Une lycéenne française explique pourquoi il est temps de révolutionner l’école

Zelda Poem
5 min readApr 15, 2016

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« Ce que tout le monde appelle « éducation » est une machine à fabriquer des soldats de l’économie et non de futurs êtres humains accomplis, capable de penser, de critiquer, de créer, de maîtriser et de gérer leurs émotions.
Eduquer peut alors se résumer à déformer pour formater et rendre conforme.

“Nous ne voulons plus être considérés comme des moutons par un système scolaire qui n’a d’autre ambition que de nous former selon les critères d’une société malade”

Le pire de tout et d’avoir fait des écoles des lieux où l’on est en compétition les uns contre les autres. Dans cette course aux diplômes, on est en train de sélectionner les gens les plus dangereux, ceux qui ne seront plus capables d’imaginer, car soumis et conforme au système.
Ainsi les « meilleurs » deviendront des prédateurs, des tueurs, les autres des consommateurs tout à fait préparé à obéir aux institutions.
La prépondérance donnée à l’intellect au détriment de l’intelligence des mains, auxquelles nous devons pourtant notre évolution, est une catastrophe qui fait de nous des infirmes sans que nous en ayons conscience.

Le rapport concret à la nature est également indispensable, car c’est à elle que l’enfant doit la vie, toute son existence durant ; tirer parti d’un principe vital sans la connaître est une erreur monumentale.

La véritable éducation serait de donner le goût d’investir, d’expérimenter, d’aider l’être à révéler sa personnalité unique et le préparer à la vie dans la vie grâce aux autres.

C’est cette école que la science doit fonder.
Alors les intérêts sociaux seront définitivement inversés.
La société sera faite pour l’école et non l’école pour la société. »
Texte composé par l’exposition « Aux Tableaux » à partir d’extraits écrits ou oraux de P. Rhabi ; A. Jacquard ; A. Dupontel ; I. Illich ; G. Bachelard

Selon un rapport de l’Unicef, la France est classé 35e sur 37e en matière d’inégalités scolaires dans les pays de l’OCDE.

Je voudrais vous exposer mon ressenti et celui d’un grand nombre de mes amis lycéens et collégiens qui, tous les jours, vont en cours. Car à notre plus grand regret, on ne nous demande jamais notre avis alors que nous sommes les premiers concernés par les décisions prises en matière d’éducation.

L’école. On y passe 12 ans de notre vie et c’est un véritable calvaire pour beaucoup d’entre nous. L’enseignement que l’on subit tout au long de notre scolarité n’est, à mes yeux, pas donné de la bonne manière. En effet, je vois un grand nombre d’élèves et d’amis autour de moi qui sont en train de couler littéralement sous la pression qu’on leurs met. Les notes, la façon qu’ont les profs de donner leurs cours… Je vous expose ici les points noirs de la scolarité française actuelle.

Les notes

Ma note à un contrôle de français. C’était un contrôle de cours que j’avais révisé toute une après-midi durant un week-end

Dès l’entrée en primaire on nous compare, on nous met en compétition, on nous interdit l’erreur avec la notation. Apprendre n’est désormais plus un plaisir, mais un moyen d’avoir une bonne note et de ne pas subir la pression des professeurs ou des parents.
On n’apprend plus parce que c’est intéressant, mais pour être le meilleur lors du contrôle.

Le système scolaire pousse les élèves à tricher en mettant en valeur le fait de réussir plutôt que d’apprendre des choses.

On nous rabaisse sans cesse, personne ne se préoccupe de savoir l’effort que l’on fournit, l’important est juste la note finale.

Les profs

Tiré du film Detachment

Les profs sont en majorité décourageants, certains même traumatisants. Ils ne te laissent pas de chances, et sont eux-même (pour la plupart) dégoûtés de leur métier, et c’est ça notre exemple, des adultes ayant perdu toute envie d’exercer leur profession.

Une professeure, pendant un cours, dit à ma classe en s’adressant aux filles: “En cours vous êtes entourées de garçons, et de professeurs qui peuvent être provoqués par votre tenue… Et ne vous étonnez pas de vous faire agressez sexuellement dans la rue, vue la façon dont vous vous habillez, c’est de la provocation.” Je vous laisse juger par vous même, sachant, de plus qu’aucune filles de la classe n’était habillée de façon “provocante”.

Le respect est leur maître mot, mais si seulement il pouvait être réciproque. Je crois être capable de penser, de parler et d’argumenter tout comme un adulte en serait capable, mais comme mon statut est celui d’élève, je dois me laisser faire et baisser les yeux quand je suis ridiculisée par un professeur.
Je ne vois pas du respect mais de la soumission.

La faute est toujours remise sur notre manque de travail, mais jamais sur la qualité des cours que l’on reçoit.

Oui, il existe des bons professeurs. Qui nous soutiennent et qui nous aident. Et on les remercie. Et on se souvient d’eux toute notre vie, d’après ma mère. Malheureusement ils sont trop rares.

Les cours

Mes cours et mes livres, à l’heure d’internet…

Nous sommes totalement passifs face aux cours reçus. La pédagogie est mauvaise. On nous demande d’apprendre par cœur des choses que nous ne comprenons même pas, plutôt que de nous apprendre à analyser et à argumenter.

Les leçons sont faites uniquement de théorie, mais pour nous intéresser, il faudrait concrétiser toutes ces formules et nous montrer enfin à quoi cela nous servira plus tard, question à laquelle les professeurs ne sont pas capables de nous répondre.

Notre créativité est pénalisée car elle ne correspond pas à ce qui est écrit dans nos livres et cahiers.

L’adolescence est une période difficile à gérer. On découvre le monde réel et ses souffrances, on se découvre nous et nos souffrances. C’est une phase où l’on est jugé, où l’on juge, où l’on découvre, où l’on est choqué et traumatisé parfois, que ça soit par notre famille ou le monde qui nous entoure.

L’école devrait être un endroit rassurant, sécurisant, où l’on pourrait oublier ses problèmes quotidiens, mais c’est souvent de celle-ci que provient le mal-être des jeunes.

Il faut réinventer cette école, tout recommencer à zéro. Pour le bien des jeunes, pour demain, pour l’avenir.

Je suis Elsa Cohen, la fondatrice de Hack ton Bac : le livre et la communauté qui changent la vie des lycéens.

Tu peux me suivre sur Instagram : @coh.elsa

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Zelda Poem

21yo. School dropout. Building the future of education since then 🧩 Wrote a book “Hack your Education” & Co-founded a program “Reverse” for young creators.