En finir avec le savoir-être

Dans son post Linkedin du 24/10/2023, Nicolas Galita déclare : “Le savoir-être est une notion discriminante qui nous fait faire n’importe quoi.” Il qualifie d’ailleurs son utilisation comme filtre de recrutement, de violence. Et je suis bien d’accord.

Oli CLEMENT
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2 min readOct 25, 2023

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Capture écran d’une vidéo : soldat médiéval en armure projeté dans les airs. Sous-titre “No! Ye-aaaaah!!!!”
Dans cette scène tirée du film “Monty Python and the Holy Grailde Terry Gilliam et Terry Jones, les chevaliers de la table ronde sont bloqués devant le Pont de la Mort. Pour le franchir, son gardien leur pose 3 questions. Galahad hésiite quand on lui demande sa couleur préférée, ce qui lui vaut d’être projeté dans le vide. Cette séquence n’est pas sans rappeler certains entretiens d’embauche.

D’un point de vue sémantique, savoir être, c’est avoir la capacité d’exister (1).

OK, l’idée délétère d’assembler ces deux notions en un contresens qui incite à confondre davantage ce que nous sommes avec ce que nous faisons est peut-être partie d’un bon sentiment (tu sais, ce solide matériau utilisé pour le revêtement de la voirie en enfer).

D’aucuns réfuteront cette lecture littérale du savoir-être.
Pourtant, “le savoir-être”, c’est ce qui fait, bien avant nos compétences, que nous décrochons ou non un emploi. Or, toute personne non rentière, à savoir l’écrasante (ou écrasée) majorité de la population, quand elle ne parvient pas à s’insérer professionnellement, se retrouve en situation de précarité (2).

En somme, si tu te plantes sur le savoir-être, tu n’existes pas.

Sauf pour les employés municipaux qui doivent, à contrecœur, te faire déguerpir de ce banc sur ordre de leur direction.
Prenons maintenant de la hauteur sur le terme. Le constat n’est guère plus reluisant. Juger ton “savoir être”, c’est évaluer ta compétence à performer les codes d’un habitus dominant, mais pas nécessairement supérieur, et surtout pas inné ni même accessible à tout le monde.

En d’autres termes, le Savoir-Être est une version xyloglotte (3) et culpabilisante de ce qu’on attend de toi en termes de “Savoir-Fake”.

Qui justifie ta qualité de vie et ta sérénité, comme tes difficultés à payer ton loyer, ton isolement, ton angoisse, ton quotidien sans loisirs… Alors que ça devrait uniquement décider de la suite de ta carrière théâtrale ou cinématographique.

Et si on en finissait avec le savoir-être ? Et si on décidait de construire “le travailler et vivre ensemble” sur une base plus juste, plus riche et plus passionnante ?
Le prochain article sera l’occasion d’évoquer des pistes et retours d’expérience de recrutement plus égalitaire et moins excluant.

(1)- Selon le Larousse “être” : “Sans attribut ni complément indique l’existence d’une personne, la réalité ou la vérité d’une chose : Ce temps n’est plus.”.
“Savoir” renvoie, quant à lui, à la connaissance, à la capacité,

(2)- Dépendre financièrement d’un conjoint, d’une conjointe, d’un membre de sa famille, etc. reste une forme de précarité, plus ou moins à retardement car cette posture expose davantage aux violences coercitives et même sans en arriver là, cela reste une menace pour l’autonomie, sans compter le risque de séparation, de conflit ou simplement, de perte de revenu de la personne qui gagne de l’argent.

(3)- Langue de bois

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Oli CLEMENT
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Accompagnement au changement par l’innovation numérique, sociale et organisationnelle. Neurodivergence, inclusion, tout ça. Aime beaucoup lire et un peu écrire.