Distribue-moi si tu peux !

Pierre-Henri DEBALLON
4 min readOct 19, 2018

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Pierre-Henri DEBALLON, Co-fondateur et CEO de Weezevent

Pourquoi un distributeur décide-t-il sciemment de court-circuiter son client ?

  • pour S’AUTO-JUSTIFIER : en s’appropriant du trafic naturel, il est ainsi possible et à peu de frais de justifier la performance de son réseau ou son “leadership” sur un public (électro par exemple), cela justifie aussi le plan de communication et les ventes promises lors de la négociation commerciale. La tendance schizophrénique va parfois très loin, avec des enchères sur les mots-clés de votre marque quand ce même réseau fournit également la billetterie en “marque blanche”.
  • pour ALIMENTER LA BÊTE : en achetant des clients, certains distributeurs constituent ou renouvellent leur propre base de données pour mieux l‘offrir ensuite à vos potentiels concurrents.
  • car VOUS LAISSEZ FAIRE : si ces pratiques prolifèrent, c’est aussi la responsabilité directe des promoteurs qui sont peu alertes sur ce sujet. Parfois par manque de staff, de vigilance… mais c’est surtout un sujet qui n’est pas identifié comme stratégique.
  • car ils TRAVAILLENT À COURT TERME : ils ne s’inscrivent pas dans une relation de long terme mais plutôt dans une stratégie de course aux parts de marché, au détriment de leur client.
  • et parfois à cause d’un BUSINESS MODEL DOUTEUX : cette fuite en avant est aussi la conséquence court-termiste d’un modèle économique non rentable et alimenté par des levées de fonds successives. Il faut en retour offrir de la croissance à ses investisseurs. La pyramide de Ponzi finit toujours par s’écrouler, mais tant que des investisseurs peu clairvoyants suivent, les producteurs et leurs consommateurs payent toujours la facture in fine.

En résumé, alors que la principale proposition de valeur des distributeurs consiste à apporter l’audience de leurs réseaux, il est étonnant d’en voir se compromettre en ticket-jackant leurs clients.

- Ah ça, dessiner, il sait faire ! (Crédits — Voutch)

Florilèges d’excuses et justifications douteuses du ticket-jacking

  • L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE INCONTRÔLABLE : “Mince c’est automatique”. Comme si les campagnes Google Ads n’étaient pas programmées manuellement…
  • C’EST LA FAUTE DU STAGIAIRE : “Notre service client a oublié, je leur fais remonter”. Excuse classique, cela permet d’avoir un disjoncteur.
  • L’EXCUSE GONFLÉE : “C’est légal, on a le droit”. C’est vrai, mais cela reste du détournement. Et certains acteurs plus fourbes encore vous piègent même avec les petites lignes de leurs contrats qui autorisent la pratique.
  • LA FAUTE AUX ÉTRANGERS : “C’est pour toucher des étrangers”. Rien d’anormal alors à ce que cela apparaisse sur Google quand je suis en France ?
  • VOUS REPRENDREZ BIEN DU CAMPING : “On ne vend que des packages”. Oui c’est la promesse originale mais pourquoi cela représente un infime pourcentage des ventes au final, et pourquoi les billets secs sont mis en avant ?
  • ON SAIT MIEUX FAIRE QUE VOUS : “Les clients ne sont pas encore décidés, on va contribuer à les convaincre”. Pardon, mais vous êtes en train de me dire qu’un site non officiel aurait plus d’informations de qualité ?
  • ON EST PAS LES SEULS : “Les autres le font aussi”. Dans ce cas, tout est justifiable…
  • LE POMPON : “C’est justifié car on doit se rattraper de la pub faite par ailleurs”. À demi-mot, on vient justifier cette pratique du fait que les autres publicités (affichage métro, présence en magasin…) n’atteignent pas leurs cibles ou leurs objectifs.
  • LA MÉCANIQUE DE L’ABSURDE : “Vous avez besoin de moi pour vendre”. Effectivement si on empêche le producteur de s’auto-distribuer, il est bien obligé de faire appel à un distributeur, cela est d’autant plus vrai quand le ticket-jacking dure depuis plusieurs éditions et que le producteur n’a pas créé un réflexe de vente en direct et/ou n’a pas collecté une base de données pour être maître de son événement. Regardez Booking dans le secteur de l’hôtellerie…
  • C’EST NOUS QUI PAYONS : “Cela fait partie du plan de communication/visibilité qu’on vous offre…”, le coût d’achat des Google Ads est parfois même quantifié pour valoriser le plan de communication.
  • OH LES MAINS : “Si on ne peut pas faire des ventes faciles sur votre vache à lait, on va arrêter de vous aider pour vos artistes en développement”. Au fait, que font-ils réellement pour l’émergence de vos jeunes pousses ?

Pris en flagrant délit de ticket-jacking la main dans le sac par les organisateurs, les explications et les justifications sont souvent cocasses et savoureuses, et petit bonus : elles sont même parfois directement présentes dans les plaquettes commerciales.

- J’ai été un écrivain qui n’écrivait pas. Puis un compositeur qui ne composait pas. Mais j’ai dit stop à tout ça : maintenant je suis un distributeur qui ne vend pas. (Crédits — Voutch)
Crédits — FrenchWeb

Pierre-Henri DEBALLON

Co-fondateur de Weezevent

Weezevent équipe des événements en France, Angleterre, Espagne, Suisse et Canada avec un outil de billetterie et de paiement dématérialisé.

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