Recrutement : comment favoriser la diversité ?

Déborah RIPPOL
Alan Product and Technical Blog
7 min readJun 12, 2018

Quelques idées et bonnes pratiques pour atténuer les biais innés qui limitent la diversité des profils.

Photo by Adam Jang on Unsplash

De nombreuses recherches démontrent que le processus de recrutement est souvent biaisé. Selon Francesca Gino, professeure à la Harvard Business School, les biais inconscients jouent un grand rôle dans notre jugement.“Ils nous font prendre des décisions en faveur d’une personne au détriment d’une autre”, souligne-t-elle. Tous les secteurs sont touchés par cette forme de “discrimination involontaire”. Les entreprises tech sont largement concernées par l’exclusion des femmes. Pourtant, la diversité est un atout indéniable pour les entreprises et les équipes.

Des mesures simples peuvent être mises en place pour reconnaître ces préjugés et les combattre lors d’un recrutement. Par où commencer ? Comment pouvez-vous aider votre équipe à se construire un jugement objectif ? Quelle sont les bonnes pratiques à installer lors d’un entretien ?

🔮 Tout d’abord, qu’est-ce qu’un biais ?

Pour commencer, voici une définition : “un biais (cognitif) est un mécanisme de la pensée, qui cause une déviation du jugement. Le terme biais fait référence à une déviation systématique de la pensée logique et rationnelle par rapport à la réalité. Les biais cognitifs conduisent le sujet à accorder des importances différentes à des faits de même nature et peuvent être repérés lorsque des paradoxes apparaissent dans un raisonnement.”

Quand on prend une décision, on a tendance à penser qu’on a évalué objectivement les avantages et les inconvénients pour qu’elle soit la plus rationnelle possible. Mais la réalité est assez différente. Notre cerveau est bombardé d’informations et on ne peut tout simplement pas évaluer chaque décision avec la même attention. Il utilise des biais cognitifs ou des “raccourcis de traitement d’information” pour passer directement à la décision, en s’inspirant de notre cadre de référence personnel ou pré-défini.

Par exemple, une personne qui est arrivée en retard lors de son premier jour de travail va être cataloguée comme “jamais ponctuelle” par les autres. Un supporter d’une équipe de football va plus facilement constater les fautes de l’équipe adverse que celle qu’il soutient. Ou encore, face à 3 produits de prix différents on aura tendance à prendre le prix du milieu.

C’est comme ça qu’on arrive à des biais qui privilégient les hommes dans la tech.

📝 Pourquoi est-ce important de les maîtriser lors d’un recrutement ?

C’est important d’avoir conscience de ces biais afin de ne pas tomber dans les jugements de valeur. Le simple fait de réaliser que ces biais existent et de s’interroger nous fait prendre du recul : qu’avons-nous dans notre inconscient et comment prendre le contrôle de nos décisions ?

La question ne devrait pas être “devons-nous avoir une équipe plus diversifiée ?”, mais “comment pouvons-nous y parvenir en étant le plus juste possible pour la réussite globale de l’équipe ?”. Lorsqu’on parle de diversité, il y a toujours des gens pour donner des conseils comme : revoir les qualifications de la fiche de poste à la baisse, ou réduire les exigences en termes d’années d’expérience, ou encore faire l’impasse sur des compétences techniques. En supposant que pour diversifier son équipe il faut forcément revoir ses exigences à la baisse. Non, non et non !

En novembre 2017, Apple a publié son rapport annuel sur la diversité de ses effectifs. Le géant affirme travailler dur pour inclure davantage de diversité. “De juillet 2016 à juillet 2017, la moitié de nos recrues venaient de groupes historiquement sous-représentés dans la tech”, dont les femmes. Mais globalement, ces efforts ne changent pas grand chose. En 2017 comme en 2016, les femmes ne pèsent que 32% dans l’entreprise. Les inégalités sont particulièrement flagrantes dans les postes techniques avec 77% d’hommes !

Ne vous méprenez pas, nous ne clamons pas notre exemplarité chez Alan. Les femmes souvent sous-représentées chez les profils ingénieurs le sont aussi chez nous (coucou Daphné 😊). En revanche, nous avons à coeur de nous améliorer et pour ce faire de nous interroger sur les meilleures pratiques.

Photo by Kelly Sikkema on Unsplash

Voici 10 bonnes pratiques pour éviter les biais dans vos processus de recrutement.

✍🏿 Interrogez-vous et testez votre équipe

La première étape pour détecter les biais, est d’en parler ouvertement en équipe. Les préjugés inconscients peuvent être très enracinés dans la culture d’une entreprise, dans l’esprit des gens ou dans un secteur d’activité. Le mieux c’est d’en parler pour en avoir conscience.

🌺 Attirez tous les talents depuis votre page “carrière” jusqu’à vos descriptions de poste

Les pages “carrière” des sites web des entreprises tech représentent très souvent des personnes homogènes. On y trouve des images d’hommes jeunes et de tables de ping-pong dans un open space épuré. Pour favoriser la diversité, il faut commencer par la représenter.

Par ailleurs, il n’est pas rare de lire à la fin de la fiche de poste une liste, plus ou moins exhaustive, de bénéfices offerts par l’entreprise. Souvent on peut y lire “apéro mensuel”, “babyfoot” ou “ping-pong”. Mais est-ce vraiment ce qui compte?

Voici les bénéfices que Buffer met en avant dans ses fiches de poste. L’entreprise s’adresse à tout le monde et ne limite pas les activités au babyfoot pour éviter de se cantonner au cliché du startuper et s’ouvrir à des profils différents.

🗺️ Standardisez les intitulés de poste

Dans les fiches de poste, les entreprises utilisent parfois un langage susceptible de décourager certains candidats. C’est le cas des descriptifs qui utilisent des mots extrêmes ou masculins comme “ninja”, “rockstar” ou “Jedi” ou mentionnent des exigences inutiles (diplômé de telle ou telle école). Mais c’est aussi le cas pour les descriptions vagues “esprit créatif” ou “vision entrepreneuriale”. Ces éléments sont le meilleur moyen de limiter le recrutement à une minorité de candidats.

✉️ Ré-apprenez à lire un CV

Le CV est le premier contact entre un candidat et l’entreprise. Et il est très facile de se laisser influencer par quelques informations : photo, sexe, expériences, formation ou encore loisirs. Pour éviter cela, il faut toujours commencer par prendre connaissance de toutes les informations de manière générale puis s’attarder sur les expériences, sur les compétences ou bien la formation du candidat. Chaque élément doit faire écho à la fiche de poste. C’est très important de se concentrer sur des éléments concrets.

📝 Préparez les entretiens

L’entretien est probablement l’étape la plus délicate quand il s’agit de mettre ses préjugés de côté. Lorsqu’on rencontre le candidat, on a tendance à se laisser déborder par les biais : ponctualité, style vestimentaire, attitude, tic de langage etc. Et à construire un jugement dès les premières secondes, pour lequel notre cerveau ne cherchera que des confirmations par la suite. C’est pourquoi, chaque entretien doit être préparé en amont avec une liste de questions fermées et fondées sur les compétences. Cela permet d’éliminer les questions qui ne seraient pas pertinentes et potentiellement biaisées.

✏️ Prenez des notes pendant et après l’entretien

La mémoire humaine n’est pas très fiable. Elle a même tendance à retenir des détails insignifiants ! Prendre des notes (même très brèves) lorsque le candidat répond aux questions est le meilleur moyen de garder des éléments concrets et objectifs de votre rencontre. C’est aussi très utile de noter vos retours sur le candidat tout de suite après l’entretien.

📑Proposez un test pour évaluer des compétences concrètes

Préparer des exercices dans votre processus de recrutement et prendre le temps d’évaluer les résultats, c’est de loin le meilleur outil pour prendre la bonne décision. Vous êtes plus susceptible d’évaluer les compétences d’une personne plutôt que de vous laisser influencer par leur personnalité, leur sympathie ou inconsciemment par l’apparence, le sexe ou l’âge.

✍️Évaluez les candidats selon une grille précise

C’est une pratique de plus en plus courante qui consiste à accorder des points selon une grille très précise. On appelle ça la “scorecard”. Cela va souvent de pair avec les questions préparées et posées durant l’entretien. Un bon moyen pour rester concentré sur les compétences et les connaissances du candidat.

💡 Justifiez votre décision

Avec des preuves concrètes comme les notes d’entretien, la scorecard ou encore le test, vous serez en mesure de justifier votre choix. Terminé les “il avait une bonne tête”, “je le voyais bien dans notre équipe” ou encore “il doit forcément mieux coder qu’elle !”. Le processus de prise de décision devient plus clair et on évite de tomber dans le piège du biais cognitif.

📖 Repensez la manière dont vous voyez le “culture fit”.

Une approche classique veut que vous posiez la question suivante « Est-ce que j’ai envie de prendre un café avec cette personne? ». Mais en vous la posant vous ne réglez qu’un seul sujet: “est-ce que cette personne est sympathique à mes yeux?”. La sympathie n’est peut être pas le meilleur critère pour recruter quelqu’un (ou un parmi tant d’autres) et reste moins puissant que l’alignement plus profond du (de la) candidat(e) avec les valeurs que vous avez définies en tant qu’entreprise. Pour vous assurer un maximum d’objectivité, séparez bien les deux questions : sympathie et alignement avec les valeurs de votre entreprise.

Pour rejoindre une équipe qui cherche à faire toujours mieux, écrivez à jobs@alan.eu

Quelques ressources

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Déborah RIPPOL
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