Lectures urbaines anthropocènes #2020_4

berenice gagne
Anthropocene 2050
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28 min readDec 14, 2020

Une veille documentaire de fin d’année très très riche : pas moins de 80 nouvelles références ! Un effet du confinement de printemps ? Ou une épidémie de sujets liés à l’Anthropocène ? De quoi faire turbiner nos librairies et nos bibliothèques pour les fêtes de fin d’année, en tout cas !

“Montagne”, huile sur toile (2011) © Johann Rivat

Dernière sélection de l’année des publications urbaines anthropocènes parues, pour la plupart, en 2020. Retrouvez également les précédentes veilles documentaires.

Retrouvez également la veille urbaine anthropocène et les parutions au fil de l’eau sur twitter : @BereniceGagne et une sélection d’images sur Instagram : berenicegagne

Commençons par un magnifique OVNI que je ne sais pas classer !

Anna L. TSING, Jennifer DEGER, Alder KELEMAN SAXENA, Feifei ZHOU (dir.), Feral Atlas. The More-Than-Human Anthropocene (Stanford Press, 2020).

Une exploration de l’Anthropocène perçu à travers la féralisation (le retour à l’état sauvage) d’écosystèmes favorisés au départ par des infrastructures humaines, et qui ont prospéré en dehors de tout contrôle humain. Le projet rassemble 79 enquêtes de terrain de scientifiques, d’humanistes et d’artistes.

AGRICULTURE

Sébastien ABIS, Pierre BLANC, Géopolitique de l’agriculture. 40 fiches illustrées pour comprendre le monde (Eyrolles, 2020).

40 fiches documentées, illustrées de cartes, de graphiques et de tableaux, pour cerner les enjeux géopolitiques et les défis de l’agriculture : du conflit foncier à la sécurité alimentaire, des révoltes de la faim à l’accès à l’eau.

Lucile LECLAIR, Pandémies, une production industrielle (Seuil/Reporterre, 2020).

La journaliste enquête sur les dangers sanitaires que porte l’élevage industriel et sur les effets contre-productifs de la biosécurité qui renforce l’industrialisation de l’élevage. Cette situation offre des conditions écologiques optimales à la diffusion de toute nouvelle souche virulente : les conditions de vie des animaux et l’homogénéisation des espèces les rend particulièrement vulnérables aux maladies infectieuses. L’autrice propose également des solutions déjà existantes, qui supposent une politique agricole différente et une modification de nos habitudes alimentaires.

Gilles LUNEAU, Steak barbare. Hold-up végan sur l’assiette (éditions de L’Aube, 2020).

Une enquête sur l’agriculture dite « cellulaire », c’est-à-dire la production par des start-up d’aliments (produits animaux) à partir de cellules souches cultivées en laboratoire ou de substituts végétaux assemblés avec des protéines de synthèse (viandes, œufs, laitages, poissons, fruits de mer, gélatines, cuirs, soies etc.). Le journaliste mène une investigation sur les financeurs et les fondations qui portent ces initiatives et alerte sur l’idéologie qui les anime, craignant une véritable rupture de civilisation.

Bertrand VALIORGUE, Refonder l’agriculture à l’heure de l’Anthropocène (éditions le Bord de l’Eau, 2020).

Les changements induits par l’Anthropocène fragilisent le système alimentaire et l’agriculture elle-même est mise en cause par des mouvements sociaux quant à son rôle dans le changement climatique. De nouveaux entrepreneurs d’une agriculture dite cellulaire émergent ainsi : la production de denrées alimentaires se basent alors « sur la multiplication de cellules animales ou végétales dans des laboratoires à partir des connaissances et moyens offerts par les biotechnologies ». La profession agricole est sommée de se transformer sous peine de disparaître et de bifurquer vers une agriculture régénératrice qui limite son empreinte environnementale, qui répare l’atmosphère par le stockage de CO2, qui restaure la biodiversité en (ré)introduisant des espèces anciennes ou nouvelles et qui réforme les institutions inadaptées, à la fois politiques, agronomiques/zootechniques et économiques (la vie des idées, 06/10/2020).

ARTS

Anne-Marie FILAIRE, Claude EVENO, Terres. Sols profonds du Grand Paris (La Découverte, 2020).

« Chaque année, 22 millions de tonnes de terre sont excavées pour la construction de la métropole et l’extension des limites de Paris ». Ces terres sont réparties entre les collectivités, dans les parcs, les bois, les terrains de sport, les terres agricoles etc. La photographe saisit cet « entre-deux du paysage », « le moment de la réception des terres, en parcourant les huit sites actuellement en gestation dans le Grand Paris. Les instants particuliers où les terres sont déversées et réparties, et où s’esquissent, avec les ingénieurs, les profils paysagers ».

Antony GORMLEY, Martin GAYFORD, Shaping the World: From Prehistory to Now (Thames & Hudson, 2020).

Le sculpteur Antony Gormley et le critique d’art et historien Martin Gayford explorent la sculpture comme art universel à travers le monde, de la préhistoire à nos jours. Ils analysent ce geste non comme une simple recherche esthétique mais comme le stigmate de l’impérieuse nécessité humaine d’imposer sa marque au paysage, de construire, de créer des images, de pratiquer une religion et de philosopher.

Hélène SCHMUTZ (dir.), De la représentation de la crise à la crise de la représentation. Esthétique et politique de l’Anthropocène (Presses Universitaires Savoie Mont Blanc, 2020).

Un ouvrage pluridisciplinaire dans le champ des humanités environnementales qui suit une hypothèse : les crises environnementales de l’Anthropocène « entraînent des changements dans les représentations culturelles de ce que nous appelons l’environnement, et de notre relation à ce dernier. En retour, ces représentations conditionnent notre mode d’être dans l’environnement, affectant celui-ci ». Avec les outils de l’histoire, des cultural studies, de la littérature, de la philosophie, de l’anthropologie, des arts visuels, de la géographie, des arts de la scène et du cinéma, il s’agit de cerner la réalité ou non d’un changement de paradigme dépassant les croyances occidentales en une dichotomie nature/culture et en une toute-puissance transformatrice de l’humain.

“Prométhée” , peinture à carrosserie et huile sur toile (2017) © Johann Rivat

BD - ROMANS GRAPHIQUES

Cécile BARNEOUD-GUIZOU, Permacomix. Vivre en permaculture, mode d’emploi (Rue de l’Echiquier, 2020).

Entre quête initiatique d’un couple de trentenaires et manuel pratique de permaculture.

Gaspard D’ALLENS, Pierre BONNEAU, Cécile GUILLARD, Cent mille ans. Bure ou le scandale enfoui des déchets nucléaires (Seuil/La Revue dessinée, 2020).

Une enquête sur le projet Cigéo de centre de stockage des déchets radioactifs en couche géologique profonde à Bure (Meuse) et sur les résistances.

Jessica OUBLIE, Nicola GOBBI, Katherine AVRAAM, Vinciane LEBRUN, Tropiques toxiques. Le scandale du chlordécone (Steinkis, 2020).

Un roman graphique sous forme d’enquête très documentée qui retrace l’histoire du chlordécone aux Antilles et raconte le combat mené par des associations écologistes, par des chercheurs et des chercheuses, des agriculteurs et des agricultrices, par des militant·es et des citoyen·nes Guadeloupéen·nes et Martiniquais·es pour faire reconnaître la responsabilité de la France dans la pollution des sols et des eaux au chlordécone. L’autrice met en lumière le passé esclavagiste et la place des békés (habitant·es blanc·hes créoles descendant des premiers colons européens) pour éclairer les dynamiques à l’œuvre.

DROIT

Marta TORRE-SCHAUB, Justice climatique. Procès et action (CNRS Éditions, 2020).

Une étude des nombreuses actions en justice climatique menées pour lutter contre les inégalités créées par le changement climatique et sensibiliser la communauté internationale à la nécessité absolue d’agir de manière ambitieuse, faisant du droit le bras armé de la mobilisation de la société civile face à l’urgence climatique.

ECONOMIE

Cécile BONNEAU, Mathilde SALIN (dir.), « Urgence écologique : l’économie en transition », Regards croisés sur l’économie, n° 26 (La Découverte, décembre 2020).

« L’économie peut-elle faire sa transition ? ». Ce numéro propose d’étudier les soubassements idéologiques de notre vision de la nature comme une ressource à exploiter puis de tracer de « nouvelles perspectives pour les politiques économiques à venir ». Il rassemble des sociologues, des économistes et des philosophes dont Catherine Larrère, Jean-Baptiste Fressoz, Baptiste Monsaingeon, Céline Guivarch, Harold Levrel, Antoine Missemer, Alain Grandjean, Éloi Laurent, Aurélien Boutaud et Natacha Gondran.

Robert BOYER, Les capitalismes à l’épreuve de la pandémie (La Découverte, 2020).

L’économiste, cofondateur de « l’école de la régulation », estime que le capitalisme sort « considérablement renforcé par cette pandémie ». L’économie de plates-formes des GAFA, grande gagnante, accentue les inégalités économiques et ne s’inquiète « ni de la production ni de l’amélioration des qualifications ». La pandémie a exacerbé la concurrence entre cette économie de plates-formes et les capitalismes d’Etat (ex : la Chine), déstabilisant les relations internationales (ex : rivalité Chine vs Etats-Unis) et risquant de précipiter l’effondrement de « projets de coordination régionale comme l’Union européenne » au profit des Etats nations. L’économiste propose une économie « anthropogénétique » qui satisfasse les besoins essentiels : au-delà de se nourrir, se vêtir et se loger, l’accès de toustes à une éducation de qualité, à une vie en bonne santé et à la culture, « condition de la vie en société ». « Il nous faut être capables de créer un modèle de production de l’humanité par l’humain » (Le Monde, 02/10/2020).

Christian DE PERTHUIS, Covid-19 et réchauffement climatique. Plaidoyer pour une économie de la résilience (De Boeck supérieur, 2020).

L’économiste veut croire que « le choc du Covid-19, ayant touché simultanément des milliards d’humains », n’est pas qu’une simple parenthèse avant le « retour à la normale ». Il éclaire « les ruptures qui vont structurer le monde de demain » et analyse « ce que la catastrophe sanitaire peut changer pour l’action climatique » : « le monde post-Covid-19 sera plus numérisé et moins carboné. La redistribution des flux de personnes et des marchandises ouvre la voie d’une accélération de la transition énergétique. La tarification carbone distributive, celle de sociétés plus solidaires. L’économie post-Covid-19 devra reposer sur de nouveaux rapports au milieu naturel et à la multitude des êtres vivants le composant » (The Conversation, 12/10/2020).

Eloi LAURENT, Et si la santé guidait le monde ? L’espérance de vie vaut mieux que la croissance (Les Liens qui Libèrent, 2020).

Pour l’économiste, la crise sanitaire du Covid-19 est révélatrice du suicide social et économique auquel nous conduit la destruction des écosystèmes. Postulant que le bien-être humain et la vitalité des écosystèmes sont liés, il propose que l’espérance de vie et la pleine santé se substituent aux indicateurs économiques comme le PIB et la croissance pour réorienter nos systèmes économiques vers la transition écologique (Entretien avec l’auteur : France inter, 11/11/2020).

ENERGIES

Richard HEINBERG, David FRIDLEY, Un Futur renouvelable. Tracer les contours de la transition énergétique (Écosociété, 2020). Traduction par Michel Durand.

« Les deux auteurs, nord-américains, établissent un état des lieux précis et très documenté des enjeux énergétiques, plus particulièrement à partir du point de vue américain. Ils esquissent à grands traits ce qu’une société fonctionnant intégralement à partir d’énergies renouvelables pourrait signifier concrètement, et en quoi un monde d’énergies renouvelables serait fondamentalement différent de notre monde actuel ». (Futuribles, 18/09/2020).

“NO MORE OIL”, peinture à carrosserie et huile sur toile (2015) © Johann Rivat

ENJEUX POST & DECOLONIAUX

Dipesh CHAKRABARTY, Provincialiser l’Europe. La pensée postcoloniale et la différence historique (Amsterdam, 2020). Traduction par Olivier Ruchet, Nicolas Viellescazes.

Nouvelle édition de la traduction du classique de la pensée postcoloniale Provincializing Europe: Postcolonial Thought and Historical Difference (Princeton University Press, 2000), toujours d’actualité ! Provincialiser l’Europe, c’est cesser de calquer les catégories de pensée et les concepts politiques occidentaux sur les mondes non occidentaux, c’est « reconnaître que l’appareil scientifique occidental ne suffit pas à comprendre nombre d’éléments des sociétés et des cultures des pays du Sud ». L’historien indien invite à penser la pluralité des temps historiques, la multiplicité des manières d’être au monde et la diversité des formes de la modernité politique et des futurs qui se construisent.

Sanjav SUBRAHMANYAM, Faut-il universaliser l’histoire ? Entre dérives nationalistes et identitaires (CNRS éditions, 2020).

L’historien se méfie de l’« universalisation » de l’Histoire qu’il voit comme « un processus d’exclusion délibéré. C’est pourquoi il préfère l’« Histoire connectée » à l’« Histoire universelle », et plaide avant tout pour une pratique historique élaborée dans un esprit d’échange et d’ouverture à d’autres expériences et d’autres cultures, de curiosité pour d’autres parties du monde et d’autres peuples, et non dans un esprit de revendication identitaire ou d’autosatisfaction nationale et culturelle ».

GEOGRAPHIE

David HARVEY, Les limites du capital (Éditions Amsterdam, 2020). Traduction par Nicolas Viellescazes.

Le chef de file de la géographie radicale démontre comment les espaces dans lesquels nous évoluons sont façonnés par la logique capitaliste de la valeur. Il livre une lecture géographique minutieuse du fonctionnement du système capitaliste et propose des « solutions spatiales » aux crises, par exemple « en réorientant les flux de capital et de force de travail vers de nouveaux secteurs et de nouveaux lieux ».

Michel LUSSAULT, Chroniques de géo’ virale (Editions deux-cent-cinq, collection « A partir de l’Anthropocène », 2020). Dessin de Lou Herrmann.

Ce livre reprend et commente le propos des 10 chroniques vidéos postées pendant le confinement par le géographe qui propose de « penser le Monde avec le virus » et présente la pandémie comme un « fait anthropocène total ». Il montre comment « la diffusion de la maladie révèle les caractéristiques majeures de la mondialisation, notamment l’urbanisation généralisée de la planète. La pandémie procède du caractère systémique du Monde, elle témoigne de ses vulnérabilités, elle souligne l’ampleur des injustices sociales ».

Thibaut SARDIER, Quand la géo explique le monde (autrement, 2020).

Un atlas « pour comprendre les bouleversements du monde d’aujourd’hui » à travers 30 phénomènes tels que « hyperlieu, pyrocène, gentrification, gaytrification, spatialité… ».

HISTOIRE

Jean-Baptiste FRESSOZ, Fabien LOCHER, Les Révoltes du ciel. Une histoire du changement climatique XVe-XXe siècle (Seuil, 2020).

« Les deux historiens de l’environnement et chercheurs au CNRS retracent dans cet essai l’intérêt ancien et constant pour le changement climatique et le rôle qu’y jouent les humains, de la découverte de l’Amérique à l’ère industrielle, en passant par la Révolution française. Seul un «interlude», quelque part entre le XIXe siècle et la fin du XXe, fait exception : le progrès technique permet à l’humanité d’oublier le climat pendant quelques décennies» (Libération, 07/10/2020).

François HARTOG, Chronos. L’Occident aux prises avec le Temps (Gallimard, 2020).

« Selon l’historien, l’Anthropocène introduirait un régime d’historicité inédit qui bouleverse notre économie du temps, non seulement parce que celui-ci se met à échapper à notre maîtrise mais parce qu’il est marqué par la réintroduction d’une perspective d’avenir… sous la forme d’une catastrophe annoncée : l’effondrement. Fin de l’histoire ? Au contraire, faisant éclater la bulle du présentisme, la catastrophe anthropocénique ouvre une réflexion nouvelle sur le temps long, l’évolution et nos choix de civilisation » (philosophie magazine, 21/09/2020, entretien avec l’auteur : Le Grand Continent, 08/10/2020).

HUMAIN / VIVANT / NON-VIVANT

Gilbert COCHET, Béatrice KREMER-COCHET, L’Europe réensauvagée : Vers un nouveau monde (Actes Sud, 2020).

« Ce tour européen de l’état de réensauvagement des différents milieux naturels révèle que, malgré un passage par la quasi-extinction de beaucoup d’espèces iconiques, dans tous les pays des initiatives inspirantes et couronnées de succès voient le jour. Bisons, ours, aigles, esturgeons et phoques reviennent. La cohabitation de l’homme et du sauvage s’avère donc possible ». Une lecture (très) critique de cette forme de réensauvagement ici (lundimatin, 03/11/2020).

Baptiste MORIZOT, Raviver les braises du vivant. Un front commun (Actes Sud / Wildproject, 2020).

« À partir d’une enquête de terrain sur des initiatives de défense de forêts et des pratiques d’agroécologie, ce livre propose une nouvelle cartographie des alliances entre les usages de la terre qui sont des gardiens du feu. Il donne des outils critiques pour révéler au grand jour le rapport au vivant partagé par ceux qui le détruisent. Et offre un guide de négociation pour sortir des oppositions stériles entre producteurs et protecteurs. C’est un appel à faire front commun contre les vrais ennemis du vivant : toutes les forces de l’exploitation extractiviste » (Socialter, 13/10/2020).

JEUNESSE

Rosie EVE, Demain la forêt (éd. Saltimbanque, 2020). Traduction par Nadja Belhadj.

Dès 6 ans. L’histoire d’une jeune éléphante qui vit dans une petite réserve de forêt avec sa famille, séparée de ses cousin·es de la réserve d’à côté par une exploitation d’huile de palme. Elle décide de faire pousser un corridor forestier pour relier les deux forêts et se fait aider par d’autres animaux de la forêt. « Un album enjoué, touchant, simple et clair, qui parle de déforestation, de perte de biodiversité, mais aussi de sensibilité animale, de coopération et de puissance d’agir quand on se sent impuissant·e » (Revue Silence, novembre 2020).

“Monument#1”, huile et peinture à carrosserie sur toile (2012) © Johann Rivat

LITTERATURE

« Les écologies du XIXe siècle », Romantisme (Armand Colin, 2020/3, n° 189).

Un numéro très pluridisciplinaire sur l’histoire des sciences, des idées, la littérature et l’esthétique, avec notamment un article de Jean-Baptiste Fressoz et Julien Vincent qui tentent de comprendre le nouveau rapport aux organismes vivants introduit par paradigmes de la Révolution Française ; Bertrand Guest qui s’interroge sur les sorcières en tant que figures des luttes pour l’écologie et le féminisme au XIXème à travers le prisme de la littérature et de l’anthropologie ; et Élisabeth Plas qui analyse la responsabilité humaine dans l’œuvre de Michelet.

Aline AURIAS, Roland LEHOUCQ, Daniel SUCHET, Jérôme VINCENT (dir.), Nos futurs (Éditions ActuSF, 2020).

Un recueil de textes de vulgarisation et de fiction qui fait dialoguer des scientifiques et des auteurs & autrices de science-fiction autour du rapport du GIEC pour imaginer à quoi pourrait ressembler nos sociétés demain.

Luc BRONNER, Chaudun, la montagne blessée (Seuil, 2020).

Une enquête intime sur un village abandonné des Hautes-Alpes, vendu en 1895 à l’administration des Eaux et Forêts par ses habitants qui ont dévoré leur environnement : disparition des forêts ravagées par des coupes excessives, pâturages inexploitables, trop de bêtes à nourrir. « Le récit minutieux d’un désastre écologique et humain et, in fine, d’une résurrection : aujourd’hui, Chaudun est le coeur d’un espace ensauvagé » : oui mais sans humains.

COLLECTIF, Demain, l’écologie ! Utopies & anticipations environnementales (Archéosf, publie.net, 2020). Préface de Natacha Vas-Deyres.

Un recueil de texte d’anticipation du 19ème siècle traitant des questions environnementales.

Rita INDIANA, Les Tentacules (Rue de l’échiquier, 2020). Traduit par François-Michel Durazzo.

En 2027, dans une République dominicaine marquée par plusieurs catastrophes écologiques, Acilde, adolescente pauvre, est depuis peu la servante d’Esther Escudero, grande prêtresse de la Santería. Elle cherche à vendre illégalement l’anémone que possède sa patronne pour acquérir le Rainbow Bright, une drogue qui lui permettrait de changer de sexe sans intervention chirurgicale. Un roman inclassable à l’énergie punk, où les époques et les personnages, les politiques queer et le désastre écologique s’entremêlent.

Chéry LLOYD, Dune, le Mook (éditions L’Atalante, éditions Leha, C’est plus que de la SF, 2020).

16 scientifiques et universitaires de toutes disciplines et 15 essayistes, journalistes et vidéastes se sont réunis autour de Dune de Franck Herbert, l’un des ouvrages avant-gardistes de la science-fiction sur les questions écologiques.

Robert MACFARLANE, Underland. Voyage au centre de la Terre (Les Arènes, 2020). Traduction par Patrick Hersant.

Un ouvrage qui mêle littérature, science et récit de voyage pour explorer notre rapport au sous-sol. Pendant plus de 7 ans, l’auteur a visité des sites souterrains (laboratoire caché dans une mine sous la mer, grottes abritant des peintures rupestres, profondeurs des glaciers etc.) à la recherche de « tout ce que nous entreposons, cachons, jetons » pour révéler notre legs géologique aux générations futures.

Corinne MOREL DARLEUX, Plutôt couler en beauté que flotter sans grâce. Réflexions sur l’effondrement (Libertalia, 2019).

Un essai philosophique et littéraire dans lequel la militante écosocialiste questionne notre quotidien en convoquant le navigateur Bernard Moitessier, les lucioles de Pasolini ou Les Racines du ciel de Romain Gary. Elle propose un choix radical : refuser de parvenir et instaurer la dignité du présent pour endiguer le naufrage généralisé. Face à la catastrophe écologique, elle défend le recours à l’action directe, couplée à une éthique personnelle de résistance et de décroissance.

NUMERIQUE

Yaël BENAYOUN, Irénée REGNAULD, Technologies partout, démocratie nulle part. Plaidoyer pour que les choix technologiques deviennent l’affaire de tous (FYP, 2020).

Pour sortir de la confiscation du progrès, les auteurs appellent à replacer le débat démocratique et les revendications citoyennes au cœur du développement technologique. Ils rappellent « que la numérisation du monde ne s’est pas écrite grâce à la délibération collective, et qu’il est encore possible d’opérer un tri parmi les technologies que nous souhaitons et celles dont nous ne voulons pas » (Usbek & Rica, 09/10/2020).

Cédric DURAND, Technoféodalisme. Critique de l’économie numérique (La Découverte, 2020).

« La thèse de ce livre est qu’avec la digitalisation du monde se produit une grande régression. Retour des monopoles, dépendance des sujets aux plateformes, brouillage de la distinction entre l’économique et le politique : les mutations à l’œuvre transforment la qualité des processus sociaux et donnent une actualité nouvelle au féodalisme ».

Valentyna DYMYTROVA, Isabelle HARE, Valérie LARROCHE, Françoise PAQUIENSEGUY, Marie-France PEYRELONG (dir.) Données urbaines et smart cities. Entre représentations et pratiques professionnelles (Editions des archives contemporaines, 2020).

Une enquête dans l’univers des open data-données ouvertes métropolitaines auprès de celles et ceux qui les produisent, les gèrent, les réutilisent ou les médiatisent. L’analyse révèle « l’importance d’impliquer l’ensemble des acteurs de la métropole dans des projets concrets accompagnés par les collectivités locales autour de l’ouverture, du partage et de la valorisation des données ».

Fabrice FLIPO, L’impératif de la sobriété numérique. L’enjeu des modes de vie (Editions Matériologiques, 2020).

Une étude de philosophie sociale sur notre dépendance au numérique et les enjeux écologiques en analysant le positionnement des divers acteurs et l’évolution des modes de vie.

Nicolas NOVA, Smartphones. Une enquête anthropologique (Metispresses, 2020).

Le chercheur a mené une enquête anthropologique méticuleuse sur le smartphone, cet objet ambivalent, cet appareil technologique, qui nous accompagne dans nos tâches quotidiennes et nous suit à la trace, qui fascine autant qu’il inquiète. L’ouvrage se distancie d’une vision alarmiste et s’intéresse à la pluralité des usages (Le Temps, 19/06/2020).

Shoshana ZUBOFF, L’Âge du capitalisme de surveillance (Zulma, 2020). Traduction par Bee Formentelli et Anne-Sylvie Homassel.

La sociologue, professeure émérite à Harvard, livre une enquête de plus de 20 ans sur le pouvoir des machines intelligentes et la menace que ce pouvoir représente pour la liberté humaine. Elle révèle les choix bien humains, et non technologiques, qui ont présidé à la mise en place de ce qu’elle appelle un « capitalisme de surveillance », ce modèle qui monétise nos données personnelles et comportementales et produit des algorithmes censés prédire et influencer nos choix (Philosophie magazine, 28/09/2020).

“Bel Zébu”, peinture à carrosserie sur toile 2013) © Johann Rivat

PHILOSOPHIE - SOCIOLOGIE - IDEES

Serge AUDIER, La cité écologique. Pour un éco-républicanisme (La découverte, 2020).

Un essai à contre-courant dans lequel le philosophe appelle à réinventer nos grands idéaux de liberté, d’égalité et de solidarité pour affronter collectivement la crise écologique. L’enjeu est de créer une cité écologique, de proposer ainsi une vision et un récit communs, l’éco-républicanisme, capables d’inspirer une politique de solidarité élargie avec la Terre. « Contre l’immense majorité des penseurs contemporains de l’écologie, prêts jeter aux orties l’héritage de la Renaissance et des Lumières, que notre tradition politique républicaine offre de précieuses ressources pour affronter les problématiques environnementales » (philosophie magazine, 13/10/2020).

André GORZ, Leur écologie et la nôtre — Anthologie d’écologie politique (Seuil, 2020).

Première anthologie réunissant les principaux textes du philosophe et penseur de l’écologie et du capitalisme tardif. Il offre des perspectives sur l’autonomie et la liberté et des analyses critiques sur les derniers avatars du capitalisme et de sa crise écosystémique.

Catherine LARRERE, Raphaël LARRERE, Le pire n’est pas certain. Essai sur l’aveuglement catastrophiste (Premier Parallèle, 2020).

La philosophe de l’environnement et l’ingénieur agronome et sociologue dénoncent le constat d’impuissance sur lequel repose le catastrophisme actuel : à rebours de leur discours, les collapsologues alimentent la logique néolibérale. « Et si, à force de dénoncer l’État et les institutions pour encenser l’entraide citoyenne et les biorégions, les effondristes étaient devenus les idiots utiles du business as usual ? » (Usbek & Rica, 06/09/2020).

Bruno LATOUR, Peter WEIBEL (dir.), Critical Zones. The Science and Politics of Landing on Earth (MIT Press & ZKM | Center for Art and Media Karlsruhe, 2020).

L’ouvrage est issu de l’exposition du même nom au ZKM Center for Art and Media de Karlsruhe (Allemagne) : des artistes et des écrivain·es dépeignent la désorientation d’un monde confronté au changement climatique. Cette désorientation est attribuée à la déconnexion entre deux définitions différentes du territoire sur lequel vivent les humains modernes : la nation souveraine dont ils tirent leurs droits, et un autre, caché, dont ils tirent leurs richesses — le territoire sur lequel et dont ils vivent. En traçant la carte du territoire qu’ils vont habiter, ils ne trouvent pas un globe, mais une série de zones critiques — inégales, hétérogènes, discontinues. Contributions de : Dipesh Chakrabarty, Pierre Charbonnier, Emanuele Coccia, Vinciane Despret, Jerôme Gaillarde, Donna Haraway, Joseph Leo Koerner, Timothy Lenton, Richard Powers, Simon Schaffer, Isabelle Stengers, Bronislaw Szerszynski, Jan A. Zalasiewicz, Siegfried Zielinski.

Rocco RONCHI, La Ligne mineure. Pour une philosophie de la nature (Editions Mimésis, 2020).

« Depuis trois siècles un modèle majeur propose une philosophie humaniste, moraliste et anthropocentrique. Au sein de ce modèle, l’auteur repère un modèle mineur, celui de William James aux États-Unis, Henri Bergson en France, Giovanni Gentile en Italie, Alfred North Whitehead en Grand Bretagne, le seul capable de répondre à la vocation la plus urgente de la philosophie contemporaine : celle de tourner notre attention vers la nature, vers la splendeur de son immanence absolue. Une lecture originale des courants dominants de la philosophie occidentale, un traité qui relève les défis essentiels de la pensée contemporaine : renoncer à l’idée d’une supériorité de l’homme sur le vivant et découvrir la nature comme horizon d’enquête » (Les Livres de Philosophie, 20/10/2020).

Fabian SCHEIDLER, La Fin de la mégamachine. Sur les traces d’une civilisation en voie d’effondrement (Seuil, 2020). Traduction par Aurélien Berlan.

« Énorme succès à l’étranger, ce livre haletant nous offre enfin la clé de compréhension des désastres climatiques, écologiques, pandémiques et économiques contemporains. Accuser Sapiens, un humain indifférencié et fautif depuis toujours, est une imposture. Notre histoire est sociale : c’est celle des structures de domination nées il y a cinq mille ans, et renforcées depuis cinq siècles de capitalisme, qui ont constitué un engrenage destructeur de la Terre et de l’avenir de l’humanité, une mégamachine ».

PLANETE TERRE

Paysageur, numéro 4, « Paysages parallèles » (novembre 2020).

« Comme il existe un marché parallèle, peut-on parler de paysage parallèle? Un paysage officieux, pirate ou halluciné ». La revue « propose des expériences d’immersion dans des territoires, entre arts et investigation, en mobilisant les savoirs des jardiniers autant que des humanités écologiques ». Dans ce numéro, elle invite à une traversée dans les mondes parallèles, « souterrains, sous-marins, alpins ou numériques, fantasmés, éloignés des centres urbains, défendus par une clôture barbelée ».

Stéphane CORDOBES, Si le temps le permet. Enquête sur les territoires du monde anthropocène (Berger-Levrault, 2020). Postface de Michel LUSSAULT.

Une enquête prospective et photographique menée à Saint-Pierre-et-Miquelon qui évoque autant la situation singulière de l’archipel français subarctique qu’elle dresse un portrait archétypal des territoires confrontés à l’entrée dans l’anthropocène. Elle défend l’hypothèse que le réagencement nécessaire à réaliser est non seulement politique, scientifique, technique, socio-économique, mais aussi culturel et anthropologique et que l’expérience esthétique, constitutive de notre rapport au monde et de la manière de l’habiter, a un rôle important à jouer.

Tim INGOLD, Correspondences (Wiley, 2020).

Avec affection et avec soin, l’anthropologue se livre à une correspondance avec des paysages et des forêts, des océans et des cieux, des monuments et des œuvres d’art. « C’est ce que signifie correspondre, joindre notre vie à celle des êtres, des matières et des éléments avec lesquels nous habitons sur la terre ». Il en résulte une enquête sur les façons de rétablir notre parenté avec une terre abîmée.

Harold LEVREL, Les compensations écologiques (La Découverte, 2020).

Un diagnostic critique complet sur la portée et les limites de la compensation comme outil devant équilibrer les préjudices subis par les espèces et les habitats naturels et permettre d’atteindre une « neutralité écologique ». L’ouvrage décrit « les contextes institutionnels dans lesquels les compensations écologiques sont mobilisées et les ruptures historiques qu’elles induisent ; les principes éthiques et les logiques économiques sur lesquels elles reposent ; les acteurs et les formes organisationnelles permettant d’en définir les modalités de mise en œuvre ; la faisabilité des actions de restauration écologique et les critères d’équivalence qui s’y rapportent ; enfin, les outils juridiques et d’évaluation qui en facilitent la réalisation ».

Pablo SERVIGNE, Raphaël STEVENS (dir.), Aux origines de la catastrophe. Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? (Les Liens qui Libèrent, 2020).

Un ouvrage collectif qui rassemble 25 auteurs et autrices (anthropologue, biologiste, économiste, sociologue, philosophe, historien·ne…) dans une approche pluridisciplinaire, chacun·e posant un regard sur une cause des catastrophes : du capitalisme à l’invention de l’agriculture en passant par le patriarcat, la technophilie et le colonialisme. Contributions notamment de Paul Jorion, Alain Damasio, François Jarrige, Malcom Ferdinand, Charlotte Luyckx, Geneviève Azam, Sophie Swaton, Dominique Bourg, Jean-Paul Demoule, Nancy Huston, Abdennour Bidar, Thierry Paquot…

Philippe VION-DURY, Rémi NOYON, Face aux chocs écologiques. 12 entretiens pour comprendre l’Anthropocène (Marabout, 2020).

Entretiens avec avec des philosophes, économistes, sociologues ou militant·es pour explorer les grandes questions soulevées par la catastrophe écologique et les bouleversements à venir : Glenn Albrecht — Bertrand Guillaume — Catherine Larrère — Corinne Morel Darleux — Baptiste Morizot — Agnès Sinaï — Virginie Maris — François Gemenne — Philippe Bihouix — Serge Morand — Gaël Giraud — Malcom Ferdinand.

“Les Bacchanales - La farandole”, huile sur toile (2019) © Johann Rivat

POLITIQUE - GEOPOLITIQUE

Benjamin CORIAT, La pandémie, l’Anthropocène et le bien commun (Les Liens qui Libèrent, 2020).

Un appel à recomposer l’économie et la société au service du bien commun, une invitation à renouveler la gouvernance du monde naturel, à repenser l’action publique et instituer de véritables biens communs : se nourrir, se loger, se soigner, se déplacer, s’éduquer.

Cyrille CORMIER, Climat : la démission permanente (Les éditions Utopia, 2020). Préface de François Gemenne.

Une lecture critique des 20 dernières années de politiques climatiques françaises qui pointe le décalage entre les discours et la réalité. L’ingénieur et militant écologiste appelle à une rupture avec « une vision économique fondée sur l’extraction des ressources naturelles et la consommation de produits neufs ».

Juan FRANCISCO SALAZAR, Céline GRANJOU, Matthew KEARNES, Anna KRZYWOSZYNSKA, Manuel TIRONI (dir.), Thinking with Soils. Material Politics and Social Theory (Bloomsbury, 2020).

Une nouvelle théorie sociale du sol, révélateur de l’intérêt croissant de la recherche en sciences sociales pour la matérialité. Une enquête et une exploration des transformations des socioécologies mais aussi des pratiques politiques et artistiques face au changement global.

François GEMENNE, On a tous un ami noir (Fayard, 2020).

Un ouvrage pour penser politiquement la question des migrations et « les accepter comme une transformation structurelle de nos sociétés devant être pensée et organisée ». « Les questions d’identité collective doivent être des enjeux qui nous rassemblent, plutôt que des clivages qui nous opposent. À condition de reconnaître et d’affronter les problèmes structurels de racisme dans nos sociétés ». Entretien avec l’auteur (Usbek & Rica, 01/10/2020).

Yifei LI, Judith SHAPIRO, China Goes Green. Coercive Environmentalism for a Troubled Planet (polity, 2020).

Une analyse des promesses et des risques de l’environnementalisme autoritaire de l’Etat chinois, qui s’accompagne de programmes politiques tels que la surveillance généralisée et l’influence géopolitique.

Marie-Cécile NAVES, La démocratie féministe. Réinventer le pouvoir (Calmann-Levy, 2020).

Le féminisme, un renouveau démocratique face au pouvoir prédateur incarné par les populismes néofascistes et le néolibéralisme ? « Fort d’une histoire plurielle, sur tous les continents » il renouvelle « les cadres de pensée pour construire un nouvel universel » et « promeut un nouveau leadership, fondé sur la coopération et la responsabilité collective ».

ZETKIN COLLECTIVE, Andreas MALM (coord.), Fascisme fossile. L’extrême droite, l’énergie, le climat (la fabrique éditions, 2020). Traduction par Lise Benoist.

Une tentative de penser ensemble la montée des températures et celle de l’extrême-droite en analysant les positions de l’extrême-droite vis-à-vis de l’écologie au fil de l’histoire et en montrant comment les énergies fossiles « ont été une pierre angulaire de la domination blanche du monde moderne ».

SCIENCE

Julia ADENEY THOMAS, Mark WILLIAMS, Jan ZALASIEWICZ, The Anthropocene. A Multidisciplinary Approach (Polity, 2020).

Une approche pluridisciplinaire par des chercheurs et chercheuses en paléobiologie, paléoenvironnement et histoire pour appréhender l’Anthropocène dans toutes ses dimensions : après une exploration fine du concept géologique (changements physiques du paysage, réchauffement rapide du climat, transformation de la biosphère), l’ouvrage examine les questions politiques et éthiques de justice, d’économie et de culture. Il analyse également l’histoire et les possibilités d’atténuer les effets dévastateurs de l’Anthropocène.

Cécile RENOUARD, Rémi BEAU, Christophe GOUPIL, Christian KOENIG (dir.), Manuel de la grande transition. Former pour transformer (Les Liens qui Libèrent, 2020).

Cet ouvrage répond à la demande du Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation d’un livre blanc sur la formation à la transition écologique et sociale dans l’enseignement supérieur. Il appelle à une refondation des programmes du supérieur pour intégrer les enjeux de la transition écologique et sociale. Son interdisciplinarité et sa transdisciplinarité apportent des connaissances fondamentales, des critiques, des modes d’actions concrets et une réflexion sur une éthique environnementale, philosophique et pédagogique.

SOCIETE

Isabelle FERRERAS, Julie BATTILANA, Dominique MEDA (dir.), Le Manifeste Travail. Démocratiser, démarchandiser, dépolluer (Seuil, 2020).

Manifeste d’un collectif de femmes, chercheuses en sciences sociales, pour « un nouveau partage du pouvoir au sein des entreprises, condition d’une véritable transition écologique ».

Nathalie GONTARD, Hélène SEINGIER, Plastique, le grand emballement (Stock, 2020).

Une enquête implacable sur le plastique par la chercheuse à l’INRAE pionnière des emballages biodégradables innovants : après 30 ans de recherche sur ce matériau, son recyclage et ses alternatives, elle appelle à un ralentissement de la consommation de plastique pour la réduire au strict nécessaire.

“Les Géants - CARE”, huile sur toile (2019) © Johann Rivat

URBAIN

Le Sentier du Grand Paris. Un guide de randonnée à travers la plus grande métropole d’Europe (éditions Wildproject, 2020).

« Le sentier métropolitain du Grand Paris est un itinéraire de randonnée pédestre de 615 km qui articule la petite couronne des faubourgs historiques à la grande couronne des villes nouvelles. Bassins versants et histoires d’eaux, ports et industrie, rail et route, urbanisme et agriculture, hip hop et chasses royales, cinéma et histoire populaire… Issu de 3 ans de repérages publics, ce guide se propose de raconter le Grand Paris en 153 histoires localisées » pour « prendre la mesure du Grand Paris à l’échelle de nos corps ».

Matthieu ADAM, Emeline COMBY (dir.), Le Capital dans la cité. Une encyclopédie critique de la ville (Éditions Amsterdam, 2020).

Une encyclopédie qui propose des outils pour comprendre, penser et agir sur les transformations urbaines en cours : le capitalisme a transformé les politiques urbaines en « véhicule de logiques managériales et financières qui ont conduit à l’explosion des inégalités sociales et spatiales. Reconfigurées selon des critères d’attractivité, les villes sont transformées en objets marketing à valoriser, tandis que leurs populations précarisées semblent vouées à évoluer dans un espace public toujours plus restreint et aseptisé, au fil de ses privatisations successives ».

Nadia ARAB, Yoan MIOT (dir.), La ville inoccupée. Enjeux et défis des espaces urbains vacants (Presses de l’Ecole Nationale Des Ponts et Chaussées, 2020).

Les sociologues et urbanistes proposent une étude transversale des espaces urbains vacants qui apparaissent comme un problème croissant dans un contexte de transition écologique imposant de plus en plus fortement une limitation de la consommation de ressources foncières. L’ouvrage analyse également les modalités de réactivation et de revalorisation de ces espaces sans usages, au-delà de l’urbanisme transitoire.

Armelle CHOPLIN, Matière grise de l’urbain: la vie du ciment en Afrique (Métis Presses, 2020).

La géographe nous emmène dans une exploration de la filière ciment en Afrique de l’Ouest, au cœur de multiples enjeux politiques, sociaux et économiques. L’urbanisation très rapide du continent africain se traduit par une vogue des constructions en béton alors même que « des voix s’élèvent pour dénoncer une industrie cimentière aux effets destructeurs sur l’environnement ». L’autrice mène une enquête au plus près de son sujet, de la carrière de calcaire jusqu’au chantier, le long du corridor urbain de 500 km qui relie Accra, Lomé, Cotonou et Lagos, mais aussi au plus près des humains liés à cet « or gris » : « des géants du secteur, des investisseurs, des acteurs politiques mais aussi des maçons et des habitants qui construisent leur propre maison ».

COLLECTIF ROSA BONHEUR, La ville vue d’en bas. Travail et production de l’espace populaire (Editions Amsterdam, 2019).

« Un collectif de sociologues propose une ethnographie des quartiers populaires de Roubaix. Cette enquête minutieuse restitue la force des solidarités pratiques qui se nouent dans ces zones où le salariat ne procure plus ni revenus ni intégration sociale » (la vie des idées, 16/10/2020).

Chantal DECKMYN, Lire la ville. Manuel pour une hospitalité de l’espace public (éditions Dominique Carré/La Découverte, 2020).

Un manifeste pour la ville. Un manuel pratique exposant « le bénéfice que représenterait pour tous, individuellement et collectivement, un espace public civil, favorisant la citoyenneté, l’égalité et la solidarité » (Le Monde, 20/11/2020).

Andrew DEENER, The Problem with Feeding Cities. The Social Transformation of Infrastructure, Abundance, and Inequality in America (The University of Chicago Press, 2020).

Une étude historique et sociologique du système alimentaire états-unien. Le sociologue met en lumière le système imbriqué d’agriculture, de fabrication, d’expédition, de logistique et de vente que représente chaque aliment. Il analyse la transformation du système alimentaire états-unien, passant en un siècle de l’approvisionnement de communautés locales à la nation tout entière, mais passant également de la satisfaction des besoins vitaux au dégagement de bénéfices. Il montre enfin que le développement du marché et des villes, et la construction des systèmes de distribution ont conduit à des infrastructures défaillantes et à l’émergence de « déserts alimentaires ».

Yvan DETRAZ, Zone Sweet Zone. La marche comme projet urbain (éditions Wildproject, 2020).

Publication du mémoire de fin d’études d’un jeune architecte qui, il y a 20 ans, défendait la création de sentiers de randonnée dans les métropoles en entamant des marches de repérage dans les franges de l’agglomération bordelaise muni d’une carte IGN et d’un appareil photo reflex. « Il est aujourd’hui reconnu comme un texte fondateur par le réseau international Metropolitan Trails ». « Dans le contexte de la descente énergétique, qui nous oblige à relocaliser nos établissements urbains, Zone Sweet Zone explique pourquoi et comment reprendre pied dans la réalité de nos territoires ».

Bénédicte FLORIN, Anna MADOEUF, Olivier SANMARTIN, Roman STADNICKI, Florence TROIN (dir.), Abécédaire de la ville au Maghreb et au Moyen-Orient (Presses universitaires François Rabelais, 2020).

« Un panorama particulièrement stimulant de la vivacité de la recherche francophone sur le fait urbain dans l’espace bouleversé qui va de la Mauritanie à l’Iran » (Orient XXI, 07/10/2020).

Sylvain GRISOT, Manifeste pour un urbanisme circulaire. Pour des alternatives concrètes à l’étalement de la ville (Dixit, 2020).

Pour sortir de l’impasse actuelle de l’étalement urbain qui menace notamment la souveraineté alimentaire, l’urbaniste consultant propose un « urbanisme circulaire dont les trois grands principes sont : l’intensification des usages (usage des lieux vacants, optimisation fonctionnelle des lieux utilisés, mixité des programmes et des temps d’occupation, etc.), la transformation de l’existant (surélévation, extensions, densification pavillonnaire, serres urbaines, etc.) et le recyclage des espaces (réhabilitation de friches, végétalisation d’espaces urbanisés, etc.) (Cairn, 27/07/2020).

Anselm JAPPE, Béton. Arme de construction massive du capitalisme (L’échappée, 2020).

Un essai à charge contre le béton, et à travers lui contre l’architecture moderne et l’urbanisme contemporain qui auraient transformé le bâtiment en marchandise. L’enseignant de philosophie retrace l’histoire du béton et met en lumière l’impact néfaste que le matériau a eu sur les architectures et savoir-faire traditionnel·les, l’environnement et la santé.

Hannah KNOX, Thinking Like a Climate. Governing a City in Times of Environmental Change (Duke University Press, 2020).

Un enquête ethnographique menée en Angleterre, le berceau de la révolution industrielle, auprès de décideurs/euses, de politicien·nes, de militant·es, d’universitaires et de citoyen·nes pour comprendre les défis que le changement climatique pose à la production de connaissances et aux politiques publiques. Le changement climatique bouscule les limites administratives et bureaucratiques et invite à réinventer le social en termes climatiques.

Christian MOUGIN, Francis DOUAY, Marine CANAVESE, Thierry LEBEAU, Elisabeth REMY (coord.), Les sols urbains sont-ils cultivables ? (éditions Quae, 2020).

Un regard prudent sur la qualité des sols urbains et périurbains de plus en plus plébiscités pour du jardinage collectif, notamment à usage alimentaire : « la localisation des jardins suscite des interrogations en termes de risques sanitaires puisque nombre d’entre eux sont implantés sur des délaissés urbains, des friches industrielles ou le long d’infrastructures routières ou ferroviaires ». Une invitation à « débattre des connaissances, des enjeux et des orientations techniques relatifs aux sols (péri)urbains ».

Philippe RAHM, Histoire naturelle de l’architecture. Comment le climat, les épidémies et l’énergie ont façonné la ville (Pavillon de l’Arsenal, 2020).

L’ouvrage invite à reconnaître le rôle essentiel des causes naturelles, physiques, biologiques ou climatiques dans l’histoire architecturale de la préhistoire à nos jours. « Pourquoi notre nature homéotherme a donné naissance à l’architecture ? Comment le blé a engendré la ville ? Comment les petits pois ont fait s’élever les cathédrales gothiques ? Ce que les dômes doivent à la peur de l’air stagnant ? Comment un brin de menthe invente les parcs urbains ? Pourquoi l’éruption d’un volcan a-t-elle inventé la ville moderne ? Comment le pétrole a-t-il fait pousser des villes dans le désert ? … Comment le Co2 est-il en train de transformer les villes et les bâtiments ? ». Cette relecture de l’histoire de l’architecture à travers les faits physiques, géographiques, climatiques et bactériologiques nous équipe pour mieux comprendre et affronter les défis environnementaux du monde urbanisé (Libération, 24/10/2020).

Charlotte RUGGERI (dir.), Atlas des villes mondiales (autrement, 2020).

« Grâce à plus de 90 cartes et documents inédits et originaux, cet atlas interroge l’avenir des villes, mégalopoles ou villes plus petites, en posant la question du renouvellement des modèles urbains ».

Jeremie SOUTEYRAT, Benoit JACQUET, L’architecture du futur au japon : Utopie et Métabolisme (Le Lézard Noir, 2020).

Une présentation de projets architecturaux des années 1960 et 1970, emblématiques du mouvement métaboliste japonais.

Eric VERDEIL, Thomas ANSART, Benoît MARTIN, Patrice MITRANO, Antoine RIO, Atlas des mondes urbains (SciencesPo Les Presses, 2020).

Au-delà des discours sur les nombreux maux de la ville (inégalités, standardisation, disparition des mondes ruraux, artificialisation, îlots de chaleur, perte de la biodiversité, etc.), Eric Verdeil, chercheur en géographie urbaine, et son équipe rappellent que « les villes sont aussi notre bien commun, des lieux de production de richesses, d’innovation, de création culturelle, de solidarité et de résilience ». Les auteurs explorent les mondes urbains à travers de multiples champs hétéroclites : les mégalopoles (qui ne sont plus européennes) comme les petites villes, les sous-sols comme nouvelle frontière, la végétalisation, « le faible «ruissellement» de la prospérité économique des métropoles », l’accroissement des rythmes urbains dans les métropoles, smart cities et low tech cities, le multilinguisme à Toronto, l’insécurité perçue par les femmes» à Delhi etc. (Géographies en mouvement — Libération, 09/11/2020).

“Verrückte Tiere - Das Panda”, graphite et aquarelle sur papier (2017) © Johann Rivat

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berenice gagne
Anthropocene 2050

🔭Veille & valorisation scientifique - Changement global, habitabilité, Anthropocène, justice sociale et environnementale