Le Bitcoin va-t-il détruire la planète ? Le contre point

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43 min readApr 10, 2018

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Le Bitcoin va-t-il détruire la planète ?

1. Introduction

Cet article est une réponse à celui de Ploum visible ici et ici.

D’ordinaire j’aime bien les articles de Ploum, sa plume est plaisante et son analyse me paraît souvent juste; mais dans son article sur la consommation énergétique du Bitcoin, Ploum use de contre-vérités, de raccourcis et de métaphores inadaptées pour arriver à ses fins. Je vais m’attacher à démontrer qu’avec un minimum de connaissances des problèmes d’un réseau électrique, de la consommation d’énergie et de rendement il est impossible de considérer ce gaspillage d’énergie comme négligeable.

Je reviendrai sur le pourquoi il est urgent d’être efficient dans tous les domaines. C’est-à-dire qu’il ne suffit pas “d’utiliser de l’énergie verte puis c’est tout”, une telle affirmation relève d’une ignorance des problèmes liés à la transition énergétique.

2. Contexte

2.1. Environnement

L’humanité n’a que 5% de chances de rester sous la barre de 2°C d’augmentation !

Les récentes études affirmant ceci ont intégré que la transition énergétique en cours nous ferait diminuer nos émissions de CO2 de 90%. Mais malgré cela, à cause de l’inertie d’un système comme la terre, ça ne serait probablement pas suffisant pour rester sous les 2°C d’augmentation.

Accroître la production d’énergie verte est un processus long sur lequel les simples citoyens n’ont pas beaucoup d’emprise. Par contre être plus efficient (ie. consommer moins d’énergie) est à la porté de tous : mieux isoler sa maison, remplacer ses lampes et acheter plus efficient d’une manière générale.

2.2. Technologie des crypto monnaies

La blockchain sert à sécuriser une suite d’informations et les crypto monnaies qui utilisent une blockchain décentralisée doivent y ajouter un système afin de résoudre le problème des généraux byzantins. Dans le cas de Bitcoin ce problème est résolu par la “Proof Of Work” (preuve de travail) qui est un concours de calcul entre les utilisateurs du réseau, ce calcul est extrêmement énergivore.
Mon article réponse ne fait que souligner un point : l’énergie gaspillée de la Proof Of Work pose effectivement des problèmes au regard de la transition énergétique.

2.3. Bitcoin versus système monétaire n’a que peu de sens

Dire que le Bitcoin va remplacer, sans que l’on s’en aperçoive, le système monétaire dans son ensemble est parfaitement irréaliste. Ces systèmes ont de trop grandes différences :

- Les transactions Bitcoin sont irréversibles, celles du système bancaire sont réversibles
- Le nombre de Bitcoin est limité (21 millions), le système bancaire a besoin de pouvoir créer de la dette (donc potentiellement infinie)

Cet article n’oppose les 2 que parce que celui auquel il répond fait de même pour justifier la dépense énergétique du Bitcoin.

2.4. Simplification au sens scientifique

Les termes : “production”, “stockage” et “dépense” d’énergie sont utilisés ici au sens : utilisable par l’humanité ça va de soi. Pour les plus tatillons qui viendraient me dire “on ne peut créer de l’énergie, on ne peut que la transformer, donc rien ne se perd”.
Bravo! Vous mériteriez la médaille de “la science inappliquée”; vous pouvez retourner dans votre labo finaliser votre système à énergie perpétuelle qui ne fonctionne pas tout à fait encore.

2.5. Désolé Ploum

Je fais un article réponse qui annule quasiment toutes tes démonstrations. Ça n’est pas par plaisir. J’aurais lu un article comme celui-ci écrit par quelqu’un d’autre sur le “bitcointropswag.com” ou autre je n’aurais rien fait. Mais comme c’est toi, il fallait que je fasse une réponse pour au moins pointer les erreurs de raisonnement. Le ton est parfois moqueur, c’est parce que je suis taquin. Il n’y a pas de méchanceté dans cette réponse, si tu penses que c’est le cas j’en suis sincèrement désolé.

3. Quelques définitions

Les types d’erreur (intentionnelles ou non) :

- La division par 0 qui donne 1

Je ne suis pas un crack des maths mais j’en ai besoin au quotidien. S’il y a une chose que je sais, c’est qu’il est relativement simple en math de faire une démonstration “foireuse” en glissant une division par 0 qui est égale à 1 au milieu de plein de calculs bien fouillés.
Note: Cette erreur résulte souvent d’une manipulation intentionnelle : on fait une belle démonstration qui a l’air tellement sérieuse qu’on peut se permettre d’y glisser une erreur énorme qui a des chances de passer inaperçue.

- La statistique du verre de vin

Connaissez vous cette étude qui stipule que “d’après des statistiques sur la population les personnes qui boivent 1 seul verre de vin par jour vivent plus longtemps” ?
Effectivement il y a de fortes chances que le critère de sélection de l’échantillon : des personnes ne buvant qu’un seul verre de vin, engendre de lui-même la sélection d’une certaine catégorie de la population. Une catégorie qui achète sûrement du bon vin, qui est donc plutôt aisée et exerce vraisemblablement une profession non manuelle.
L’étude de cet échantillon en soi n’est pas fausse mais le résultat appliqué à l’ensemble de la population, lui, est incorrect. Vous vous douterez bien que cette étude était très utile aux producteurs de vin, afin d’encourager la consommation régulière dudit breuvage.
Cette famille d’erreurs est décrite dans un précédent article de Ploum comme “piège de l’intuition
Note: Cette erreur n’est pas forcément intentionnelle.

Pour la suite je vais simplement reprendre la même structure que celle de Ploum en y corrigeant le raisonnement et en identifiant ces 2 types d’erreurs qui parsèment le texte.

4. Article

Ceux qui défendent la consommation énergétique actuelle du Bitcoin vont vouloir démontrer l’indémontrable, ils vont parfois assimiler ceux qui dénoncent le gaspillage énergétique à d’autres détracteurs d’une autre “cause” ou “non-cause” qui n’a rien à voir.
Et si possible en faisant référence à une classe de détracteurs qui ne se renseignent généralement pas sur le sujet qu’ils dénoncent. C’est de l’assimilation bas de gamme, les politiciens font ça entre eux régulièrement (c’est dire si c’est bas de gamme !).

Ici l’exemple parfait est :

4.1. « “Bitcoin pollue énormément et va détruire la planète” est au Bitcoin ce que “Les étrangers piquent notre boulot” »

Le rapport entre bitcoin et chômage ? Aucun, ici on tente bassement de discréditer ceux qui dénoncent l’énergie gaspillée du Bitcoin en grossissant le trait (“détruire la planète”) et en les assimilant à ceux qui représentent certaines idées sans fondement.
C’est une tentative grotesque de clore un débat.

4.2. « Si le Bitcoin consomme autant d’électricité que le Maroc, c’est une catastrophe, non ? »

Actuellement le Bitcoin consommerait autant d’électricité que le Maroc.
En fait, si on ne peut pas parler de catastrophe écologique c’est tout simplement parce que ce mot est plutôt employé pour une pollution flagrante (genre marée noire ou autre pollution chimique). Mais le fait est que le bitcoin consomme tous les jours et tous les jours un peu plus, la facture énergétique s’allonge et s’accroît ; c’est comme fumer : ça détruit un peu tous les jours les poumons et on ne parle de catastrophe que lorsque le cancer est là.
Le Bitcoin seul ne crée pas le réchauffement climatique, mais il fait partie des nombreux systèmes qui tendent à l’aggraver.

Donc : Si le Bitcoin consomme autant d’électricité que le Maroc, ce n’est pas une catastrophe mais ça n’est clairement pas bon du tout.

Pour simplifier je vais diviser les erreurs de raisonnement en quatre parties :

1. La fausse simplification consommation continue et gaspillée n’équivaut pas à pollution
2. On ne compare que ce qui est comparable
3. Oui, l’énergie du Bitcoin est gaspillée
4. Les 2 phases d’optimisation en ingénierie

5. Consommation électrique n’est pas pollution, mais la gaspiller en continu oui

5.1. « En tout premier lieu, consommer de l’électricité ne pollue pas. Ce qui pollue, ce sont certains moyens de production d’électricité. »

C’est pareil, diriez-vous à Ploum. Et bien oui ! Vous avez raison.

Car même si on sait produire de l’énergie verte, le problème est double :

- On ne sait pas encore produire assez d’énergie verte pour couvrir tous nos besoins.

L’énergie verte n’est pas faite à la demande (éolien, solaire) or on ne sait pas encore stocker l’électricité en quantité suffisante.
Donc consommer inutilement mais de manière permanente c’est obliger le réseau électrique à accroître sa puissance de manière permanente; donc à l’heure actuelle c’est utiliser plus de nucléaire ou de charbon ou de gaz ou d’hydraulique.

- La production d’énergie verte, même en grande quantité, ne résoudra pas le problème seule : il nous manque un moyen de stockage de cette énergie et dans des quantités considérables.

Jusqu’alors on avait soigneusement évité de s’attaquer au problème du stockage d’énergie en accordant la production avec la consommation. Si c’est possible avec un mix Nucléaire/Hydraulique/Charbon/Gaz; en utilisant exclusivement des énergies vertes ce n’est plus possible. Le défi à relever est de pouvoir stocker des quantités d’énergie jusqu’alors inédites.

… Mais revenons aux arguments pour le Bitcoin. On va nous dire que consommation électrique n’est pas pollution car :

5.2. « Si c’était pareil, on se battrait contre les voitures électriques et on encouragerait les voitures à essence (qui sont plus efficaces car l’énergie est produite directement avec un meilleur rendement global). »

Ho, la première division par 0 : un moteur électrique est au moins 2x plus efficient qu’un moteur à explosion. Une voiture électrique (alimentée en électricité produite avec un bon rendement) a donc un rendement global bien supérieur à n’importe quelle voiture thermique.

3 chiffres clés à avoir en tête :

1. Même un mauvais moteur brushless d’une puissance supérieure à 10kW (la Renault Zoé c’est 57kW) a un rendement supérieur à 90% et une durée de vie facilement 4x plus longue que l’équivalent à explosion (et les doigts dans le nez!)
2. Les meilleurs moteurs à explosion plafonnent à 40% de rendement et il est quasi impossible de faire mieux
3. Si les voitures électriques ont une autonomie moindre par rapport aux thermiques c’est à cause du pouvoir de stockage des batteries qui est 60x inférieur à l’essence, mais c’est une donnée qui n’affecte pas le rendement.

5.3. « si la moitié des automobilistes d’un petit pays comme la Belgique achetait une Tesla, cette moitié consommerait à elle seule plus que toute la consommation du Bitcoin ! Et je ne parle que de la moitié d’un tout petit pays ! Vous imaginez la catastrophe si il y avait plus de Tesla ? »

Alors là on a l’erreur du verre de vin : on ne montre qu’une partie du problème pour en tirer une conclusion globale biaisée. Mais effectivement il y a une part de vérité : aujourd’hui on ne pourrait pas produire du jour au lendemain assez d’électricité si toute la Belgique passait à la voiture électrique.
Cela ne veut pas dire que les voitures électriques sont moins efficientes que les voitures thermiques : elles le sont 2x plus. Et, au niveau écologique le gain est très important : pas de rejet de CO2 (à condition que l’électricité avec laquelle serait rechargé un tel parc de voitures ne soit pas produite de manière polluante, évidemment).

Par contre oui il y a un défi de taille à relever : produire plus d’électricité verte. Mais ce n’est pas parce que l’on ne sait pas le faire aujourd’hui qu’il ne faudra pas le faire demain.
Le détail des solutions prendrait tout un article, voire un livre, je vous renvoie à mon annexe 1 : le défi de la voiture électrique pour en avoir un aperçu et à l’ouvrage gratuit et d’utilité publique de David J.C. MacKay pour une vision plus complète.

5.4. « …parfois l’électricité est là et inutilisée. C’est le cas des panneaux solaires, des barrages hydro-électriques ou des centrales nucléaires qui produisent de l’électricité, quoi qu’il arrive. On ne peut pas faire ON/OFF. Et l’électricité est pour le moment difficilement transportable. »

2 divisions par 0 et un verre de vin :

1. Une plutôt évidente : “les panneaux solaires qui produisent de l’électricité quoi qu’il arrive” … sauf quand il fait nuit, quand la météo n’est pas clémente ou quand ils sont sales.
2. L’autre division par 0 : “l’électricité est pour le moment difficilement transportable”. Difficilement par rapport à quoi ? Car en fait c’est sûrement la source d’énergie la plus transportable qui soit. D’ailleurs les pays européens sont interconnectés entre eux et s’échangent de l’électricité (bien plus rapidement qu’une transaction Bitcoin 😁). Certes, il y a des pertes sur le réseau (~2 à 6%), mais essayez donc de transporter aussi facilement du gaz, du charbon ou du mazout !

Et l’erreur du verre de vin → C’est ce que sous-entend cette phrase : “il y a trop d’électricité on peut la consommer”. Alors oui il y a un peu “trop d’électricité” dans les réseaux de nos pays modernes, mais si ça n’était pas le cas il y aurait des coupures d’électricité toutes les 5 minutes. Car on ne stocke que très peu l’électricité, de plus grâce à l’interconnexion européenne on ne souffre quasiment jamais de panne importante.
En fait ce qui conduit Ploum à penser qu’il y a de toute façon trop d’électricité c’est la très bonne qualité du réseau électrique en Europe où les défauts de production sont vraiment minimes. Avoir plus d’électricité que les utilisateurs n’en demandent est nécessaire, nous avons la chance de vivre dans un pays qui n’a pas ce problème; ce n’est pas le cas partout !

Et même s’il est possible actuellement de perdre de l’énergie verte (en 2017 la Californie a perdu 300 000 MW faute d’utilisation). Cela démontre juste l’immaturité des réseaux électriques intelligents (smart grid).
Il n’est pas possible d’en conclure que le fait de brancher sa ferme de minage de 300 000 MW en Californie va utiliser de l’énergie qui serait perdue, car c’est uniquement des pics de production en face de demandes faibles qui produisent ces pertes.

Les crypto-mineurs n’utilisent pas de système relié aux réseaux électriques leur permettant de savoir quand consommer et quand tout éteindre (et même faire cela serait un frein à la mise en place de smart grid).

5.5. « Selon une étude de Bitmex, une grande partie de l’électricité aujourd’hui utilisée dans le Bitcoin serait en fait de l’électricité provenant d’infrastructures hydro-électriques sous-utilisées car initialement dédiées à la production d’aluminium en Chine, production qui a baissé drastiquement suite à une baisse de demande pour ce matériau. Je répète : le Bitcoin a bénéficié d’une grande quantité d’électricité non-utilisée et donc très bon marché, écologiquement comme économiquement. »

C’est vraiment une très grosse simplification.
Tout d’abord un fait en trois points sur l’énergie en Chine. La Chine est à la fois :

1. Le 1er producteur de charbon (46,1 % de la production mondiale)
2. Le 1er consommateur de charbon (50,6 % du total mondial)
3. Le 1er importateur de charbon (16,5 % des importations mondiales en 2015)

La Chine est donc le premier consommateur mondial de charbon. Et cela tout simplement parce que c’est sa première source de production d’électricité (72%) et que le pays a des besoins énormes.

Si on regarde les chiffres environnementaux, ils sont tellement énormes, eux aussi, que ça fait peur :
Une étude de Greenpeace sur les quelques 196 centrales à charbon de la périphérie de Pékin estime que les conséquences de la pollution ont engendré 10 000 morts en 2011 !!
Selon une étude du Health Effect Institute, il y aurait eu 1,2 million de morts dus à la pollution en Chine. L’espérance de vie en Chine serait réduite de 5 ans à cause des particules fines.

Je me rends en Chine une fois par an. Je peux vous dire que ces chiffres bien que très impressionnants ne m’étonnent pas.
Le ciel dans les grandes villes c’est souvent ça :

Pollution de l’air à Pékin

Photo (Beijing Air Pollution) de Kentaro IEMOTO, licence CC BY-SA 2.0

Et parfois c’est pire. Depuis 2013 même le Japon est parfois touché par la pollution chinoise.
Ne pas voir le soleil même quand la météo affiche beau temps ça fait quand même bizarre. J’aime la Chine mais je n’échangerai pas le ciel parisien et sa pollution contre l’équivalent pékinois pour tout l’or du monde.

Si les autorités chinoises avaient de l’énergie à ne plus savoir qu’en faire à un endroit, c’est dû au temps de mise en place du réseau de distribution. Cette donnée ne peut pas être et ne doit pas être considérée comme acquise ad vitam æternam.
La consommer de manière outrancière réduit bien le temps de mise à disposition du réseau aux populations. Car ça ne se fait pas de couper l’électricité à Paul pour la donner à Pierre … sauf si on sait que Paul consomme tout pour calculer des hashs inutiles alors que Pierre se meurt dans un nuage de particules. Mais encore faut-il identifier que l’utilisation de Paul est moins légitime que celle de Pierre.

Le barrage des 3 gorges cité dans l’étude Bitmex a bien pour but d’approvisionner en énergie les régions côtières (ie. les populations) et aussi impressionnant qu’il soit ce barrage ne représente que quelque pourcents de l’électricité nécessaire aux habitants. Mais le but est bien d’arrêter de construire 2 centrales à charbon par semaine. Et donc, indirectement mais sûrement, de sauver des vies !

Dire que consommer cette énergie est écologiquement bon c’est vraiment un raccourci qui pose question sur la Chine : pensez-vous vraiment qu’un pays qui a conscience de devoir réduire sa pollution atmosphérique gaspillerait de l’énergie verte ?
Non, la Chine est peut-être l’un des plus gros pollueurs du monde mais c’est aussi le pays qui investit le plus dans les énergies propres.

Désormais la consommation énergétique des gros mineurs chinois va être surveillée par les autorités et ce qui leur sera accordé va aller décroissant à mesure que le réseau électrique augmentera sa capacité de distribution aux populations. L’énergie du Bitcoin pose bien problème en Chine.

5.6. « Dans certains cas, diminuer la consommation électrique peut même être problématique. Lors de mes études, on m’a raconté que l’éclairage outrancier des autoroutes belges a été conçu pour absorber l’excédent électrique des centrales nucléaires durant la nuit. Je ne sais pas si c’est vrai mais cela était affirmé comme tel par des professeurs d’université. »

… Hé ben, j’espère que le professeur affirmant ceci n’était pas celui d’une matière scientifique.
Car même si j’ai écrit précédemment que l’électricité se stocke très peu il est quand même possible d’en stocker assez pour ne pas la gaspiller sur des éclairages d’autoroutes. Surtout dans des pays comme la Belgique ou la France qui ont une production stable et de plus sont interconnectés avec les voisins européens : un surplus ici peut être utilisé ailleurs.

La technique de pompage-turbinage est utilisée depuis longtemps. Le principe est simple : pomper de l’eau pour la stocker dans un réservoir en amont lors du surplus d’électricité ; pour l’utiliser il suffit de laisser s’écouler l’eau dans des turbines en aval pour re-produire de l’électricité (au passage on perd ~15 à 20% d’énergie en pertes diverses). Il y a d’autres moyens : Tesla propose d’utiliser des batteries et il y a des nouvelles technologies à l’étude.

Parenthèse : la cause de l’éclairage des autoroutes belges n’est peut-être pas des plus glorieuses mais en tout cas ça n’a rien à voir avec la consommation d’un hypothétique surplus d’énergie. Heureusement cet éclairage devrait aller en diminuant.

5.7. « En deuxième lieu, si on se concentre uniquement sur la pollution de CO2 (qui est loin d’être la seule pollution mais la plus médiatique actuellement), il est tout simplement impossible de faire une équivalence: autant d’électricité produite équivaut à autant de CO2 produit. En effet, le CO2 produit dépend complètement du moyen de production utilisé. »

En fonction du mix énergétique de la localité où est utilisée l’électricité la quantité de CO2 d’un système fonctionnant en permanence est parfaitement déductible. Par exemple en France le Bitcoin gaspille du Nucléaire et en Allemagne à 53% de l’énergie fossile donc productrice de CO2.
Il est aussi important de se rendre compte que gaspiller de l’énergie verte reste du gaspillage : cette énergie devrait servir à remplacer une énergie moins propre utilisée actuellement.

Un petit exercice de réflexion basique s’impose. Prenons comme données indiscutables :

1. Nous devons diminuer nos émissions de CO2 si nous voulons contenir le réchauffement à 2,5°C (oui pour les 2°C c’est déjà compromis) et que le principal levier du réchauffement c’est le CO2
2. Nous ne savons (pour l’instant) pas produire de l’énergie verte en quantité suffisante pour couvrir tous nos besoins
3. La diminution du CO2 passe par le remplacement d’énergie fossile par de l’électrique propre ce qui implique une augmentation (conséquente) de la consommation électrique (voir l’exemple de Ploum avec la moitié de la Belgique roulant en Tesla)

En évitant de raisonner comme un tambour, on peut synthétiser comme solutions de principe :

1. Tout gaspillage d’électricité est un frein au remplacement des énergies fossiles par de l’électricité non charbonnée
2. Donc gaspiller l’électricité, même verte, c’est polluer, car c’est mettre des bâtons dans les roues de la transition énergétique (en plus de polluer directement dans certains cas)

5.8. « Alors je sais qu’on nous lave le cerveau depuis des années avec “consommer de l’électricité, c’est mal, il faut éteindre les lumières” mais c’est un raccourci très très très raccourci qui peut parfois être faux. »

“lavage de cerveau”, carrément ! Heureusement qu’il y a des Donald Trump (et des Ploum du coup) qui résistent bien à ce lavage de cerveau !

Dire que consommer de l’électricité en continu de manière outrancière ne pose aucun problème environnemental est un “rallongi” vraiment très très très long qui fait prendre des détours vers plein de contre-vérités et se révèle presque tout le temps faux. Je vais continuer de le démontrer.

5.9. « Dans son livre “Sapiens”, Harari affirme que tenter de consommer moins d’électricité n’a aucun sens. Ce qu’il faut améliorer, ce sont les moyens de production. Il ajoute que quelques kilomètres carrés de panneaux solaires dans le Sahara suffiraient à alimenter toute la planète. »

Alors là, lol :

1. En premier lieu, je suis très content de savoir qu’il ne fait jamais nuit dans le Sahara (puisque des panneaux solaires y fonctionneraient en continu) … Ça modifie quelque peu ma vision du monde; mais ok, tout un chacun a le droit d’être platiste 😁

2. Harari (historien de formation) affirme que quelques kilomètres carrés de panneaux solaires suffisent à l’humanité L O L. Non sérieusement la phrase correcte est “Quelques milliers de km² peuvent suffire à alimenter l’humanité pendant seulement 46% du temps” (la démo vient juste après)

Pour le point 2, reprenons notre sérieux : Vite, il faut appeler d’urgence les quelques 2000 chercheurs et ingénieurs qui travaillent d’arrache-pied à la fusion nucléaire :

- Allô les mecs, plus besoin de vous embêter à essayer de trouver une source d’énergie propre : y a Ploum qui m’a dit que Harari lui a dit qu’avec quelques panneaux solaires dans le Sahara on n’aura plus de problème d’énergie ! On annule tout et on planche sur les moyens de transporter cette électricité !
- … Environ 2000 soupirs consternés au bout de la ligne …

5.10. « Cette solution n’est malheureusement pas réalisable en l’état car l’électricité reste difficile à déplacer sur de grandes distances mais cela illustre bien que le challenge est dans l’amélioration de la production et du transport, pas dans une hypothétique réduction de la consommation. »

… Ou alors parce que c’est juste une énorme bêtise et que quand Harari a affirmé cela il s’est planté comme une loutre bourrée à la bière. Je ne veux pas dire qu’il est bête, chaque homme à le droit de se planter de temps en temps, surtout si on s’aventure sur un sujet qu’on ne maîtrise pas, c’est l’effet Dunning-Kruger. Il ne faut pas le faire trop souvent, il faut savoir reconnaître ses bêtises et surtout s’abstenir de faire des citations de loutre bourrée à la bière comme si c’était des vérités émanant de grands hommes touchés par la grâce d’un moment de réflexion absolue.

Pour ce qui est du transport d’électricité : l’idée de mettre des panneaux solaires dans le désert n’est pas nouvelle : le projet Desertec prévoyait bien le transport de quantités non négligeables d’électricité jusqu’en Norvège. Le problème n’est pas vraiment là… Le fait que ce projet ne prévoyait aucunement des lignes vers les pays en voie de développement d’Afrique est bien plus préoccupant, mais ça mériterait aussi un autre article.

Pour les quelques km² seulement de panneaux solaires : expliquons pourquoi les calculs donneront tort à Harari, sans les faire (ça vient après), car il est plus important d’avoir de bonnes notions de quantité d’énergie que de savoir faire de bêtes multiplications :

1. Le rendement des panneaux solaires n’est pas très bon : plafond théorique à 33,7% et 26% réel pour les meilleurs existants
2. Le même rendement maximum théorique d’une éolienne est de 59%, et un peu de technique permettrait aux éoliennes de s’approcher de cette limite
3. L’éolien offshore est l’une des énergies vertes avec le meilleur rendement (après les centrales hydroélectriques)
4. Les besoins de l’humanité pourraient probablement être couverts par une ferme éolienne dans l’atlantique Nord de la taille de l’Inde, ces éoliennes fonctionneraient presque tout le temps grâce aux vents verticaux des océans de l’Atlantique nord.

Sachant que :

- les éoliennes fonctionnent potentiellement aussi la nuit
- la durée d’ensoleillement max est de 4000h/an sur 8760h soit ~46% du temps
- l’Inde fait 3,287 millions km²
- quand je lis “quelques km²” je comprends 1000 km² maximum (mais peut être est-ce ici qu’il y a confusion)

Je sais que ça ne va pas le faire. Outre la nuit, le problème c’est la limite des “quelques km²” de panneaux solaires. A mon avis ( je n’ai pas encore fait les calculs ), en recouvrant de panneaux solaires le quart du Sahara ça peut marcher (sauf la nuit), mais avec seulement “quelques km²”, aucune chance.

5.10.1 Démonstration :

Tout d’abord les données (je prends les données les plus avantageuses à Harari)

- Il y aurait un potentiel solaire maximum de 1000W/m²
- L’humanité à besoin de 17,7TW en continu. Ce chiffre prend en compte toutes les sources d’énergie : faisons comme si nous avions accompli notre transition énergétique !

Donc par km² on peut espérer avec le meilleur rendement actuel (1) de 26%, et le max théorique (2) 33,7% :

1. : rendement de 26% = 260 W/m² → 260 MW/km²
2. : rendement de 33,7% = 337 W/m² → 337 MW/km²

Soit Y le nombre de km² nécessaire pour atteindre 17,7 TW de puissance :

1. : 260 MW * Y = 17.7 TW → Y = 68 077 km²
2. : 337 MW * Y = 17.7 TW → Y = 52 522 km²

C’est donc, en théorie, la superficie de la Bosnie (un peu moins de 2 fois la Belgique) qui serait nécessaire à couvrir les besoins de l’humanité pour les heures d’ensoleillement du Sahara, soit ~46% du temps.

Même si j’avoue que je me serais attendu à beaucoup plus grand, on reste loin des quelques km². Surtout que ces chiffres sont clairement optimiste. Mais en fait Harari n’a sûrement pas sorti ces chiffres de son chapeau, il a peut-être mal lu cette thèse, qui stipule qu’un carré de 254x254 km (soit 64516 km² → je suis à peu près d’accord en théorie) suffit à l’humanité… uniquement durant les heures d’ensoleillement.
Thèse qui se révèle, comme je vous le disais pour mes chiffres, très improbable à cause du rendement en conditions réelles; une autre étude donne un chiffre 8 fois plus élevé.

Car “La différence entre la théorie et la pratique, c’est qu’en théorie il n’y a pas de différence alors qu’en pratique il y a en a une” → exemple de citation d’homme touché par la grâce d’un moment de réflexion absolue (merci Johannes Lambertus Adriana van de Snepscheut pour avoir partagé le fruit de ce moment)

5.11. « Bref, pour résumer, il est tout simplement faux de dire que consommer de l’électricité pollue. Cela peut être parfois (ou souvent) le cas mais c’est très loin d’être une vérité générale. Et oui, c’est très difficile à admettre quand ça fait 10 ans qu’on met des ampoules écolos et qu’on mesure chaque kilowattheure de sa maison pour se sentir l’âme d’un sauveur de planète. Mais ces actions n’ont qu’un impact infime par rapport à d’autres actions individuelles (par exemple réduire l’utilisation d’une voiture à essence). »

Soulignons la première vérité de l’article : diminuer l’usage d’une voiture essence est une très bonne action pour la planète. Randall Munroe nous dit même que de faire subir à notre voiture une ré-entrée dans l’atmosphère éviterait ~20 à 30 tonnes d’émission de CO2 par 100 000 km et serait donc meilleur pour l’environnement que de la conduire.
Cela dit, je comprends que certains sont obligés d’utiliser une voiture, dans ce cas je recommanderais d’acheter la plus efficiente possible pour vos trajets.

Mais sinon rassurez vous et continuez à faire des économies en achetant plus efficient : remplacez les ampoules par des LED, isolez votre maison, etc. Vous ferez une bonne action pour la planète mais aussi pour votre porte monnaie, quoi qu’essaye de vous faire croire Ploum ici.

6 Comparons ce qui est comparable

6.1. « Bitcoin consommerait autant que le Maroc. La consommation du Bitcoin aurait annulé les bénéfices de l’obligation des ampoules économiques en Europe. Voire “Bitcoin consommerait plus que 159 pays” (en oubliant de préciser qu’il s’agit d’un classement, pas de la somme de ces pays). »

Dans l’ordre :

1. Oui si Bitcoin consomme autant que le Maroc c’est la honte
2. Oui si la consommation du Bitcoin équivaut à l’annulation de l’effet des ampoules électriques c’est aussi la honte
3. C’est vrai que dire que le Bitcoin consomme autant d’énergie que 159 pays nécessite de bien choisir les pays. Je préfère dire qu’en moyenne une transaction bitcoin consomme autant d’énergie qu’un foyer américain moyen pendant 1,5 journée (et le foyer américain est parmi les foyers les plus consommateurs au monde).

6.2. « Dit comme ça, ça paraît catastrophique. »

… on peut quand même dire que ça fait bien chi#*!*, non ?

6.3. « Mais vous savez combien consomme le Maroc, vous ? Vous savez que le Maroc a 33 millions d’habitants et qu’on estime entre 13 et 30 millions le nombre d’utilisateurs de Bitcoin ? Bref que l’ordre de grandeur est tout à fait comparable ! »

Hum la belle division par 0. Ou alors il y a un gros problème d’intuition ?
Donc il y a : à peu près autant d’utilisateurs de Bitcoin que d’habitants au Maroc et justement les consommations sont à peu près équivalentes donc tout va bien … hein tout va bien ?

Là je cite Ploum dans le texte :

“Les comparaisons que j’ai vues sont toutes plus absurdes les unes que les autres”

, celle-ci en est un parfait exemple.

Reprenons: qu’est ce que Bitcoin : Un système d’échange de valeurs.
Ok, donc utiliser Bitcoin c’est comme payer avec sa carte bleue : le système a le même but.
Donc ici, on essaye de nous faire avaler que 30 millions de personnes qui ne font que payer régulièrement avec leur carte bleue c’est pareil que 33 millions qui, en plus eux aussi, d’utiliser une carte bleue de temps en temps, se déplacent, s’éclairent, utilisent leurs ordinateurs, leurs machines, rechargent leurs téléphones, ont une climatisation, font fonctionner leurs entreprises … etc, bref 33 millions de personnes qui vivent.
Non ce n’est pas du tout comparable : le fait que 30 millions d’utilisateurs de Bitcoin consomment autant que 33 millions de marocains démontre l’inefficacité énergétique extrême du Bitcoin.

6.4. « Quand aux ampoules, cela ne veut-il pas dire tout simplement que cette mesure d’obligation des ampoules économiques est tout simplement une mesurette qui n’a pas servi à grand chose en termes d’économie ? »

On dirait une citation de Trump ou l’affirmation d’un climatosceptique quelconque (ça revient au même en fait).
Il faut ramener la mesurette aux nombre de foyers potentiellement touchés. 0,1 c’est rien mais multiplié par 10 000 000 ça fait 1 million (désolé de devoir écrire une telle évidence).

Avec un peu de source ça donne :

“La consommation mondiale pour l’éclairage public et l’éclairage des bâtiments est de 2 700 TWh, émettant 1 150 millions de tonnes de CO2. En France, la consommation totale d’électricité liée à l’éclairage est de 56 TWh, émettant 5,6 tonnes de CO2 (Ademe — 2017).”

“Le passage aux nouvelles technologies de l’éclairage permettrait selon l’UNEP d’économiser 140 milliards de dollars et de réduire les émissions de CO2 de 580 millions de tonnes par an.”

Sachant qu’une LED pour le même éclairage consomme 10x moins qu’une lampe incandescente, ça fait pas mal d’économie pour une mesurette.
Sans compter que la durée de vie des meilleures LED est 25x supérieure à celle des lampes incandescentes.
Imaginez un peu l’économie appliquée rien qu’aux autoroutes Belges : 9,5 millions € à diviser par 10, sans compter les durées de vie supérieures des LED à remplacer moins souvent …

Donc chaque fois que vous remplacez une lampe à incandescence par une LED la planète et votre portefeuille sont très contents !

6.5. « Surprise, le Bitcoin consomme à peine plus que la production des pièces de monnaies et des billets de banque ! Or, rappelons que les pièces et billets ne représentent que 8% de la masse monétaire totale et plus spécifiquement 6,2% pour la zone euro. »

Effectivement je suis surpris ! Car je n’ai pas du tout les mêmes chiffres pour la production de monnaie. Mais j’ai l’impression que Ploum a intégré l’extraction de l’or dans le coût de production de monnaie ce qui est faux depuis de nombreuses années (j’y reviens juste après)

Pour le coût de la monnaie fiduciaire je vais citer Emmanuelle Assouan, de la Banque de France :

« le coût de fabrication d’un billet se situe entre 5 et 10 centimes d’euro. Une validation d’une transaction bitcoin c’est 215 kilowatts-heure… »

6.6. « Or, outre la consommation énergétique, l’extraction de l’or est extrêmement contaminante (notamment en termes de métaux lourds comme le mercure). »

Donc l’excuse c’est “lui il pollue plus que moi, donc je peux polluer aussi”. C’est la défense Chewbacca !
En terme de pollution on peut toujours trouver pire, par exemple : envoyer un satellite dans l’espace c’est une dépense d’énergie folle; donc c’est bon on peut tous polluer car on ne fera jamais pire que ça.

6.7. « La pollution liée à l’or semble d’autant plus inutile quand on sait que 17% de tout l’or extrait dans l’histoire de l’humanité est entreposé dans les coffres des états et ne bougent pas. Comme le disait Warren Buffet, l’or est extrait d’un trou en Afrique pour être mis dans un trou gardé jour et nuit dans un autre pays. »

C’était vrai il y a 40 ans, la citation de Warren date probablement de cette époque ! Désolé Warren je ne te rajeunis pas (oui je tutoie Warren Buffet, c’est permis sur internet).
Ça fait longtemps que l’étalon-or n’est plus utilisé par les états comme contrepartie des émissions de monnaie. L’or n’a plus aucun rôle monétaire depuis 1971.
Si aujourd’hui les banques étatiques conservent leur or durement acquis c’est uniquement par sécurité. La France a même vendu un peu de ses réserves. Les exceptions à cette stabilité sont la Chine et La Russie, mais cela ne relève pas du fonctionnement du système monétaire mais plus de problèmes de politiques (ie: pouvoir jouer à “qui à la plus grosse” avec les États Unis). On pourrait au moins nuancer le cas de la Chine car c’est majoritairement de l’or acheté des stocks suisses donc pas d’extractions (pour les autres je n’ai pas trouvé de source).

Les réserves d’or des grands pays de 2000 à aujourd’hui :

La chine rachéte l’or suisse

Avec les USA sur le graphique, on voit bien la stabilité de la chose :

Les stocks d’or sont globalement stables

source : gold.org

6.8. « Si Bitcoin remplaçait l’or stocké dans des coffres, même partiellement, ce serait donc une merveille d’écologie, comparable au remplacement de toutes les voitures à essence du monde par des voitures électriques. »

Malheureusement même en remplaçant l’or des coffres de nos nations nous n’annulerions pas la pollution causée par l’extraction de cet or qui s’est produite il y a des années.
Les coffres des Etats sont plein d’or depuis bien avant ma naissance et cet or n’a pas bougé et ne bougera pas (source : James Bond Goldfinger sortie en 1964 ! Hey tu t’en souviens Warren ? T’avais 34 ans ! )
Bitcoin étant un système de transactions, il faut le comparer aux systèmes de transactions : en l’état actuel il est 5000x moins efficient que VISA par exemple. Donc, non, ça n’a aucune chance d’être une “merveille d’écologie”.

6.9. « Et s’il fallait comparer Bitcoin au système bancaire, avec ses milliers d’immeubles refroidis à l’air conditionné, ses millions d’employés qui viennent bosser en voiture (ou en jets privés), je pense que le Bitcoin ne paraîtrait plus écologique mais tout simplement miraculeux. »

VISA/Mastercard seraient bien mal gérés s’ils consommaient autant que les multiples et énormes data centers de minage du bitcoin. Surtout que, comme la plupart des grandes entreprises ayant besoin de grands bâtiments, il est rentable pour VISA/Mastercard d’investir dans des bâtiment HQE, voire des bâtiments à énergie positive.
De plus, sous-entendre que Bitcoin n’a aucune forme d’humains travaillant pour lui est aussi un non sens.
Le Bitcoin se base sur un concours entre mineurs pour valider chaque transaction, il n’y a qu’un gagnant à chaque fois et il y a donc des millions de calculs qui sont faits inutilement.
A côté de ça les transactions monétaires actuelles sont bien plus simples et les entreprises comme VISA/MasterCard ont optimisé au mieux leurs systèmes d’information car pour eux : plus efficient = plus de sousous dans la popoche à la fin du mois, je les vois mal faire des calculs inutiles à chaque transaction.

6.10. « Sans compter que nous n’en sommes qu’au début ! Bitcoin a le potentiel pour devenir une véritable plateforme décentralisée qui pourrait remplacer complètement le web tel que nous le connaissons et modifier nos interactions sociales et politiques : votes, communications, échanges sans possibilité de contrôle d’une autorité centralisée. »

L’inefficience de Bitcoin a une conséquence lourde en plus de polluer : il ne scale pas (c’est à dire : très mauvaise montée en échelle). Il plafonne à 7 transactions par seconde, ce qui à l’échelle de la planète : 7 milliards d’utilisateurs potentiels, est vraiment … minable (presque sans mauvais jeux de mot). Pour comparer : VISA effectue en moyenne plus de 1600 transactions par seconde et des pics bien plus importants sont absorbés sans problème.
Donc, non, sans résoudre le problème d’efficience, Bitcoin ne peut pas faire plus que ce qu’il fait aujourd’hui, c’est à dire finalement ne servir qu’à très peu d’utilisateurs.

6.11. « Vous êtes-vous déjà demandé quelle est la consommation énergétique d’un Youtube qui sert essentiellement à vous afficher des pubs entre deux vidéos rigolotes (et donc de vous faire consommer et polluer plus) ? Et bien la consommation des data-centers de Google en 2015 était supérieure à la consommation du Bitcoin en 2017 ! Cela n’inclut pas les consommations des routeurs intermédiaires, de vos ordinateurs/téléphones/tablettes ni de tous les bureaux de Google autres que les data centers ! »

Erreur du verre de vin.

Déjà YouTube ce n’est que de l’énergie renouvelable (comme tout google), ok, c’est un détail.

Ensuite, toute personne regardant YouTube va dépenser une énergie qu’il va devoir payer. Au contraire un mineur est payé plus en Bitcoin que le coût de la dépense énergétique du minage.

Et enfin, comme les journaux qui choisissent bien leurs pays pour pouvoir dire que le Bitcoin consomme autant que 159 pays, ici Ploum choisit de manière bien orientée ses sources.

- Google a consommé le plus en 2015 : 5,7 TWh (soit 2x San Francisco tout de même) et en 2016 : 6,2TWh (voir p48) et depuis c’est du 100% renouvelable
- Bitcoin = selon une étude optimiste aujourd’hui 12,91 TWh ; en prenant l’étude moins optimiste c’est 59 TWh, et c’est loin d’être du 100% renouvelable

Donc Bitcoin consomme entre 2x plus et 9x plus que tout Google.

6.12. « Face à ces nombres, quelle est selon vous la consommation acceptable pour une plateforme décentralisée mondiale capable de remplacer l’extraction hyper polluante de l’or, les banques, l’Internet centralisés voire même les états ? Ou, tout simplement, de protéger certaines de nos libertés fondamentales ? Avant de critiquer la consommation de Bitcoin, il est donc nécessaire de quantifier à combien nous estimons une consommation “normale” pour un tel système. »

Comme vu précédemment :

1. Bitcoin n’arrêtera pas l’extraction d’or. Pour ça il faudrait convaincre le monde d’arrêter d’acheter de la joaillerie.
2. Les banques sont un système qui est plus efficient et moins polluant que le Bitcoin. Remplacer les banques par Bitcoin équivaut à consommer plus que toute l’énergie que l’humanité ne sait produire… Si Bitcoin ne procède pas à une révolution technique.
3. Remplacer l’internet centralisé… Une définition d’internet centralisé s’impose, là je ne vois pas trop. Bitcoin s’appuie sur internet, le fait que le protocole soit décentralisé n’a pour moi aucun rapport avec internet.
4. Remplacer les états ?!? J’ai pas accès à la potion magique nécessaire pour arriver à suivre ce raisonnement là, désolé. Mais soit, essayons : Bitcoin remplace l’état; je suis malade, je dois aller à l’hôpital … ça ressemble à quoi l’hôpital Bitcoin ?

Comparons ce qui est comparable : puisque Bitcoin n’est qu’un système d’échange, comparons le aux systèmes d’échange.
Consommer autant que le Maroc pour un simple système d’échange en ne servant qu’à peine 0,5% des utilisateurs (33 millions / 7 milliards) … c’est moche.

7. Un gaspillage d’énergie ?

7.1. « Une autre incompréhension, plus subtile celle-là, est que l’énergie du Bitcoin est gaspillée. Il est vrai que les mineurs cherchent tous à résoudre un problème mathématique compliqué et consomment tous de l’électricité mais que seul le premier à trouver la solution gagne et il faut à chaque fois tout reprendre à zéro. Vu comme ça, cela parait du gaspillage. »

La Proof Of Work utilisée pour sécuriser les données c’est du gaspillage, plus il y a de mineurs concurrents, plus il y a de gaspillage.

7.2. « Mais la compétition entre mineurs est un élément essentiel qui garantit la décentralisation du Bitcoin. Si les mineurs se mettaient d’accord pour coopérer, ils auraient le contrôle sur le réseau qui ne serait plus décentralisé. Ce “gaspillage”, appelé “Proof of Work”, est donc un élément fondamental. Chaque watt utilisé l’est afin de garantir la décentralisation du système Bitcoin. »

Ploum ne parle que de la “Proof Of Work” comme concept de sécurisation.
C’est pourtant une partie du système particulièrement inélégante qui devrait être remplacée par quelque chose de moins énergivore.

- Ethereum veut passer à la “Proof Of Stake” (preuve d’enjeux, moins énergivore) par exemple.
- Gridcoin remplace la “Proof Of Work” par des calculs utiles à l’humanité
- Duniter applique un handicap aux utilisateurs ayant trop de puissance de calcul ce qui évite la course à la puissance polluante.

Bref, la consommation énergétique outrancière de Bitcoin n’est pas une fatalité pour les crypto monnaies.

7.3. « Ce serait comme dire que les policiers doivent rester enfermés dans leur commissariat et n’en sortir qu’après un appel. Les rondes en voiture sont en effet polluantes et essentiellement inutiles (seules un pourcentage infime des rondes en voitures aboutit à une intervention policière). Pourtant, nous acceptons que les rondes de police « inutiles » sont un élément essentiel de la sécurité d’une ville ou d’un quartier (moyennant que vous ayez confiance envers les forces de police). »

L’informatique est moins sujette aux limitations physiques que cette métaphore. Comme dit plus haut il y a des alternatives.
Le fond du problème c’est que s’il existait un moyen de faire des rondes policières sans que ça ne coûte ni pollue ça serait mis en place.
Alors que pour Bitcoin si quelqu’un trouve le moyen de deviner les hashs de manière très efficace, alors il casse le système. La Proof Of Work ne peut pas être (trop) optimisée, car l’optimiser trop c’est casser le système.

7.4. « Des alternatives au Proof of Work sont étudiées mais aucune n’a encore été démontrée comme fonctionnelle. Il n’est même pas encore certain que ces alternatives soient possibles ! »

Si les alternatives ne sont pas possibles alors Bitcoin mourra (à mon humble avis).

Car pour l’instant Bitcoin c’est plus une action boursière qu’un système d’échange (hé oui on peut pas acheter son pain, son vélo, ni faire ses courses avec du Bitcoin).
Donc détenir du Bitcoin c’est comme détenir une action d’une société qui promet que dans le futur son produit remplacera les échanges mondiaux.

La somme totale de Bitcoins émise est connue : 21 millions. Sachant qu’il était estimé 10 trillions de dollars en circulation dans le monde en 2013 ça fait un potentiel de valeur de :
10 000 000 000 000 000 000 / 21 000 000 = 476 190 476 190 $ par Bitcoin.

Soit potentiellement plus de 476 milliards de dollars par Bitcoin. Même si Bitcoin n’atteint que 1% de cet objectif tous les possesseurs de 1 Bitcoin seraient multi-milliardaires; évidemment ça laisse rêveur. C’est pourquoi beaucoup des utilisateurs aujourd’hui font avec Bitcoin plus de la chrématistique que de l’utiliser comme un système d’échange à proprement parler (chrématistique = se comporter comme des picsous).

Par contre si le monde se rend compte que Bitcoin ne peut pas être utilisable à l’échelle de la planète ou qu’il devrait consommer plus d’énergie que l’humanité n’en produit actuellement (ou les 2) alors il ne vaudrait plus rien.

8. L̶’̶o̶p̶t̶i̶m̶i̶s̶a̶t̶i̶o̶n̶,̶ ̶u̶n̶e̶ ̶é̶t̶a̶p̶e̶ ̶n̶é̶c̶e̶s̶s̶a̶i̶r̶e̶m̶e̶n̶t̶ ̶t̶a̶r̶d̶i̶v̶e̶ Les 2 phases d’optimisation en ingénierie

Ici je vais m’attarder à parler des 2 phases d’optimisation en ingénierie :

0. Conception et réalisation d’un prototype fonctionnel : 0 optimisation ici
1. Optimisation phase 1 : on identifie les goulots d’étranglement et on les supprime
2. Optimisation phase 2 : chaque mini bout de code subit des micro optimisations (comme en formule 1: on optimise tout même si ça ne pèse qu’un tout petit peu). On peut aussi tout ré-écrire différemment pour arriver au même résultat mais avoir un code plus propre, plus modulable qui permettra peut-être d’autres optimisations

Peu de logiciels vont jusqu’à la phase 2. Les seuls auxquels je pense sont les OS (Linux, Windows, iOS, OSX), les serveurs de base de données et les serveurs web. Car ces logiciels sont des projets à long terme qui ont atteint la maturité (il n’y a plus de goulot d’étranglement évident) et ils sont en compétition pour être plus performants que le concurrent.

Ploum ne parle que de la première phase d’optimisation, or un réseau électrique ou un système d’échange de valeurs utilisé à l’échelle mondiale devrait rapidement atteindre le stade de maturité donc la phase 2.

La première phase 0 est assez bien décrite par Ploum :

8.1. « On n’essaie pas de rendre plus rapide un programme informatique qui renvoie des valeurs erronées. On ne rend pas plus aérodynamique un avion qui ne vole pas. On n’essaie pas de limiter la consommation d’un moteur qui ne démarre pas. »

Donc en phase 0 on essaye d’avoir un truc qui marche correctement 100% du temps. On est d’accord.
Par contre durant cette phase on ne met pas en production afin de limiter les problèmes :

« Lors de la phase expérimentale, la consommation de ressources est maximale »

Je n’avais pas remarqué que Bitcoin était en phase expérimentale : les accès n’y sont pas restreints et rien n’est fait pour justement limiter la consommation en limitant le nombre d’utilisateurs.

8.2. « Elon Musk a utilisé toute une fusée juste pour envoyer une voiture dans l’espace. Non pas par gaspillage mais parce que concevoir une fusée nécessite des tests “à vide”. »

Oui, Elon Musk a envoyé une et une seule fusée pour faire un test, il y en aura peut être 2 mais certainement pas 150 fusées pour tester … c’est ce que fait Bitcoin aujourd’hui.

8.3. « Comme le disait Antonopoulos, dire “En 2020, le Bitcoin consommera plus que tout la consommation actuelle mondiale” revient à dire à une femme enceinte “Madame, à ce rythme, dans 5 ans, votre ventre aura la taille de la pièce”. »

Alors là encore une fois : “Les comparaisons que j’ai vues sont toutes plus absurdes les unes que les autres”

Effectivement une femme enceinte ne va pas grossir plus que nécessaire pour faire un enfant (enfin un tout petit peu plus que nécessaire à cause des glaces au chocolat du dernier mois, n’est ce pas mesdames ? ) mais ça ne sera pas exponentiel et la grossesse a une durée limitée dans le temps.
Si pour une femme enceinte c’est de l’extrapolation foireuse, il n’en va pas de même en informatique. Par exemple: si vous lancez un service qui a besoin de 1 serveur puissant pour 100 utilisateurs car pas optimisé du tout, il est inévitable que pour 100 millions d’utilisateurs il vous faudra 1 million de serveurs… Et votre patron ne sera pas très content.

Dans le cas de Bitcoin ce qui nous protège d’une montée en puissance/pollution exponentielle c’est aussi son inefficacité : 7 transactions par seconde c’est un magnifique goulot d’étranglement !

Une image plus juste : le Bitcoin est actuellement comme un tracteur auquel on ajouterait des chariots, plus on lui ajoute de chariots, plus il crache de la fumée noire en faisant un boucan d’enfer et plus sa vitesse diminue … même si sa vitesse n’atteint jamais 0 km/h. A partir d’un certain nombre de chariots sa vitesse est tellement basse qu’il en devient inutilisable.

Ici les chariots sont les utilisateurs et la vitesse représente les frais et la rapidité/lenteur des transactions.
Ploum voudrait nous dire que ce tracteur rejette une fumée noire qui est une merveille d’écologie et que ce tracteur peut prendre l’autoroute sans rien y changer. Mais que c’est l’autoroute et notre perception de la vitesse qu’il faudrait adapter au système … Désolé Ploum, n’est pas Steeve Jobs qui veut

8.4. « Donc oui, comme tout système humain, le Bitcoin pourrait sans doute polluer moins. Et je suis certain que, dans les prochaines années, des propositions en ce sens vont voir le jour. »

Là je suis plus radical : un système qui consomme autant en servant aussi peu d’utilisateurs devrait être mis à l’arrêt en attendant que les développeurs solutionnent le problème.

8.5. « C’est d’ailleurs déjà le cas si on considère la consommation liée au nombre de transactions car l’amélioration “Lightning Network” va permettre de réaliser des milliers de transactions Bitcoin pour un coût quasi nul, y compris en termes de consommation électrique. »

J’espère que ça arrivera vite. J’espère surtout que le lightning network augmentera le taux de transactions et diminuera l’empreinte énergétique. Faire l’un sans l’autre serait pire que l’état actuel : si par exemple le taux de transactions était débridé mais pas la consommation.

8.6. « Mais les comparaisons coût par transaction sont de toutes façons pour la plupart malhonnêtes car elles ne prennent généralement pas en compte toute l’infrastructure bancaire sur laquelle s’appuient les solutions comme VISA ou MasterCard. »

L’infrastructure bancaire est optimisée (comparé à Bitcoin et sa Proof Of Work). Nier cette évidence est juste une blague car même en admettant que l’infrastructure coûte 50% à VISA/MasterCard on a toujours VISA 2500x plus efficient que Bitcoin. Et surtout VISA/Mastercard ont tout intérêt à optimiser le plus possible leur système. A contrario l’idée même de “Proof Of Work” est une anti-optimisation.

8.7. « Une autre règle de l’optimisation est qu’avant toute optimisation, il faut mesurer pour tenter d’optimiser les points les plus critiques. En effet, rien ne sert de diminuer de même 90% la consommation électrique des ampoules si les ampoules ne représentent que 0,01% de la consommation globale mais que l’air conditionné, par exemple, représente 30% de la consommation globale. J’invente les chiffres mais ça vous donne une idée. C’est un principe bien connu des développeurs informatiques qui, après des jours à diviser par deux le temps d’une fonction, se rendent compte que cette fonction ne prend qu’un millième du temps total d’exécution. »

Ploum oublie encore la phase 2 : c’est peut être pour ça qu’il ne voit pas l’intérêt des ampoules basse consommation et de l’isolation des maisons…

Prenons des exemples concrets en informatique.

Exemple de phase 1 : le code de la lib standard Go pour ARM64 : vous pouvez voir ici

- à ma gauche (en rouge) le code naïf pas optimisé mais qui fait le boulot
- à ma droite (en vert) le code optimisé qui donne un gain de plus de 90% dans la fonction concernée

Même sans connaissance en informatique, la différence de taille (et de complexité) entre les 2 codes est claire et on comprend que lorsqu’on est en phase de réalisation on écrit d’abord celui de gauche.

Exemple de phase 2 : La réécriture du code d’allocation de la mémoire du noyau Linux qui n’améliore que très peu les performances mais simplifie le code tout en gérant mieux une plus grande famille de processeurs.
La différence en terme de performance est minime mais toujours bonne à prendre.

Utiliser une version de Linux ne disposant pas de la ré-écriture du code d’allocation de la mémoire ne devrait pas me poser de problème.
Par contre, tout comme je n’utiliserai pas Go sur des processeurs ARM64 pour faire du RSA avant que la version optimisée ne soit disponible; il serait logique de faire la même chose avec Bitcoin : ne pas l’utiliser avant qu’il ait résolu son problème énergétique (Proof Of Work).

8.8. « Il s’ensuit qu’avant de chercher à optimiser Bitcoin à tout prix, il est nécessaire de voir quelle sera sa consommation lors des utilisations futures et mesurer si c’est bien lui qui consomme le plus. Cela pourrait être nos smartphones. »

Encore mieux : pourquoi ne pas carrément comparer une transaction Bitcoin à une fusée lançant un satellite ? Ça permettrait directement de conclure qu’il n’est pas nécessaire d’optimiser Bitcoin !

Note : Et ça serait oublier que les fusées sont optimisées pour leur tâche grâce à la compétition des opérateurs sur le coût et donc la compétition à l’efficience.
Nos smartphones sont également optimisés régulièrement, pour leur tâche.
Le fonctionnement de Bitcoin se base, pour l’instant, sur une dépense d’énergie qui est une pure perte (la Proof Of Work).

9. Pourquoi un tel acharnement

9.1. « J’espère qu’à ce point de la lecture, vous avez compris le nombre d’erreurs de logique nécessaires pour arriver à la conclusion “Bitcoin est un monstre de pollution qui va détruire le monde et les bébés phoques”. »

Bitcoin est à l’heure actuelle bien trop consommateur d’énergie. Tenter de le nier c’est nier l’évidence et tenter de le démontrer se fait uniquement comme Ploum l’a fait en faisant un maximum d’erreurs et d’imprécisions.

9.2. « Le deuxième point c’est que les médias sont financés par les publicitaires et par les états. »

Je suis ingénieur en informatique, je ne suis pas journaliste et je ne travaille pas pour une banque ni un état.
Je vous prie de croire que je n’ai aucune raison particulière de défendre les banques ou les états. Un système d’échange décentralisé est une bonne chose, mais pour moi laisser une planète dans le meilleur état possible à mes enfants est bien plus important.

9.3. « Mais écrire un article comme celui que vous êtes en train de lire en ce moment demande à la fois de la compétence et du temps. »

Pour le temps je suis d’accord, écrire cette réponse m’a pris bien plus de temps que je ne l’aurais imaginé (et j’y réfléchirai à 2 fois avant de le refaire).

L’article de Ploum a manqué bien plus d’impartialité que de compétence, je ne pense pas que Ploum soit incompétent. Il a orienté son raisonnement car il est investi ou a investi dans le Bitcoin, et le coût de la conviction est une grosse barrière l’empêchant de changer d’avis et même de faire une étude non partisane.
Au moins aussi mal qu’un mauvais journaliste orienté tel qu’il les critique, il a involontairement tronqué ou biaisé ses démonstrations :

- “l’extraction d’or est polluant, il y 40 ans les monnaies en étaient directement responsables” … en oubliant de vérifier si les monnaies dépendent encore de l’or aujourd’hui !
- “si les ampoules basse consommation ne font économiser que le Bitcoin, alors elles sont une toute petit économie négligeable (puisque à priori le Bitcoin est négligeable)” … en oubliant de vérifier les chiffres !
- “Harari a écrit ceci”, “un prof m’a dit ça”, “mon chat pense pareil” et le très efficace “les médias sont partisans” … en oubliant de vérifier, sourcer et réfléchir autrement que “comment je pourrai défendre Bitcoin au mieux ?”.

10. Moralité

10.1. « De manière étonnante, les personnes les plus convaincues que le Bitcoin est une catastrophe écologique sont celles qui ne connaissent absolument rien au domaine. »

De manière logique (donc “pas étonnante”) seuls ceux qui ne connaissent absolument rien aux domaines de la consommation électrique et de la transition énergétique arrivent à défendre le Bitcoin dans l’état actuel. Je suis vraiment étonné et désolé de voir Ploum parmi ces gens.

10.2. « Dans la littérature académique, on peut même lire que, potentiellement, le Bitcoin pourrait devenir la manière la plus efficace de transformer de l’électricité en argent… »

Je passe la “ref nécessaire” que je collerai sur la littérature académique. Je préfère faire une démonstration par l’absurde : puisque Bitcoin serait le moyen le plus efficace de transformer l’électricité en argent, tout le monde devrait faire du Bitcoin … et pourquoi faire autre chose d’ailleurs ?

Petite dystopie sur le sujet :

- Je vais à la supérette acheter cette boisson au thé glacé que j’aime bien …
- Ha non, monsieur, ils ont arrêté ils font du bitcoin maintenant
- Ha bon, je croyais qu’ils avaient juste changé leur nom
- Au début oui, mais ils ont trouvé plus profitable de faire du Bitcoin

Je regarde les rayons quasiment vides du magasin, le doute m’envahit et je demande :

- Ok, vous avez quoi alors ?
- En boissons ? Plus rien, mais l’eau de la Seine serait potable il paraît…
- … Heu, je suis pas convaincu.

(Surtout depuis que Ovélia qui était chargé du traitement des eaux a détourné ses fonds pour faire du Bitcoin). Je demande quand même bêtement :

- Tant pis vous avez des fruits ou des légumes ?
- Ho, vous savez la plupart des producteurs font du Bitcoin maintenant. Il y a bien Roger, c’est un chimiste anarchiste, il a expérimenté un nouveau procédé pour faire pousser des salades au bord de l’A13…

Je jette un coup d’œil aux salades que me montre la vendeuse

- … Mais c’est normal si elles n’ont pas une couleur majoritairement verte ?!
- C’est vous qui voyez, de toute façon on ferme demain et on deviendra “Your Simply Bitcoin Market”, alors pour les salades c’est aujourd’hui ou jamais !
- Vous vendrez quoi alors ?
- Rien directement, on sera une plateforme de validation de transactions !
- Ha … super. Et pour acheter de quoi vivre j’irai où ?
- Ben y a bien Roger, à côté de l’A13, sinon on m’a parlé d’une ferme mais c’est en Bretagne : un petit village aurait décidé de résister à la folie Bitcoin …
- Hum, c’est un peu loin

Surtout depuis que la SNCF fait du Bitcoin et que toutes les compagnies du pétrole n’alimentent que les centrales au fioul nécessaires au “Bitcoin mining” ; voyager prend un peu de temps. En plus, je trouve pas les pièces pour réparer mon vélo : plus personne ne les fabrique.
Alors je tente :

- Mais vous, comment vous allez manger et boire ?
- Tous les employés de “Your Simply Bitcoin Market” reçoivent une ration de nourriture standard du groupe. C’est fabriqué en Inde et ils nous livrent directement. Mais c’est réservé aux employés uniquement !

Tant pis, il faut que j’aille à la pharmacie pour mon insuline. J’aurais pu être soigné définitivement par le remède miracle promis par une entreprise de biotechnologie dont j’ai oublié le nom mais ils ont tout arrêté pour faire du Bitcoin maintenant.
Je mets mon masque à particules et m’enfonce dans l’épais brouillard causé par les centrales au fioul qui ont été installées un peu partout par les mineurs de Bitcoins.
Après être arrivé au bout de la rue je m’arrête, je ne comprends pas, j’aurais déjà dû croiser la pharmacie, c’était la seule à des km à la ronde, je ne la vois pas …

10.3. « À terme, le Bitcoin pourrait donc forcer une optimisation du réseau électrique mondial et favoriser le développement des productions d’électricité plus locales, moins centralisées »

Le problème de la transition énergétique c’est que beaucoup de choses doivent passer à l’électrique et il n’y aura pas la place si tous les nouveaux systèmes se comportent tel Bitcoin (en l’état actuel de Bitcoin).

10.4. « Il n’est pas impossible que le Bitcoin signe la fin des centrales à charbon et des méga centrales nucléaires. Mais ce genre de possibilité n’est tout simplement jamais évoqué dans les feuilles de chou sponsorisées par l’état et les vendeurs de voitures. »

Comment un nouveau système d’échange consommant 5000x plus que l’actuel pourrait ne pas augmenter la consommation électrique et donc les centrales nucléaires et les centrales à charbon ?!?
C’est à cause des journalistes et des vendeurs de voitures !? Ha, les salopiots !!

10.5. « Alors, oui, le Bitcoin consomme de l’électricité. Mais c’est normal, c’est un système très complexe qui offre énormément de choses. Il consomme cependant moins d’électricité que bien d’autres systèmes que nous acceptons et qui sont certainement moins utiles ou qui n’ont pas été sélectionnés comme tête de turc par les médias. Vous avez souvent lu des articles sur la consommation électrique de l’industrie de l’or, de l’aluminium ou de l’industrie du surgelé ? Et si, en fait, pour ce qu’il propose le Bitcoin était extrêmement écologique ? »

Y a-t-il des propositions techniques pour faire de l’aluminium en dépensant moins d’énergie ? Si ces propositions existent et tiennent la route elles seront appliquées très rapidement.

Pourquoi toutes ces comparaisons sont-elles foireuses ?
Parce que la production d’aluminium tout comme par exemple l’envoi de satellites sont optimisés et continuent à l’être car il y a des personnes qui ont un intérêt direct à ce que cela consomme moins.
La fusée comme l’aluminium ne sont pas une fin en soit : le client d’Ariane Espace ou de SpaceX paye pour avoir son satellite dans l’espace. La pollution de l’envoi du satellite a servi à autre chose que juste envoyer une fusée très haut. Idem l’aluminium aura servi à fabriquer un train, un bus…
La pollution de Bitcoin en revanche ne sert qu’à faire fonctionner Bitcoin.

11. Conclusion

Il faut bien comprendre que tous les efforts énergétiques sont importants. Devoir le nier pour quelque raison que ce soit mérite de remettre en cause cette raison en premier lieu.

Les efforts énergétiques sont bien en marche, simplement grâce au fait qu’être plus efficient c’est utiliser moins d’énergie et c’est donc économiquement rentable. Si en plus, les états se mettent d’accord pour taxer plus certaines dépenses énergétiques cet effet est accru. C’est le meilleur moyen de pousser au changement.

Le fonctionnement de la “Proof Of Work” est particulièrement gênant car couplé à une crypto monnaie à succès il permet de rémunérer une personne pour une dépense énergétique inutile. Le fait que cela soit un concours entre utilisateurs les pousse à utiliser plus de puissance pour gagner plus, donc consommer plus.
C’est à contre courant du changement qui est nécessaire. Argumenter sur les chiffres de dépense énergétique ne change pas cet état de fait.
Tant que la consommation énergétique de Bitcoin ne revient pas à un niveau négligeable, il sera écologiquement mauvais.

J’en viens à me poser des questions sur les défenseurs du Bitcoin : ils sont devenu des défenseurs de la “Proof Of Work” … Mais pourquoi ? Car si les crypto-monnaies ont bien une utilité dans l’avenir il faut reconnaître que Bitcoin n’est qu’un brouillon. Comme vu en 7.2 il a des alternatives, il y en a plein même.
J’ai vraiment l’impression que même si il y avait une alternative moins polluantes prenant le dessus sur Bitcoin les pro-Bitcoin resteraient des défenseurs du Bitcoin car ils en sont un peu actionnaires.

Si comme moi vous êtes allez voir la vidéo que Ploum nous conseille, vous aurez remarquez :

- Déjà, qu’elle est coupé : l’intervention de la personne devant expliquer que ce n’est pas négligeable de consommer autant n’y est pas.
- Mais bien plus symptomatique de l’argumentaire pro-bitcoin, il y est dit “on est dans la défense, on devrait être dans l’offensive” … Non, les mecs … soyez dans le vrai : regardez les problèmes en face. Même si certains exagèrent la pollution du Bitcoin c’est ridicule de vouloir la faire passer pour négligeable ou pour “une merveille d’écologie”

Ce que je reproche n’est pas insurmontable j’aimerais que les pro-Bitcoin disent : “Oui c’est vrai : c’est la méga honte de consommer autant d’énergie il faut absolument trouver une solution, c’est notre priorité absolue.” … Mais pour l’instant beaucoup sont plus, comme Ploum, dans le déni.

Annexe 1 : Le défi de la voiture électrique

Le problème que pose la voiture électrique est d’augmenter significativement la quantité d’électricité nécessaire. Dans un futur proche l’idéal serait d’avoir cette quantité d’électricité produite de manière écologique. Or, la production d’électricité verte est très variable (éolien et solaire). Il nous manque un moyen de stockage conséquent.En réfléchissant à un réseau intelligent il est possible que la voiture électrique soit elle-même une partie de la solution au problème qu’elle pose. En effet : un parc important de voitures électriques, c’est un parc important de batteries, donc de stockage d’électricité.

En imaginant des chargeurs intelligents :

- Je rentre chez moi avec ma voiture chargé à 80%, je programme le chargeur pour avoir 90 km d’autonomie pour demain 9h
- Le chargeur intelligent convertit cela en 50% de charge pour demain 9h
- Mon voisin part travailler à 1h du matin
- Le réseau électrique peut utiliser une part de la charge présente de ma voiture pour répondre au besoin de mon voisin sans avoir à utiliser la puissance du réseau

Pour inciter les utilisateurs à ne pas utiliser leurs véhicules aux moment de pic, on peut même imaginer une rémunération pour ceux qui utilisent leurs véhicules aux heures creuses et ceux qui ont une batterie pleine aux heures de pic.

C’est un exemple très simplifié. Si vous souhaitez lire plus sur le sujet je vous recommande l’ouvrage gratuit de David J.C. MacKay, notamment ce chapitre.

Cette article à été publié originellement sur linuxfr

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