Revue technique de l’ATAF sur le projet discussion de la plateforme de collaboration sur les questions fiscales

L’imposition des transferts indirects extraterritoriaux — Une boîte à outils

ATAF
African Tax Administration Forum
8 min readNov 30, 2017

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L’élaboration et l’application de toute disposition législative nationale devront tenir compte des obligations découlant des conventions fiscales existantes.

1. Contexte

Ce rapport est l’un des nombreux outils produits par le FMI, l’OCDE, le Groupe de la Banque mondiale et les Nations Unies, partenaires de la plateforme de collaboration sur les questions fiscales, en réponse à une demande du Groupe de travail pour le développement (DWG) du G20. Les boîtes à outils ont pour objectif d’appuyer les pays en développement dans la mise en œuvre adéquate des réponses relatives aux questions fiscales internationales dans le cadre du projet sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (BEPS) du G20/ OCDE, ainsi que d’autres questions particulièrement pertinentes pour les pays en développement que le projet BEPS ne prend pas en compte.

Le projet fournit une analyse, des options et des recommandations pour le traitement fiscal de ce qui est communément appelé transferts indirects extraterritoriaux. C’est une question de fiscalité importante pour les pays africains et pour les autres pays en développement, comme l’illustre le cas de Zain en Ouganda où la taxe concernée était de 85 millions de dollars, soit environ 5% des recettes publiques totales. Le rapport est donc très pertinent pour les membres de l’ATAF.

Cette analyse technique de l’ATAF donne un aperçu des principales questions abordées dans le projet et présente les points de vue de l’ATAF sur ces questions clés.

2. Problématique

L’exemple illustratif de la figure 1 à la page 12 du projet fournit une description très claire du transfert indirect et est reproduit ci-dessous aux fins de référence:

Dans cette transaction, l’entreprise B, résidant à LTJ, vend des actions qu’elle détient dans l’entreprise A à l’entreprise P2, résidant à P. Il s’agit d’un transfert direct des actions de l’entreprise A et d’un transfert indirect de l’actif détenu par l’entreprise A qui se trouve dans le pays L.

Dans le cadre de ses programmes d’assistance technique aux membres, l’ATAF a souvent vu des cas anonymes où l’entreprise A ci-dessus est située dans un pays africain et possède un actif très précieux tel qu’une licence de télécommunication ou d’exploitation minière. Une telle licence peut être extrêmement utile et le transfert de propriété d’un tel actif peut donner lieu à un gain ou à une perte imposable très important ; d’où la question de savoir quelle(s)juridiction(s) fiscale(s) peut/peuvent réclamer le droit d’imposer les transferts.

En supposant que les entreprises P1 et P2 ne sont pas liées, il n’y a donc pas de problèmes de prix de transfert dans ce cas et que l’entreprise P1 veuille réaliser un gain en capital reflétant une augmentation de la valeur de l’actif sous-jacent et que P2 souhaite contrôler cet actif, les règles fiscales de (au moins) quatre pays entreront en jeu pour déterminer le traitement fiscal de cette transaction (ainsi que les traités fiscaux applicables).

Ce sont:

  • Le pays dans lequel l’actif sous-jacent est situé = Pays L
  • Le pays où réside le vendeur (entreprise B) = Pays LTJ
  • Le pays dans lequel la société mère (entreprise P1) du vendeur se trouve = Pays P
  • Le pays dans lequel l’acheteur (entreprise P2) réside

Comme indiqué dans l’exemple, le groupe P1 peut faire en sorte que la vente soit effectuée indirectement par une entité d’un pays (LTJ) qui applique un taux d’imposition réduit aux gains en capital.

3. Comment les droits d’imposition sur le transfert indirect extraterritorial devraient-ils être attribués?

Le projet considère cela comme une question de principe : Le pays dans lequel l’actif est situé devrait-il, en principe, se voir attribué des droits d’imposition prioritaires sur son transfert indirect à l’étranger et, auquel cas, sur quel actif ces droits devraient-ils s’appliquer ?

Le projet conclut qu’il existe des arguments favorables et non-favorables à l’octroi de tels droits au pays en question mais, dans l’ensemble, il favorise la répartition des droits d’imposition sur les plus-values liées aux transferts de biens immobiliers vers le pays dans lequel les actifs sont situés, que le cédant y réside ou y dispose d’une présence imposable.

Cette conclusion aidera de nombreux pays africains, car c’est dans ceux-ci que se trouve souvent ces actifs, et elle reflète l’approche adoptée par l’ATAF dans son Modèle de convention fiscale discuté plus en détail dans la section 5 ci-dessous.

4. Législation fiscale nationale

Comme indiqué dans le projet, là où il existe un transfert indirect extraterritorial d’un actif, le pays dans lequel l’actif est situé doit disposer d’un cadre fiscal national qui contient une règlementation fiscale en matière de transfert indirect pour disposer du droit d’imposer le transfert. Il aura également besoin de règles d’application nationales appropriées pour recouvrer la dette fiscale qui en résulte.

En outre, ceci est nécessaire pour s’assurer que les dispositions appropriées des conventions fiscales sont en place (voir la section 5 ci-dessous), car une convention fiscale ne peut donner lieu à des droits d’imposition ou des mécanismes d’application qui n’existent pas dans la législation nationale.

i. Règle de responsabilité fiscale

Le projet établit deux modèles communs pour la conception de la règle de responsabilité fiscale. Le premier modèle vise à taxer l’entité locale qui détient directement l’actif en question en traitant cette entité comme cédant et recouvrant ses actifs pour leur valeur marchande lorsqu’un changement de contrôle se produit par exemple, en raison d’une vente à l’étranger d’actions ou d’intérêts comparables.

Le modèle vise à taxer le propriétaire d’actifs locaux au motif que l’actif qu’il détient a subi un changement de contrôle en raison d’une vente à l’étranger d’une entité propriétaire indirecte ou directe du détenteur des actifs locaux.

Le second modèle vise à imposer au vendeur non-résident des actions concernées ou des intérêts comparables au moyen d’une règle d’évaluation pour les non-résidents.

Le projet favorise le premier modèle, car il est plus facile à appliquer et plus simple. Le deuxième modèle est souvent adopté par les pays cherchant à taxer les transferts indirects extraterritoriaux, mais le rapport note qu’il peut donner lieu à de plus grands défis en matière d’application et qu’il présente des options de conception plus complexes que le modèle 1.

L’ATAF est d’avis que l’adoption du modèle 1 serait une option préférable pour les membres en raison de sa plus grande force exécutoire et de sa simplicité, ce qui permet aux contribuables de mieux se conformer aux exigences et, aux administrations fiscales de les appliquer.

ii. Règles d’application/de recouvrement

Il est également essentiel que les pays adoptent des règles d’application/de recouvrement pour s’assurer que l’administration fiscale peut imposer le recouvrement de la taxe évaluée.

Plusieurs éléments peuvent être inclus dans ces règles et les pays devront les examiner et décider lesquels répondent à leurs objectifs stratégiques.

Le projet fournit des exemples de dispositions législatives nationales qui sont de nature générale et qui ont été conçues et rédigées de manière à empêcher la double imposition légale par le pays de résidence.

L’ATAF dispose d’une expérience considérable en matière d’assistance à ses membres pour l’élaboration de nouvelles législations fiscales nationales et les membres peuvent demander l’appui de l’équipe d’assistance technique de l’ATAF en vue de rédiger une législation sur le transfert indirect d’actifs pour leur pays.

5. Implications des conventions fiscales

L’élaboration et l’application de toute disposition législative nationale devront tenir compte des obligations découlant des conventions fiscales existantes.

Les droits d’imposition sur les gains réalisés grâce aux transferts indirects qui proviennent principalement (par exemple plus de 50%) de biens immobiliers locaux sont généralement stipulés dans l’article 14 (4) du Modèle de convention fiscale de l’ATAF et l’article 13 (4) des modèles de conventions fiscales de l’OCDE et des Nations Unies.

Tous les modèles permettent au pays de résidence de saisir les gains provenant de la vente d’avoirs intermédiaires à différents niveaux.

Il est important que la question de la définition de la portée de l’intérêt qui est soumise à l’impôt soit correctement définie et ne soit pas trop restrictive.

De même, il est aussi essentiel d’avoir une définition appropriée de «biens immobiliers» pour la règle de la responsabilité fiscale et pour les règles d’application et de recouvrement connexes.

Le rapport fournit un exemple de définition minimale.

Cette définition est considérée comme une définition non exhaustive de la législation nationale.

L’article 14 (4) du Modèle de l’ATAF a la définition la plus exhaustive recommandée dans le rapport sur l’action 6 du BEPS qui comprend non seulement les gains des actions mais aussi les gains provenant de l’aliénation des intérêts dans d’autres entités, telles que les partenariats ou les fiducies.

Une définition robuste et suffisamment exhaustive des biens immobiliers sera également importante dans le contexte de l’application d’une convention fiscale.

En effet, tel qu’indiqué à l’article 6, paragraphe 2, des modèles de l’ATAF, de l’OCDE et de l’ONU le terme «biens immobiliers» a le sens que lui attribue la loi de l’État contractant où les biens en question y sont localisés.

Cependant, la définition minimale pourrait être élargie pour couvrir une catégorie plus large de biens immobiliers qu’il serait approprié pour le pays de localisation de chercher à taxer. Les membres de l’ATAF devraient en particulier élargir la définition faite à l’article 6 (2) des modèles de l’ATAF, OCDE et ONU pour couvrir les droits à recevoir des paiements variables ou fixes en relation avec les droits des industries extractives ou les droits octroyés par les gouvernements avec une qualité exclusive.

L’ATAF possède une expérience considérable dans la rédaction et la négociation de conventions fiscales et les membres peuvent demander l’appui de l’équipe d’assistance technique de l’ATAF pour la rédaction de leurs conventions fiscales.

6. Conclusion

Le rapport soutient l’approche adoptée dans le modèle de convention fiscale de l’ATAF qui stipule que le pays dans lequel l’actif est situé devrait avoir droit d’imposition prioritaire sur le transfert indirect de sa propriété qui a lieu en dehors du pays de localisation/d’origine.

Les dispositions du modèle de l’OCDE et de l’ONU soutiennent également l’approche du modèle de l’ATAF, ce qui indique une acceptation internationale assez large du principe selon lequel l’imposition des gains en capital sur les transferts indirects de «biens immobiliers» devrait être principalement attribuée au pays d’origine.

Il est donc très important que les membres de l’ATAF examinent leurs conventions fiscales et veillent à ce que le contenu de l’article 14, paragraphe 4, et de l’article 6, paragraphe 2, du modèle de l’ATAF soit inclus dans tous leurs traités fiscaux.

De plus, comme une convention fiscale ne peut créer de levée d’impôts, les membres doivent veiller à ce que leur législation nationale crée un droit fiscal pour ces transferts indirects extraterritoriaux et dispose de règles appropriées pour l’exécution et la perception de la taxe créée par ce droit fiscal.

L’ATAF est en mesure d’aider les membres à examiner et à réviser leurs conventions fiscales existantes et à rédiger une législation nationale appropriée en vue de garantir que leurs membres disposent de cadre juridique nécessaire pour faire face à la perte fiscale potentiellement importante de ces transferts indirects extraterritoriaux.

Les membres souhaitant bénéficier d’une telle assistance de l’ATAF peuvent contacter:

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