Un an de pige

Pierre Foucart
5 min readJan 3, 2015

12 clients, 33 projets, 1380 heures

2014, était ma première année fiscale complète comme travailleur autonome. Cet article se veut être un bilan de cette année. J’espère que d’autres pigistes se retrouveront dans ces lignes, et que cet article aidera les personnes qui projettent de se mettre à leur compte.

Les projets

De mes 8 années d’expérience professionnelle en tant qu’employé, j’en ai passé la moitié côté client et l’autre en agence.

Lorsque l’on est employé, les projets sur lesquels on travaille se limitent aux clients ou à la stratégie de développement de l’entreprise. Lorsqu’on est travailleur autonome, ces contraintes n’existent plus. On peut s’introduire dans tout type d’entreprise, projets, industries, etc. Être à mon compte m’a donc permis d’avoir une plus grande diversité de projets (courts, simples, longs, complexes, pour de très grandes entreprises, pour des agences, pour des start-ups).

De nombreuses raisons mènent une entreprise à externaliser: le manque de ressources en interne, la volonté de ne pas vouloir monopoliser une ressource sur un seul projet, des ressources internes manquant d’expertise. À ma grande surprise, j’ai découvert que les entreprises manquant d’une expertise étaient généralement celles qui la valorisent le plus. Je n’ai jamais eu autant de compliments sur mon travail et sur mon apport que depuis que je suis à mon compte.

Les rencontres

Le travail est reconnu pour être l’un des premiers lieux de socialisation. En étant sans emploi fixe j’avais peur de m’isoler, mais la nature de mon activité m’a finalement amené à rencontrer beaucoup de monde. Je n’ai plus un employeur mais une douzaine.

Je me suis spécialisé dans les mandats courts ce qui m’amène à changer fréquemment d’environnement. N’étant pas en permanence chez mes clients, je ne suis pas obligé de participer aux discussions de couloirs.

Le seul défaut de ces interventions ponctuelles, c’est lorsque l’on a un coup de coeur pour une équipe. On passe moins de temps avec celle-ci que l’on ne le souhaiterait. Mais après tout… Ça donne une bonne excuse pour organiser des 5 à 7.

Les revenus

Je fais partie de cette génération qui ne se rappellent plus vraiment de la vie avant Internet. J’ai commencé à bricoler des sites web en 1997. J’ai fait des études “dans l’Internet” et je suis sorti de l’université au début de la déferlante 2.0. Je n’ai donc jamais connu le chômage, ni de bas salaire… Je n’ai jamais vraiment eu besoin de savoir la valeur de l’argent à l’âge adulte.

Lorsque l’on fait partie d’une structure, que l’on soit employé ou employeur, le salaire tombe à la fin du mois. Mais en tant que travailleur autonome, si l’on ne travaille pas, on ne gagne pas d’argent. C’est cette perspective qui m’a redonné la valeur de l’argent: en facturant à l’heure j’ai recréé un lien direct entre l’argent et le travail.

Un homme politique français disait “Travailler plus pour gagner plus”. Mon activité de 2014 fait mentir ce principe. En effet, une moyenne de 30 heures facturées par semaine et 6 semaines de vacances laisserait penser que mes revenus ont diminué ou stagné… et bien non. En 2014, mes revenus auront été supérieurs de 50% à ma meilleure année en tant que salarié. D’où vient cette augmentation? Dans une entreprise, la valeur créée par un employé est répartie à travers la structure (l’électricité, les locaux, les secrétaires, …). En ne travaillant que pour moi je n’ai pas à diviser mes revenus et je n’ai presque aucun frais professionnels.

Le rythme de vie

Mon démarrage en tant que pigiste en 2013 a été quelque peu stressant. Cela m’avait pris 3 mois pour trouver un rythme de croisière. Cette année, à chaque moment de ralentissement de mon activité, ou de baisse de la demande, le stress revenait.

Pour empêcher l’inactivité, j’ai accepté 90% des contrats que l’on m’a proposés. Si en premier lieu je pensais que les projets se chevaucheraient, en fin de compte ils se sont naturellement imbriqués les uns aux autres. Exception faite de quelques semaines où j’ai facturé plus de 60 heures.

Être une mini-agence m’a demandé d’être disponible en tout temps. Les réunions clients le dimanche sont même devenues une habitude… Pouvoir travailler sur une semaine de 7 jours au lieu de 5, m’a permis de diminuer mon nombre d’heures travaillées par jour, de respecter des échéances serrées ou encore de profiter de belles journées de semaine pour travailler les week-ends pluvieux. Cette absence de contrainte a également compliqué le décrochage. Lors d’un congé de 5 jours en chalet, j’en ai passé 3 à travailler à plein temps…

Depuis que je suis à mon compte, je n’ai jamais vraiment arrêté de travailler. Car aux 30 heures facturées dont je parlais plus haut, il faut ajouter les heures de gestion de l’activité. La comptabilité, la gestion des prospects, la formation, le résautage, etc., sont des activités qui prennent beaucoup de temps et ne se facturent pas. Mes 30 heures facturées représentent en fait un “gros” 40 heures de travail hebdomadaire.

Enfin je ne suis clairement pas à plaindre. Cette année je me serais offert près de 8 semaines de congés! Le double de ce que j’avais en tant que salarié au Québec.

Finalement, c’était une année bien équilibrée qui laisse une sensation assez spéciale. J’ai l’impression de ne jamais avoir autant travaillé, mais en même temps je ne me rappelle pas avoir eu autant de temps pour moi.

Et l’année prochaine?

Cette nouvelle année, j’espère changer certaines choses :

  • Ne plus travailler le week-end pour prioriser ma famille et les amis.
  • Ne plus négocier mon taux horaire. Tout le monde paie le même prix pour le pain de mie. Il devrait en être de même pour mon expertise.
  • Ne pas aller dans des lieux de vacances où il n’y pas Internet. Personne n’a envie de perdre de contrat parce que l’on ne capte pas… et je n’aime pas particulièrement passer la journée au McDonald’s.

Et dans mes rêves les plus fous, j’aimerais pouvoir choisir mes contrats. Je sais maintenant quels sont les mandats qui m’intéressent le plus et ceux sur lesquels je suis le plus efficace. Et l’avantage d’être à la pige… c’est qu’on a le choix.

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Pierre Foucart

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