COMPRENDRE ET INFLUENCER LA MECANIQUE DU CHOIX

jonathan bros
AgenceProches
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6 min readJan 26, 2017

Grâce à l’économie comportementale

Chaque jour nous prenons des milliers de décisions, conscientes ou inconscientes

Cet article vise à mieux expliquer la mécanique des choix et comment influencer cela au prisme de l’économie comportementale.

Mark Zuckerberg a abordé le sujet en 2014 lors d’une conférence publique. « Je veux faire en sorte d’avoir le moins de décisions possible à prendre sur tout ce qui ne concerne pas la communauté [Facebook]. J’ai la chance d’être dans une position où chaque jour je me lève et peux aider plus d’un milliard de personnes, et j’aurais l’impression de ne pas bien faire mon travail si je dépensais mon énergie sur des choses superflues et frivoles. »

Mais il n’est pas le seul à résonner de cette manière, en 2012 Barack Obama dans un article publié par Vanity Fair, un journaliste demandait au président américain de lui apprendre à être président. Une partie de sa réponse fut pour le moins étonnante : « Je ne porte que des costumes bleus ou gris, j’essaie de réduire au minimum le nombre de décisions à prendre. Je ne veux pas en prendre en rapport avec ce que je porte ou ce que je mange, parce que j’en ai trop à prendre par ailleurs. Vous devez mette en place une routine, vous ne devez pas être distrait par des choses triviales pendant votre journée. »

Nous ne choisissons jamais de manière totalement libre.

Nous faisons tout le temps des choix : manger, investir de l’argent, s’habiller ou voter pour tel ou tel candidat. Si nous ne subissons généralement aucune contrainte, nous restons soumis à une réelle influence. Le contexte dans lequel nous choisissons nous influence parfois délibérément. L’approche d’économie comportementale essai de prendre en considération ces personnes pour les guider, plutôt que leur imposer des règles. Il est cependant parfois utile d’être poussé à faire quelque chose, car selon les circonstances, on peut parfois agir de manière irrationnelle et en être conscient. Cette idée va à l’encontre de la volonté populaire ‘d’optimiser ses choix’, autrement dit plus grand est le choix d’options, mieux c’est. Cette idée, même si elle est séduisante, n’en reste pas moins fausse.

Pourquoi nous peinons parfois à prendre une décision.

Nous peinons à prendre des décisions car notre cerveau dispose de deux systèmes distincts. Le ‘système automatique’ fournit des réponses émotionnelles immédiates. Le ‘système réflectif’ nécessite une réflexion consciente, tel l’effort que vous devez déployer pour apprendre à parler une langue étrangère. Bien que le système réflectif soit lent et laborieux à utiliser, nous pouvons nous exercer à le faire fonctionner.

Pour réfléchir plus facilement aux évènements, nous appliquons des ‘règles générales’ aux situations communes. Malheureusement, cette technique présente de nombreuses failles, telles que ‘l’ancrage’, situation dans laquelle un fait familier influence notre raisonnement futur.

Nous prenons également des décisions en fonction de la ‘disponibilité’, en évaluant les risques selon notre facilité à obtenir les informations nécessaires. Si vous énumérez leurs choix à des personnes qui raisonnent en fonction d’expériences marquantes mais non pertinentes, orientez leur réflexion en leur proposant des situations où les évènements se sont bien déroulés par exemple.

Un troisième élément qui induit les individus en erreur est la ‘représentativité’. Les individus jaugent une situation en fonction de sa ressemblance avec une situation passée. Ceux qui sont guidés par la représentativité se représentent des situations qui n’existent pas réellement (comme les parieurs qui pensent gagner le jackpot).

Les êtres humains ont tendance à être démesurément optimistes.

90 % des automobilistes, par exemple, pensent qu’ils conduisent mieux que la moyenne. Nous évaluons également les pertes et profits de manière disproportionnée. Lorsque nous obtenons quelque chose, nous voulons le garder. Nous ne voulons pas subir de perte. Le changement génère du stress et induit des prises de décisions.

Pour nous aider à opérer des choix productifs, nous entérinons simplement la situation actuelle comme une situation par défaut (comme c’est le cas, par exemple, lors d’un renouvellement d’assurances) au lieu de nous demander de réévaluer toutes les alternatives à chaque fois. Pour lutter contre ces tendances, il faut déterminer des éléments de motivation qui nous impliquent de manière émotionnelle, comme le fait de parier avec un ami que vous perdrez du poids.

Nous voyons les choses différemment selon la manière avec laquelle le problème se présente à nous. En effet, nous serons plus enclin à accepter de subir une opération si nous sommes informé que 90 % des patients sont encore en vie cinq ans après, nous le serions certainement moins si l’on nous dit que 10 % en meurent.

‘L’influence sociale’ joue également un rôle primordial. Nous serons plus enclin à faire quelque chose si nous voyons les autres le faire fréquemment ou si nos semblables le font.

Le désir d’adhérer au contexte social est si fort qu’il peut changer notre perception de la réalité : en effet, si nos proches insistent sur le fait qu’un objet a une certaine apparence, nous le visualiserons différemment. Cela implique que l’on peut inciter les gens à adopter un meilleur comportement en leur expliquant simplement comment.

De la mécanique du choix aux exemples de « nudge »

Le Nudge (coup de pouce» en français) consiste à mettre les individus dans un contexte de choix qui les incite à adopter un comportement spécifique recherché. Ce contexte de choix est conçu en se fondant sur les leviers spécifiques identifiés en en économie comportemnantales.

Parmi les nudges connus :

A. L’exemple des urinoirs où une mouche a été gravé dessus. Pour permettre aux hommes de mieux viser et réduire ainsi les dépenses de nettoyage de 80% à l’aéroport Schiphol d’Amsterdam.

B. L’exemple du don d’organes au Royaume-Uni. La Nudge Unit du gouvernement britannique a modifié la page du site qui propose l’adhésion au programme de don, en ajoutant cette phrase : «Chaque jour, des milliers de gens qui voient cette page décident de s’enregistrer», et en y insérant le logo de la NHS, équivalent de notre sécurité sociale. En jouant sur l’effet de pair et la norme sociale, couplés à l’effet d’attention du logo rouge, le taux d’accord est passé en un an de 2,3 à 3,2%, soit 96 000 adhésions supplémentaires.

C. Même principe dans le domaine fiscal, avec la lettre de relance du ministère des Finances britannique aux 10% de foyers fiscaux en retard dans le paiement de l’impôt. La simple mention «neuf personnes sur dix payent leurs impôts à l’heure» a permis de récupérer 2,8 millions de livres (3,4 millions d’euros).

Il existe 7 règles d’or pour influencer les choix, pour de vrai :

1. Imaginer un ‘chemin du moindre effort’ dont vous tirerez profit.

2. Élaborez un système par défaut facile à utiliser, simple et automatique.

3. Concevez votre système en partant du principe que les gens font des erreurs.

4. Vous leur permettrez alors de corriger leurs erreurs ou de changer d’avis plus facilement.

5. Le système doit fonctionner même s’ils commettent de petites erreurs.

6. Concevez votre système de manière à ce qu’ils bénéficient d’un compte rendu.

7. Faites-le aussi compréhensible que possible.

Pour le développement de l’enseignement de l’économie comportementale en France

Mais malgré les preuves d’efficacité de cette politique des « coups de pouce », la société française, très jacobine, préfère toujours la coercition à l’incitation. Selon Astrid Hopfensitz, «ce n’est pas un problème culturel. Les nudges peuvent fonctionner partout, même en France». Encore faudrait-il que l’enseignement de l’économie comportementale se développe dans nos universités et grandes écoles. En France, le principe d’égalité engendre une préférence pour les réglementations.

Sources

Richard H. Thaler, Cass R. Sunstein, Nudge: Improving Decisions About Health, Wealth, and Happiness — February 24, 2009.

Richard H. Thaler, Misbehaving, The Making of Behavioral Economics, W.W. Norton & Company, New York, 2015.

Marc Willinger et Nicolas Eber, L’économie expérimentale, La Découverte, 2005.

Erik Angner, A Course in Behavioral Economics, Palgrave Macmillan, ‎ 2012.

Gilles Saint-Paul, The Tyranny of Utility : Behavioral Social Science and the Rise of Paternalism, Princeton University Press,‎ 2011.

Daniel Kahneman : Système 1 / Système 2 : Les deux vitesses de la pensée — 28 septembre 2012.

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jonathan bros
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