2010s ou 2000s ?

Benoit Zante
TLDR by Benoit Zante
4 min readMay 13, 2022

Il y a quelques semaines, j’ai ressenti une impression mitigée, et je voulais vous la partager. C’était en parcourant les allées de la Bourse, où se tenait le salon NFT Day, puis, le lendemain le Paris Blockchain Week Summit… Au milieu d’une foule compacte, plutôt jeune, très anglophone, on ressentait en effet une certaine effervescence qu’on n’avait pas vue à Paris depuis l’époque de LeWeb, début des années 2010.

Flashback… Au début des années 2010, lors de ma première visite à LeWeb, je n’étais pas encore diplômé et je découvrais cet univers avec une extrême curiosité. Par chance pour moi, c’était une période faste, pendant laquelle blogs, réseaux sociaux, applications, jeux et sites e-commerce bourgeonnaient à travers le monde, à la faveur de la révolution du “mobile”. On ne parlait pas encore de French Tech, mais avec LeWeb, Paris donnait l’impression de compter sur la scène du web mondial.

Mais tout ça, c’était quelques années avant qu’on ne prenne conscience de tout ce que l’uberisation, la domination de Google, la collecte à outrance de données personnelles ou l’impact des réseaux sociaux portaient comme menaces sur nos modèles de société…

Mais revenons à 2022, dans les allées du palais Brongniart. On y trouvait donc plein de monde et beaucoup de stands de boîtes inconnues, avec tous les mots clés qui ont émergé depuis quelques mois… metaverse, NFTs, Web3 et bien sûr crypto, wallets, Ethereum et autres buzzwords de la DeFi (“Decentralized Finance”)… Ainsi que quelques bizarreries, comme ce vendeur d’armes (heureusement virtuelles) pour le metaverse ou ce salon de tatouages (bien réels) connectés via des NFTs…

Sur scène, on entendait parler de smart contracts, de protocoles, de digital assets, de collectible, de DAOs et bien sûr de NFTs… bref tout un vocabulaire nouveau, avec des acteurs déterminés à tout chambouler, pardon, disrupter, non, décentraliser… Et puis aussi quelques représentants de l’”ancien monde”, marques de luxes et de cosmétiques, groupes de grande distribution, chaînes de casinos ou sportifs en reconversion venus “surfer la vague” ou tâter le terrain.

Toute ressemblance avec les années 2010…

Enfin, à une nuance près : dans les années 2010, les sujets abordés à LeWeb étaient bien plus proches du “grand public”. De mémoire, ça parlait applications, APIs, mobile gaming, paiement, e-commerce… Surtout, à l’époque, prendre en main un smartphone et y installer une application était déjà à la portée du plus grand nombre. Rien à voir avec la difficulté que représente aujourd’hui le fait de devoir jongler avec différents wallets et comptes Discord pour espérer intégrer le monde du Web3.

D’ailleurs, d’autres observateurs avisés qui ont connu “la bulle” comparent plutôt l’événement du palais Brongniart* aux années 2000… Une autre période pendant laquelle beaucoup de monde s’est enthousiasmé devant les perspectives ouvertes par internet, mais beaucoup trop en avance de phase par rapport au grand public ! Pour devenir “mainstream”, le Web3 va devoir résoudre son problème d’UX, au risque de décevoir très rapidement.

Pour appuyer la comparaison, certaines soirées de la Paris Blockchain Week avaient apparemment des allures des soirées pré-bulle, lorsque l’argent des investisseurs partait en champagne, petits fours et extravagances diverses. N’ayant pas connu les soirées des années 2000 et passé mon tour pour celles de 2022, je ne me prononcerai pas sur ce point.

Benoit Zante

*Le palais de la Bourse, bien qu’il rende l’organisation d’événements assez complexes par sa disposition, est un choix emblématique à plusieurs titres. D’abord symbole de la libéralisation des marchés et de la dérégulation des années 80, il a été dans les années 2000 un centre d’attraction pour les startups de la bulle internet qui se sont massées autour, car les connexions y étaient les plus rapides. Et aujourd’hui, c’est une coquille presque vide, mais il est peut-être un peu tôt pour considérer que la finance dite décentralisée ou alternative est en train de supplanter définitivement la finance traditionnelle.

PS. Cette newsletter a été rédigée il y a déjà quelques semaines… donc avant le crash du Bitcoin et des cryptos en général de ces derniers jours. Est-ce l’éclatement d’une bulle comme en 2000, ou juste un “dip” passager ? L’avenir nous le dira !

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