Guide de bonnes pratiques pour éviter que la presse parle de votre jeu vidéo

Sébastien Delahaye
4 min readDec 1, 2018

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Photo by rawpixel on Unsplash

À travers les ans, plusieurs développeurs de jeux vidéo indépendants m’ont demandé des bons conseils pour faire en sorte que la presse parle d’un jeu (si possible le leur).

Je n’en ai pas.

En revanche, je ne manque pas de bons conseils (tous tirés d’exemples réels) pour que la presse ne parle à coup sûr pas de votre jeu.

  • La base, c’est bien sûr de ne pas avoir de presskit.
  • Si vous avez fait l’erreur d’en faire un, ne le mettez surtout pas à jour ! À la rigueur, ne le distribuez pas sous forme de page web (ça rend l’information trop facile à accéder) mais sous forme de fichier compressé. Dans ce cas, n’oubliez pas de mettre un mot de passe dessus !
  • Quoi qu’il arrive, évitez de mettre dans votre presskit des détails sur le jeu, sur sa création (ça emmerde tout le monde… à quoi bon avoir des choses à raconter ?), des informations sur le développeur et des moyens de vous contacter. Moins on en sait… eh bien moins on en sait.
  • Tant que possible, préférez les formulaires de contact (idéalement bien buggés et avec un captcha qui demande d’identifier 125 modèles différents de feux rouges) plutôt que d’indiquer clairement une adresse email : l’objectif est de décourager quiconque de vous contacter et de parler de ce que vous faites.
  • N’indiquez nulle part vos comptes de réseaux sociaux : la presse pourrait vous suivre ou tenter de vous y contacter.
  • Tous les screenshots que vous diffusez (si vous faites l’erreur d’en créer) doivent avoir des logos énormes, et le plus possible ! Le nom du jeu, le nom du développeur, le nom de la carte graphique, le numéro de version (pensez bien à préciser que c’est une version “alpha 0.5.8-prealpha”, ça intéresse tout le monde !). Moins on voit le jeu, mieux c’est : moins on voit le jeu, moins l’image peut être utilisée, et donc moins on parlera de vous.
  • Si vous ne savez pas rajouter des logos, vous pouvez aussi distribuer vos images en 640*480, ça devrait calmer les plus motivés.
  • Ne contactez surtout pas la presse ! Et si on vous contacte, ne répondez pas ! Ça semble évident mais certains le font encore…
  • Si vous contactez la presse, pensez à le faire le plus tard possible, idéalement le jour de la sortie voire après la sortie du jeu ! Ainsi, vous êtes assurés (à moins que quelqu’un ne fasse une grosse erreur quelque part, ça arrive, désolé d’avance) que tout le monde évitera de parler du jeu dans la presse. Plus vous contactez les gens tôt, plus ils ont le temps de s’intéresser au jeu, voire de prévoir d’en parler. Grave erreur !
  • Ne contactez que la presse de votre pays (si vous faites l’erreur de contacter la presse). Ou que la presse anglophone. Les autres pays ne comptent pas car ils ne représentent que la majeure partie du monde, ça pourrait donc être potentiellement bien trop intéressant pour vous.
  • Bâclez vos mails : pas de lien vers un site (idéalement pas de presskit, souvenez-vous), ni vers le trailer, mettez une description qui s’attarde longuement sur l’univers du jeu et n’évoque pas un instant le jeu, rendez-ça bien impersonnel et envoyez-le au pif, sans vous renseigner sur qui dans chaque publication pourrait s’intéresser à votre production. Tous ces journalistes n’ont pas de personnalité et sont interchangeables, de toute façon, des petits robots.
  • Paressez tant que possible : pourquoi tenter de donner une identité propre à votre jeu quand vous pouvez simplement citer les titres à la mode (« War Zombie 3000 VR, le jeu de cartes à la Hearthstone, entre Fortnite et Pokémon Go mais avec de la blockchain ») ?
  • Rendez la procédure de demande de jeu la plus compliquée possible.
  • Hébergez votre trailer sur vimeo ou dailymotion (voire dans un player concocté par vos soins si vous avez du temps libre, ce qui est sûrement le cas si vous développez un jeu vidéo).
  • Ne distribuez pas vos communiqués de presse via gamespress : ça permettrait à trop de monde de pouvoir y accéder.
  • Ne créez pas de newsletter, mais si vous en faites une, abonnez de force tout votre fichier presse (et pensez à planquer le lien de désabonnement, c’est illégal mais de toute façon si votre plan fonctionne comme prévu vous aurez fait faillite à la fin du trimestre alors quelle importance). Ça leur fera une bonne surprise !
  • N’embauchez pas de professionnels de la comm’, ne demandez pas conseil, faites votre truc dans votre coin, les autres n’y connaissent rien de toute façon.
  • Évitez les salons, vous risqueriez, en plus de la presse, de rencontrer encore pire : des clients potentiels.
  • N’oubliez pas de faire (le plus tard possible, idéalement après la faillite de l’entreprise) un post-mortem, qui sera bien écrit, détaillé, rempli d’histoires intéressantes et d’images bien choisies : on y verra ainsi le soin avec lequel vous vous êtes tué à la tâche pour créer le jeu, mais aussi les efforts que vous avez mis en œuvre pour éviter d’en vendre le moindre exemplaire.

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