Redevance de sécurité aéroportuaire : réduction ou augmentation ?

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3 min readJan 25, 2018

« Investir davantage dans la mise en place de solutions technologiques innovantes en vue notamment, d’assurer la maitrise des flux migratoires ». Tel est l’objectif affiché par le décret instituant une redevance de sécurité et fixant ses modalités de perception et de répartition, adopté en conseil des ministres le mercredi 17 janvier 2018. Ce décret prévoit « à l’exclusion des vols domestiques, une redevance de sécurité perçue sur les passagers à destination et au départ de l’Aéroport International Félix Houphouët-Boigny. Le montant de cette redevance est fixé à quatre mille (4000) francs CFA pour les vols en provenance ou à destination de tout aéroport de la CEDEAO et à cinq mille (5000) francs CFA pour les aéroports autres que ceux de la CEDEAO »[1].

Investir davantage ! Autrement dit, percevoir plus de redevances que celles précédemment perçues en application du décret n° 2016–190 du 06 avril 2016. Or, lit-on dans la presse que la modification récente des modalités de perception, réduit de moitié la redevance de la sécurité. L’impact pratique pour le consommateur ivoirien devant être la baisse de son billet d’avion. Dans quelle mesure alors ce décret qui permettrait une réduction de moitié de la redevance de sécurité, prélevée sur les billets en provenance et à destination d’Abidjan, parviendra-t-il concomitamment à davantage d’investissements dans la sécurité ? Pour répondre à cette question, il importe de scruter le contenu du décret de 2016 désormais abrogé.

A la lecture de son article 2, il ressort que « les taux de redevance de sécurité aérienne par passager embarquant sur l’aéroport international Félix Houphouët-Boigny étaient fixés en fonction des destinations comme suit :

- Pour les vols domestiques : 500 francs CFA

- Pour les vols à destination de tout aéroport de la CEDEAO : 4000 francs CFA

- Pour les vols à destination de tous autres aéroports : 5000 francs CFA. »[2]

Autrement dit, seuls les passagers en provenance de l’aéroport d’Abidjan étaient redevables de cette taxe aéroportuaire. Ceux à destination d’Abidjan n’étaient pas concernés par cette redevance.

Plusieurs remarques à l’issue de l’analyse comparée de l’ancien et du nouveau décret :

- Les vols domestiques qui faisaient l’objet d’une redevance en sont désormais exonérés. Les billets d’avion pour les vols sur le territoire Ivoirien devraient ainsi connaitre une baisse au prorata de cette exonération. La réduction relayée par la presse est indéniable.

- Cependant, pour ce qui concerne les vols en provenance d’Abidjan et contrairement à ce que l’on a pu lire ici et là, le montant de la redevance reste inchangé tant pour les vols à destination de la CEDEAO que des aéroports hors CEDEAO (soit respectivement 4000 francs CFA et 5000 francs CFA). Par ailleurs, aucune trace dans le décret de 2016, de « la redevance de sécurité aérienne fixée à dix mille (10.000) francs CFA ».

- Plus encore, les vols à destination d’Abidjan qui avant le récent décret de 2018, ne faisaient l’objet d’aucune taxation sur les passagers, le sont désormais.

Plus qu’une réduction de moitié de la taxe aéroportuaire, se rajoute une nouvelle redevance de sécurité sur les billets d’avion : Celle payée pour les vols à destination d’Abidjan et non plus uniquement en provenance d’Abidjan. L’on comprend mieux comment il sera alors possible d’investir davantage dans des « infrastructures technologiques de dernière génération pour assurer la maitrise des flux migratoires ». Si cet objectif est probablement louable, ce qui reste critiquable est, toute la communication relayée par la presse privée autour de ce décret, donnant ainsi l’impression aux usagers d’une réduction de moitié de la taxe aéroportuaire qui dans les faits, n’en est pas une[3].

Marc Assoumou

[1] http://www.gouv.ci/_conseil-ministre-details.php?recordID=323

[2] http://www.anac.ci/anac/web/docs/DECRET%20N2016-190.pdf

[3] A l’exception bien évidemment des billets d’avion pour les vols domestiques.

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