Aux frontières de la médecine — 2è partie et conclusions

Ostéopathie et chiropractie

Hugo C.
Auto Thérapeute
7 min readMay 6, 2020

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Le caractère impersonnel de la médecine classique, dans son ensemble, a crée une grande désillusion chez la plupart des gens. On apprend aux étudiants en médecine la structure des os et les maladies qui les menacent, mais leur connaissance est limitée en ce qui concerne la manipulation des os pour rétablir leur fonctionnement harmonieux. Bien plus, les professeurs de l’école de médecine se sont longtemps opposés à l’exercice des hommes de l’art qui connaissaient la manipulation des os.

Les chiropracteurs et les ostéopathes ont dû endurer de longues années de mépris dans leur lutte pour s’établir comme d’honorables professionnels. Aux Etats-Unis, on emprisonnait les chiropracteurs pour exercice illégal de la médecine tandis qu’en Grande-Bretagne, tout médecin qui collaborait avec un ostéopathe courrait le risque d’être radié de l’Ordre des médecins. C’est ce qui arriva en 1911 au Dr Frederick Axham, qui avait servi d’anesthésiste à Herbert Barker, le plus éminent « chirurgien manipulateur de l’époque ». Barker fut plus tard anobli par le roi George V pour avoir bien soigné les soldats durant le Première Guerre mondiale, mais il ne fut jamais accepté par le corps médical. Axham non plus ne fut pas réintégré.

Il y a toujours eu des gens qui avaient un don pour remettre en place un os démis comme le font chiropracteurs et ostéopathes. Doués d’une sensibilité exceptionnelle du toucher, ils n’utilisèrent généralement leur habilté que dans certaines occasions, comme une sorte d’occupation à mi-temps distincte de leur travail quotidien.

Parmi les plus habiles, à Londres, au XVIIIe siècle, citons Mme Sarah Mapp, femme d’humeur peu facile, qui comptait la reine d’Angleterre parmi ses clients. Elle faisait preuve d’un sens de l’humour diabolique face aux critiques ou aux incrédules. On lui demande un jour de soigner quelqu’un qui se portait parfaitement bien mais à qui des médecins jaloux avaient recommandé de se plaindre d’une luxation. Leur plan consistait à la couvrir de ridicule lorsqu’elle prétendrait avoir remis le membre en place. Sarah Mapp fut suffisamement rusée pour éventer leur plan et elle retrourna la situation en luxant à dessein l’épaule du malheureux. Elle le renvoya aux médecins avec un mot disant que, s’ils ne pouvaient pas le soigner, elle le ferait volontiers.

Vers la fin du XIXe siècle, le travail du rebouteux avait donné naissance aux arts jumeaux de l’ostéopathie et de la chiropractie. Pour le profane, il n’y a apparemment guère de différence entre ces deux façons de soigner. Toutes deux professent que la maladie apparaît quand des défauts se manifestent dans la charpente du corps — les muscles et les os — et, que si l’on corrige ces défauts, le corps recouvrera une bonne santé. Il y eut cependant à une certaine époque une divergeance d’opinion quand à la façon dont ces défauts de structure affectaient le reste du corps. Les ostéopathes croyaient qu’un déplacement articulaire coinçait un capillaire, ce qui gênait la circulation du sang. Quant aux chiropracteurs, ils prétendaient qu’un déplacement articulaire affectait un nerf. Ils admettent aujourd’hui que les systèmes circulatoire et nerveux sont également affectés.

En pratique, la différence la plus marquée entre ces deux arts est la suivante : un chiropracteur remettra un os en place plutôt à l’aide d’une traction vigoureuse tandis qu’un ostéopathe utilisera de préférence le principe du levier.

L’ostéopathie a été fondée par Andrew Taylor Still, le fils d’un prédicateur méthodiste de Virigine. En 1864, trois des ses enfants contractèrent la méningo-myélite (inflammation de la moelle épinière et de ses membranes) ; les médicaments classiques n’eurent aucun effet et les enfants moururent. Se recueillant devant leur dépouille, Still décida de se consacrer à la guérison de son prochain.

Il ne coryait plus au pouvoir des médicaments et il se convainquit progressivement que le remède à la maladie résidait dans le corps lui-même. Dans son Autobiographie, il écrivait : « Un Dieu si sage a certainement placé le remède à l’intérieur de la chair où réside l’esprit de la vie. »

Still étudia l’anatomie pendant dix ans. Il déterra des cadavres pour les disséquer et il transportait des os dans ses poches pour mieux les palper et apprendre, à tout moment de la journée, comment ils fonctionnaient. Il parvint finalement à la conclusion que la maladie était due à des lésions de la moelle épinière — des blessures qui entravaient le libre déplacements des articulations mais qui étaient souvent si légères qu’elles passaient inaperçues du malade : « Je soutins l’opinion en 1874 que le sang était chargé de corpuscules de santé qui irriguaient toutes les parties du corps. Gênez ce flot de sang et vous descendez la rivière de la vie pour aboutir à l’océan de la mort. »

Still, comme les acupuncteurs, croyait à la force vitale. Il ne lui donna aucun nom particulier. Il croyait simplement qu’il fallait la laisser aller librement. Comme les acupuncteurs, il établissait son diagnostic après un examen minutieux du corps avec les mains.

Un acupunteur perçoit les variations des pouls. Still et les ostéopathes qui suivaient sont enseignement percevaient de minuscules déplacements de la colonne vertébrale. Ils pensaient que la manipulation de la coloone vertébrale permettrait au flux sanguin porteur de vie et à la force vitale de s’écouler de nouveau librement.

Les premiers ostéopathes ne prescrivaient pas de médicaments et, dans l’enthousiamse du début, ils se croyaient capables de guérir presque toutes les affections. Still avait pour devise : « Diagnostiquer, remettre en place et ne plus s’en occuper. »

Les ostéopathes modernes ne regardent plus leur système comme une panacée mais considèrent qu’il peut avoir un champ d’application très étendu. Dans des cas où la médecine officielle s’était déclarée incompétente, les ostéopathes ont souvent guéri des maladies des os telles que luxations, entorses, épanchements, courbatures et autres maux mystérieux difficiles à localiser.

La chiropractie commença par une guérison miraculeuse

L’homme qui l’accomplit était Daniel David Palmer. Assez âgé, il avait d’abord pratiqué le magnétisme. En 1895, il entendit par hasard le portier de son bureau expliquer comment il était devenu sourd. Cet homme disait que, dix-sept ans auparavant, il avait senti quelque chose « se déplacer » dans son dos alors qu’il se baissait. Palmer lui examina le dos et découvrit une bosse à hauteur du cou ; il s’agissait d’une vertèbre déplacée. Il plaqua le portier dans l’encadrement de la porte de façon que le montant consistuât un solide repose-tête et frappa la vertèbre avec le côté de la main. On entendit un bruit sec et la surdité du portier disparu immédiatement.

Les références de Palmer n’auraient guère impressionné les médecins contemporains. Il n’avait aucune qualification médicale et pratiquait une médecine de charlatan, mélange de chance, de science mal assimilée, de sorcellerie, et d’un quatrième élément que les médecins ignoraient — et continuent bien souvent d’ignorer de nos jours — , c’est-à-dire l’intuition. Les mains de Palmer pouvaient sentir ce qu’il convenait de faire au cou du portier.

Le système de traitement qu’il découvrit reçut le nom de chiropractie, du grec kheir, « main », et praktikos, « mis en action ». Il le traduisit librement par « manipulation ».

Palmer, comme Andrew Still l’avait fait avant lui — constata qu’il était impossible d’expliquer de façon scientifique comment il opérait car en fait, la science et les connaissances anatomiques se révèlent incapables de décrire avec précision comment agissent la manipulation et les diverses méthodes qui lui sont associées. Les méthodes de Still étaient plus intuitives qu’il ne pensait et son pouvoir de suggestion ainsi que son aptitude à inspirer confiance à ses malades étaient plus grands qu’il ne l’affirmait.

Sir Herbert Barker décrivit en ces termes ce qu’il ressentit quand il examina le coude disloqué de son premier malade : « Je frissonnais en prenant possession du membre blessé, tandis que quelqus chose semblait guider ma main et régler mes mouvements lorsque — presque avec tendresse — je passais mes doigts frémissants sur une protubérance qui, à mon avis, ne devait pas se trouver là. Puis, faisant confiance à une impulsion instinctive et utilisant mon bon sens, j’executai la prise et la pesée que je croyais nécessaires et, en un clin d’oeil, quelque chose “céda” et le bras reprit sa position normale. »

Ce sens inné est fondamentalement chez tout chiropracteur et ostéopathe et chez les autres guérisseurs de tout poil. Il faut de l’entraînement pour développer au mieux l’intuition, mais il reste que si cette intuition peut être constatée, elle n’est pas expliquée.

Conclusions

Si la majorité des médecins officiels avaient pu parvenir à leur fins, aujourd’hui comme hier, Still, Palmer et leurs successeurs auraient été considérés comme de dangereux charlatans. Les médecins manifestent souvent leur souci de protéger le public contre des guérisseurs cyniques ou illuminés qui, au mieux, ne peuvent rien faire pour un malade et au pis le rendent plus malade qu’auparavant. Mais ce souci cache mal parfois le désir de préserver une chasse gardée.

Les victoires de la médecine non officielle sur la maladie ou la douleur ont acquis une valeur indiscutable. Au cours de son histoire cependant, la médecine a tour à tour progressé et reculé. Elle s’est enlisée puis a progressé de nouveau et puis a perdu à plusieurs reprises son chemin dans un dédale d’écoles rivales dont chacune proclamait qu’elle était seule à détenir la vérité.

Au cours de ces allées et venues, les médecins ont essayé beaucoup de remèdes, les uns proprement stupides, d’autres tout simplememnt dangereux comme cette pratique, si répandue au XVIIIe siècle, de saigner un malade quelle que fût sa maladie. Le corps médical a rejeté tout ce qui était inutile ou superflu et a par la même occasion écarté ou ignoré beaucoup de choses qui étaient bénéfiques.

De plus en plus de gens en viennent à croire qu’un médecin ne peut pas posséder toutes les connaissances et qu’on ne peut le considérer comme la seule personne capable de soigner un malade. Il existe d’autres méthodes — des arts — que la médecine pour soigner.

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Hugo C.
Auto Thérapeute

Quelle triste époque où il est plus facile de briser un atome qu’un préjugé ou une croyance. ― A. Einstein