Les champignons sauveront le monde…

Benoit Zante
TLDR by Benoit Zante
5 min readOct 31, 2018

… devinez qui était la star improbable de la Dutch Design Week ?

La Dutch Design Week est le plus grand événement d’Europe consacré au design, avec 2 600 designers, plus d’une centaine de lieux d’exposition et 355 000 visiteurs.

Pour susciter un tel engouement, qui dépasse le cercle des professionnels, il fallait adopter une vision du design très large, bien au-delà de la conception d‘objets à laquelle on pense naturellement : des matériaux de demain au “design” de solutions en passant par le futur de l’alimentation ou du transport, la palette des thèmes abordés à la DDW est bien vaste !

Le tout dure plus d’une semaine, à travers toute la ville d’Eindhoven — une ancienne cité industrielle, bastion de Philips, qui a su rebondir pour devenir un pôle important dans la R&D et donc, le design.

Le cadre est idéal pour un tel événement : ateliers industriels, anciennes usines ou hangars et parkings en voie de reconversion fournissent une multitude de lieux d’exposition ou de conférence.

Impossible de résumer tout cela — surtout qu’en deux journées sur place, je ne prétends pas avoir tout vu, loin de là ! Mais le champignon, star improbable de cet événement, peut jouer le rôle de fil rouge et aider à résumer les préoccupations du moment…

Vers une économie de la circularité ?

Plusieurs “Embassies” étaient disséminées à travers la ville : “Embassy of Urban Transformation”, “Embassy of Health”, “Embassy of Food”,…

L’ambassade de la circularité posait par exemple la question de l’habitat de demain, autour d’un enjeu principal : utiliser moins de matériaux, ou, a minima, employer des matériaux plus durables, recyclés ou recyclables. Le digital et la data devraient permettre d’accélérer le mouvement, en créant des maisons plus intelligentes et “efficaces”.

L’apport des designers sur ce sujet ? Nous amener à nous poser des questions pas si bêtes, comme “A quoi sert une porte ?” 90% du temps les portes à l’intérieur de la maison sont ouvertes et ne servent à rien : n’y-a-t-il pas de meilleurs moyens de fermer une pièce ?

De nombreuses expositions posaient aussi la question des matériaux de demain, notamment en remplacement du plastique. Aux “New Material Awards”, on pouvait ainsi voir des expérimentations avec des bambous ou du verre, mais aussi des cheveux ou du sang.

Et les champignons dans tout ça ? Ils peuvent servir de base à des panneaux isolants

Une mode plus responsable ?

La notion de “circularité” était aussi centrale dans toutes les expositions liées à la mode (un thème important cette année) : en tant qu’industrie parmi les plus polluantes du monde, comment repenser le secteur dans son ensemble pour le rendre plus durable ?

Tout commence par les matières, avec des alternatives au coton (c’est là que l’on retrouve des champignons, avec le MycoTex ou le projet de Tim Dekkers, “The Parasitic Humanity”), puis les usines, la distribution et les modèles économiques.

Présent dans l’exposition “Clean Revolution”, Mud Jeans propose ainsi de louer des jeans plutôt que de les acheter. Chaque année, le client peut renvoyer son jeans pour le faire recycler, en échange d’un neuf. Quant à “The Girl And the Machine”, un projet actuellement sur Kickstarter, il s’agit d’imprimer en 3D, à la demande donc, des vêtements, pour relocaliser la production et limiter la surproduction.

Une alimentation et une agriculture plus durables ?

Les designers de la Dutch Design Week s’intéressent aussi à nos assiettes : leur forme (comme Teresa Berger, cette étudiante qui a conçu 8 assiettes correspondant aux 8 plats d’un grand chef, pour son projet “Beyond Taste”), leur contenu, ou le cérémonial qui entoure le repas.

Agri Meets Design” proposait différentes expériences, dont une mêlant dégustation et podcasts : pendant le repas, il était possible d’écouter un échange entre l’agriculteur à l’origine des aliments dans l’assiette et un designer.

Les champignons sont ici naturellement en bonne place. Ils sont parés de beaucoup d’atouts : peu consommateurs d’eau et d’espace, faciles à produire, faiblement caloriques… en prime, on peut même les faire pousser sur du marc de café recyclé (hastag #circularité).

L’an dernier, pour marquer les esprits, Botanic Bites avait conçu une saucisse aux champignons d’1,5 mètres puisqu’elle avait nécessité 15 fois moins de ressources qu’une version classique… Cette année, ces “food designers” étaient à nouveaux présents, notamment avec leurs “Shroombites“, qui peuvent remplacer le poulet sur des brochettes.

Et je ne vous parle même pas d’une autre forme de champignon, le lichen, qui pourrait se retrouver dans des corn-flakes, du beurre ou de la moutarde…

Ce n’est là qu’un rapide aperçu de cette folle semaine (j’ai 600 photos à trier maintenant…). Je continuerai à vous parler de la DDW la semaine prochaine, avant de m’envoler pour Lisbonne et le Web Summit (le rendez-vous incontournable des startups européennes) : je vous parlerai probablement d’une autre tendance de l’événement, “visualiser l’invisible”, c’est à dire les données et le digital…

// Avant de nous séparer //

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Benoit Zante

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