de déduction logique pour produire un nouveau fait, vrai lui aussi.

Ces bases posées par Aristote au 4ème siècle avant notre ère ont connu un développement extraordinaire au cours du 19ème siècle et au début du 20ème. Les travaux considérables de Gottlob Frege sur le calcul formel des propositions ont été à la base de ceux menés par Alfred North Whitehead et Bertrand Russell qui ont abouti à la publication du premier volume des Principia Mathematica, ouvrage de référence sur la logique. Frege a aussi été un contributeur essentiel à la logique des prédicats.

Astou
(¬_^)

Il en existe, des intelligences artificielles construites selon ce principe ?

Marc
8-)

Il doit toujours en exister… Parmi ces intelligences artificielles, on en trouve qu’on appelle systèmes experts, car elles sont supposées penser comme un expert humain. Elles sont des outils d’aide à la décision ou au diagnostic dans un domaine très précis.

Astou
(¬_^)

Comment fonctionnent-elles ?

Marc
8-)

De tels systèmes sont constitués d’un moteur de déduction logique, d’une base de règles et d’une base de faits certains dans leur domaine d’expertise. On les utilise de deux façons différentes. La première consiste à découvrir de nouveaux faits certains à partir de la base de faits initiale à laquelle sont appliquées les règles par le moteur de déduction. La seconde part d’un objectif et consiste à identifier les faits de la base qui devront être vérifiés pour que l’objectif soit atteint.

Astou
(¬_¬)

Dans le premier cas, je vois bien de quoi il s’agit. On met dans le système tout ce qu’on sait d’un domaine précis et toutes les règles qu’on connaît de ce domaine et, avec le moteur de déduction, le système applique les règles aux faits. De cette manière, il peut découvrir des choses qu’on ne savait pas.

Mais dans le deuxième cas, je ne vois pas trop…

Mehdi
(¬_*)

Ben, par exemple, tu as une hypothèse et tu te demandes si elle est vraie ou non. Tu la donnes au système et, si j’ai bien compris, avec son moteur de déduction, il va appliquer les règles, mais en arrière en quelque sorte, pour trouver les faits qui devront être vrais pour que ton hypothèse soit vraie.

Marc
8-)

C’est bien ça.

Hilary
(¬_¬)

Quand est-ce que le premier système expert a été construit ?

Marc
8-)

À ma connaissance, le premier système expert à été Dendral. Il a été conçu en 1965 par deux informaticiens, Edward Feigenbaum et Bruce Buchanan, par un pionnier de la biologie moléculaire et Prix Nobel de médecine, Joshua Lederberg et par Carl Djerassi, surtout connu pour avoir contribué à l’invention de la première pilule contraceptive. Dendral était utilisé pour déduire la structure moléculaire d’une substance à partir de données spectrographiques. Il était du niveau des meilleurs chimistes.

Driss, Mehdi, Astou & Hilary
(*_*)

Marc
8-)

La limite du mode de déduction des systèmes experts est qu’il repose sur des faits absolument certains. Or, il arrive rarement qu’on soit absolument certain de quelque chose. Pour combler ce manque et modéliser le raisonnement sur la base de faits incertains, on peut faire appel à la logique floue, formalisée dans les années 1960 par Lofti Zadeh. Elle constitue une extension de la logique classique grâce à l’introduction de valeurs de vérités partielles. On peut également se tourner vers la théorie des probabilités.

Avec cette approche, on disposerait donc de systèmes capables de faire des déductions et des prédictions sur la base de faits certains ou incertains.

Mehdi
(¬_¬)

Mais, est-ce bien vrai que toutes les connaissances peuvent être exprimées avec la logique ou les probabilités ?

Marc
(¬_¬)

Je te retourne la question, Mehdi. Qu’en penses-tu, toi ? Qu’est-ce qui te gêne, exactement ?

Mehdi
(¬_¬)

Eh bien, est-ce qu’il existe des règles logiques qui permettraient à une intelligence artificielle de déduire qu’une photo prise par la NASA représente la Voie Lactée, par exemple ? Je n’en ai pas l’impression. Parce que même nous, on ne serait pas capable d’expliquer comment on sait reconnaître une galaxie.

Astou
(¬_¬)

Et puis déjà, ces machines qui ne feraient que penser rationnellement ne pourraient pas voir la photo ! Elles ne pourraient pas non plus agir sur le monde…

Marc
8-)

Exact ! Ils sont limités par la connaissance humaine et ne peuvent interagir avec le monde. Vous avez trouvé leurs points faibles ! En même temps qu’une excellente transition vers l’approche qui consiste à concevoir des machines capables d’agir rationnellement.

Mehdi & Astou
=]

Hilary & Driss
(¬_¬)

Marc
8-)

Selon cette approche, une intelligence artificielle est pensée comme étant un agent rationnel. Un agent est une entité qui peut être vue comme percevant son environnement à l’aide de capteurs et comme agissant sur cet environnement à l’aide d’effecteurs. Un humain est un agent doté de capteurs tels que les yeux et les oreilles, et d’effecteurs tels que les bras et les jambes. L’agent est rationnel dès lors qu’il mobilise ses capacités de perception et d’action dans le but d’atteindre un objectif.

Hilary
(¬_¬)

Et donc, une intelligence artificielle, ce serait une machine qui a été conçue comme un agent rationnel ?

Marc
8-)

Précisément ! D’ailleurs, cette approche de l’intelligence artificielle en tant qu’agent rationnel rejoint la définition que donne la Commission Européenne à ce domaine : “L’intelligence Artificielle (IA) désigne les systèmes qui font preuve d’un comportement intelligent en analysant leur environnement et en prenant des mesures — avec un certain degré d’autonomie — pour atteindre des objectifs spécifiques.

Une intelligence artificielle de classification de photos prises par la NASA serait constitué d’un système de captation des images — une caméra ou un appareil photo — d’un programme auquel on aura appris à classer correctement les photos, et d’un autre programme qui aurait pour effet d’affecter la classe indiquée par le programme précédent à la photo analysée.

Astou
(¬_¬)

Ça servirait à quoi de construire une intelligence artificielle qui classifierait ces photos ?

Marc
8-)

Elle pourrait, par exemple, permettre de retrouver aisément les photos de la Voie Lactée parmi les dizaines de milliers de photos mises à disposition par la NASA via son moteur de recherche ouvert au public.

Astou
(^_^)

Ah, d’accord ! C’est clair.

Mehdi
(*_*)

Marc
8-)

Et de tels systèmes, il en existe un très grand nombre !

Driss
(¬_¬)

Dans ce cas, une voiture autonome, c’est aussi un aussi un agent rationnel, non ?

Marc
(¬_¬)

Qu’est-ce qui te fait penser ça ?

Driss
(¬_¬)

Eh bien déjà, il y a des capteurs comme des caméras et des capteurs de proximité. Et puis il doit y avoir un programme qui décide de ce que la voiture doit faire. Comme, par exemple, ralentir ou tourner à gauche. Ça dépend des images capturées par la caméra ou de ce que dit le capteur de proximité, en fait. Et puis enfin, il y a sûrement des sortes de moteurs qui commandent la voiture pour lui faire faire ce que le programme a décidé.

Marc
8-)

Excellent ! Tu as bien compris le principe !

Driss
=]

Hilary
(¬_¬)

Mais, pour que l’intelligence artificielle ait un comportement intelligent, il faut bien qu’elle pense rationnellement, non ?

Marc
8-)

Oui, tout à fait !

Hilary
(¬_¬)

Alors, les intelligences artificielles qui sont des agents rationnels, ce sont des systèmes experts auxquels on a ajouté des capteurs et des effecteurs ?

Marc
8-)

Non.

Hilary
(¬_^)

Mehdi
(¬_¬)

Parce qu’on ne saurait pas définir des règles pour reconnaître une galaxie ou pour conduire une voiture. Et aussi parce qu’on ne saurait pas traduire le contenu de la photo dans le langage de la logique.

Hilary, Astou & Driss
(o_O)

Mehdi
(°~°)

J’ai dit une bêtise ?…

Marc
8-)

Non, tu as raison, Mehdi.

Mehdi
=]

Marc
8-)

Un système expert est limité par ce que nous, êtres humains, sommes capables d’exprimer dans le langage formel de la logique, tant pour les faits que pour les règles.

Driss
(¬_^)

Mais alors, c’est pareil pour un programme informatique quelconque. Ce qu’il peut faire est limité par ce que les programmeurs humains sont capables d’exprimer dans le langage de programmation.

Marc
8-)

Ça, c’est vraiment très bien vu !

Driss
=]

Marc
8-)

Et c’est d’ailleurs précisément dans ces cas-là, dans les cas où ils nous est humainement impossible de définir les règles qu’on fait appel à l’intelligence artificielle telle qu’on l’entend aujourd’hui.

Ici, donc, on conçoit des intelligences artificielles capables d’apprendre par elle-même les règles qui leur permettront de réaliser la tâche à laquelle elles sont destinées.

Hilary
(*_*)

Ah mais, c’est puissant !

Marc
8-)

Ces intelligences artificielles sont donc capables de définir des règles inexprimables !

Driss
(¬_^)

Comment ça marche ?

Marc
8-)

Il y a plusieurs façons de s’y prendre. Celles qui rencontrent actuellement le plus de succès s’inspirent du fonctionnement du cerveau humain.

Driss
(¬_*)

Ah ben, ce sont ces intelligence artificielles qui utilisent les travaux des sciences cognitives, alors !

Marc
8-)

Exactement !

Driss
=]

Marc
8-)

On peut voir cette façon de penser l’intelligence artificielle comme un nouveau moyen de communiquer des instructions à une machine.

Avant cela, les seules instructions qu’on pouvait lui donner était celles que nous étions nous-mêmes capables d’exprimer. Dans le cas le plus général, on les donnait en les exprimant dans le langage de programmation le plus adéquat. Dans le cas particulier des systèmes experts, on avait recours au formalisme de la logique.

Astou
(¬_*)

Mais d’ailleurs, quand on explique à quelqu’un comment faire quelque chose qu’il ne sait pas faire, on fait pareil. On lui donne les instructions à suivre. Et dans ce cas, en utilisant simplement le langage courant.

Marc
8-)

Très juste ! Et dans certaines situations, on s’y prend un peu différemment…

Astou
(¬_¬)

Je ne vois pas… Ah, si ! On peut essayer de lui faire deviner comment il faut faire et, à chaque proposition, on lui dit si elle se rapproche ou si elle s’éloigne du but.

Mehdi
(¬_*)

Sinon, on peut lui donner des exemples et lui dire de se débrouiller de trouver comment faire !

Marc
8-)

Eh bien, grâce à la façon de concevoir les intelligences artificielles aujourd’hui, il est possible de s’adresser de ces façons-là à une machine pour lui demander de réaliser une tâche.

L’intelligence artificielle enrichit nos modes de commande des machines.

Hilary
(o_O)

Ah ben, du coup…

Driss
(O_o)

… c’est pas du tout comme dans les films, alors !

Astou & Mehdi
(¬_^)

Marc
¯\_(ツ)_/¯

Ben non ! On trouve en effet de nombreux exemples d’intelligences artificielles dans la culture populaire, en particulier dans des œuvres littéraires et cinématographiques de science-fiction. Leur attitude vis-à-vis des humains balaie un très large spectre.

Vous en connaissez certainement…

Dris, Mehdi, Astou & Hilary
=]

Terminator !

Marc
8-)

Terminator, bien sûr ! Il est devenu l’archétype de l’intelligence artificielle malveillante et destructrice de l’humanité.

HAL, dans 2001, l’Odyssée de l’Espace, de Stanley Kubrick, est une intelligence artificielle plus subtile : membre à part de l’équipage, elle se retourne contre ses partenaires humains après que ces derniers aient pris la décision de la déconnecter suite à un dysfonctionnement.

Dans l’œuvre d’Isaac Asimov, les humains sont protégés de ce type de dérive par les trois lois de la robotique, les robots pouvant ici être vus comme des incarnations, anthropomorphiques ou non, d’intelligences artificielles. L’exemple le plus célèbre de robot régi par ces lois protectrices est très certainement Robby, le robot qui apparaît dans Planète Interdite, de Fred M. Wilcox, inspiré de la pièce La Tempête de William Shakespeare.

Blade Runner, de Ridley Scott, adapté du roman Les Androïdes Rêvent-Ils de Moutons Électriques ?, de Philip K. Dick, met en scène la révolte contre leur condition d’androïdes, difficilement discernables des êtres humains, doués de conscience et dont la durée de vie est limitée à quelques années. Ghost in the Shell, de Masamune Shirow, porte sur une intelligence artificielle qui, ayant accédé à la conscience et dans la poursuite de son désir de reproduction, prend le contrôle de cerveaux humains reliés à divers réseaux via des implants. Love Machine est une intelligence artificielle qui parvient à prendre le contrôle, à des fins maléfiques, du réseau Oz, gérant de toutes les activités humaines, dans le film d’animation Summer Wars, de Mamoru Hosoda.

Astou
=]

Des intelligences artificielles, il y en a dans Matrix, aussi !

Marc
8-)

Oui ! Les événements dépeints dans The Matrix, des Wachowski, se déroulent aux environs de l’année 2199, bien après que les humains aient perdus la guerre menée contre des intelligences artificielles toujours plus puissantes. Dans un rapport de force initial inversé, les intelligences artificielles ont transformé les humains en ressource énergétique, les maintenant dans l’illusion d’une vie normale menée dans un monde tout à fait semblable au nôtre. La matrice.

Mehdi
=]

Et dans Iron-Man !

Marc
8-)

En effet ! Jarvis, dans Iron-Man et The Avengers, est un super-assistant bienveillant qui accroît considérablement les capacités de création, d’analyse et de combat d’Iron Man et de son alter ego, Tony Stark.

Driss
=]

Et dans Star Wars, R2-D2 et C-3PO sont des robots super intelligents qui sont bienveillants aussi ! Ils aident beaucoup Luke et ils ont des émotions comme les humains ! Pareil pour BB-8 avec Rey !

Marc
8-)

Bien vu !

Hilary
(¬_¬)

J’ai entendu parler d’un film où le personnage principal est amoureux d’une intelligence artificielle, je ne me souviens pas du titre…

Marc : 8-) Her ! Dans ce film, Theodore Twombly, interprété par Joaquin Phoenix, entretient effectivement une relation amoureuse avec l’intelligence artificielle Samantha. Il a peut-être influencé le chanteur Philippe Katerine qui imagine, de façon hallucinée dans Stone Avec Toi, des robots qui auraient des enfants avec des humains.

Hilary
(¬_¬)

Ah mais, Laylow aussi ! Le rappeur. Il a fait un album entier dans lequel il raconte une histoire d’amour avec un programme informatique.

Marc
8-)

Trinity ! En référence au nom de l’un des personnages principaux de la trilogie Matrix, d’ailleurs.

Enfin, pour terminer cette petite sélection d’œuvres populaires qui mettent en scène des machines intelligentes, dans le manga Terrarium, de Yûna Hirasawa, robots et humains sont considérés de la même façon.

Au travers de ces diverses représentations, on peut lire les espoirs et les craintes que suscitent les intelligences artificielles. Ces craintes n’en sont que plus exacerbées dès lors qu’on entrevoit la possibilité qu’une telle intelligence artificielle puisse faire son cogito cartésien, c’est-à-dire accéder à la conscience de soi. On est cependant encore loin, aujourd’hui, de pouvoir en créer.

Leur existence relève, pour quelque temps encore, de la science-fiction et de la discussion philosophique.

Driss, Mehdi, Astou & Hilary
(o_*)

Marc
8-)

Sauriez-vous dire ce qui distinguent ces intelligences artificielles imaginaires de celles qui existent aujourd’hui ?

Driss
(¬_¬)

Il y en a qui peuvent se faire passer pour des humains !

Astou
(¬_¬)

Dans Matrix, on dirait presque que c’est comme des extraterrestres qui ont asservi les humains ! Sauf que ce sont des intelligences artificielles qui l’ont fait !

Hilary
(¬_¬)

Ouais !

Marc
8-)

Dans la très grande majorité des cas que nous avons cités, les intelligences artificielles peuvent tout à fait passer pour des humains, dans le sens où elles pensent et agissent comme des êtres humains. Bien que pas toujours avec humanité.

Dans Blade Runner, les intelligences artificielles ont tellement l’air humaines que certaines d’entre elles sont persuadées de l’être, humaines !

L’intelligence artificielle dans Ghost in the Shell et Love Machine dans Summer Wars, sont des exceptions. Elles diffèrent franchement des humains.

Dans Matrix, elles semblent humaines de prime abord, mais l’illusion ne tient pas longtemps et elles dénotent franchement dans le monde simulé dans lequel les humains asservis ont la sensation d’exister.

Robby est une autre exception notable. Les robots à la sauce Asimov sont clairement distincts des humains. Non pas parce qu’ils seraient incapables de penser ou de se comporter comme des humains — Robby fait ça très bien — mais parce qu’ils sont soumis à des lois spécifiques, les fameuses lois de la robotique. Au nombre de trois, elles ne concernent en aucun cas les humains et tiennent ainsi les robots à l’écart de l’humanité.

Hilary
(¬_¬)

C’est quoi, ces trois lois ?

Driss
=]

Il y en a même quatre, en fait ! Une numéro zéro a été ajoutée plus tard aux trois premières !

Marc
(o_O)

Driss
=]

Alors…

Loi numéro 0 : Un robot ne peut pas porter atteinte à l’humanité, ni, par son inaction, permettre que l’humanité soit exposée au danger.

Loi numéro 1 : Un robot ne peut porter atteinte à un être humain, ni, restant passif, permettre qu’un être humain soit exposé au danger, sauf contradiction avec la Loi numéro 0.

Loi numéro 2 : Un robot doit obéir aux ordres que lui donne un être humain, sauf si de tels ordres entrent en conflit avec la Première Loi ou la Loi Zéro.

Loi numéro 3 : Un robot doit protéger son existence tant que cette protection n’entre pas en conflit avec la Première ou la Deuxième Loi ou la Loi Zéro.

Marc
(¬_¬)

Là, tu m’apprends quelque chose, Driss ! Je n’avais pas connaissance de cette loi zéro…

Driss
=]

Hilary
(¬_¬)

Ouais, mais bon, tout ça c’est de la science-fiction…

Marc
8-)

De la science-fiction qui a inspiré un député français, l’année dernière, pour sa proposition de loi Constitutionnelle relative à la Charte de l’intelligence artificielle et des Algorithmes ! Ces lois sont aussi immanquablement mentionnées dans de nombreux débats sur l’éthique de l’intelligence artificielle.

Driss, Hilary & Astou
(o_O)

Mehdi
(¬_¬)

Et en plus, elles sont capables de tout faire, ces intelligences artificielles, dans les films et les livres !

Marc
8-)

Exactement ! Contrairement aux intelligences artificielles qu’on est capable de construire aujourd’hui qui, elles, sont spécialisées dans une tâche donnée. Ou dans un ensemble de tâches similaires pour les plus avancées d’entre elles.

Cette différence est certainement la plus importante !

Mehdi
=]

Marc
8-)

On distingue en effet les intelligences artificielles spécifiques — Artificial Narrow Intelligence — des générales — Artificial General Intelligence. Les premières, les intelligences artificielles spécifiques, ne sont destinées qu’à effectuer une tâche spécifique. Ce sont celles dont le développement est en plein boom en ce moment. Elles sont opposées aux secondes, les intelligences artificielles générales. Ces dernières seraient capables de traiter tout problème, pourraient se comporter comme des humains et pourraient même accéder à la conscience. Ce sont celles qui sont le plus souvent représentées dans les livres et les films. Mais peut-être qu’un jour de telles intelligences artificielles existeront…

Driss, Mehdi, Astou & Hilary
(^_^;)

Marc
8-)

Merci, Driss, pour ta question.

Driss
=]

Astou
(*_*)

J’en ai une pour la prochaine fois ! Parce j’ai aussi entendu parler de Machine Learning et de Deep Learning…

Marc
8-)

Oui, Astou ?

Astou
=)

Bon, je crois que la réponse est non, vu ce dont on vient de discuter, mais je demande quand même pour être sûre et aussi pour en savoir un peu plus…

Marc
8-)

Quelle est ta question ?

Astou
(¬_¬)

Formulée comme si c’était le titre d’un chapitre d’un livre, c’est ça ?

Marc
8-)

C’est bien ça.

Astou
=)

Intelligence Artificielle, Machine Learning, Deep Learning, c’est pas un peu la même chose, tout ça ?

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